Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

25/07/2012

(J-Drama) Tsukahara Bokuden : le portrait romancé d'un maître d'armes légendaire

sakai1.jpg

Restons au Japon en ce mercredi asiatique ! Etant donné mon inclinaison naturelle pour tout ce qui touche à l'historique et aux fictions en costumes, parmi mes résolutions de début d'année, figurait celle d'essayer de caser dans mes programmes un vrai jidaigeki. Jin peut certes être rapproché de ce genre, mais cela reste une histoire de voyage dans le temps qui démarre dans le présent. La cinquantaine d'épisodes qui compose un taiga étant trop volumineuse actuellement pour me lancer dans un tel investissement au long cours (même si, dès que j'ai un peu de temps, je compte bien me lancer dans Ryomaden - c'est un de mes challenges placé tout en haut de ma liste de sériephile !), j'ai donc surveillé les dramas plus courts. Il faut dire que ce n'est pas le type pour lequel des sous-titres sortent le plus fréquemment, mais j'ai quand même pu trouver une série adéquate : Tsukahara Bokuden. Elle a été diffusé à l'automne 2011 sur NHK (BS Premium). Elle se compose d'un total de sept épisodes, d'une quarantaine de minutes chacun (sauf le premier d'une durée de 70 minutes).

tsukaharag.jpg

Proposant une immersion dans le Japon médiéval, ce drama propose le récit romancé (avec certaines libertés prises) de la vie d'un maître d'armes légendaire : Tsukahara Bokuden. Né vers 1489, il est resté un des sabreurs les plus célèbres de l'Histoire du Japon. S'il a eu une longue vie (il est décédé en 1571, de mort naturelle), la série ne s'intéresse en réalité qu'à ses premiers pas dans la vie d'adulte et, surtout, aux épreuves qui vont permettre sa maturation progressive, jusqu'à faire de lui la figure combattante qui s'est imposée dans la mémoire collective.

Entraîné dès le plus jeune âge, une fois l'âge adulte atteint, ShinEmon (c'est sous ce nom que nous le connaîtrons durant la majeure partie du drama) demande à être autorisé à partir voyager à travers le Japon. Son but premier est le perfectionnement de ses techniques de combat, un art qu'il entend pouvoir parfaire en croisant des combattants rompus à d'autres styles. Mais l'objectif est aussi de répandre le nom de Kashima afin de redonner son éclat au sanctuaire shinto qui s'y trouve, puisque cette maîtrise du sabre est un don de la divinité qui y est révérée.

tsukaharap.jpg

Tsukahara Bokuden est un récit initiatique au sens strict du terme, avec les forces, mais aussi les limites de ce genre. La construction de ce drama semi-itinérant suit une évolution linéaire régulière, avec des épisodes respectant tous une structure très proche : une épreuve se présente au héros, et il va devoir la surmonter. Le plus souvent, elle se matérialise par un combat. La première moitié du drama permet à ShinEmon de se mesurer à des adversaires disposant de forces et d'atouts auquel il doit s'adapter (stratégie, armes...), améliorant par là-même ses propres techniques. Puis, à mesure qu'il maîtrise son art, c'est logiquement en lui-même qu'une autre bataille se lève et va devoir être gagner : ne pas se laisser entraîner par cette soif de sang, ce rush d'adrénaline qui le parcourt à chaque victoire. Il lui faut lutter pour rester fidèle à ses principes et à ses valeurs, sans s'écarter de sa ligne de conduite. Si le récit est fluide, le drama apparaît cependant très didactique dans ses développements, manquant de souffle, voire de tension en raison de ses issues prévisibles.

Pour autant, Tsukahara Bokuden reste plaisant à suivre justement parce qu'il met en scène un héros que, comme dans toute histoire initiatique, on a envie de voir grandir et mûrir. De plus, je ne suis pas restée insensible à l'immersion médiévale proposée - même si la vie du maître d'armes y est relatée avec plus ou moins de libertés (Pour en savoir plus / en anglais). Sans avoir de grands moyens, la série s'efforce cependant de bien retranscrire la codification de la société féodale d'alors, avec la place des maîtres d'armes. Elle fait également un effort de contextualisation intéressant pour évoquer une période troublée qui voit s'affronter de nombreux seigneurs locaux. ShinEmon se retrouve en effet entraîné dans des affrontements autour du pouvoir, et si, encore une fois, le drama peine à matérialiser une vraie tension, les échanges et les rapports de force fluctuants enrichissent le parcours personnel raconté. Enfin, une place importante est aussi accordée à la religion, avec les croyances qui rattachent l'art du combat à la divinité : en consacrant sa vie à cet art, le héros mène en parallèle une véritable quête spirituelle (particulièrement perceptible dans les derniers épisodes) qui aboutit à faire de lui le dépositaire du message de cette dernière.

