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06/05/2012

(US) The West Wing (A la Maison Blanche) - Election Night (4.07) & Process Stories (4.08)

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Aujourd'hui, j'ai eu envie de marquer la conclusion du cycle "politique" avec une review plus précise qu'à l'accoutumée - pour rester dans l'air du temps. De tous les épisodes de séries mettant en scène une journée électorale, les premiers qui me viennent à l'esprit quand je m'intéresse à ce thème sont ceux de la saison 4 de The West Wing (A la Maison Blanche). Diffusés en novembre 2002, Election Night (4.07) et Process Stories (4.08) figurent toujours parmi mes préférés. Non seulement parce qu'ils sont les représentants parfaits du style premier de la série, celui de l'ère Sorkin, mais aussi car ils sont empreints d'un profond souffle d'idéalisme et d'une tonalité résolument légère qui revigorent le téléspectateur, en laissant flotter dans l'air un optimisme résolument combatif.

Hier soir, en ressortant mes DVD, j'ai sans surprise ri et vibré comme au premier jour devant mon petit écran. Peut-être avec encore plus d'attachement, ou du moins une certaine nostalgie. Dix ans après, ces épisodes ont une dimension particulière. Avec le recul, on sait désormais que nous assistons là à la dernière ligne droite de The West Wing "1.0". Non seulement le style d'écriture changera, mais la saison 4 n'est pas uniquement celle du départ d'Aaron Sorkin, elle est aussi celle de Rob Lowe, c'est-à-dire de Sam Seaborn. Et s'il y a bien une chose que ce double épisode met en exergue, c'est cette fameuse complicité, cette solidarité inaltérable au sein du staff présidentiel. Certes d'autres dynamiques seront introduites par la suite, mais c'est une des dernières fois que l'on a à l'écran cette osmose particulière qu'est l'équilibre d'origine.

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Plus précisément, ces deux épisodes relatent la journée électorale en mettant en parallèle deux élections, la nationale - présidentielle - jouée d'avance, et le facteur d'incertitude qui va venir troubler les prévisions : l'élection locale d'un représentant de Californie (à Orange county). Dès la scène introductive, le ton du récit est immédiatement donné : Toby s'amuse à jouer avec les nerfs déjà à vif de Josh en le faisant accoster à son bureau de vote par des citoyens pro-Bartlet dont les bulletins sont tous nuls ou erronés. Car, s'il semble certain que le président sera réélu (même s'il ne faut pas le dire trop fort), tous les personnages n'en sont pas moins dans un état électoral où l'adrénaline monte, les rendant encore plus survoltés qu'à l'accoutumée. Par-delà les grands enjeux pour le pays, l'épisode s'intéresse avant tout aux intéractions de ces figures familières, leurs échanges venant rythmer cette trop longue journée de travail.

Election Night ne sera ainsi qu'une suite d'anecdotes aussi savoureuses les unes que les autres, couvrant toute la palette des tonalités de la série. Il y aura des moments franchement drôles, comme Sam tentant la chance en criant trop tôt victoire et se retrouvant à devoir exorciser le mauvais sort sous les menaces de Toby, ou encore Josh confronté à la nouvelle secrétaire du président et aux règles qu'elle entend poser pour le briefing quotidien (avec Sam passant au travers du contrôle, car il était juste très en retard à la réunion précédente). Il y aura aussi des passages totalement improbables, Donna découvrant qu'elle a voté malencontreusement pour le candidat républicain et entreprenant de chercher un électeur de Ritchie pour échanger leur vote. Et puis il y aura des scènes plus pédagogiques, propres également à la série, comme Charlie qui s'occupe de l'éducation civique accélérée d'un jeune homme qu'il va conduire jusqu'au bureau de vote.

