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21/02/2014

(UK) Inside No. 9 : rebondissements et humour noir pour une anthologie enthousiasmante

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Depuis le 5 février 2014, BBC2 diffuse une nouvelle comédie, Inside No. 9, signée Reece Shearsmith et Steve Pemberton (deux des co-créateurs de The League of Gentlemen). Avec cette fiction, ces derniers poursuivent une expérience qu'ils avaient initiée dans leur précédente série, Psychoville : il s'agit en fait ici d'explorer plus avant le concept qui avait sous-tendu l'épisode 4 de cette dernière, à l'inspiration Hitchcock-ienne revendiquée (en référence au film La Corde, de 1948). La saison 1 de Inside No. 9 comptera six épisodes, d'une demi-heure chacun ; une saison 2 a d'ores et déjà été annoncée -avant même le début de la diffusion.

Inside No. 9 étant une anthologie, cela rend l'exercice du critique plus difficile : les épisodes sont en effet extrêmement différents les uns des autres, et mériteraient presque de se voir consacrer une suite de critiques indépendantes, tant le concept de départ y est décliné sous des facettes diverses. Écrire un billet sur le "pilote"/premier épisode aurait donc été trop limité. J'ai patienté. Après trois épisodes, nous voilà déjà à mi-chemin de la première saison. Et Inside No. 9 confirme, semaine après semaine, qu'elle sait entraîner le téléspectateur vers des chemins aussi déroutants que savoureux.

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Le point commun de tous les épisodes de Inside No. 9 est qu'ils se déroulent à huis clos dans un lieu situé au numéro 9 : il peut s'agir d'un appartement, d'une maison ou d'une villa, le cadre pouvant ainsi considérablement changer. Chaque histoire est indépendante, dotée d'une construction également très variable : certaines se déroulent sur une très courte période, presque en temps réel -une soirée par exemple-, d'autres couvrent au contraire une durée beaucoup plus longue, permettant de suivre l'évolution de personnages. Partant d'un tel cadre quasi théâtral, Inside No. 9 offre un véritable condensé de twists et de rebondissements, servis par une écriture noire, humoristique à l'occasion, régulièrement déroutante, qui nous conduit invariablement jusqu'à une chute finale, toujours sombre, parfois proprement jubilatoire.

Parmi les trois premiers épisodes, le plus marquant est incontestablement le deuxième (A Quiet Night In). Il relate une soirée animée dans une riche villa, au sein de laquelle tentent de s'introduire deux cambrioleurs guère doués convoitant un précieux tableau. Cet épisode est un véritable exercice de style comique, maîtrisé de bout en bout. En dehors de la dernière scène, il s'agit d'une demi-heure entièrement muette (une forme d'hommage au cinéma muet), parfaitement cadencée par une bande-son qui exploite les divers bruits de la maisonnée (musique, télévision, outils de cuisine...). L'humour y est résolument burlesque, rythmé par de multiples rebondissements, où l'inattendu surgit fréquemment comme un ressort comique efficace. A Quiet Night In est en résumé une expérience télévisuelle, assez fascinante, qui se vit devant son petit écran. C'est l'épisode incontournable de cette première moitié de saison : celui qui mérite à lui-seul le détour.

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Les deux autres épisodes de Inside No. 9 ont cependant aussi leurs atouts. Ce sont des essais dans des registres très différents, qui partagent tous une même maîtrise d'écriture et un sens du twist qui savent provoquer plus d'un moment jubilatoire. Le premier épisode est clairement le plus déroutant et surprenant : toute son histoire tourne autour d'un étrange jeu de cache-cache dans une maison familiale, aboutissant à faire s'entasser dans une grande armoire tous les protagonistes. A l'opposé complète du deuxième, c'est entièrement sur les dialogues que la demi-heure repose. Ces derniers sont joyeusement ciselés, oscillant entre piques et flottements, entre malaises et silences, le tout avec cette gêne inhérente à des retrouvailles quelque peu forcées. La chute, très noire, offre une conclusion pesante à ce qui a longtemps semblé la déclinaison d'une idée volontairement loufoque, voire absurde.

Quant au troisième épisode, diffusé ce mercredi soir en Angleterre, il s'échappe presque du genre comique pour offrir un récit pourtant fidèle, dans l'esprit, aux précédents. En une demi-heure, le téléspectateur assiste à la descente aux enfers d'un enseignant qui se coupe peu à peu de la société, sous l'influence d'un individu qui s'est invité chez lui. C'est la construction narrative qui est ici déterminante, l'histoire prenant cette fois le temps de s'étaler sur plusieurs semaines. Celle-ci paraît, par rapport aux deux premières, presque prévisible. Mais le scénario nous conduit admirablement à une suite de twists dans le dernier tiers de l'épisode, durant lequel s'enchaînent des rebondissements surprenants, pour aboutir à une chute, toujours sombre, qui, sorte d'ultime pied de nez, correspond parfaitement à la tonalité de l'ensemble.