tsukaharak.jpg

La réalisation est traditionnelle, un peu figée par moment, mais avec une belle photographie. Dans l'ensemble, elle sait mettre en valeur la reconstitution d'époque, notamment par quelques superbes plans qui nous immerge dans ce Japon médiéval avec efficacité. Il faut préciser que Tsukahara Bokuden n'est pas un drama d'action. Toutefois les combats y occupent bien une place centrale. Leur mise en scène donne un résultat plus mitigé : la vitesse d'exécution de certains affrontements - où un seul coup de sabre achève l'adversaire - impose au réalisateur d'essayer de les dramatiser en recourant à des ralentis - ce qui n'est pas toujours du plus convaincant. L'autre élément qui m'a marqué, c'est à quel point les combats paraissent "propres", et finalement très peu graphiques en terme de violence. Non que j'aille jusqu'à conseiller le responsable des effets spéciaux d'OCN (et ses chers jets d'hémoglobine) à la NHK, mais c'est vrai que le rendu est ici assez réservé (par rapport à mes derniers sageuk sud-coréens). A noter également un long générique introductif qui semble avoir pour thème l'harmonie avec la nature que j'ai trouvé très beau visuellement (et je vous l'ai découpé spécialement, 1ère vidéo ci-dessous).

Enfin, le casting s'en sort globalement bien. Sakai Masato (Legal High) interprète ShinEmon durant tout le drama, de la sortie de l'adolescence jusqu'à la maturité avec pour seule nuance marquant l'âge et l'expérience, l'évolution dans les postures du héros. Certes il a, au début, quelques expressions forcées qui sonnent faux (surtout pour souligner l'insouciance avec un sourire figé agaçant), mais j'ai été vite soulagée en constatant qu'il trouvait ensuite un juste équilibre très intéressant entre la distance qu'acquiert rapidement le héros et une humanité qu'il ne perd jamais et qui ressort plus fortement dans certaines scènes. S'il manque donc parfois un brin d'expressivité, il est plus que correct. A ses côtés, j'ai eu le plaisir de retrouver Kuriyama Chiaki (Atami no Sousakan), qui interprète sa soeur : restée à Kashima, on la voit assez peu, mais il n'y a rien à redire à ses scènes. On croise également dans ce drama Hira Takehiro, Kyono Kotomi, Nakamura Kinnosuke, Asaka Mayumi, Honda Hirotaro ou encore Nashima Toshiyuki.

tsukaharae.jpg

tsukaharaf.jpg

Bilan : Récit initiatique nous plongeant dans le Japon médiéval, Tsukahara Bokuden est un drama à la construction linéaire, assez basique et prévisible dans la progression par étapes qu'il offre à son personnage principal. Manquant un peu d'ambition sur ce point, il peine à insuffler une dramatisation et une tension qui auraient rendu l'ensemble plus marquant. Cependant l'immersion historique qu'il propose n'en reste pas moins intéressante. Efficace et sans temps mort, il se laisse donc suivre sans déplaisir, tout en nourrissant quelques regrets.

A réserver pour les amateurs du genre (ou pour les curieux souhaitant regarder un
jidaigeki de longueur raisonnable).


NOTE : 6,5/10


Le générique d'ouverture du drama :

La bande-annonce de la série :

04/08/2010

(J-Drama) Hagetaka (Road to rebirth) : sur les ruines du capitalisme financier, destins croisés et vies à reconstruire




"Someone said there’s only two kinds of tragedy.
The first, having no money. Second, having too much of it.
The world is made of money, and money bears tragedies."

hagetaka2.jpg

Attention, petit bijou téléphagique en ce premier mercredi asiatique du mois d'août !