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Mais en plus, Election Night a l'habilité de contrebalancer ces instantanés de l'aile ouest avec une autre dynamique électorale où le suspense est bien réel, celle qui se déroule en Californie. C'est d'elle que va venir la surprise et ce frisson particulier que suscitent les aléas et l'imprévisibilité de la démocratie en action. Will Bailey se démène pour son candidat pré-décédé, fort de la promesse faite un peu légèrement par Sam de prêter son nom en cas de victoire. Tout en nous offrant une leçon synthétique des pratiques des électeurs et de leurs horaires de vote selon leurs opinions, Will ira jusqu'à conjurer les éléments météorologiques pour précipiter la tempête providentielle, dans cette scène marquante où la pluie se met à tomber lorsqu'il lève les yeux au ciel, parachevant ainsi de créer les circonstances favorables à la victoire inattendue du démocrate. Une touche de folie, idéaliste et touchante, traverse alors l'écran, ne laissant pas indifférente le téléspectateur.

L'annonce des résultats s'opère en deux temps, avec un timing parfaitement géré. Election Night se conclut sur le discours triomphant du président, au son d'une chanson hautement symbolique, The Times Are A-Changing, tandis que Process Stories démarre sur l'annonce des résultats de Californie avec - surtout - le nom de Sam révélé comme potentiel candidat pour le scrutin exceptionnel qui suivra. De cette nuit de festivités démocrates que raconte le second épisode, se dégage une douce euphorie communicative. Tout apparaît à nouveau possible. L'équipe se persuade que Sam doit relever le challenge, de la même manière qu'Andrea entend revendiquer sa grossesse, hors mariage, peu importe ce qu'en dira Toby. Pour autant, le subtil équilibre vers le réel et le dramatique propre à la série se rappelle à notre souvenir avec un coup d'Etat en cours en Amérique du Sud qui nécessite une réunion de crise de l'Etat Major, champagne et petits fours circulant toujours dans les salles de réception.

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Bilan : Election Night & Process Stories sont deux épisodes magistraux. Ils représentent parfaitement les atouts du style Sorkin, cette dimension grisante, ses répliques et personnages virevoltant allégrement dans un habile mélange d'humour et de sérieux. Mais ils sont aussi parcourus par un souffle particulier, celui d'un idéalisme triomphant, communicatif, avec une nuit de victoire où tout semble - un instant - possible. C'est aussi un épisode où de multiples storylines, plus personnelles, sont en cours, alors que s'esquisse le départ de Sam. Toutes ne seront pas gérées parfaitement jusqu'au bout ; cependant, le temps d'un double épisode, tout s'emboîte, se justifie, jusqu'aux paris d'Amy sur les plus résultats d'élections les plus improbables.

Ce début de second mandat était la fin d'une époque, on ne le savait pas encore, mais le revoir fait toujours particulièrement chaud au coeur. Unique.


NOTE : 9/10


La scène d'ouverture d'Election Night (4.07) :

28/07/2011

(US) A la Maison Blanche (The West Wing) : Hommage personnel à une grande série

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Hier soir, j'ai ressorti un des premiers, si ce n'est le premier, coffret DVD de séries que j'ai acheté, pour une célébration un peu particulière. Car en ce mois de juillet 2011, je fête un anniversaire d'un genre à part : il y a dix ans, je suis devenue sériephile. Certes, je regardais déjà beaucoup de séries auparavant. Mais un tournant s'est produit cette année-là, une prise de conscience. Au cours de l'été 2001, le vendredi soir en deuxième partie de soirée, France 2 diffusa la première saison d'une série créée en 1999 et qui connaîtra en tout 7 saisons sur la chaîne américaine NBC : A la Maison Blanche (The West Wing).

C'est étrange comme la mémoire humaine fonctionne, car je me souviens encore distinctement de cette soirée estivale. Ou plutôt du frisson, entre vertige et jubilation, qui accompagna mon visionnage du pilote. C'était une euphorie diffuse, unique, une sensation que je n'avais jamais éprouvée jusqu'alors devant aucune série. Ce soir-là, je me suis dit que si la sériephilie pouvait procurer ce genre d'émotions, si elle savait proposer ce type de créations, alors elle méritait qu'on s'y investisse sérieusement.

