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28/10/2012

(FR) Un Village français, saison 4 : une chronique ordinaire dense et marquante de la France de 1942

 
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Un de mes plus intéressants rattrapages de séries françaises effectué cette année aura sans conteste été la découverte de Un Village français. Une oeuvre au sujet fort, ambitieux, qui gagne en maîtrise, en intensité et en qualité tout au long des trois premières saisons sur lesquelles j'avais eu l'occasion de revenir dans un bilan rédigé en début d'année. Depuis, la quatrième saison 4 a été diffusée au printemps 2012. J'ai investi dans le coffret DVD les yeux fermés. Avec raison.

Elle confirme en effet la place de la série parmi ces fictions qui démontrent que, oui, la France est capable de faire de bonnes, voire très bonnes, séries, exploitant pleinement le format télé et sachant les faire mûrir au fil des épisodes. En attendant la cinquième saison, annoncée pour février 2013 sur France 3 (au tournage de laquelle un nouveau magazine français sur les séries, sorti cette semaine, Preview, consacre d'ailleurs un reportage), j'ai achevé mon visionnage de la quatrième. Il est donc temps de vous expliquer pourquoi Un Village français mérite, cette année encore plus particulièrement, votre attention.

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La saison 4 d'Un Village français continue de nous faire progresser dans la chronologie de la Seconde Guerre Mondiale, durant la période de l'Occupation, abordant cette fois l'année 1942. Se voulant représentative de tous les enjeux d'alors, la saison se découpe en deux parties, séparées par plusieurs mois, mais se déroulant sur des courtes périodes de quelques jours seulement.

La première permet d'évoquer le sort des juifs : Villeneuve accueillant en transit un convoi de juifs étrangers déplacés par les Allemands, elle devient le théâtre d'arrestations pour satisfaire aux demandes de l'occupant, tandis que l'école doit faire face à l'hébergement provisoire de ces détenus dans des conditions difficiles. A la mi-saison, ils partent finalement pour le camp de Drancy, sans savoir ce qui les attend. Ensuite, la série se recentre sur la question des réseaux de résistance à l'intérieur du pays, mais aussi en coordination avec la France libre dont le parachutage d'un radio venu de Londres rappelle l'existence. L'enjeu devient alors celui d'un rapprochement entre les différents mouvements issus de toutes les tendances politiques, des communistes aux gaullistes, tandis que la police française et les autorités allemandes redoublent d'effort pour les exposer. 

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Cette saison 4 s'inscrit dans la droite ligne de l'équilibre trouvé au fil des précédentes saisons. Tout en n'occultant jamais un arrière-plan historique où les grands évènements nous parviennent par quelques mots échangés à la préfecture, mais aussi par l'intermédiaire de Radio Londres, Un Village français reste centrée sur le sort de ses figures locales devenues familières. Les stéréotypes des débuts ont depuis longtemps été dépassés, les psychologies se sont affinées, révelant des complexités, voire des ambivalences, qui ont humanisé des personnages ayant gagné en épaisseur. On sait chacun caractérisé par une ambition, une prudence, un engagement ou un humanisme particulier. Désormais, partant de cette base, la série nous relate leurs réactions face aux nouveaux développements et tournants pris par l'occupation : comment, en cohérence avec eux-mêmes, mais aussi avec les limites de leurs caractères ou de leurs convictions, vont-ils faire face aux évènements ? C'est sur ce plan que le parti pris de la série est très intéressant. Car c'est sans le moindre recul, ni toujours réelle compréhension des enjeux, que chacun est amené à se positionner.

Faire de Villeneuve un lieu de transit provisoire pour des détenus juifs est ainsi l'occasion de se replacer du point de vue de 1942. Au-delà de l'antisémitisme ambiant, à ce moment-là, ni les juifs, ni les habitants de la ville ne peuvent imaginer ou mesurer ce vers quoi ils se dirigent. Or l'ignorance des protagonistes contraste avec la connaissance du téléspectateur. La gorge se noue imperceptiblement en voyant Daniel Larcher s'agiter pour mettre à disposition un local communal afin de tenter de soigner le quotidien immédiat des juifs, devenant sans le comprendre un maillon parmi tant d'autres qui facilitent par-là même le bon déroulement de la déportation en cours. Pareillement, les échanges à l'intérieur de l'école et les efforts faits par chacun pour comprendre et rationaliser ce qu'il se passe n'en sont que plus marquants. Il faut ici saluer la qualité de l'écriture qui conserve toujours, dans ces moments-là, une sobriété bien dosée, même face à des scènes où le drame et le déchirement pointent.

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Si les personnages d'Un Village français sonnent souvent authentiques et réels, c'est justement grâce à leurs paradoxes et à leurs failles. Ils évoluent, pour la plupart, dans une zone grise, et seul l'avenir permettra de juger les décisions qu'ils ont prises, sur un plan aussi bien moral que légal ou politique. La saison offre à un certain nombre d'intéressants développements, fidèles à eux-mêmes, mais jamais figés non plus dans leurs positions. Parmi les différentes storylines, la seule sur laquelle je garde des réserves est celle de la relation entre Marchetti et Rita, une histoire d'amour impossible que je n'ai jamais réussie à trouver crédible. Toujours est-il que la série a conservé une dimension chorale qui fait sa force, avec une caractérisation cohérente des personnages particulièrement bien mise en valeur au cours des passages de crise les plus déterminants. Les conditions de la chute du réseau gaulliste, avec ce piège qui se referme sur la ferme de rendez-vous, illustrent cette qualité.