La découverte de la semaine est d'autant plus appréciable qu'elle aura été difficile à dénicher. La vie du sériephile est faite de frustrations. Cette curiosité inassouvie qui le pousse constamment vers de nouveaux horizons a un côté sombre : les découvertes ne sont pas toujours à la hauteur. Pour dix pilotes testés, combien d'essais concluants ? Le ratio est encore plus disproportionné quand je m'essaye à la télévision japonaise. Comme je vous l'ai déjà confié, actuellement, je m'intéresse plus particulièrement à ce pays. J'ai testé divers dramas de la saison estivale, tous genres et toutes chaînes confondues... sans grand succès. J'ai bien trouvé quelques programmes suffisamment accrocheurs pour que l'on est envie de poursuivre le visionnage, mais rien de marquant.

Insatisfaite, j'ai donc entrepris de remonter un peu le temps, me rendant dans des recoins plus reculés, encore inconnus de la relative profane en télévision japonaise que je suis. Ce week-end, je commençais à désespérer, achevant de m'auto-convaincre que le problème venait de mes goûts personnels et qu'aucune histoire d'amour sur le long terme ne serait peut-être jamais possible avec le pays du Soleil Levant (un coup de coeur pour combien de tentatives ?). Et puis, soudain, ce fut l'étincelle tant espérée ! Dès les premières minutes, j'ai bien senti qu'entre Hagetaka et moi, cela pourrait coller. Deux heures plus tard, les deux premiers épisodes visionnés à la suite, je m'étais réconciliée avec le Japon, à nouveau captivée, impressionnée, fascinée, par un jdrama ! Car voyez-vous, Hagetaka, c'est une de ces gifles téléphagiques qui vous font le plus grand bien, raniment une passion et vous redonnent foi dans le Dieu du petit écran.

Si bien qu'avant de vous en parler plus précisément, je profite de ce billet pour lancer un appel à vous, chers lecteurs ; car, motivée comme je le suis actuellement, c'est le moment ou jamais de me proposer des séries japonaises. Mais j'ai beau y mettre beaucoup de bonne volonté, je me perds trop souvent dans cette offre si riche. Si on récapitule, mes gros coups de coeur de ces derniers mois, en provenance du pays du Soleil Levant, furent Mother, Gaiji Keisatsu et, donc, Hagetaka. Quelles autres découvertes pourriez-vous me conseiller ? Sachant que les comédies ne m'intéressent pas et que j'ai fait une overdose de high school dramas lors de mon précédent cycle japonais.

hagetakaa.jpg

Hagetaka est une série qui fut diffusée sur NHK en 2007. Elle comporte six épisodes d'une heure chacun.

Adaptée d'un roman éponyme de Mayama Jin, elle nous plonge dans un cadre original, celui des rouages de la finance, pour nous relater les destins croisés, teintés de tragédies, de plusieurs personnages aux vies imbriquées. Dotée d'une réelle dimension humaine, elle s'intéressera à leurs évolutions, s'étalant sur presque une décennie, de la fin des années 90 au début des années 2000. Son premier épisode nous introduit dans un Japon encore affaibli par la crise que le pays connut lors de l'explosion de la bulle financière au début des années 90. Le modèle économique sur lequel il s'était reconstruit, après la Seconde Guerre Mondiale, est alors mis à mal par les excès d'un capitalisme forcené, dont les assauts font vaciller ses fondements. Ses anciennes valeurs fondatrices, patriarcales, apparaissent désormais obsolètes, étrangères et dépassées pour les nouveaux acteurs des marchés financiers.

Hagetaka débute en 1998. Une des banques les plus importantes du pays est alors en situation critique, considérablement fragilisée par la crise. Ses débiteurs n'étant plus en mesure de payer en respectant les échéances, sa dette s'est envolée. Pour éviter la banqueroute, elle n'a d'autre choix que d'accepter les propositions d'achat d'une partie de ses dettes par un fonds d'investissement étranger, Japan Horizon. Ce dernier est dirigé par un de ses anciens employés, Washizu Masahiko, pour qui cette tractation marque le retour au pays après plusieurs années passées aux Etats-Unis. Il avait à l'époque quitté précipitamment ses fonctions à la suite d'un drame, le suicide d'un de ses clients, conséquence de son refus d'accéder à sa demande de prêt.

hagetakab.jpg

Se comportant désormais comme un véritable "hagetaka" (= vautour), Washizu assure la liquidation rapide et déshumanisée des dettes reprises. Faisant peu de cas de l'opinion modératrice émanant de son ancien supérieur, Shibano Takeo, il traite notamment de manière particulièrement expéditive le dossier d'une vieille auberge familiale. Une histoire qui se terminera, une nouvelle fois, en tragédie. Mais la culpabilité appartient désormais au passé ; le temps n'est plus aux regrets. Cette première incursion dans l'économie japonaise est le début d'une bien plus vaste offensive de la part de Japan Horizon et de ses capitaux internationaux. "Let's buy Japan out !" est le mot d'ordre venu de New York.