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Lors du TV Meme, l'an dernier, je vous avais déjà confié qu'il n'y a pas de débat, ni d'hésitation, lorsqu'on me demande aujourd'hui quelle est ma série préférée : A la Maison Blanche s'impose comme une évidence. Elle m'a marqué plus que toute autre, et aucune fiction ne saura jamais rivaliser avec elle. Tout simplement parce qu'au-delà de ses qualités, il y a d'autres éléments purement conjoncturels qui ont installé cette série au sommet de mon panthéon personnel. A l'époque, j'avais 16 ans, une passion dévorante pour les États-Unis et une fascination pour la politique qui m'avait fait engloutir des rayonnages entiers de bibliographies de présidents américains. Un intérêt qui se faisait ressentir jusque dans les fictions : un des romans que j'ai le plus (re)lu cette année-là était Nulle part au monde, de Richard North Patterson.

Et puis, ma sériephilie même était encore en phase d'éveil et d'apprentissage, à la croisée des chemins. J'avais déjà regardé suffisamment de séries télévisées pour me construire un étalon qualitatif et une esquisse de sens critique, mais pas encore suffisamment pour être devenue cynique ou blasée. C'était une période charnière dans la construction de cette passion. La force d'A la Maison Blanche est d'avoir su parler aussi bien à mon coeur qu'à ma tête.

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A la Maison Blanche a donné ses plus belles lettres de noblesse à la fiction politique, intimidant et servant désormais autant d'inspiration que de repère à tout un genre télévisuel. La génération des Borgen n'a-t-elle pas grandie devant cette oeuvre ? Ancrée dans le réel, elle a su s'adresser et toucher le téléspectateur-citoyen. Grâce au savoir-faire de ses scénaristes-orfèvres, elle a réconcilié le plus désabusé d'entre nous avec les ressorts et rouages d'une politique politicienne qui a soudain retrouvé un sens. La série fera toujours preuve d'une pédagogie consciencieuse, mais jamais rébarbatrice, restant constamment accessible à un public pas forcément familier des institutions américaines.

Si A la Maison Blanche a tant marqué, c'est aussi parce qu'elle n'a jamais hésité à aborder de manière frontale des thématiques sociales importantes, centrales dans les démocraties occidentales modernes. Ses sujets ont toujours paru très concrets. Jamais timorée, elle ne s'est pas défaussée devant les thèmes les plus sensibles ou difficiles. Elle n'a jamais avancé cachée, ne dissimulant pas le fait que parler politique, c'est effectivement émettre des opinions, pas forcément consensuelles. La série a toujours assumé son discours. Ses personnages ont argumenté, construit des réflexions, esquissé des réponses et prôné des principes et des valeurs, sans pour autant jamais s'égarer dans un élan moralisateur. Elle a su trouver ce bon dosage, cet équilibre si volatile, entre réalisme et idéalisme, pour faire vibrer la fibre particulière qui se trouve en chacun de nous : sans s'abaisser à un plus petit dénominateur commun hypothétique, elle nous a au contraire tous élevé dans son sillage.

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A la Maison Blanche, c'est aussi un style d'écriture très reconnaissable et qui a forgé son identité. La série a été créée par Aaron Sorkin, un scénariste n'aimant rien tant que nous plonger dans l'envers du décor, comme l'illustrent ses autres séries, de Sports Night à Studio 60 on the Sunset Strip. Les quatre premières saisons portent indéniablement sa marque. Son départ bouleversera l'équilibre originel de l'oeuvre, mettant à mal ses fondations. Après une saison 5 hésitante et troublée, la plus faible des sept, la série retrouvera cependant ensuite une seconde vie, s'épanouissant dans un autre registre, au cours de ses deux dernières saisons qui complètent finalement pleinement le cycle politique et humain qu'elle nous aura fait vivre.

