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06/09/2010

(Téléphagie) Les séries et la musique : le savoir-faire sud-coréen (part. 2)


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Choisir des pistes musicales plaisantes, c'est une chose. Parvenir à les utiliser à propos, c'en est une autre. Or, à mes yeux, s'il est un pays qui manie à merveille cet art d'allier séries et musique, c'est la Corée du Sud. En fait, il existe généralement une forme d'osmose entre ces deux aspects qui engendre une réciprocité généralement bien maîtrisée, leur permettant de se mettre mutuellement en valeur. Le téléspectateur finit par associer et mêler les échos positifs de part et d'autre. C'est bien simple, depuis le début de l'année 2010, j'ai dû avoir autant de coups de coeur pour des OST de k-dramas qu'en une décennie entière de téléphagie occidentale. (J'avoue qu'il m'est même arrivée d'aimer la musique, sans apprécier le drama ; le dernier exemple que j'ai en tête est Road Number One.)

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Un filon d'exploitation florissant

Ne cachons pas la dimension marketing liée à cette production : l'industrie sud-coréenne de l'entertainement maîtrise parfaitement toutes les ficelles. Pour bien comprendre les enjeux, il suffit de jeter un oeil sur les divers classements des singles les plus vendus/téléchargés sur les plate-formes légales chaque semaine. Par exemple, prenons la dernière synthèse des 5 grands sites de musiques du pays (Melon, Bugs, Mnet, Soribada, Dosirak)
qu'assure KPopNet4 de façon hebdomadaire, proposée pour la dernière semaine du mois d'août au pays du Matin Calme.

Dans le top 30 des singles, on retrouve rien moins que 7 singles issus d'OST de dramas. Le savoir-faire marketing est encore plus flagrant lorsque l'on analyse de près ces sorties, puisque ces 7 morceaux couvrent en réalité "seulement" 3 séries différentes. Tout d'abord, il y a les singles tirés du grand succès d'audience actuel en Corée du Sud, Baker King, encore représenté dans ce top 30 par 2 singles (alors même qu'ils sont présents depuis quelques temps déjà, une longévité à souligner). A ses côtés, le drama actuellement à son apogée musicale est incontestablement My Girlfriend is a Gumiho, lancé le 11 août dernier sur SBS, dont on retrouve rien mois que les 4 singles différents de l'OST dans le top 30. Les dates de sorties de ces derniers sont d'ailleurs significatives : les chansons ont été disponibles, respectivement, les 4 août, 11 août, 20 août et 25 août pour la dernière... Parlez-moi d'une campagne parfaitement orchestrée ! Mieux encore, le morceau d'OST le plus haut dans le classement (n°4) est rien moins qu'une entrée, pour le moins fracassante, relevant d'un drama dont la diffusion est prévue... pour le mois de novembre prochain. Il s'agit en effet du premier extrait de l'OST d'Athena : Goddess of War (le spin-off d'IRIS) dont SBS a lancé la campagne de promotion fin d'août.

Ces exemples illustrent parfaitement la réciprocité installée entre ces deux volets de l'entertainement sud-coréen et cette forme de complémentarité, mais aussi de dépendance qui existe, chacun pouvant être instrumentalisé pour promouvoir l'autre. Dans le cadre de My Girlfriend is a Gumiho, la série sert de tremplin de promotion pour les chansons (l'acteur principal est d'ailleurs l'interprète de la chanson du premier single - ainsi, la boucle est bouclée) ; dans le cadre d'Athena, c'est la chanson qui sert de mise en bouche.

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La composition des OST : une recette bien huilée

Si les soundtracks des dramas font recette et que tout le monde y trouve finalement son compte dans la distribution qui s'opére, c'est aussi parce qu'elles n'ont généralement pas leur pareil pour séduire le public.

 A quoi ressemble l'OST "type" d'un drama ?