Menant une politique agressive de spéculation, les froides recherches de rentabilité du fonds d'investissement viennent achever de bouleverser le modèle entrepreneurial traditionnel du Japon. Hagetaka dépeint avec un réalisme minutieux, mais jamais rébarbatif - bien au contraire -, les coulisses de milieux financiers où l'affrontement est permanent, guidés par une quête constante du profit. Dans ce cadre, acteurs et victimes vont et viennent, ne cessant de se croiser, évoluant au sein d'un même système qui cannibalise tout sur son passage. Drame humain autant que thriller financier, Hagetaka va prendre le temps de s'intéresser à ses personnages aux motivations plus insaisissables que les apparences ne le laisseraient penser. Au fil des épisodes et des années, c'est une forme de parcours initiatique qui s'esquisse sous les yeux du téléspectateur. Un voyage sur une "road to rebirth", pour essayer de faire la paix avec soi-même, même si toute faiblesse peut être fatale.

hagetakae.jpg

L'argent est donc l'élément central, moteur, de l'univers de Hagetaka, en témoigne la première phrase que j'ai reprise au début de cet article, prononcée en guise d'introduction par Washizu. La symbolique de la scène d'ouverture de la série mériterait d'ailleurs à elle-seule un développement entier, tout comme le générique de fin, aussi troublant que poétique. Je me contenterai de souligner que ce drama est bien plus qu'une simple démonstration des ressorts broyeurs du capitalisme financier. Ici, pas de morale univoque, ni de vérité facilement accessible. Le but n'est pas de pointer des responsabilités, la série s'attache simplement - mais avec une rigueur ambitieuse - à décrire le fonctionnement d'un système, avec ses limites et ses injustices.

L'aspect humain ne s'oppose pas au vecteur financier. Les deux ne s'excluent pas, mais doivent, au contraire, se combiner et trouver un équilibre. Le danger réside dans les excès. La réussite de Hagetaka, c'est justement cette capacité à amener le téléspectateur à s'interroger, sans prétendre asséner de réponses miracles. Le drama trouble, interpelle, mais ne préjuge jamais. Sa portée est d'autant plus forte que derrière ce portrait sombre et pessimiste qu'il dépeint, les thématiques abordées marquent également par leur frappante actualité avec le monde réel. L'histoire relatée - et les dérives mises en lumières - trouve un écho particulier dans notre propre situation économique (l'impression amère que tout se répète en quelque sorte, sans que les enseignements aient été tirés).

hagetakaq.jpg

Cependant Hagetaka va bien au-delà de son seul cadre financier de départ. Si l'ensemble renvoie une image faussement déshumanisée, c'est pourtant bien une histoire aux accents terriblement humains que la série relate. L'émotion perce presque malgré la volonté de certains personnages. Comment arbitrer ses sentiments, son parcours personnel, voire même son éthique professionnelle, quand on est seulement un simple rouage dans un système qui s'auto-alimente ? Le capitalisme, même poussé à l'extrême, ne peut entraîner la négation complète de l'individu qui met en oeuvre sa logique. La force de Hagetaka est de refuser de céder à la tentation d'une approche manichéenne, optant pour un réalisme d'une rare acuité.

Il n'y a pas de chevalier blanc, pas de personnage pour incarner un "méchant" dénué de toute conscience. Il y a seulement des êtres humains, à la fois acteur et victime de ce système dont ils ne maîtrisent pas les règles. Les situations sont difficiles et la bonne solution évidente n'existe pas. Au fil des épisodes, chaque protagoniste gagne en épaisseur. Acculés dans des impasses qui les placent en porte-à-faux avec eux-même, ils révèlent peu à peu toute leur complexité, dévoilant des motivations plus obscures et des contradictions parfois fatales. Aussi vivant que troublé, c'est un tableau tout en nuances qui se peint finalement sous nos yeux fascinés.