Ses fameuses "réunions pédestres", survoltées, hantant les couloirs de l'aile ouest resteront une des images caractéristiques à laquelle demeure associée la série, jusque dans cette parodie célèbre de Mad Tv qui les met en scène. En effet A la Maison Blanche est une série qui parle beaucoup, mais qui n'ennuie jamais. Ses dialogues admirablement ciselées, déclamés suivant un débit à donner le vertige, reflètent une maîtrise de l'écriture proprement jubilatoire pour un téléspectateur qui se laisse emporter. Alternant le sérieux mais aussi l'humour, cette série m'aura fait pleurer de tristesse, mais aussi de rire. La dureté des drames de certains épisodes trouve son pendant parfait dans la légèreté d'autres (ah, le plan secret de Josh pour lutter contre l'inflation !). S'épanouissant dans cette narration sur-dynamique, la série requiert une concentration de tous les instants pour être visionnée en version originale. Mais voyez-vous, ce sont justement les scénaristes de ce calibre, Aaron Sorkin, David E. Kelley, Amy Sherman-Palladino qui m'ont fait devenir sériephile.

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Souvent brillante par sa façon d'aborder ses sujets, A la Maison Blanche n'en a pas pour autant négligé sa dimension humaine. Si elle a pu fidéliser les téléspectateurs, c'est en partie grâce à une galerie de personnages, hauts en couleur et attachants, qui auront tous su s'imposer. Certes, tout ne fut pas toujours parfait. Mais le point fort de la série aura été de savoir générer un véritable esprit d'équipe, en installant une complémentarité et, surtout, une complicité naturelle et instinctive à l'écran au sein de ce groupe si soudé et vivant. Les relations de travail, mais aussi d'amitié, ont toujours efficacement gérées ; et si les rapports plus sentimentaux ont pu être plus hésitants, voire maladroits, la série aura su mener à terme et récompenser ses plus fervents shippers, bouclant ainsi la boucle de la plus satisfaisante des manières.

Autour de cette figure présidentielle quasi-idéale, mais pourtant très humaine et donc faillible, incarnée Jed Bartlet, A la Maison Blanche rassemble un staff, porté par une dynamique propre, que l'on prendra toujours plaisir à retrouver. Leo, Josh, Donna, C.J, Toby, Sam, Charlie... Ils ont tous eu une place. Leo fut la voix de la sagesse, C.J., un modèle de pragmatisme et de sang-froid. Josh représentera l'arrogance et la brillance des élites démocrates, tandis que le caractère de Toby restera légendaire. La pointe d'idéalisme de Sam, le bon sens de Donna, le regard neuf de Charlie, étranger à cette sphère politique, constitueront autant de portes d'entrée pour le téléspectateur, de points d'accroche dans une fiction qui aura compris qu'il ne faut jamais perdre de vue l'importance des personnages, qui sont le coeur d'une oeuvre, aussi solide que puisse être le sujet de départ.

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Par ailleurs, la force d'A la Maison Blanche a aussi été de réunir un casting cinq étoiles qui saura proposer une interprétation des plus solides, à la hauteur des scénarios. Débutant avec un groupe de rêve, composé de Martin Sheen, John Spencer (La loi de Los Angeles), Allison Janney (Mr Sunshine), Bradley Whitford (Studio 60 on the Sunset Strip, The Good Guys), Richard Schiff (Past life), Rob Lowe (Brothers & Sisters, Parks & Recreation), Janel Moloney et Dulé Hill (Psych), on y croisera dans les saisons suivantes Stockard Channing (Out of Practice), Joshua Malina (Sports Night), Jimmy Smits (La loi de Los Angeles, New York Police Blues, Cane), Kristin Chenoweth (Pushing Daisies) ou encore Alan Alda.