Une OST se compose généralement d'une partie de chansons et d'une partie de simples instrumentaux. Il est fréquent d'ailleurs de rencontrer dans l'OST plusieurs versions, instrumentale et chantée, du même morceau. Parmi les chansons, on trouve quelques reprises (l'import de "classiques" étrangers n'est pas rare, avec une certaine tendance anglo-saxonne), mais aussi des inédits conçus spécialement pour la série. La plupart des musiques d'une OST auront chacune un interprète différent, ce qui va donc multiplier les influences et les interventions sur une même soundtrack. On y croise généralement au moins un acteur (ou une actrice) de la série. Les carrières acteur/chanteur ne sont pas cloisonnées en Corée du Sud ; et même si ladite personne n'a jamais envisagé son futur dans la chanson, elle saura généralement pousser la chansonnette sans trop de difficulté. Par ailleurs, participent également des chanteurs et/ou groupes extérieurs, sans aucun lien avec le drama ; ils peuvent être déjà connus, prêtant ainsi une part de leur notoriété à la série, ou bien, moins présent sur la scène médiatique, ils vont se servir de la série comme tremplin personnel. Il y a une forme de donnant-donnant constat entre les deux sphères de l'industrie du divertissement.

 Quant aux chansons, la diversité de leurs styles ne doit pas cacher qu'à quelques variantes près, leur contenu reste fidèle à un grand classique : la thématique de l'amour impossible/la rupture/l'adieu demeure la grande source d'inspiration première de la plupart d'entre elles. Pour peu qu'on se penche un peu sur  les paroles, ces dernières sont généralement assez édifiantes. L'amour est au fond un thème qui transcende tous les genres et les styles de dramas. Cependant, il faut bien insister sur le fait que tous les genres musicaux sont représentés et explorés, de façon à s'adapter au mieux à la tonalité de la série. On y trouve ainsi beaucoup de balades mélancoliques appréciées dans le cadre des sempiternels mélodramas, mais aussi des morceaux très dynamiques, plus orientés variétés, destinés à mettre en valeur l'atmosphère légère des comédies. Il y aura également des chansons aux accents franchement épiques pour accompagner les séries historiques.

En règle générale, le morceau musical s'appréciera pleinement si l'on a vu le drama ; et ce, même si certaines chansons peuvent s'imposer de manière indépendante. Reste que l'association d'une mélodie au souvenir d'un moment téléphagique agréable demeure le plus sûr moyen de diffusion de ces OST, mais aussi une façon d'assurer leur pérennité. L'assimilation du morceau par le téléspectateur est de plus facilitée par sa récurrence au cours des épisodes : la simple répétition de l'écoute familiarisera toute oreille récalcitrante qui n'aura pas eu un coup de foudre instantané.

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Aperçu de soundtracks : éclectisme et multiplicité

Examinons maintenant quels morceaux ont pu marquer mon parcours téléphagique au pays du Matin Calme.

L'instrument de prédilection des OST de kdramas est le piano. Rien de tel que son utilisation pour proposer des thèmes profondément touchants et mélancoliques, qui vous donneraient presque instantanément envie de fondre en larmes lorsque les premières notes retentissent. L'OST de Bicheonmu est à mes yeux une des plus abouties sur ce point (pas seulement parce que cette série est celle qui m'a sans doute tiré le plus de larmes). Comment ne pas frissonner et rester insensible devant la beauté mélancolique de cette superbe composition ? 

(Nocturne, par Park Ji Yoon)
OST du drama Bicheonmu

Autre exemple de piano doux déchirant : A song of sorrow, par Kim Bum Soo, issue du drama Damo. Cette approche chargée d'une extrême douceur n'est pas le seul registre musical permettant d'éclairer et de faire vibrer la fibre tragique d'un drama. Les sud-coréens maîtrisent toutes les nuances de ce genre, pouvant également proposer des chansons qui déboucheront sur un résultat tout aussi poignant, mais où le fond musical sera plus riche en instruments de musique diversifiés et où le rythme sera un peu plus tranchant. Toujours dans Damo, nous y trouvons le parfait exemple illustrant ces subtiles variations dans l'émotionnel :

(A song of devotion, par Page)
OST du drama Damo


Si le piano demeure un instrument apprécié, il faut préciser que son utilisation ne renvoie pas automatiquement à des morceaux mélancoliques ou tristes. En effet, couramment employé pour souligner et servir toutes sortes de tonalités, il peut également, par exemple, constituer le support de chansons entraînantes à souhait, en offrant en guise de refrain mélodieux, une petite ritournelle agréable à l'oreille :