Par ailleurs, la saison 4 aura été celle de la confirmation pour ce qui est de la maîtrise du rythme narratif. Le passage à du vrai feuilletonnant en saison 3 avait constitué un déclic pour la série, soudain capable de susciter une attente chez un téléspectateur impatient de découvrir la suite. Le même savoir-faire se retrouve : le récit est dense, sans temps mort, avec une narration homogène. Les chutes de fin en forme de cliffhanger permettent un enchaînement naturel des épisodes. La maturité de la fiction se perçoit également dans sa gestion de ses grandes trames. Par exemple, on assiste au cours de la première partie relative aux juifs à un glissement inexorable, impeccablement géré, allant crescendo dans une tonalité de plus en plus glaçante. Tout d'abord, la déportation est assimilée à une simple tâche administrative et policière. Puis surgissent rapidement la réalité d'enjeux humanitaires pressants. Mais c'est l'ordre de séparation des enfants, et enfin l'arrivée des SS, qui achèvent le basculement dans l'horreur, confirmée par l'annonce finale de la destination du groupe : Drancy. Une escalade que la série sait bien construire.

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Enfin, outre sa solidité d'écriture et l'ambition de son sujet, Un Village français bénéficie également d'un casting dans l'ensemble très bon et convaincant, dont les interprétations permettent de donner une force supplémentaire aux intrigues portées à l'écran. Cette saison 4 rassemble des acteurs principaux fidèles à eux-mêmes et maîtrisant parfaitement leurs personnages, même si, les storylines variant, tous n'ont pas la même exposition que par le passé (Thierry Godard, par exemple, est plus en retrait). Quant à ceux qui arrivent au cours de cette saison, ou sont seulement de passage, ils trouvent aussi très vite le ton juste. En dépit d'une histoire un peu artificielle, Axelle Maricq apporte une belle fraîcheur à l'écran dans son rôle de Rita. Philippe Résimont rend instantanément détestable personnage de Chasagne, un des rares à être présenté sans la moindre ambivalence. Nathalie Bienaimé se sera affirmée en se rapprochant d'un Raymond Schwartz moins présent. Et puis, en radio parachuté de Londres, je ne dis jamais non à quelques épisodes comprenant Jérôme Robart

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Bilan : Avec un récit dense et un rythme de narration très bien maîtrisé, la saison 4 de Un Village français marque une nouvelle étape dans la maturation d'une série qui semble désormais prendre pleinement la mesure de la force et de l'ambition de son sujet. Capable de susciter une vraie implication émotionnelle grâce à l'humanité de ses personnages, la série conserve dans le même temps l'approche pleine de sobriété et de retenue qui fait sa force, lui permettant de traiter avec beaucoup de justesse de thèmes difficiles. Cette saison 4 aura été une saison pleine et solide, confirmant la progression constante d'une oeuvre parvenue à maturité.

En conclusion, si cela n'est pas déjà fait, un rattrapage s'impose avant février prochain.


NOTE : 8/10


La bande-annonce de la saison :

27/04/2012

(SUI) "10" : un intrigant thriller sur fond de partie de poker

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My Télé is Rich! pose ses valises dans un nouveau pays européen aujourd'hui... la Suisse ! Certes, une destination peut-être pas aussi exotique que certaines des découvertes précédentes, mais l'occasion de me rappeler que la fiction francophone en dehors des frontières françaises mérite également le détour. Il y avait déjà eu CROM en début d'année toujours en Suisse ; mais je pense aussi au Québec, sur lequel j'entends des échos très positifs au sujet de séries comme Apparences. Pour en revenir à la Suisse, j'ai découvert "10" par hasard (je blâme le fameux secret suisse), alors que je me renseignais sur des fictions sur le thème du jeu. Et j'ai été doublement agréablement surprise : non seulement le pilote au parfum de thriller m'a fortement intrigué, mais en plus, en maître de cérémonie, on retrouve Jérôme Robart (et vous savez combien j'apprécie cet acteur). 

Conçue à partir d'une idée de Christophe Marzal, associé pour l'écriture du scénario à Christian François et Jean-Laurent Chautems, "10" a été diffusée sur la TSR du 21 novembre au 19 décembre 2010. Elle comporte 10 épisodes, de 26 minutes chacun. Si je décide de vous en parler aujourd'hui, alors que je n'ai vu que les quatre premiers épisodes, c'est surtout parce qu'elle est actuellement diffusée en France sur TV5 Monde depuis lundi dernier (le 23 avril) et jusqu'au 4 mai prochain. Or cette chaîne dispose d'un service de catch-up qui pourra donc permettre aux lecteurs curieux de rattraper ces épisodes, qui sont encore disponibles (jusqu'à lundi pour le premier) sur son site (par ici pour le pilote), avant d'attendre la suite dans le courant de la semaine prochaine.