hagetakao.jpg

Aussi dense et passionnant que soit son contenu, Hagetaka ne serait pas ce qu'elle est sans sa somptueuse bande-son signée Sato Naoki (plus connu pour avoir réalisé celle de Pandora, par exemple). Le téléspectateur est presque surpris de découvrir, dès les premières minutes, un tel accompagnement musical pour une série qui aura su éviter tous les écueils dus à la technicité de son sujet. Insufflant un souffle épique dans chaque scène, subtile et sobre quand il le faut, vertigineuse et entraînante en parfaite adéquation avec l'importance du passage à d'autres moments, elle constitue un véritable petit bijou à elle toute seule. Pour couronner le tout, l'ensemble est complété par un langoureux générique, mélancolique à souhait, qui donne des frissons au téléspectateur.

Dans le même temps, Hagetaka est tout aussi sérieuse dans sa réalisation, proposant des plans soignés, ne renonçant pas à cette poésie des images que l'on retrouve dans les dramas japonais réussis. Elle a également recours à des jeux de lumière intéressants qui lui permettent de s'approprier pleinement son univers.

hagetakad.jpg

Enfin, dernier compliment - mais non des moindres -, celui qui doit être adressé au casting qui se révèle juste impeccable. Faisant preuve d'une sobriété pesée et calculée, en adéquation avec la tonalité d'ensemble du drama, les différents acteurs parviennent également, sans jamais se départir de leur réserve, à exprimer une réelle intensité dramatique lors des passages les plus poignants. Leurs performances m'ont bluffée, en particulier le duo principal dont l'interprétation nuancée, de figures pourtant particulièrement complexes, fut d'une justesse jamais prise en défaut.

Nao Omori réussit ainsi à capter parfaitement l'ambivalence des conflits internes animant un Washizu Masahiko qui se révèle bien loin d'être un simple "hagetaka" ; tandis que Kyohei Shibata dépeint, avec beaucoup de subtilité et de retenue, ce personnage renvoyant une image toujours si solide qu'est Shibano Takeo. A leurs côtés, Chiaki Kuriyama (Mishima Yuka) apporte une touche de fraîcheur, mais aussi de foi et d'espérance en certains personnages, qui s'avère touchante. Plus en retrait, enfin, Ryuhei Matsuda (Osanu Nishino) colle parfaitement à l'affirmation d'un fils brisé par le suicide de son père, chez qui le désir de vengeance finira par tout obscurcir.

hagetakas.jpg

Bilan : Hagetaka, c'est une de ces claques téléphagiques salvatrices que l'on rêverait de rencontrer plus souvent dans ses explorations du petit écran. A partir d'une thématique originale, mais également très ardue, qui ne manquait pas de complexité et pouvait décontenancer a priori, la série s'affirme comme un drama de haut standing, sublimant et dépassant son cadre financier. Bénéficiant d'une écriture subtile, d'une justesse troublante, sa richesse est de proposer une lecture à plusieurs niveaux. Elle dresse le portrait nuancé d'un Japon économiquement affaibli, au sortir des années 90, au croisement de deux voies semblant destinées à se confronter, entre une tradition industrielle forgée dans les liens familiaux et un capitalisme impersonnel presque sauvage. C'est une société en crise, où les situations renvoient à des images de l'actualité récente.

Mais Hagetaka, ce sont aussi des histoires personnelles, un chemin timide vers la rédemption entrepris par des personnages cherchant à faire la paix avec eux-mêmes, tous acteurs d'un système capitaliste outrancier, dont les rouages broyeurs les ont, à des degrés divers, brisés. Agresseurs ou victimes, les rôles se révèlent bien moins clairs que ce que les apparences peuvent laisser croire a priori. Détachée de tout manichéisme, Hagetaka est une série sombre, relativement pessimiste, qui choisit de traiter avec beaucoup de réalisme des problématiques compliquées, tout en parvenant à captiver le téléspectateur tout au long de ses six épisodes.


En résumé - en espérant avoir réussi à retranscrire au moins une partie de mon enthousiasme dans cette review -, il s'agit d'une série tout simplement incontournable. Et par sa thématique qui transcende les frontières, elle parlera à tout téléspectateur, qu'il soit familier ou non avec les fictions japonaises. Indispensable.


NOTE : 9,5/10


Le superbe générique de fin :



Une bande-annonce (pour le premier épisode) :