(Blood tears, par Lisa)
OST du drama Gumiho : The Tale of the Fox's Child

 
Au-delà de ces questions instrumentales, plus généralement, il est facile d'affirmer que la Corée du Sud est le pays des ballades. On y croise toutes les variantes du genre, déclinées avec toutes les nuances possibles et imaginables. Il est rare qu'une OST de kdrama n'en contienne pas au moins une. Il est fréquent d'en croiser plusieurs. Pour les interpréter, les possibilités ne manquent pas. On n'hésite pas à mettre à contribution les acteurs de la série, mais on est aussi prêt à se tourner vers d'autres chanteurs, plus ou moins confirmés, ou à faire appel aux multiples groupes et autres boys bands qui sévissent dans l'entertainment coréen.
Exemple du degré d'imbrication entre l'industrie de la musique et celle de la télévision, dernièrement, Baker King a ainsi pu confier la conception d'une de ses chansons phares à Lee Sung Chul, un des chanteurs coréens les plus productifs en terme de ballades.

Dans ce style musical, l'approche la plus épurée - et peut-être une des plus agréable - demeure une valeur sûre : la ballade intimiste, où la sobriété est maître mot et où le fond musical se contente d'accompagner tout en douceur, une voix simple qui ne force pas. I am Legend a proposé, dans ce registre, une belle version mélancolique le mois dernier, avec une chanson interprétée par Kim Jung Eun. Mais une des premières à m'avoir marqué dans ce style est issue du drama On Air. On pourra remarquer que, sans doute à dessein, dans chacun de ces exemples, le morceau est interprété par l'actrice principale de la série : un choix pas si innocent et plutôt judicieux.


(Shadow, par Song Yoon Ah)

OST du drama On Air


Si l'identité musicale du drama se forge naturellement dans le cadre d'une ballade personnelle comme citée ci-dessus, c'est un peu moins vrai pour les ballades plus classiques. Elles ne
s'apprécieront sans doute vraiment que si l'on a visionné la série - car certaines donnent parfois le sentiment d'être un peu interchangeables -, associant ainsi des souvenirs à cette mélodie. Cependant, on croise aussi dans ce genre quelques petites perles assez marquantes qui vont sortir du lot. Parmi mes préférés, figure une belle ballade langoureuse à souhait, qui vint rythmer un drama un peu plus ancien, All in :

(Just like the first day, par Park Yong Ha)
OST du drama All in


Comme je l'ai dit, les kdramas ne se contentent pas d'exploiter les doubles compétences de leurs acteurs, ils recourent également à des artistes populaires, déjà installés. S'opèrera alors la jonction entre deux sphères a priori réellement indépendantes, l'industrie musicale et l'industrie télévisée. Cette collaboration permet de mêler le style musical de l'artiste sollicité avec la tonalité particulière du drama à mettre en valeur. Pour une comédie romantique assez légère et explosive, comme Coffee House, cela donnera un morceau de kpop entraînant et dynamique à souhait, penchant vers la variété :



(Page One, par SG Wannabe & Ock Ju Hyun)
OST du drama Coffee House


Toujours dans ce cadre, certaines des plus belles OST de kdramas sont nées de cette collaboration : le recours à ces chanteurs peut en effet aussi déboucher sur de superbes ballades musicalement abouties et qui sauront vous transporter. Un drama comme The Legend, qui propose dans son ensemble une des plus belles OST qu'il m'ait été donné d'écouter (ecléctique, particulièrement riche et très réussie), exploitera ainsi à merveille cette voie, avec une chanson où pointe une dose de merveilleux, teinté d'épique, qui sied parfaitement à cette série :


(Love song for a thousand years, par TVXQ (DBSQ))

OST du drama The Legend


Par ailleurs, on ne soulignera jamais assez à quel point tous les genres musicaux sont représentés. Certains dramas contiendront des petits morceaux très légers, tel Go Go Chan, dans Coffee Prince. D'autres morceaux investiront des styles un peu moins présents à l'écran, tel du r'n'b, dans City Hall :

(I'll believe in myself, par Jung In ft. Bizzy)
OST du drama City Hall


Les OST s'adaptent donc à la tonalité des séries, mais elles vont également se positionner par rapport aux époques relatées. Il y aura alors deux approches possibles : soit la musique va s'inscrire dans le prolongement de la période mise en scène, permettant ainsi d'accentuer le dépaysement, soit il y aura une rupture volontaire qui sera orchestrée, de façon à distiller une certaine ambivalence dans l'atmosphère de la série.