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Quelque part dans Genève, un 31 décembre, dix personnes se retrouvent dans un appartement a priori anonyme. Si certains se connaissent, la plupart ne sont pas amis. Ils ne sont pas non venus réveillonner, mais pratiquer une activité officiellement illégale dans ce cadre : jouer au poker. Vincent, un entrepreneur en informatique, est un organisateur habituel de parties clandestines. En plus de lui, huit joueurs et un croupier, professeur de poker, s'assoient autour de la table. Suivant les règles que chacun a accepté, l'enjeu est de taille : le vainqueur empochera l'intégralité des mises, un demi-million de francs suisses, tandis que les autres perdront leur apport de départ.

Mais très vite, il apparaît que derrière les apparences, la partie comporte des enjeux qui dépassent le cadre du simple jeu d'argent, avec son lot de suspense et sa part de chance. Les dix amateurs de poker ne sont pas seuls ; ils sont en effet surveillés par des caméras installées par la police fédérale. Cette dernière ne s'intéresse pas à ces parties clandestines, elle enquête sur une affaire d'espionnage industriel. Or la transaction de documents doit normalement avoir lieu ce soir. Qui est impliqué ? Chaque participant cache des secrets et des motivations plus ou moins troubles... Et à mesure que la nuit avance, la tension monte autour de la table...

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Plus qu'une série sur le poker, "10" est une fiction à suspense qui nous immerge dans un prenant quasi-huis clos, celui de l'appartement dans lequel la partie se déroule. Comme ses protagonistes, la série ne dévoile ses cartes et ses réels enjeux qu'avec parcimonie. Construisant peu à peu son suspense, elle intrigue, interpelle un téléspectateur vite intéressé par ce curieux mélange des genres, entre ces confrontations cartes en main et l'espionnage industriel en toile de fond. Cette fiction investit d'autant mieux le registre du thriller qu'elle exploite pleinement la durée relativement courte de ses épisodes (seulement 25 minutes). Ne pouvant prendre le temps de tergiverser, elle va à l'essentiel pour délivrer un récit dense, sans temps mort. La structure suivie par chaque épisode est d'une grande efficacité : une accélération sur la fin lui permet de se terminer en quasi-cliffhanger, dévoilant une nouvelle pièce du puzzle ou introduisant un bouleversement potentiel, s'assurant ainsi de la fidélité d'un téléspectateur qui ne voit pas l'épisode passer.

L'ensemble est d'autant plus intéressant qu'il ne se réduit pas à cette sourde tension qui s'installe. Il apparaît très vite que la partie de poker va servir de révélateur aux différents joueurs. Recourrant à de brefs flashback (sans jamais en abuser), "10" nous relate les évènements qui ont conduit chacun derrière la table de jeu en ce 31 décembre, explorant leurs motivations réelles et les arrière-pensées qu'ils peuvent nourrir. C'est une galerie de portraits plus ou moins troubles qui s'esquisse, dépeignant des personnages avec leur part de mystères et de certitudes, avec aussi les non-dits et les apparences sur lesquels ils jouent : que se passe-t-il dans la tête de ce diplomate chinois, de cette grand-mère si déterminée à ne pas perdre, de ce bègue en quête d'assurance, de cette apprentie comédienne ou de ce jeune homme à lunettes de soleil ne décrochant pas de son téléphone ? Evoluant dans une zone grise chargée d'ambivalences, "10" est un puzzle intrigant, une énigme que le téléspectateur entend bien résoudre.

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L'ambition et la volonté d'expérimenter et d'explorer les atouts de son format télévisuel se perçoivent également sur la forme. La réalisation confiée à Jean-Laurent Chautems insuffle volontairement une certaine tension : la caméra se fait nerveuse ; la photographie est sombre, avec une teinte dominée par des couleurs froides. "10" bénéficie également d'une bande-son intéressante, parfois un peu trop omniprésente pour certaines scènes, mais qui a le mérite de bien correspondre à l'ambiance et de poser l'identité visuelle et musicale de la série. Le thème du générique, rythmé et vite entêtant, en est bien représentatif.

Enfin, "10" bénéficie d'un casting homogène et solide. En orchestrateur de la partie, Jérôme Robart (Reporters, Nicolas le Floch) est (comme toujours) très charismatique et convaincant, n'ayant pas son pareil pour retranscrire l'ambivalence et le côté joueur d'un personnage qui semble miser gros dans cette soirée. A ses côtés, le téléspectateur français reconnaîtra également Bruno Todeschini (prochainement à l'affiche d'Odysseus sur Arte). Et, pour incarner le reste de cette galerie de protagonistes très dissemblables, la série rassemble des acteurs qui trouvent vite leur place, comme Natacha Koutchoumov, Philippe Mathey, Paulo Dos Santos, Séverine Bujard, Alice Rey, Bastien Semenzato, Moussa Maaskri, Sifan Shao, Sophie Lukasik, Martin Rapold, Rachel Gordy ou encore Isabelle Caillat.