Mais A la Maison Blanche, ce fut aussi de très nombreuses apparitions en guest-stars de visages déjà familiers du petit écran ou qui le deviendraient plus tard : Mary-Louise Parker (Weeds), Edward James Olmos (Battlestar Galactica), Elisabeth Moss (Mad Men), Gary Cole ou encore Jorja Fox (Les Experts) et Emily Procter (Les Experts Miami).

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Enfin, et c'est aussi pour cela qu'elle est si importante : A la Maison Blanche demeure irrémédiablement attachée à ce tournant du XXIe siècle aux États-Unis. Elle n'est pas vieille, puisqu'elle a été diffusée de 1999 à 2006. Mais elle est pourtant précisément datée et conservera toujours le parfum de son époque. Tour à tour contre-utopie, puis reflet-écho de la société américaine, la fiction a su rejoindre ou croiser le fer avec la réalité, supportant les comparaisons comme peu de fictions en sont capables. Elle s'est imposée et a marqué dans un contexte particulier. Si elle sera à jamais associée à Jed Bartlet, c'est aussi parce que l'idéalisation de cette figure sera sortie grandie du contraste avec la réalité offerte par son homologue texan d'alors. Plus généralement, c'est la série qui a su proposer le didactique et pédagogique Isaac & Ismaël dans les semaines immédiates qui ont suivi le 11 septembre.

Cependant, A la Maison Blanche n'a pas été seulement un refuge utopique démocrate dans une Amérique républicaine, ou une illustration de la supposée existence de deux Amériques, elle a aussi été, jusqu'au bout, une anticipation de politique fiction aboutie et, en un sens, visionnaire. Car cette série s'est conclu avec l'accession à la présidence de Matt Santos, figure construite sur le modèle et en s'inspirant de celui qui était alors seulement sénateur de l'Illinois, un certain Barak Obama. Tous les parallèles facilement identifiables entre ces deux politiciens, le premier fictif, le second réel, les verront partager jusqu'à leur destinée, empruntant la même route qui les conduira jusqu'à la Maison Blanche. En 2006, sur NBC, Matt Santos sera élu président des Etats-Unis, dans la dernière et septième saison de la série qui tira ainsi sa révérence ; en 2008, viendra le tour de Barak Obama.

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Bilan : Brillante et inspirante, traversée par une dynamique grisante, A la Maison Blanche est une grande série. De celles qui marquent durablement non seulement le petit écran, mais aussi le genre qu'elle a investi, démontrant toute l'étendue et les possibilités offertes par la fiction politique. Pour sa représentation de la société américaine, pour son parfum d'idéalisme qui aura su redonner foi au téléspectateur-citoyen, pour tous ces instants jubilatoires qu'elle nous aura faits vivre, pour ces discours que l'on aurait tant voulus, nous aussi, applaudir, A la Maison Blanche demeure incontournable, un de ces phares du paysage téléphagique.


Je n'ai plus 16 ans. J'ai vu depuis, au cours des années qui ont suivi, des centaines, des milliers de séries... Ma consommation télévisuelle actuelle n'a plus grand chose à voir avec mes programmations d'alors à prédominance américaine NBC-ienne. Mais je vais vous confier un secret : hier soir, j'ai re-visionné le pilote d'A la Maison Blanche et une chaleur particulière a envahi mon coeur. Il y a dix ans, je suis devenue sériephile. Et j'en suis toujours fière.