Pour ce qui est de la première hypothèse, un des meilleures illustrations se trouve dans l'OST de Capital Scandal. En écho au contexte des années 30, pour un drama se déroulant durant l'occupation japonaise, elle nous plonge dans un morceau swinguant à souhait :

(Kyung Sung Scandal, par Eru)
OST du drama Capital Scandal


Dans le registre des sageuk - les kdramas historiques -, on retrouve les deux grandes écoles au sein des productions. Soit il va s'agir d'exalter cette fibre épique contenue dans le drama, à la manière par exemple, de Jumong. Ou bien, certaines OST vont prendre le téléspectateur à contre-pied en optant pour des styles musicaux où pointe un flagrant anachronisme qui peut quelque peu déstabiliser dans un premier temps : parmi cette seconde tendance, on peut citer Damo et ses morceaux de krock endiablés, ou, plus récemment, Chuno (Slave Hunters).

Relevant de la première voie, voici un exemple d'envolée épique :

(Sesang-i nareul ora hane, par Insooni)
OST du drama Jumong

Relevant de la seconde voie, certains k-dramas vous prouveront avec beaucoup d'aplomb qu'une introduction type "chants grégoriens" qui enchaîne sur du rock endiablé en plein XVIIe siècle, et bien si, c'est possible...

(Change, par Gloomy 30's)
OST du drama Chuno (Slave Hunters)

De la même manière, toujours dans ce décalage anachronique, du rock électrique :

(Fate, par Kim Sang Min)
OST du drama Damo


Enfin, les dramas eux-mêmes parachèvent parfois la confusion des deux sphères musique et série, en intégrant l'univers musical directement dans les storyline. La série mettra alors en scène un chanteur ou bien un groupe fictif. Gloria, You're Beautiful, ou encore dernièrement I am Legend, rentrent tous dans cette catégorie. Et, une fois encore, cela ouvre un horizon particulièrement éclectique : il y en a pour tous les publics, et pour tous les goûts.

I am Legend propose des morceaux plutôt dynamiques, de la pop tendant vers  le rock, à l'image d'un de mes récents coups de coeur :

(Millions roses, par Come back Madonna)
OST du drama I am Legend


En mode Idols (boys bans), A.N.Jell aura été un groupe "fictif" particulièrement marquant et rentable, surfant sur le buzz et le "phènomène" You're Beautiful en fin d'année 2009 :

(I will promise you, par A.N.Jell)
OST du drama You're Beautiful

 

Pour conclure, en guise de dernière illustration de cette extraordinaire diversité des OST de k-drama, voici mon dernier gros coup de coeur du moment, issu de la soundtrack de My Girlfriend is a Gumiho, un morceau étrangement féérique d'où s'échappe comme une pointe de magie :

(Fox Rain (Sun Shower), par Lee Sun Hee)
OST du drama My Girlfriend is a Gumiho



En conclusion, j'ai envie d'insister sur le fait que la Corée du Sud n'est pas seulement un des pays qui propose les OST originales les plus abouties, avec des morceaux qui constituent et apportent une réelle valeur ajoutée à ses séries, soutenant ainsi leur contenu. Elle est aussi un des plus pragmatiques, faisant partie de ceux qui ont le mieux perçu tous les avantages à imbriquer ces deux volets, poussant la réciprocité entre musiques et séries à son maximum. Là où les Etats-Unis balbutient un Glee plus ou moins digeste, la Corée du Sud fait preuve d'une maîtrise globalement bien supérieure dans ce domaine.

Toutes les OST ne sont pas aussi marquantes que celles que j'ai pu évoquer ici, mais, dans l'ensemble, j'espère que cet article aura pu vous présenter un aperçu synthétique de la richesse de l'univers musical des kdramas, expliquant pourquoi il est à mes yeux le plus soigné parmi les nationalités dont le petit écran m'est familier.