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Bilan : Ficton sur le jeu dont l'intrigue dépasse vite ce seul cadre, "10" est une série intrigante, un huis clos aux accents de thriller dont le suspense grandit peu à peu. Bénéficiant d'un fil rouge consistant - l'enquête fédérale d'espionnage industriel -, la série surprend par la richesse des thématiques qu'elle est capable de mener de front en seulement 25 minutes, s'intéressant non seulement au déroulement de la partie et aux coulisses policières, mais s'arrêtant aussi sur chacun des joueurs. C'est donc une série très intéressante qui se regarde avec plaisir.

Une curiosité suisse (!) à tester : Episode 1 sur le site de TV5Monde+.


NOTE : 7,25/10


La bande-annonce de la série :

09/03/2012

(FR) Reporters, saisons 1 & 2 : le journalisme sous toutes ses facettes

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Comme annoncé en début d'année, j'ai donc enfin entamé un grand cycle de découvertes et rattrapages de séries françaises. Je reconnais ne pas avoir le réflexe de m'installer spontanément devant mon petit écran national, mais pour corriger mes préconceptions, il faut sans doute commencer par visionner ce qu'il a pu proposer de convaincant ces dernières années. C'est ainsi qu'aujourd'hui, c'est un petit évènement sur My Télé is Rich!, car c'est la première fois qu'est évoquée une série française contemporaine (comprendre : "non historique").

Reporters fait partie des productions originales de Canal + (sur lesquelles il est grand temps que je me penche). Diffusée de 2007 à 2009, elle comporte deux saisons, une première de 8 épisodes, une seconde de 10. Créée par Olivier Kohn, sa première saison avait remporté le Fipa d'or du meilleur scénario, "séries et feuilletons", en 2007. Je me suis vraiment investie dans cette série qui se sera révélée très intéressante. Et je reconnais d'ailleurs avec le recul que ce fut une mauvaise idée de l'avoir débutée la semaine où commençait la diffusion des Hommes de l'ombre, car la deuxième a quelque peu peiné devant la comparaison. Mais l'important, c'est que voici une série française que je conseille ! 

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Reporters nous plonge dans le quotidien de plusieurs journalistes, nous proposant d'accompagner une galerie de personnages représentatifs de toutes les facettes de ce métier. Du grand reporter d'investigation au présentateur de JT, du journaliste politique habitué des arcanes du pouvoir au chroniqueur de faits divers, du rédacteur en chef d'un grand journal au président d'une chaîne de télévision, la série dresse un portrait complet et riche de cette profession. Toutes ces individualités mises en scène, certaines consensuelles, d'autres beaucoup plus clivantes, vont contribuer à forger autant d'instantanés et de portraits d'une profession très hétéroclyte.

Plus généralement, la série va nous faire vivre de longues enquêtes aux enjeux explosifs, des dilemmes éthiques constants ou encore tous ces arbitrages financiers déterminants normalement passés sous silence. Elle  décrit et met en lumière toutes les influences, potentiellement divergentes, qui sont à l'oeuvre à la source et dans le traitement de l'information. Dans un milieu où l'humain côtoie les faits, les sensibilités et les croisades personnelles jouent, tout autant que les égos et les enjeux de pouvoir... Et le tableau d'ensemble est très prenant.   

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Le premier aspect qui frappe dans Reporters, c'est sans doute l'ambition avec laquelle la série s'approprie son sujet. Elle entreprend de s'intéresser à toutes les facettes du métier de journaliste, et l'expose sous toutes ses coutures. La richesse des thématiques abordées impressionne d'ailleurs d'emblée le téléspectateur : à la différence d'une série comme Pressa qui optait pour une radiographie d'un seul type de journalisme (la presse tabloïd), Reporters évoque la profession dans toute sa diversité, et aussi dans toutes les problématiques qui peuvent s'y rattacher, aussi bien sur le terrain, que sur un plan économique ou encore moral. Si parfois la multiplicité des intrigues peut provoquer quelques flottements dans la cohésion globale de certains épisodes, la plupart du temps, la série parvient à un résultat homogène et consistant. 

Les thèmes évoqués offrent donc une large palette d'angles d'approche : la connivence des hautes sphères industrielles et du pouvoir, la loi de l'audimat, le danger du reportage de guerre, la protection des sources, le combat pour le sauvetage d'un journal et pour préserver l'indépendance de sa ligne éditoriale, les menaces et intimidations, tout semble y être... De manière générale, la série s'intéresse au traitement et à l'économie de l'information, mais aussi au facteur humain qui va irrémédiablement jouer. Elle met en lumière cette schizophrénie constante qui parcourt ce métier, engendrée par tous les conflits d'intérêts provoqués et au sein desquels les journalistes doivent arbitrer. Reporters dépeint ainsi avec détails un milieu qui oscille en permanence entre concurrences et solidarités, entre ambitions personnelles et nécessaires collaborations pragmatiques. Initialement présenté de relativement académique et presque binaire, il faut aussi noter que la vision proposée se nuancera considérablement au fil de la série.