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Enfin, s'il vous faut une dernière raison pour vous convaincre de vous installer devant l'intrigante Inside No. 9, ce sera son casting. Reece Shearsmith et Steve Pemberton (The League of Gentlemen, Psychoville) apparaissent dans beaucoup d'épisodes, mais les deux ne sont pas présents dans tous. A leurs côtés, l'épisode 1 est celui qui rassemble le plus de protagonistes : c'est ainsi l'occasion de croiser Anne Reid (Five Days, Last Tango in Halifax), Katherine Parkinson (The IT Crowd, Whites), Anna Chancellor (Spooks, The Hour), Julian Rhind-Tutt (Green Wing, The Hour), Timothy West (Bleak House), Ophelia Lovibond (Titanic : Blood and Steel), Ben Willbond (Rev, The Thick of It), Tim Key ou encore Mark Wootton (La La Land, Delocated). Dans le deuxième épisode, on retrouve Oona Chaplin (The Hour, Game of Thrones, Dates) -un casting doublement parfait pour cet essai d'épisode muet- et Denis Lawson (Jekyll, Marchlands). Quant au troisième, c'est Gemma Arterton (Tess of the D'Urbervilles) qui intervient aux côtés du duo principal. 

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Bilan : Avec son concept de huis clos qui lui confère une dimension presque théâtrale, Inside No. 9 fait preuve d'une solide maîtrise de sa narration pour manier des rebondissements multiples et une bonne dose d'humour noir, tout en cultivant un sens aiguisé de la chute finale. Comme toute anthologie, la diversité des épisodes proposée fait que tous ne marquent pas pareillement, mais ce format permet à la série de constamment se renouveler. Ces trois premiers épisodes peuvent dérouter, mais ils ne déçoivent pas. En particulier le deuxième, qui offre un sacré moment de télévision comique (il mérite au moins de prendre une demi-heure pour le regarder comme un unitaire).

Quant au public visé, ceux qui apprécient les œuvres de Reece Shearsmith et Steve Pemberton devraient se laisser embarquer facilement. Plus généralement, Inside No. 9 ne devrait pas laisser indifférent les téléspectateurs curieux qui souhaiteraient glisser dans leurs programmes une dose de comédie britannique inventive. 


NOTE : 7,75/10


Un extrait de l'épisode 1 :

Un extrait de l'épisode 2 :

16/06/2013

(Pilote UK) Dates : les incertitudes d'un premier rendez-vous

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Cette semaine a débuté en Angleterre, sur Channel 4, une intéressante série relationnelle : Dates. Certains parmi vous se souviennent peut-être que l'année dernière à la même époque, BBC1 s'était aussi essayée - avec moins de succès - aux instantanés amoureux dans la série True Love. Dates emprunte un format quasi-anthologique assez proche. Il s'agit d'une création de Bryan Elsley, co-créateur de Skins. Seulement, cette fois-ci, ce ne sont plus des instantanés d'adolescence, mais les méandres amoureux de vies d'adultes qui ont retenu son attention.

La série comptera un total de 9 épisodes, d'une durée de 25 minutes chacun environ. La programmation suit un rythme particulier : après avoir diffusé trois épisodes en première semaine, du lundi au mercredi (à partir du 10 juin), elle se fixera sur deux épisodes les mardi et mercredi. C'est donc au terme de la première fournée (les trois premiers épisodes) que j'écris cette review. Car Dates s'est révélée être une jolie surprise, fraîche et humaine juste comme il faut pour traiter d'un tel sujet.

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Dates repose sur un concept simple : il s'agit de raconter le premier rendez-vous, à l'aveugle, organisé entre deux utilisateurs d'un réseau en ligne de rencontres. L'épisode couvre donc une seule soirée, la plupart du temps débutée dans un bar ou un restaurant, et dont les suites varieront en fonction du déroulement du rendez-vous. Dans cette quête du grand amour, il faut bien reconnaître qu'il y a plus de désillusions ou de nuits sans lendemain que de relations au long court qui naissent dans ces circonstances. L'excitation initiale du premier contact fait souvent place à la déception. Mais qu'importe. Dates nous raconte une prise de risque, une tentative... en s'intéressant à la manière dont ce premier échange a lieu, révélateur de bien des hésitations et des maladresses, et oscillant entre séduction et tergiversation.

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Le charme de Dates tient à la simplicité et à la fraîcheur qui émane de la série. L'écriture privilégie une spontanéité pleine de naturel pour relater le déroulement d'une soirée et tous les aléas qui accompagnent invariablement le premier rendez-vous. La brièveté des épisodes conforte le dynamisme d'ensemble. Chacun commence par s'évaluer, ne sachant trop sur quel pied danser. Une fois dépassées les hésitations initiales, les échanges se font de plus en plus vifs. Après une mise en confiance, les réparties fusent, parfois trop vite, suivies ensuite de longs silences gênés. La série capture à merveille toute l'incertitude que représente ce moment où chacun se jette à l'eau sans savoir quelles sont les attentes réelles de leur vis-à-vis : le nom sous lequel il est inscrit sur le site est-il seulement le sien ? S'agit-il de charmer cette personne, de poser des fondations pour apprendre à la connaître et envisager un futur ensemble ? Un seul premier coup d'oeil doit-il suffire pour couper toute envie de poursuivre la rencontre ? Autant de questions qui peuvent se reproduire selon des déclinaisons extrêmement diverses en fonction du duo mis en scène.