Et vous, comment percevez-vous et ressentez-vous cet univers téléphagique musical du pays du Matin Calme ? Vous avez déjà poussé l'écoute des OST hors visionnage de la série ? Quelles sont les k-dramas qui ont pu vous marquer dans cette perspective ?

 

En complément, je vous conseille d'aller lire l'article d'Eclair sur Les OST de séries et de films coréens, ce dernier dispose en effet sans doute d'une vision d'ensemble plus complète, en raison d'un meilleur recul et d'une plus grande expérience sur tout ce qui touche à la Corée.

15/11/2009

(K-Drama) The Legend (Tae Wang Sa Shin Gi) : l'accomplissement d'une prophétie


Il existe peut-être une divinité téléphagique qui nous envoie des signes de réconfort lorsque notre étincelle vacille. Au milieu du marasme des déceptions de la semaine, je me suis retrouvée skotchée devant un drama coréen, diffusé à l'automne 2007 sur MBC, The Legend (Tae Wang Sa Shin Gi)
. Être emporté par surprise par le souffle addictif d'une fiction m'a rappelé les bons moments de la vie du sériephile.

En effet, jeudi soir, un peu en désespoir de cause, j'avais jeté mon dévolu sur cette série qui traînait, bien rangée sur mon disque dur, depuis quelques temps déjà, mais dont j'avais toujours retardé le lancement pour une raison ou une autre. Je m'attendais éventuellement à passer une soirée sympathique, la série ayant des thématiques devant a priori me plaire. Mais je ne pensais pas éteindre à regret mon petit écran à 1 heure du matin passée, après le visionnage d'affilée des six premiers épisodes. Non que The Legend soit un "chef-d'oeuvre", mais elle a allumé une petite flamme en moi qui m'a fait sacrifier mes nuits de sommeil depuis lors, afin d'en visionner l'intégralité. Et ce petit instant magique, dont tout téléphage connaît la valeur, c'est déjà beaucoup !

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Résumer le synopsis de The Legend se révèle assez complexe. Il s'agit d'un récit clairement empreint de Fantasy, faisant référence à un légendaire royaume de Corée, Jooshin. Composée de 24 épisodes, la série se propose de nous narrer l'accomplissement épique d'une prophétie.

L'histoire commence 2000 ans auparavant. Le fils du roi des Cieux (la divinité suprême) était alors descendu sur Terre afin d'unir les peuples et de fonder une nation, Jooshin, où règneraient paix et prospérité. Mais, voyant la fondation de Jooshin comme une menace pour leur clan, la Tribu du Tigre, qui régnait par la force sur la Terre, rentra en guerre pour assurer sa domination, conduite par sa prêtresse, Kajin, qui possédait le pouvoir du Feu. Après de nombreux massacres, le fils du roi des Cieux décida finalement de lui retirer ce pouvoir destructeur et il l’emprisonna dans une amulette, le Coeur du Phoenix. Or, durant leur confrontation, Kajin tomba amoureuse du jeune homme. Mais le coeur du fils du roi de Cieux appartenait déjà à une autre, une guerrière du Clan de l'Ours, à qui il confia le Symbole du Phoenix. Kajin devint folle de jalousie lorsqu'elle apprit la future naissance de leur enfant. Elle enleva le nouveau-né en otage dans le but de récupérer en échange son pouvoir du Feu. Mais, sous l'emprise de la colère et du désespoir, la mère libéra le Phoenix Noir de l'amulette. Incontrôlable, il dévasta la Terre par le Feu. Le fils du roi des Cieux n’eut alors d’autre choix que de tuer sa bien-aimée pour maîtriser cette créature divine.
Anéanti par son échec sur Terre, il décida alors de retourner aux Cieux, abandonnant derrière lui les symboles qui renfermaient les pouvoirs des quatre divinités censées l'aider dans sa tâche. Cependant, il laissa au peuple une prophétie : il prédit qu'un jour, les Cieux enverraient un véritable roi, le Roi de Jooshin, qui réunifiera tous les royaumes. La nuit de sa naissance, l'étoile de Jooshin brillera dans le ciel. Et les quatre symboles des divinités s'éveilleront et chercheront leur gardien.

2000 ans plus tard, une nuit, l’étoile de Jooshin apparut dans le ciel… Et la légende reprit vie dans la mémoire du peuple. C'est de son accomplissement dont nous allons être les témoins.