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En complément de cette richesse, Reporters retient également l'attention par le parfum de réalisme que perçoit le téléspectateur dans ses scénarios. Les sources d'inspiration sont en effet proches et clairement identifiables, si bien que les parallèles se font naturellement. Dans la saison 1, on assiste ainsi à la mobilisation de toute une profession suite à la prise d'otages de deux journalistes en Tchétchénie. Certaines situations sont même sourcées : le marasme économique de la presse écrite et les coulisses de ce journal qui lutte pour sa survie en espérant un repreneur qui lui laisse sa liberté, c'est en filigrane Libération qui est évoqué. Mais Reporters va encore plus loin, anticipant et se faisant seulement après rejoindre par la réalité, avec son arc qui constitue le fil rouge de la saison 2 : un attentat commis sur fond d'arrêt de rétrocommissions occultes, sur lequel pèse désormais l'ombre de l'affaire Karachi. Tout cela renforce l'impression d'authenticité de la série, et lui confère une portée supplémentaire.

Pour donner corps à l'ensemble, Reporters mêle habilement le feuilletonnant comportant un grand arc s'étalant sur toute la saison, et des intrigues bouclées sur un seul épisode. La saison 1 contient plus de loners que la seconde, qui voit le feuilletonant se généraliser à toutes les intrigues. Si la série n'échappe pas à quelques inégalités dans la narration, l'ensemble se révèle convaincant. Initialement relativement convenue dans la distribution des rôles au sein des personnages, le récit gagne progressivement en nuance, en ambiguïté et en complexité. La seconde saison sera sur ce plan celle de la maturité, se dégageant de tout manichéisme pour proposer un envers des coulisses du pouvoir que je n'avais jamais vu aussi finement capturé dans une série française que durant le dernier épisode de Reporters. C'est bien simple : la conclusion de la série est un petit bijou, à mettre entre les mains de tout scénariste ambitionnant d'évoquer le pouvoir, et prouvant que, oui, une fiction française peut parvenir à ce niveau de subtilité rare. J'en aurais presque applaudi devant ma télévision, si je n'avais pas eu dans le même temps le coeur tellement serré en sachant que j'assistais à la fin de la série.

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Le dynamisme qui parcourt Reporters se retrouve également dans la mise en scène. Caméra à l'épaule, la réalisation est très nerveuse, parfois même un peu trop ; j'ai mis quelques épisodes à m'y habituer. Cependant, cette approche se justifie par une volonté de proximité qui semble avoir été une constante de l'écriture de cette série : on retrouve une proximité par rapport au terrain, aux situations dépeintes, et plus globalement à toute cette galerie de personnages qui tentent de se faire une place.

Dans cette optique, le dernier attrait de Reporters - et non des moindres - réside dans un casting efficacement dirigé, très homogène, où tous les rôles principaux sont très convaincants. Il faut préciser que, de la première à la seconde saison, le personnage principal autour duquel tourne le fil rouge change : à Jérôme Robart (qui a un rôle moins important dans la deuxième) succèdera Grégori Dérangère. Dans le registre du journaliste prêt à tout, n'hésitant pas à provoquer et à dépasser certaines lignes jaunes, le premier s'en tire admirablement bien (mais vous savez combien j'apprécie cet acteur). Quant à Grégori Dérangère, dans un registre plus classique d'enquêteur qui dépasse le monde policé dans lequel il s'était cantonné, il s'avère également très bon. 

A leurs côtés, il faut saluer Anne Coesens qui, avec sobriété et fermeté, incarne une femme qui sait trouver ses marques dans un milieu ultra-concurrentiel. Patrick Bouchitey est parfait pour jouer ce "vieux de la vieille", à la plume envoûtante, qui respire un cocktail alcoolisé de faits divers, figure directement issue de polars noirs. Aïssatou Diop saura également progressivement trouver le ton juste, à l'image de son personnage, dans les coulisses et sur le plateau de TV2F. Parmi le casting principal, il convient également de citer Christine Boisson, en directrice de l'information qui doit gérer d'une main ferme toute sa rédaction, Didier Bezace dont on suivra le parcours difficile dans une première saison où son personnage se dédiera entièrement à son journal, Michel Bompoil en ambitieux pendant à Florence dans la saison 2, et un autre ambitieux, à TV2F cette fois, Jérôme Bertin, le visage du JT de la chaîne. 

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Bilan : Portrait dense et très riche du journalisme, de ses acteurs mais aussi de ses enjeux, Reporters est une série ambitieuse et efficace qui se bonifie avec le temps. Initialement relativement académique dans l'approche de son sujet, elle gagne en nuance et en subtilité au fil de son écriture, à mesure qu'elle prend la pleine mesure de son potentiel. Si elle se disperse parfois au sein de son impressionante galerie de personnages (et de thèmes), la série reste une immersion prenante et fascinante dans l'envers du décor du journalisme. A découvrir !