L'autre atout de Dates tient justement à la diversité inhérente à son concept. Les associations, auxquelles conduit le hasard d'une rencontre virtuelle par profils interposés, sont parfois surprenantes... Chaque épisode joue sur les contrastes entre les deux protagonistes, le téléspectateur s'invitant à leur table sans avoir non plus de connaissance préalable sur les motivations de chacun. Il y en a souvent un dont on se sent plus proche, parce que la caméra a plus insisté sur lui. Mais c'est seulement par leurs confidences volontaires que l'on cerne peu à peu chaque personnage. La diversité se retrouve aussi dans la tonalité ambiante de la série, oscillant entre espoir, rire et désillusion. La soirée passe souvent par plusieurs stades, frôlant la catastrophe par moment, pour finalement, à l'occasion, partir sur une dynamique inattendue avec quelqu'un qui ne semblait a priori pas fait pour soi. Le premier épisode offre d'ailleurs un condensé de toute la richesse et de la versatilité de ce drama relationnel, évoluant de la confrontation aux confidences avec un naturel déconcertant. Le rire se fait même communicatif lorsque Mia reste sans voix suite à la révélation du nombre d'enfants de son rendez-vous. Le portrait de chacun est ainsi dressé par petites touches, révélant le meilleur... ou le pire, pour offrir une série qui marque précisément par son humanité.

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Tournée à Londres en début d'année, Dates a pour cadre la capitale anglaise. Si tout semble devoir invariablement commencer dans le huis clos d'un restaurant, la série s'évade aussi en extérieur en fonction des épisodes. La réalisation est soignée, privilégiant ce même naturel qui se retrouve dans les dialogues. Bonus non négligeable, la série débute par un bref générique d'une vingtaine de secondes, coloré et londonien, qui met le téléspectateur dans l'ambiance et donne parfaitement le ton, pétillant juste comme il faut (pour un aperçu, cf. la première vidéo ci-dessous).

Dates peut également se reposer sur les prestations d'une galerie d'acteurs très solides. Chaque épisode se concentre sur deux personnages, le format quasi-anthologique explique donc le turn-over. Cependant, certains protagonistes seront croisés à plusieurs reprises dans la série, les découvrant dans des configurations de premier rendez-vous différentes. C'est le cas, dans deux des trois premiers épisodes, d'Oona Chaplin (The Hour, Game of Thrones), qui délivre une superbe performance, pleine d'aplomb. Parmi les nombreuses têtes familières, la série sera l'occasion de retrouver également Andrew Scott (Sherlock, The Town), Will Mellor (White Van Man, In with the Flynns, Broadchurch), Neil Maskell (Utopia), Sheridan Smith (Mrs Biggs), Katie McGrath (Merlin), Ben Chaplin (Mad Dogs), Greg McHugh (Fresh Meat), Gemma Chan (Bedlam), Montanna Thompson (The Story of Tracy Beaker) et Sian Breckin.

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Bilan : Humaine et attachante, Dates plonge le téléspectateur dans une suite d'instantanés relationnels dépeints avec une fraîcheur et un naturel aux accents très authentiques. L'idée de centrer la série sur le premier rendez-vous est un concept qui a le mérite de pouvoir se décliner à l'infini, mettant en scène bien des associations inattendues. Capturant les spécificités et les aléas de chaque rencontre, les épisodes, courts, sont très plaisants à suivre, bénéficiant d'un dynamisme et d'une justesse de ton très appréciables. Dates apparaît donc comme un drama relationnel, à la tonalité aussi versatile que la vie, qui répond parfaitement aux attentes que le projet avait pu susciter. Avis aux amateurs !


NOTE : 7,5/10


Le générique (pétillant) de la série :


Une bande-annonce de la série :

23/12/2012

(UK) The Hour, saison 2 : le temps d'une superbe maturation

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The Hour était de retour cet automne sur BBC2 (du 14 novembre au 13 décembre 2012). L'occasion de retrouver le Londres médiatico-politique des années 50. Diffusée durant l'été 2011, la première saison avait été intéressante par la richesse de ses thèmes et les personnages mis en scène, mais il lui avait manqué une vraie consistance dans son récit fil rouge d'espionnage pour exploiter le potentiel qu'elle avait laissé entrevoir. Pour cette saison 2, la série a cependant gagné en maîtrise, capable désormais de susciter l'intensité dramatique qui avait trop fait défaut à la première.

Les débuts de saison pour The Hour sont certes lents, mais c'est pourtant une histoire homogène et de plus en plus prenante qui prend corps sous nos yeux. Au final, cela donne une saison de qualité supérieure à la première, qui mérite vraiment l'investissement. Mais le public britannique n'a pas eu la même patience : les audiences n'ont malheureusement pas suivi. Cependant si vous n'aviez qu'une seule série anglaise de ces derniers mois à rattraper, pas d'hésitation, il s'agit de The Hour !