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Enoncé de façon aussi abrupte, cela peut sembler un brin compliqué a priori, mais je vous rassure, il est relativement aisé de s'immerger dans l'histoire. Un ou deux épisodes suffisent pour bien cerner les enjeux et identifier les différents camps s'affrontant.
Le premier épisode nous présente les évènements qui se sont passés il y a 2000 ans et qui ont forgé la prophétie, racontés, sous la forme d'un conte légendaire, à une enfant curieuse et fascinée. Les trois épisodes suivants introduisent les personnages principaux, en nous exposant leur enfance. Ensuite, à partir du quatrième épisode, arrivés à l'âge adulte, s'enclenche l'escalade finale : l'affrontement pour la réalisation de la prophétie, l'assouvissement d'une vengeance millénaire et une course au pouvoir qui s'envenime rapidement. Car deux princes de sang royal sont nés le jour de l'étoile de Jooshin ; la confrontation des ambitions des uns et des autres trouvera d'une façon ou d'une autre une issue fatale. Intrigues de cour, complots mortels et manipulations s'étirent en toile de fond. Outre la question de l'accession au trône (première partie), c'est la quête des symboles des divinités qui occupera la seconde partie du récit. La légende ne dit-elle pas que leurs gardiens ne reconnaîtront que le véritable roi ? Ils deviennent un enjeu central dans ces luttes de pouvoir. Entre guerres et trahisons, entre amours et haines, les loyautés se troublent et une histoire qui paraît déjà presqueécrite se met irrémédiablement en marche. Le destin de certains semble déjà scellé ; comme il le fut 2000 ans auparavant.

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Le premier aspect marquant dans The Legend est son ambiance. La série parvient parfaitement à recréer une atmosphère épique, où se mêlent destinés humaine et divine, ambitions et loyautés, trahisons et manipulations. Mise à part quelques petits épisodes de transition au milieu, son rythme reste dynamique et sans temps mort. Les situations ne demeurent jamais figées, se renversant régulièrement complètement en un épisode. En raison de la densité de l'histoire (où de multiples évènements s'enchaînent), les scénaristes doivent éviter toute baisse de rythme dans la narration. Cela les oblige ainsi à ne jamais laisser s'éterniser une situation. Par conséquent, la réalité des distances entre les lieux a parfois tendance à disparaître, sacrifiée au nom du récit. Mais ces petites approximations scénaristiques, tout comme l'omniscience apparente un peu agaçante de certains personnages, ne viennent pas enrayer le souffle épique qui règne sur cette série. Sans être aveugle à ces facilités de conception, le téléspectateur se laisse transporter, grisé, dans l'histoire.
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Car The Legend réussit une très bonne exploitation de son attrayant concept de départ, bien aidée par une base mythologique complexe et très intéressante. Le versant Fantasy de la série conduit à mettre en jeu des intérêts tels, que cela donne une résonnance particulière au cocktail habituel à ce type de fiction : du drame, mêlé à une touche d'humour, notamment grâce à quelques personnages secondaires bien inspirés ; de l'action, que viennent brouiller de légères romances, qui ne sont pas omniprésentes, mais servent à exposer et justifier l'intensité des relations d'amour et de haine entre les personnages principaux. L'équilibre entre tous ces éléments est vite trouvé et savamment dosé. The Legend va ainsi au-delà de la simple série historique. Tout cela contribue à son originalité et à sa réussite auprès d'un téléspectateur qui ne peut rester insensible à la richesse de cet univers.
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Le second attrait majeur de la série réside dans ses personnages. Loin d'être manichéens (à une ou deux exceptions marginales près), ils sont pour la plupart très fouillés et bénéficient d'une psychologie vraiment travaillée. On échappe ainsi aux stéréotypes unidimensionnels, même si, à chacun, est dévolu un rôle précis dans ce vaste et impitoyable jeu d'échecs qui prend forme sous nos yeux. Ces personnages ne sont pas non plus figés une fois pour toute dans la série. Au contraire. Nous les voyons évoluer, se forger un destin, se former à travers les épreuves qu'ils doivent traverser. Ce sont les évènements qui les façonnent et les amènent à faire leurs propres choix, à choisir un camp qu'ils trahiront peut-être avant la fin.
Un autre élément qui contribue à la richesse de la série, c'est le fait que les personnages secondaires ne sont pas éclipsés par les principaux, comme c'est trop souvent le cas. Ils ne sont pas cantonnés à de simples rôles de faire-valoir. Ils ont droit à leur propre développement et à leurs propres épreuves. Est ainsi mise en scène une galerie de protagonistes très diversifiée. Conférant une réelle densité au récit, elle apporte aussi une touche d'humanité, lui permettant également de jouer sur l'affectif du téléspectateur.