NOTE : 8/10


Une bande-annonce de la série (saison 2) :

14/01/2012

(FR) Nicolas Le Floch, saison 4, épisode 1 : Le Dîner de Gueux

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La soirée d'hier était exceptionnelle : j'ai allumé ma télévision pour regarder une chaîne française ! Ce vendredi 13 janvier, c'était en effet un peu le rituel annuel grâce auquel je renoue avec le petit écran de mon pays. Ce moment où je culpabilise aussi devant toutes mes belles résolutions non tenues le reste de l'année, me promettant une énième fois d'essayer de plus souvent donner leur chance aux séries françaises (tiens, pourquoi pas Les hommes de l'ombre à la fin du mois ?). Et ce, même si, en 2011, je suis satisfaite d'avoir rattrapé - et aimé - Un Village français, à défaut d'avoir trouvé mon bonheur parmi les autres fictions testées.

La série dont je vais vous parler aujourd'hui (et dont je vous ai de toute façon déjà parlé à plusieurs reprises par le passé) est un cas à part dans ma sériephilie : elle demeure une des rares fictions françaises à laquelle je suis profondément attachée et fidèle à travers les années - même si, en effet, au rythme de deux épisodes par saison, il y a peu de risque de voir la lassitude poindre ! C'est une série dont je guette chaque année le retour avec une impatience mêlée d'excitation. Car il émane de Nicolas Le Floch un parfum inimitable et savoureux, celui d'un plongeon aventurier et policier au XVIIIe siècle.

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Depuis la saison 3, Nicolas Le Floch s'est affranchi des romans de Jean-François Parot dont la série se contente de librement s'inspirer, Hugues Pagan écrivant désormais des aventures inédites du commissaire au Châtelet (avec une plume toujours aussi inspirée).

Le Dîner de Gueux débute de façon mouvementée. La jeune Clémence de Villerbois et son père échappent de justesse à des brigands grâce à l'intervention d'un noble étranger, le charmeur Giacomo Petracci, bien aidé par l'arrivée opportune de Nicolas Le Floch et de ses hommes, présents grâce aux renseignements fournis par la Paulet. Mais c'est l'ombre d'un célèbre bandit qui plane sur cette affaire : celle de La Griffe, brigand insaisissable dont la réputation n'est plus à faire dans tout le royaume. Dirigeait-il l'attaque que Nicolas a fait échouer comme un premier témoignage semble l'indiquer ? Mais pourquoi l'instinct rarement pris en défaut du commissaire lui dit-il de se méfier de ce seigneur si galant qu'est Petracci ?

Parallèlement à cette gestion quotidienne d'actes de brigandage, Nicolas Le Floch est également sollicité à Versailles pour des enjeux autrement plus importants qui touchent directement la couronne et ses finances alors dans un état épouvantable. En effet, si les jeux d'argent sont officiellement interdits par le roi, Louis XV s'adonne cependant, sans trop de restrictions, dans l'intimité de la cour, à des paris sur des duels opposant les plus fines lames d'Europe. Un combat est d'ailleurs prochainement programmé, or tant d'argent rassemblé à la cour ne peut qu'attiser toutes les convoitises... notamment d'un homme tel que La Griffe.

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Fidèle à l'atmosphère particulière qui règne dans la série, Le Dîner de Gueux est un pur divertissement historique de cape et d'épée, enthousiasmant et dynamique. Dans cet épisode, c'est dans une aventure foisonnante qu'il nous entraîne, avec une intrigue à plusieurs entrées où toutes les ramifications de l'histoire finissent par se rejoindre autour d'un enjeu principal : la confrontation avec La Griffe. Comme souvent, le téléspectateur se laisse facilement grisé par le soin apporté à l'ambiance, ne s'arrêtant pas sur les détails de l'enquête. Ce qui retient l'attention, ce sont ces savoureux échanges aux tournures de phrases délicieusement ampoulées qui maintiennent un savant équilibre dans les tonalités, entre effronterie, légèreté et sérieux. Ce sont aussi ces morceaux de panache et de bravoure, ce sens du théâtralisme assumé qui tend vers la grandiloquence, ces flirts jubilatoires avec un libertinage de folklore. Tous ces ingrédients sont ici réunis dans un épisode où l'on retrouve toute la saveur de Nicolas Le Floch.

Cependant, la réussite du Dîner de Gueux est double, car c'est grâce aux personnages mis en scène qu'il va se démarquer. Parce que Nicolas Le Floch n'est jamais autant attachant que lorsqu'est éclairée cette ambivalence qui le caractérise, à la fois esprit légal rigoriste et enquêteur hors pair, mais aussi impulsif charmeur et bon vivant aimant se faire plaisir. Or il se retrouve face à un adversaire à sa hauteur, qui n'est pas si dissemblable. Descendant direct d'un Mandrin, La Griffe respire le même sens du panache que Nicolas. La bonne idée de départ est de les avoir faits se rencontrer dans ces circonstances mouvementées au cours desquelles Nicolas sauve La Griffe dont il ignore alors la réelle identité. A partir de là, l'épisode peut construire leur confrontation sur des bases solides : la proximité des styles permet la naissance d'une certaine estime entre les deux hommes, même si chacun a bien conscience d'être dans des camps opposés. L'intervention finale de la chanoinesse permettra cependant à l'épisode de conserver la part d'insouciance que Nicolas, comme La Griffe, auront encouragé tout au long de l'aventure.