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The Hour reprend plusieurs mois après les évènements ayant conclu la première saison. Tandis que Freddie a quitté l'Angleterre et est parti en quête de nouvelles expériences à travers le monde, Bell s'efforce de continuer à faire tourner une émission en perte de vitesse, notamment face à la concurrence d'une nouvelle émission d'ITV directement inspirée du concept de The Hour. La gestion est d'autant plus difficile que leur présentateur-vedette, Hector, profite désormais un peu trop de la célébrité, se faisant photographier dans tous les milieux en vogue des soirées londoniennes, tout en étant bien peu assidu pour faire acte de présence au bureau.

C'est dans ces circonstances qu'un nouveau directeur de l'information est placé à la tête de l'émission. Il s'agit de Randall Brown, qui a notamment bâti sa réputation à Paris. Conscient qu'il manque désormais ce qui faisait le piment des débuts de l'émission, une de ses premières décisions est de ré-embaucher... Freddie, permettant ainsi le retour du journaliste prodigue, cette fois, en tant que co-animateur aux côtés d'Hector. Le but est notamment de signifier à ce dernier qu'il est temps de redevenir professionnel. C'est pourtant le mode vie d'Hector qui va les conduire à enquêter sur un club à succès de la capitale et sur son puissant patron.

Entre affaires de moeurs, chantages et corruptions, les journalistes s'intéressent de bien dangereux arrangements, tandis qu'au sommet de l'Etat, les discussions autour de l'installation de missiles nucléaires américains sur le sol anglais attisent diverses convoitises.

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Proposant un récit homogène, la saison 2 de The Hour s'appuie sur une construction narrative maîtrisée, où la tension ne va cesser d'aller crescendo. Les premiers épisodes suivent un rythme volontairement plutôt lent, permettant à la série de s'épanouir dans un registre de fiction d'ambiance. Parfaitement ciselées, toutes les scènes semblent saturées du parfum des années 50, chaque décor étant travaillé jusqu'au moindre détail. Reconstitution presque trop soignée et policée, la série joue habilement sur cette image surchargée des fantasmes d'une époque. The Hour assume ainsi à merveille les codes du roman noir qu'elle se réapproprie. Mêlant à une enquête, des thèmes familiers, entre prostitution, corruption et chevalier blanc se dressant contre les dérives du système, la série intègre de manière plus cohérente la géopolitique et les enjeux de la guerre froide, mis au service d'une intrigue consistante.

Progressivement, les enjeux se précisent, les histoires se recoupent, et l'ensemble se complexifie au fil des révélations et des découvertes. Une sourde tension apparaît, les dangers devenant parfaitement identifiables. Tandis que le rythme s'accélère, l'atmosphère se fait de plus en plus prenante. The Hour nous conduit vers un final à l'intensité dramatique tour à tour magnifique et bouleversante, légitimant a posteriori le choix fait au départ de prendre le temps de bien façonner les fondations du récit à dérouler. Transparaît en filigrane une dimension tragique et inéluctable à l'enchaînement des évènements, que la série va savoir pleinement exploiter. Cette saison 2 est une vraie décharge émotionnelle, à la fois grisante et poignante. Ce sont quelques heures de télévision de haut standing qui provoquent une implication rare de la part d'un téléspectateur, totalement investi dans les méandres relationnelles dévoilées, et qui la quitte un peu choqué, hébété, longtemps marqué.

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Ce que The Hour a gagné en cohésion se perçoit également dans son traitement des personnages. La série entremêle parfaitement les destinées des protagonistes à l'intrigue principale. Tout se recoupe, le versant personnel s'invitant dans les rebondissements d'une enquête qui touche au plus près certains. Finis les batifolages dilatoires : chacun gagne en épaisseur et en complexité. La logique l'emporte, notamment dans le rapprochement progressif de Freddie et de Bell. Qu'importe le bref twist inventé pour les séparer un temps, la cohérence reprend ensuite ses droits avec des certitudes renforcées, primant tout et emportant du même coup le coeur du téléspectateur. La saison 2 aura aussi vu l'introduction d'une nouvelle dynamique, entre le directeur de l'information, Randall, et Lix Storm. Ces derniers partagent une vieille histoire, et une blessure jamais refermée : celle d'un enfant né d'une brève passion, abandonné par Lix dans une France à l'aube de la Seconde Guerre Mondiale. Cette histoire prend un tour très poignant, contrebalançant très bien les relations des autres personnages qui ont, eux, encore un futur devant eux. Elle offre en plus aux deux acteurs des scènes à la hauteur de leur talent.