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Sur la forme, The Legend est un drama très abouti pour une production coréenne. On devine derrière un budget plus conséquent que la moyenne. En effet, la réalisation s'avère propre et assez convaincante, plus stable et posée que ce que l'on rencontre habituellement dans ce type de fictions. De plus, la photo est globalement bien travaillée. Même si on n'échappe pas à quelques poncifs, il y a un réel effort qui est fait pour différencier les ambiances suivant les lieux et les personnages mis en scène. Pour bien s'immerger dans l'univers de la série, nous avons également droit à quelques beaux paysages et des décors changeants, même si les lieux clés sont bien rentabilisés. De manière générale, la reconstitution historique de ce monde médiéval est bien maîtrisée, dans la lignée des classiques dramas historiques coréens. Par ailleurs, il n'y a rien à redire sur les scènes d'action, où les chorégraphies des combats sont bien orchestrées et plutôt sobres dans l'ensemble. Certes, on n'échappe pas à quelques petits problèmes de raccord entre les scènes, avec quelques translations de décors malencontreuses ou des ruptures maladroites dans la correspondance entre deux perspectives d'une même scène. Mais ce ne sont que points de détail qui ne dérangent pas le téléspectateur.
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Dans l'ensemble, The Legend se révèle très sérieuse dans la forme. Finalisée jusqu'à sa bande-son, qui constitue un autre de ses points forts. L'utilisation opportune de musiques épiques ou de douces mélodies d'ambiance confère une stature supplémentaire à l'épopée suivie, contribuant à happer le téléspectateur dans le souffle du récit. Très présent, cet aspect n'est cependant pas envahissant. Hormis une chanson exceptionnellement utilisée deux ou trois fois, ce sont toujours uniquement des thèmes musicaux qui viennent accompagner les moments les plus importants.
Le casting, mené par Bae Yong Jun (Winter Sonata), est globalement convaincant, alternant entre sobriété dans le dramatique et quelques excès de théâtralisme dans un but plus comique. Je voudrais faire une mention toute particulière pour la performance de Lee Ji-Ah (qui incarne Sujini) qui est mon véritable coup de coeur. Je l'ai trouvée superbe et éclatante dans ses scènes, nous démontrant qu'elle était capable d'évoluer sur tous les registres, suivant les nécessités du scénario.
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Bilan : The Legend (Tae Wang Sa Shin Gi) est une série qui se révèle très addictive. Utilisant certains codes des dramas historiques coréens, elle va cependant plus loin que cette simple approche, en offrant un récit teinté d'éléments de Fantasy. L'attrait de la légende s'ajoute donc à la reconstitution de l'univers médiéval. Une fois rentré dans l'histoire, il est difficile de s'en détacher. La diversité des protagonistes, dotés d'une psychologie fouillée, la densité du récit, la dynamique d'ensemble qui s'en dégage... tous ces éléments contribuent à la richesse de cette fiction, dont les épisodes s'enchaînent très facilement une fois que l'on s'est laissé emporter par l'histoire. Les quelques petits soucis de cohésion à certains moments du récit ne sont que des points de détail, vite balayés, et ne gâchent pas l'appréciation d'ensemble.

Certes, mon enthousiasme ne m'empêche pas d'être réaliste. Je suppose que ce n'est pas une série destinée à être mise entre toutes les mains. Mais si vous êtes en quête de dépaysement, n'hésitez pas à tenter l'aventure. Sinon, les amateurs de science-fantasy et de dramas historiques devraient y trouver leur compte avec beaucoup de plaisir !


NOTE : 8,5/10


Un clip de la chanson qui clôture chaque épisode, avec des images des premiers épisodes de la série :