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Si Nicolas Le Floch s'offre donc un retour convaincant dans le registre assez léger du divertissement enthousiaste de cape et d'épée qui se savoure sans modération, un bémol vient pourtant ternir quelque peu ce tableau positif. Tout en prouvant que la série a désormais trouvé ses marques pour pleinement s'épanouir, en entamant (déjà) sa quatrième saison, avec son (seulement) septième épisode, Le Dîner de Gueux signe cependant l'abandon du feuilletonnant : il ne donne aucune nouvelle de la Satin, quittée enceinte il y a plus d'an lors de la fin de la saison 3 (Hugues Pagan ne voulant apparemment pas de bébé venant enrayer la dynamique de sa série). Or si Nicolas Le Floch s'est construit une identité propre dans le petit écran français, il est dommage d'oublier que l'avantage du format télévisé est justement de permettre de voir grandir et mûrir une oeuvre, mais aussi des personnages. C'est récompenser la fidélité et l'investissement du téléspectateur que de ne pas jeter aux oubliettes la continuité narrative.

Pour terminer sur une note positive cette critique, il me faut m'arrêter un instant sur les performance d'un casting excellent. Il faut tout particulièrement saluer Jérôme Robart capable de parfaitement retranscrire toutes les nuances de ce personnage fascinant qu'est devenu Nicolas Le Floch. A ses côtés, tous les acteurs sont très solides et pleinement dans leur rôle. Les comparses de Nicolas sont des alliés précieux, du docteur Scemacgus (Vincent Winterhalter) à qui est donné l'occasion de démontrer de nouveaux talents, au toujours fidèle inspecteur Bourdeau (Mathias Mlekuz). Sartine (François Caron), ses perruques et son ordre des priorités, fournissent encore un élément comique très appréciable. Enfin, il faut également citer, pour cet épisode, un Grégori Dérangère en grande forme, qui campe un adversaire digne de Nicolas, les deux rivalisant de charisme pour le plus grand bonheur du téléspectateur.

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Bilan : Avec Le Dîner de Gueux, Nicolas Le Floch nous entraîne dans une aventure enthousiasmante et virevoltante, pleine de panache et de flamboyance, qui se suit avec beaucoup de plaisir. La saveur des dialogues admirablement ciselés n'a d'égal que le charme des personnages mis en scène. Toujours très attachante, s'inscrivant pour son retour dans un registre volontairement plus léger - même si elle perd pour l'occasion sa dimension feuilletonnante -, Nicolas Le Floch confirme qu'elle reste une série à part (que j'aime très fort).


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de l'épisode :


Le générique de la série :

05/12/2010

(FR) Nicolas le Floch - saison 3, episode 1 : La larme de Varsovie

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Chaque année, je me promets d'essayer de donner plus de place aux fictions françaises. Chaque année, cette résolution reste invariablement lettre morte. Pourtant, j'entends bien des échos intéressants du Village français et autre Fais pas ci, fais pas ça, qui me donneraient assez envie de trouver le temps de m'installer devant mon petit écran. Mais pour une raison ou pour une autre, je finis toujours par oublier et remettre à plus tard. Cependant il reste quand même une poignée de séries françaises auxquelles je suis fidèle.

C'est ainsi que vendredi soir dernier marquait le retour des aventures inédites de Nicolas le Floch, sur France 2, pour une saison 3 qui s'annonce tout aussi brève que savoureuse. Doublement inédite car il s'agit de la première saison où les scénarios ne sont pas basés sur les livres originaux de Jean-François Parot. D'ailleurs, pour évoquer tout cela, n'hésitez pas à aller regarder la vidéo de la rencontre avec l'équipe de la série sur Le Village. Toujours est-il que, attendue, la première aventure, La larme de Varsovie, aura tenu toutes ses promesses.

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Cette première enquête plonge Nicolas dans les coulisses de la Cour, au sein de laquelle l'intrigant et excessivement mystérieux Comte de Saint-Germain, sur lequel mille et une rumeurs agitent Versailles, apparaît bien en grâce auprès de Louis XV, pour le plus grand agacement de certains de ses ennemis, dont le duc de Choiseul. Non seulement le Comte de Saint-Germain indique au roi l'emplacement secret où repose, depuis soixante ans, un magistrat dont le sort était entouré de mystère, mais il se propose également de raviver l'éclat de la "Larme de Varsovie", une perle que la reine tient de sa famille et qui semble se ternir chaque jour un peu plus. On raconte que si elle venait à s'éteindre, elle scellerait la fin de la lignée la détenant... Or, le Comte de Saint-Germain a tout juste le temps de se mettre à l'ouvrage que le précieux bijou lui est dérobé. Nicolas, chargé originellement de sa sécurité, enquête donc, tout en s'occupant de plusieurs homicides par strangulation qui semblent également liés à toute cette affaire aux premiers abords bien floue.