Cependant la plus belle évolution de la saison est indéniablement la consistance acquise par Marnie, l'épouse d'Hector. Femme au foyer de la bonne société qui a parfaitement intégrée tous les codes de cette dernière, sur la place effacée et docile dévolue à la femme, elle est prête à admettre toutes les largesses de son mari volage, si seulement il pouvait aussi remplir le rôle qui est attendu de lui : qu'ils aient un enfant. Mais Hector, ne pouvant lui donner cela, n'en fuit que plus les soirées en face à face avec sa femme. L'humiliation provoquée par le scandale auquel il est mêlé aurait pu signer la fin d'un couple qui s'était peu à peu perdu, elle est au contraire le moment où Marnie acquiert toute sa dimension : celle d'une épouse qui décide de reprendre sa vie en main et qui entend s'émanciper. Sa plus savoureuse vengeance est son succès, fut-il bref, sur ITV. Le re-équilibrage progressif qui s'opère au sein du couple symbolise à merveille la maturation de la série. Cette saison aura vraiment su donner aux personnages l'ampleur narrative qu'ils méritent.

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S'il vous fallait un dernier argument pour vous expliquer en quoi The Hour propose quelques heures de grande télévision, il convient de terminer ce billet en se tournant vers son casting. Même en trempant ma plume dans l'encre le plus dithyrambique qui soit, tous les superlatifs, que je pourrais mettre bout à bout dans ces colonnes, afin de tenter de décrire les performances d'acteurs auxquelles cette saison nous a permis d'assister, ne suffiraient sans doute pas pour retranscrire la puissance dramatique de certaines scènes. Leurs jeux, tout en nuances et en intensité, ont plus que jamais sublimé les échanges, des confrontations explosives jusqu'à certains dialogues initialement simplement anecdotiques, conférant au script une dimension supplémentaire. Plusieurs passages hanteront ainsi durablement le téléspectateur.

La dynamique entre Ben Whishaw (Criminal Justice) et Romola Gorai (Crimson Petal and the White) repart sur des bases proches de la première saison, avec un certain infléchissement et rapprochement, qui permet à leur relation de conservant ce mordant toujours réjouissant qui la caractériser. Le signe d'une maturité est encore plus perceptible dans le couple que Dominic West (The Wire, The Devil's Whore) forme avec Oona Chaplin : cette dernière bénéficie cette fois d'un rôle qui s'épaissit et lui donne l'occasion de gagner, sa place face à un Dominic West égal à lui-même. Enfin, l'ajout principal de la saison tient à l'arrivée de Peter Capaldi (The Thick of It), comme toujours particulièrement génial, a fortiori dans un rôle ambivalent où il délivrera, face à Anna Chancellor, une des plus marquantes scènes de la saison.

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Bilan : La saison 2 de The Hour est une magnifique suite de 6 épisodes, durant lesquels la série fait preuve d'une maîtrise narrative à saluer. Fiction d'ambiance posant un décor et des enjeux dans sa première partie, son intrigue prend progressivement corps avec cohérence. Plus homogène et plus crédible dans son registre de roman noir au décor des 50s', cette saison culmine avec un dernier épisode à l'intensité dramatique qui laisse le téléspectateur le souffle court, choqué, fasciné, électrisé... Portée par de grands acteurs auxquels elle donne l'occasion de pleinement s'exprimer, The Hour aura proposé quelques heures de grand standing. Elle m'aura enthousiasmé comme peu de séries cet automne, et cela fait un bien fou. A savourer.


NOTE : 8,5/10


La bande-annonce de la saison :

27/08/2011

(UK) The Hour, saison 1 : journalisme sous tutelle, amours contrariés et guerre froide

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La diffusion de la saison 1 à peine terminée, BBC2 a annoncé hier que The Hour reviendrait bien pour une seconde saison . Si la nouvelle marque, c'est que cela faisait plus d'une décennie que la chaîne n'avait pas renouvelé une de ses séries. D'ores et déjà, on sait qu'elle reprendra 10 mois après les évènements de fin de la saison 1. Au parfum de crise internationale et de guerre froide qu'elle aura cultivé au cours de cet été, succèdera un éclairage particulier sur les relations entre les médias et les célébrités dans le Londres des 50s'.

Ayant réuni une moyenne de 2,1 millions de téléspectateurs, la première saison avait débuté avec un pilote convaincant qui avait su retenir mon attention. Au final, la série aura laissé entrevoir beaucoup de potentiel, mais aussi une certaine inconsistance récurrente. Sans que l'intérêt global du téléspectateur n'en souffre, elle a quelque peu peiné à maintenir le juste équilibre entre les thèmes traités, surfant du thriller d'espionnage au décryptage du milieu du journalisme, en passant par des passages plus romanesques et sentimentaux. Cependant, si cette richesse n'aura pas été toujours été pleinement maîtrisée, elle aura su exercer un attrait constant au cours de la saison 1.

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Nous plongeant dans les coulisses d'une émission venant tout juste d'être lancée par la BBC, The Hour va nous faire vivre les premiers mois agités de ce nouveau programme censé contribuer à moderniser l'information télévisée. Si la série pèche sans doute par excès d'ambition, voulant peut-être trop en faire, aborder trop de sujets, pour finalement avoir du mal à se fixer une direction précise vers laquelle s'orienter, n'embrassant jamais complètement tous les genres qu'elle effleure, elle ne va pas moins sûrement fidéliser son public grâce à deux atouts majeurs. Non seulement elle bénéficie de la dynamique attrayante existant entre ses personnages, mais elle va aussi s'imposer comme une série d'ambiance qui pose et exploite avec soin le cadre 50s' dans lequel elle se déroule.