NOTE : 9,5/10


Le générique de la série :

22/05/2010

(Pilote US) The Good Guys : le retour des buddy cop shows des années 80

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Toutes les séries des grands networks US se concluent les unes après les autres en cette fin de mois de mai (il sera bientôt l'heure de dresser un bilan de la saison écoulée), tandis que leurs consoeurs estivales s'apprêtent à prendre le relais, principalement sur les chaînes câblées. Cependant, certaines chaînes insufflent encore un soupçon de nouveauté, ou plutôt d'inédits (le terme "nouveauté" étant, par bien des côtés, peu en rapport avec la réalité d'une série comme The Good Guys). C'est le cas de la Fox, sur laquelle a démarré le 19 mai 2010, The Good Guys, un cop show tout droit sorti des années 80, prouvant une nouvelle fois ce revival des fictions policières à l'ancienne, plaçant les personnages en son centre et délaissant le scientifique déshumanisé qu'avait insufflé la franchise CSI au paysage téléphagique.

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The Good Guys nous plonge dans le quotidien d'un duo d'enquêteurs de la police de Dallas. Reprenant à son compte un schéma invariable décliné depuis des décennies, les deux personnages principaux ne pourraient être plus opposés : tout les différencie, de leur façon d'être à leur conception de leur métier. Pourtant, la série va logiquement nous montrer qu'au-delà des affrontements inévitables et des clashs réguliers que l'association génère, ils forment aussi une équipe très atypique, vaguement improbable, mais finalement complémentaire.

Avec un sens inné pour fâcher ses supérieurs, assorti d'une certaine arrogance et d'une tendance à respecter scrupuleusement les règlements, Jack Bailey est un jeune carriériste qui a énervé suffisamment de monde dans son département pour se retrouver à devoir faire équipe avec le vétéran du service, relique d'un autre temps avec laquelle personne ne souhaite s'associer, Dan Stark. Ce dernier est un policier déphasé, perdu dans le souvenir des aventures de ses folles premières années dans les forces de l'ordre, qui a oublié de rentrer dans le XXIe siècle. S'il a conservé son badge, en dépit de ses écarts, notamment en boissons alcoolisées, c'est en raison d'une gloire passée : dans les années 80, lui et son partenaire ont sauvé la vie du fils du gouverneur. Hollywood en a fait un film, son ancien partenaire une crise de nerfs, et Dan Stark est resté, imperturbabe et immuable, à son poste.

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Le concept de base de The Good Guys laissait entrevoir une série se réappropriant de vieilles recettes. La promo entourant la série annonçait quelque chose d'assez décalé, la Fox ayant capitalisé plus que de raison sur la fameuse moustache de Dan Stark. Le résultat se révèle au final rempli d'une autodérision plutôt lourde, où le décalage et le ridicule des situations sont poussés jusqu'à l'absurde. Jouant sur ses codes scénaristiques, s'amusant des clichés qu'elle convoque et empile à l'écran, ce pilote finit cependant par faire frôler l'indigestion au téléspectateur. Car c'est sans finesse, et avec une complaisance assez grasse, que la série verse dans un second degré qui, s'il n'est pas forcément désagréable à suivre, ne brille pas par son originalité et ni les surprises qu'il pourrait réserver au téléspectateur. The Good Guys exploite jusqu'à l'excès son côté kitsh, sur la forme comme sur le fond, de sa réalisation jusqu'à son traitement des intrigues mises en scène.

La relation entre les deux co-équipiers évolue avec une prévisibilité déconcertante au fil de l'épisode, de la défiance jusqu'à une relative compréhension. Chacun des personnages force sur ses traits de caractère, Dan Stark symbolisant, jusqu'au bout de sa moustache, le "vieux de la vieille", allergique aux ordinateurs et à toute technologie moderne, resté coincé dans les méthodes ayant cours deux décennies auparavant et idéalisant cette période jusqu'à la caricature. A ses côtés, Jack Bailey promène ses faux airs de gendre idéal, bien sous tout rapport, avec l'assurance d'une jeunesse qui va se retrouver confrontée aux limites de ses vérités sur le travail de policier. Si cela donne une ambiance inclassable, pas déplaisante, l'accumulation de ces effets finit par peser.