Adoptant les codes habituels de la série, on retrouve dans cette aventure tous les ingrédients qui font de Nicolas le Floch une série aussi aboutie que divertissante. L'intrigue débute avec un paradoxal excès de simplicité pour mieux se complexifier au fil de l'épisode, à mesure que viennent s'y greffer de nouveaux enjeux, plus ou moins obscurs, voire à la rationnalité discutable, et des protagonistes aux intérêts très divers. C'est d'ailleurs dans cette multiplicité de pistes qui finissent par toutes se rejoindre, s'assemblant en un puzzle finalement cohérent, que réside une des forces de l'épisode. Cette richesse du scénario dénote une réelle ambition narrative qu'il est nécessaire de souligner, tant elle s'assure de captiver l'intérêt d'un téléspectateur dont l'attention ne retombera jamais. L'ensemble est rythmé, les rebondissements soutenus. Si on aurait facilement pu s'égarer quelque peu en suivant Nicolas et son fidèle Burdeau dans cette intrigue à tiroirs multiples, la réussite de la construction narrative proposée est de ne jamais perdre de vue le fil rouge principal.

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Assurément prenant par sa maîtrise d'un scénario complexe, l'épisode ne se départit pas de ses origines policières, tout en n'hésitant pas à tendre à l'occasion vers l'aventure de cape et d'épée. On retrouve ainsi ce cocktail des plus attrayants, déjà admirablement maîtrisé au cours de la saison 2. Flirtant avec une thématique résolument ésotérique, entre alchimie, société secrète et malédiction, sur fond de résurgence de la fameuse vengeance des Templiers (il y a quand même quelque chose d'assez fascinant dans la source narrative inépuisable que constitue cet ordre monastique), l'histoire ne nous épargne pas des sempiternelles querelles de personnes gangrénant la Cour, au cours desquelles les plus humbles apparaissent invariablement comme de simples pions à la disposition des puissants. Le téléspectateur se prend donc facilement au jeu de ces mystères, parfaitement portés à l'écran par une galerie de personnages des plus convaincante.

Il faut bien dire en effet que si l'ensemble fonctionne aussi, il le doit en partie à ses personnages, au dynamisme communicatif. Ce sont eux qui permettent aussi bien d'alterner les tons - offrant des passages plus légers - que d'insérer des ruptures opportunes dans la narration. Ils apportent une vitalité parfaitement symbolisée par un Nicolas le Floch, charismatique à souhait, dont l'assurance flirte à l'occasion avec une certaine arrogance qu'il assume par une prise de distance souvent désarmante. Il est impossible de ne pas apprécier le personnage. Pourtant la série ne se limite pas à sa seule figure centrale ; en effet, on retrouve à ses côtés des protagonistes, extrêmement différents les uns des autres, mais en un sens parfaitement complémentaires. C'est homogène et chacun apporte une pierre à l'édifice, à l'image d'un Sartine ambivalent, qui permet tout à la fois de rappeler - avec humeur - ses limites à Nicolas, tout en introduisant une imperceptible pointe de comédie.

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Par ailleurs, même si c'est une constante, il est impossible de ne pas rappeler une nouvelle fois un élément incontournable sur lequel une bonne partie du charme de Nicolas le Floch repose : ses dialogues si finement ciselés, dont les tournures soignées sont un ravissement pour les oreilles, et qui rendent les échanges tellement savoureux. Cela apporte un plaisir supplémentaire à suivre l'ensemble.

Ce délicieux parfum de XVIIIe siècle qui flotte ainsi sur la série est cependant modérément confirmé sur la forme. Si les costumes - et les perruques - ne dépareillent pas, si la réalisation est également tout à fait correcte, tout reste cependant très propret, clair, offrant une reconstitution, certes par l'esprit, mais point par la photographie qui reste peut-être un peu trop neutre.

Enfin, il convient de saluer les performances du casting, conduit par un Jérôme Robart qui personnifie à merveille le charme, mais aussi les ambivalences, du héros. A ses côtés, nous retrouvons également Mathias Mlekuz, Camille de Pazzis, François Caron ou encore Vincent Winterhalter. Chacun maîtrise son registre, pour un résultat des plus convaincants.

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Bilan : Mêlant les ingrédients de l'enquête policière à ceux de l'aventure de cape et d'épée, avec en toile de fond les soubressauts avant-coureurs du milieu du XVIIIe siècle, La larme de Varsovie propose une aventure enlevée, où les dialogues savoureux résonnent avec délice dans notre petit écran. Si l'affaire du jour semble parfois un peu alambiquée, l'histoire se suit de façon plaisante, d'autant plus que les personnages trouvent chacun leur place pour offrir une galerie aussi bariolée qu'équilibrée, portée par le dynamisme et l'aplomb sans faille d'un Nicolas le Floch toujours aussi charismatique.

Bref, ne boudons pas notre plaisir. 


NOTE : 7,25/10


Le savoureux générique :


La bande-annonce de la saison 3 :