C'est donc tout d'abord sur un plan humain que The Hour se détache. En plus des différentes perspectives sur le métier de journaliste que chaque protagoniste représente, de l'éthique revendicatrice de Freddie, au carriérisme et aux réseaux d'influence d'Hector, en passant par la volonté de Bel de s'affirmer dans des sphères encore très fermées aux femmes, la série installe progressivement un triangle amoureux, dont les ambivalences vont être le point fort. Si la complicité entre Bel et Freddie offre souvent des scènes aux répliques réjouissantes, c'est paradoxalement peut-être encore plus les rapports entre Hector et Freddie qui retiennent l'attention. Opposés par leur milieu, leurs conceptions du métier, leurs expériences personnelles, leur concurrence professionnelle se double en plus d'une dimension plus personnelle, lorsqu'il devient évident que Bel n'est pas indifférente à son nouveau présentateur. Pourtant, à l'inimitié exacerbée, presque puérile, des débuts, succède peu à peu une certaine compréhension, doublée d'une forme d'estime réciproque, qui donne une consistance supplémentaire à l'équilibre qui se met en place au sein du trio principal.

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Outre cette dimension relationnelle qui renforce l'attachement du téléspectateur aux personnages, l'attrait de The Hour repose sur l'atmosphère caractéristiques des 50s' qu'elle va s'efforcer de capturer et de retranscrire à l'écran. Nous sommes ici face à une série d'ambiance, avec les atouts, mais aussi les limites de ce genre : donnant parfois l'impression de se contenter de survoler les thèmes, elle ne va pas toujours au bout des idées qu'elle laisse entrevoir, ce qui peut frustrer, tout en s'assurant de conserver de manière omniprésente la toile de fond historique. L'émission télévisée va en effet devoir faire face à une actualité des plus riches, mais aussi très sensible.

Nous sommes en 1956. Ce sont les enjeux internationaux qui s'imposent comme un des fils rouges de la série avec la crise du canal de Suez. Cette dernière permet de s'intéresser aux rapportsdu pouvoir et des médias, entre connivences de classes et intérêts divergents, éclairant plus particulièrement les pressions gouvernementales sur la ligne éditoriale de l'émission. A travers la mise en scène de cet arbitrage constant entre intérêt du pays et liberté de la presse, la série traite avec application des efforts d'émancipation du (futur) quatrième pouvoir par rapport à une tutelle étatique omni-présente.

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Parallèlement, The Hour va également utiliser le contexte de la Guerre Froide pour emprunter certaines ficelles narratives propres aux fictions de cette époque. Si l'insurrection de Budapest permet d'introduire le bloc de l'Est dans l'actualité, c'est surtout sous des allures de roman d'espionnage que la série investit ce thème. Flirtant sans jamais pleinement l'embrasser avec le thriller conspirationniste, elle procède à nouveau par petites touches. L'enquête que suit Freddie, en cherchant à comprendre les raisons de l'apparent suicide d'une amie d'enfance, le conduit sur ce terrain mouvant des forces de l'ombre par définition secrète.

A mesure que la saison progresse, une sourde paranoïa s'installe : tandis que les téléphones des studios sont mis sur écoute et que d'étranges filatures vous font constamment jeter un oeil par-dessus votre épaule, des agents du MI-6 s'invitent dans les couloirs de l'émission. Les questions de Freddie dérangent ; sa pugnacité glisse vers l'obsession, entretenant une atmosphère pesante. La présence supposée d'une taupe soviétique à la BBC ne fait que sur-ajouter aux pressions indirectes. Si The Hour échoue à insuffler une tension légitimement attendue, trop contemplative peut-être pour basculer dans un vrai suspense, il n'en demeure pas moins que tous ces éléments construisent une ambiance intrigante et prenante dans laquelle le téléspectateur se laisse entraîner.

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L'exploitation du cadre 50s' est indéniablement un des points forts de The Hour ; le soin accordé à la forme ne fait que souligner davantage ce parti pris. En effet, la série bénéficie d'une réalisation qui est un vrai plaisir pour les yeux. La photographie est superbe. L'esthétique travaillée, qu'il s'agisse des décors ou des costumes, donne vraiment l'impression de plonger dans les 50s'. Par ailleurs, toujours dans ce souci de poser une tonalité particulière, il faut également saluer le générique, minimaliste sur le plan visuel, mais diablement entraînant musicalement parlant, et dont le rythme renvoie parfaitement à cette époque.

Enfin, The Hour aura également bénéficié d'un convaincant casting qui aura offert une performance collective des plus solides. Le trio principal finit par s'équilibrer avec justesse et complémentarité : Ben Wishaw (Criminal Justice) est aussi entraînant que survolté, Romola Garai (Crimson Petal and the White), plus posée, lui sert de pendant naturel, tandis que Dominic West (The Wire, The Devil's Whore), tout en sobriété, campe bien ce personnage ambitieux qui va se révéler plus complexe que la caricature initialement renvoyée. Les figures secondaires s'imposent avec tout autant d'aplomb pour compléter l'ensemble : on retrouve notamment Tim Pigott-Smith, Anna Chancellor, Anton Lesser, Juliet Stevenson, Julian Rhind-Tutt ou encore Oona Chaplin.