The Good Guys replace également les délinquants au centre du jeu, leur appliquant le même traitement que pour ses protagonistes principaux. Cette forme d'autodérision du genre policier, ne prenant pas au sérieux les évènements relatés, même quand il s'agit de fusillade, m'a un peu rappelé, cette saison, la manière dont Justified met en scène ses propres criminels. Seulement, là où la série de FX montre une certaine habileté et finesse pour manier cette tonalité décalée, y recourrant avec parcimonie et maîtrise, The Good Guys s'y complaît en versant dans une caricature de la caricature.

L'appréciation reste ensuite très subjective. Tout dépend du téléspectateur : est-il prêt à jouer le jeu et à suivre les scénaristes sur cette voie ? Pour ma part, j'avoue que c'était un peu too much.

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Sur le fond, comme sur la forme, The Good Guys apparaît donc comme une série hors de son époque, à l'image de Dan Stark. Les scénaristes ont voulu jouer jusqu'à l'excès sur ce parti pris ; ils obtiennent une fiction de pure détente qui ne sollicite pas le cerveau fatigué du téléspectateur rentrant du travail. La narration aurait cependant pu être un peu plus fluide ; car la série s'amuse plus que de raison à faire des retours en arrière, pour expliquer comment tel ou tel personnage en est arrivé là. Cela renforce cette impression d'absence de sérieux ; la légende nous indiquant à l'écran que nous repartons en arrière s'accompagnant d'ailleurs d'un coup de feu, bruitage qui prête à sourire ou à se dire qu'ils en font vraiment trop.

Je vous avoue que, dès le départ, je me doutais que The Good Guys ne serait pas trop ma tasse de thé. Si j'ai tenu à visionner au moins le pilote, c'est autant pour dépasser mes a priori et faire preuve d'une saine curiosité sériephile, que pour retrouver les membres de son casting dans mon petit écran. Il faut savoir que Bradley Whitford et moi, c'est une histoire qui a vraiment débuté un vendredi soir de juillet 2001, sur France 2 ; quand il releva une tête pas réveillée, assommée par sa gueule de bois, du bureau sur lequel il venait de passer sa nuit, l'épée de Damoclés d'un renvoi pesant sur sa tête. Oui, il s'agissait alors du pilote d'A la Maison Blanche ; et Josh Lyman demeurera toujours pour moi une des figures les plus symboliques d'une série qui restera sans doute à jamais comme une de mes préférées, pour tout ce qu'elle a pu apporter à ma téléphagie. Par conséquent, il m'était inconcevable de ne pas au moins regarder le premier épisode de The Good Guys. En souvenir du "bon vieux temps", pour une production qui se complaît tellement à en appeler à la fibre nostalgique du téléspectateur. Aux côtés de Bradley Whitford, qui en fait peut-être un peu trop en Dan Stark, "vétéran des vétérans", on retrouve Colin Hanks (Roswell) qui correspond parfaitement à l'image de Jack Bailey. Enfin, la petite touche féminine indispensable est assurée par Diana-Maria Riva (Side ordre of life) et Jenny Wade (Reaper).

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Bilan : The Good Guys est une série plutôt adaptée à la période estivale en ce sens où elle est une invitation claire à se divertir sans réfléchir. Elle se place volontairement dans le registre de l'excès, se complaisant souvent dans une autodérision grasse. Par son cadre très 80s', elle entreprend de surfer sur la fibre nostalgique du téléspectateur qui aurait gardé quelques doux souvenirs des rodéos motorisés et fusillades multiples du petit écran de cette décennie. Malheureusement, tout cela tourne un peu à vide, se laissant submerger par une course à l'absurde qui peut lasser le téléspectateur.
Au final, le visionnage du pilote de The Good Guys se justifie surtout par son casting. La seule présence de Bradley Whitford (avec moustache !) vaut bien un bonus de +1,5 points sur la note finale attribuée à l'épisode. En souvenir du bon vieux temps. Mais la suite sera sans moi.


NOTE : 4/10


La bande-annonce de la série :