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Bilan : La richesse thématique et les pistes narratives multiples de The Hour ont été au cours de cette première saison tout autant un atout indéniable, qu'une limite parfois criticable. Dotée d'un rythme volontairement lent, la série a sans doute manqué d'homogénéité dans son écriture, insuffisamment aboutie sur certains sujets. Pour autant, elle aura aussi su nourrir et préserver l'intérêt du téléspectateur pour des intrigues très fortement ancrées dans leur époque et pour des personnages qui n'auront cessé de se complexifier. Sans être une rigoureuse reconstitution historique, The Hour reste donc une série d'ambiance très attrayante, qui aura cultivé avec soin ce parfum caractéristique des 50s'. Au final, j'aurais suivi cette première saison avec beaucoup de plaisir. Le rendez-vous est donc pris pour la saison 2 !


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la série :

22/07/2011

(Pilote UK) The Hour : ambiance 50s' pour une révolution de l'information sur fond de conspiration

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Si les années 50/60 ont été remises au goût du jour téléphagique avec Mad Men, l'ambiance de cette époque et les salles de travail enfumées resteront le seul parallèle tangible que l'on pourra dresser avec la nouvelle série de BBC2. Il faut d'ailleurs reconnaître à la chaîne anglaise un certain sens du timing en lançant The Hour, portant sur la révolution de l'information dans les médias à la fin des années 50, cette semaine, alors que l'Angleterre est en plein "hacking-gate".

Créée et écrite par Abi Morgan (à qui l'on doit notamment la marquante mini-série Sex Traffic), la diffusion de The Hour a débuté le 19 juillet 2011. Six épisodes ont été commandés. Avec son atmosphère soignée, son casting flamboyant et son sujet intéressant, le pilote de cette nouvelle série a laissé entrevoir un potentiel incontestable, avec un twist conspirationniste des plus intrigants. Une chose est certaine : la série a retenu mon attention.

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The Hour débute à Londres, en 1956. Freddie Lyon, journaliste aussi brillant que profondément idéaliste, étouffe dans le carcan rigide du programme auquel il participe, rédigeant des brèves sur des sujets qui tiennent plus du divertissement que de l'information. Avec une de ses plus proches amies, Bel Rowley, il caresse le rêve de révolutionner l'approche télévisuelle de l'actualité, délaissant les compte-rendus des mondanités de la haute société, pour de réelles investigations et une vraie réactivité aux évènements de ce monde. Passionné et goûtant peu aux compromis, Freddie a bien besoin du pragmatisme de Bel pour contrebalancer certaines de ses sorties, voire plaider en sa faveur lorsqu'il s'aliène les mauvaises personnes.

Les deux jeunes gens voient une chance inestimable pour leur carrière lorsque la BBC envisage la création d'une nouvelle émission d'information. Ce programme a l'ambition de moderniser la manière dont l'actualité est traitée à la télévision. Une équipe de journalistes est rassemblée. Bel a la surprise de se voir offrir le poste convoité de productrice, mais Freddie, rêvant de présenter le magazine, doit se contenter de couvrir les news nationales ; un job qu'il finit par accepter bon gré, mal gré. C'est à un nouveau venu, Hector, qu'est confié la responsabilité d'être le visage du nouveau programme. Ses connexions et son réseau social n'y sont sans doute pas étrangers.

Comment cette émission va-t-elle voir le jour ? De quelle indépendance et marge de manoeuvre disposera-t-elle ? La question va être d'autant plus sensible que Freddie se lance dans une bien troublante enquête, où se mêlent un meurtre mystérieux, l'implication surprenante des services secrets et des accusations étranges de la part d'une vieille amie. Mais la recherche de la vérité pourrait se révéler dangereuse, pas seulement professionnellement parlant.

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The Hour dispose tout d'abord des atouts de son cadre : c'est une ambiance stylisée et soignée que la série dévoile dans ce pilote qui sait parfaitement mettre en valeur ce doux parfum des 50s'. Au-delà des costumes et de l'atmosphère enfumée, c'est avec beaucoup de maîtrise que sont introduits tous les enjeux de l'époque. La question des médias retient en premier lieu notre attention, à travers les débats sur le traitement de l'actualité à la télévision. Ce média trop calibré et consensuel, qui se complaît dans des comptes-rendus mondains soporifiques, semble avoir plutôt pour fonction de rassurer les téléspectateurs que de réellement chercher à les informer. En arrière-plan, les connivences sociales et les intérêts de classe brident toute indépendance. Peut-on parler de liberté de la presse à la télévision ? Quelles sont ses limites ? La nouvelle émission de la BBC, qui focalise tant d'espoirs pour Freddie, sera-t-elle vraiment un espace où la tonalité plate et sans ambition qui prédomine dans le petit écran pourra être dépassée ? Tout autant qu'une photographie soignée d'époque, The Hour posent des thématiques relatives à la presse et à l'information qui sont intemporelles, et inhérentes à toute démocratie.

Mais la série se démarque de la simple reconstitution historique du monde des médias avec l'introduction d'une seconde ligne directrice, toute aussi intrigante : elle pose en effet les bases d'un thriller conspirationniste. BBC2 semble dernièrement particulièrement apprécier plonger ses téléspectateurs dans une paranoïa ambiante du meilleur effet. Le pilote distille tous les ingrédients classiques du genre, de l'implication des services secrets (MI-6) jusqu'à la présence d'un mystérieux tueur qui élimine "ceux qui savent" - ce qui n'est pas sans rappeler les débuts de The Shadow Line. Dans un contexte de guerre froide où il fait bon citer Ian Fleming, une interrogation aussi provocatrice que troublante va conduire la piste périlleuse sur laquelle Freddie se lance : "You think you live in a democracy ? You think this country stands for freedom of speech ? It does not." Si le pilote en reste au stade de l'exposition, dévoilant peu, il s'assure d'aiguiser la curiosité du téléspectateur, et par conséquent, sa fidélité.

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Au-delà de cocktail diversifié et dense des thématiques effleurées, le pilote de The Hour réussit particulièrement bien l'introduction de ses personnages, ou plus précisément du duo central composé de Freddie et de Bel, auquel vient s'ajouter un extérieur, Hector, dont on ne sait pas encore trop quoi penser derrière son sourire ultra-bright. L'équilibre est instantanément trouvé entre la flamboyance idéaliste et intransigeante de Freddie et le calme plus terre-à-terre de Bel. Les dialogues, aussi rythmés que riches en réparties parfois cinglantes, reflètent parfaitement la dynamique attendue du milieu des médias dans lequel la série nous immerge. Jouant sur les apparences, les personnages flirtent, s'invectivent, se fâchant et se réconciliant presqu'aussi vite. Il y a une vraie dimension humaine dans cette série ; et le pilote, ne faisant que donner les premières indications, donne envie de s'investir et d'en savoir plus sur chacun des protagonistes.

Maniant habilement les contrastes entre l'élite dirigeante, encore régie par ses codes et convenances sociales rigides et fermées, et les soubressauts d'émancipation modernisateurs incarnés de manière si enflammée par Freddie, l'épisode prend aussi le temps de dresser un bref portrait de la société londonienne de la fin des années 50. De plus, à travers Bel, c'est le statut de la femme qui est mis en scène. Si la responsabilité d'être nommée productrice est importante, elle demeure regardée de haut dans ce monde des "dirigeants" à prédominance masculine qu'elle fréquente. Par la richesse de toutes les pistes que The Hour laisse entrevoir du potentiel. Il faudra sans doute à la série gagner en homogénité pour bien maîtriser les tenants et aboutissants, et mêler tous ces ingrédients, du médiatique au conspirationniste. Cependant, les enjeux sont bien là : à la suite de parvenir à les exploiter et à faire qu'ils s'équilibrent et se complètent !

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Prometteuse sur le fond, The Hour est également très solide sur la forme, laquelle constitue toujours un point non négligeable de ces séries "d'époque". La réalisation est travaillée. L'ambiance 50s' est parfaitement portée à l'écran, avec un style soigné. La reconstitution historique en costumes, accompagnée d'une photographie enrichie, s'avère être un vrai plaisir pour les yeux du téléspectateur.

Enfin, The Hour bénéficie d'un excellent casting qui délivre une performance d'ensemble très convaincante. C'est Ben Wishaw (Criminal Justice) qui mène l'ensemble, la flamboyance de son personnage, charismatique et survolté, l'imposant comme la figure centrale de la série. Sa relation pimentée et complice avec Romola Garai (Crimson Petal and The White) ressort très bien à l'écran, l'actrice offrant un pendant plus sobre mais tout aussi déterminé. Pour compléter le trio, Dominic West (The Wire, The Devil's Whore) trouve rapidement ses marques dans un rôle plus mesuré et convenu. A leurs côtés, on retrouve des têtes très familières du petit écran britannique, comme Tim Pigott-Smith, Anna Chancellor, Anton Lesser, Juliet Stevenson, Julian Rhind-Tutt ou encore Oona Chaplin.

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Bilan : Le potentiel de The Hour réside dans sa richesse. Derrière son enjeu médiatique central qui demeure le traitement de l'information à la télévision, le pilote introduit dans le même temps un versant conspirationniste qui ajoute une dimension supplémentaire à la série. Si ces deux facettes d'une même problématique - la liberté de la presse, pilier d'une démocratie ? - devront apprendre à cohabiter de façon plus homogène par la suite, elles savent toutes deux retenir l'attention du téléspectateur. Portée par des personnages forts, bien servie par un casting cinq étoiles, The Hour s'assure donc de notre fidélité au terme de cette première heure. Il reste à la série à s'affiner et à bien prendre la mesure de son concept ambitieux pour confirmer tout ce qu'elle a laissé entrevoir dans ce pilote. A suivre !


NOTE : 8/10


La bande-annonce de la série :