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16/03/2011

(J-Drama) BOSS : une série policière versatile et attachante

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Comme annoncé, le mois de mars sera bien en partie policier. En attendant de pouvoir jeter un oeil à plusieurs épisodes d'une nouveauté sud-coréenne, Crime Squad, dont la diffusion a commencé la semaine dernière, c'est au Japon que nous conduit ce troisième mercredi asiatique de mars, avec une critique sous forme de bilan d'un drama qui figurait sur ma liste de "séries à rattraper" dressée en début d'année, en partie pour les échos positifs que j'avais pu glaner, mais également pour la présence d'acteurs que j'apprécie beaucoup dans son casting : BOSS.

Diffusée au printemps 2009, sur la chaîne Fuji TV, sa première saison comporte 11 épisodes, de 45 minutes chacun (sauf pour le premier et le dernier d'une durée d'1h). La série fait également partie de ces quelques dramas qui obtiennent un renouvellement (disposer d'une deuxième saison reste une exception au Japon). La saison 2 était initialement annoncée pour ce printemps, à partir du mois d'avril ; l'actualité obligeant à mettre ceci au conditionnel. (EDIT : La diffusion de la saison 2 est officiellement annoncée pour le 14 avril prochain.)

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BOSS se propose de nous plonger dans le quotidien et les enquêtes d'une unité spéciale de la police japonaise. La série s'ouvre en effet sur la création d'une équipe annoncée et présentée aux médias comme une formation d'élite destinée à répondre à l'inquiétude suscitée par l'augmentation de crimes particulièrement violents. Osawa Eriko est nommée à sa tête, bénéficiant du soutien d'un des dirigeants de la police qui est un ancien de sa promotion. Cette femme de poigne au caractère bien trempé rentre tout juste d'une formation aux Etats-Unis. Très compétente, sa vie professionnelle a malheureusement souffert de sa vie privée, ce qui explique cet exil américain temporaire. Si elle revient avec des ambitions intactes, elle va cependant vite déchanter en découvrant la réalité du projet dont elle obtient la direction.

En effet, la supposée unité d'élite se révèle n'être qu'une maladroite façade médiatique. Loin de la promesse de se voir assigner les plus brillants éléments des différents services, ce sont au contraire les officiers posant problème, les "moutons noirs" dont on souhaite se débarrasser, qui lui ont été envoyés. C'est donc une équipe dans laquelle on a regroupé tous les agents dont personne ne voulait. Sans être foncièrement incompétents, par leur attitude ou leur façon de concevoir leur métier, ces derniers sont loin de représenter le stéréotype du policier idéal tel que le conçoit l'institution, navigant entre rébellion, défiance de l'organisation ou difficulté à réagir comme un officier. Eriko va non seulement devoir diriger et résoudre les enquêtes qui lui sont confiées, mais elle va aussi apprendre à créer et construire une solidarité et un esprit d'équipe qui apparaît illusoire au premier abord. Affaires policières et gestion humaine, voici donc les deux grandes thématiques que BOSS va investir. 

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Fidèle à son genre, BOSS démarre sur les bases d'un procedural (cop) show classique : elle va tout d'abord mettre en scène des enquêtes ayant vocation à seulement durer le temps d'un épisode. N'hésitant pas à relater des crimes très violents, la série cède souvent à une recherche de sensationnalisme parfois un peu excessive. Cependant, au fur et à mesure que la saison avance, le drama va progressivement glisser vers un feuilletonnant qui s'avère plus consistant et satisfaisant pour le téléspectateur. Un fil rouge finit d'ailleurs même par apparaître, permettant ainsi de conclure tous les arcs de façon autrement plus ambitieuse dans le dernier épisode.

Dans l'ensemble, en dehors de quelques cas plus finement traités, les affaires policières se laissent globalement suivre sans forcément retenir pleinement l'attention. Mais il est important de souligner que, au fil de la série, cette dernière gagne incontestablement en maîtrise dans la gestion de ces storylines, mais aussi en subtilité lorsqu'elle parvient à l'occasion à se détacher de la dynamique d'opposition manichéenne entre le criminel et la police. Cependant, si ce cadre policier sert la série, l'atout de BOSS est ailleurs. En effet, il va résider dans la dimension humaine que va être capable d'investir la série.

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Car si BOSS marque le téléspectateur, c'est sans doute prioritairement dans le domaine de l'affectif. Conduite par une Eriko à la présence particulièrement charismatique, la série bénéficie d'une galerie de personnages secondaires, extrêmement colorée et bigarrée, dont la diversité n'empêche pas une complémentarité efficace et des intéractions aussi pimentées que convaincantes. La dynamique d'ensemble fonctionne bien, tant dans l'opposition initiale que dans les relations qui se nouent peu à peu. Les liens entre chacun des protagonistes ne vont d'ailleurs jamais se figer, se consolidant avec le temps. Chacun finit ainsi, à sa manière, par trouver sa place au sein de cette unité atypique.

Si certains n'échappent pas à la caricature - mais c'est le lot des seconds rôles des comédies -, ils sont tous extrêmement attachants, et c'est avec un vrai plaisir que le téléspectateur les suit dans des enquêtes dont la finalité semble autant être d'attraper le criminel, que de servir de révélateurs à des personnages qui gagnent en épaisseur à mesure que l'image qu'ils renvoient se nuance. Comment rester insensible au manque d'estime de Kimoto qui cherche encore sa voie et pour laquelle la figure tutélaire d'Eriko va être déterminante ? Comment ne pas vouloir en savoir plus sur les non-dits et blessures du passé qui ont conduit Katagiri dans cet état désillusionné, où il a perdu toute foi en son métier ? Et puis, en dehors de l'équipe, comment ne pas se laisser séduire par les flirts incessants et la légèreté cultivée et mise en scène de Nodate ? Tous ces éléments sont autant de fils rouges à connotation humaine que l'on suit avec un intérêt presque plus prononcé que pour l'enquête policière du jour.

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Enfin, au-delà des thématiques classiques ainsi portées à l'écran, il faut souligner que BOSS n'est pas dénuée d'une identité propre. Son originalité va venir de la tonalité adoptée par la série. Si j'insiste dessus, c'est que rarement aura-t-on vu un ton aussi volatile et versatile que celui cultivé avec beaucoup de soin dans ce drama. Face à cette alternance constante et entêtante, entre comédie et cop show plus dramatique, le téléspectateur reste aux premiers abords un peu décontenancé, se demandant si les scénaristes n'ont pas des difficultés pour choisir son genre. Mais au contraire, loin d'être une problème de tergiversation narrative, c'est dans cette résistance à toute catégorisation que BOSS s'affirme et se distancie de ses modèles d'inspiration plus traditionnels.

Bénéficiant d'un rythme d'ensemble très énergique, la série pourra ainsi nous proposer des scènes fortes émotionnellement à l'intensité avant tout dramatique, tout en enchaînant quelques minutes plus tard sur des répliques décalées, parfois vraiment jubilatoires, qui sauront susciter plus d'un sourire. D'ailleurs, elle n'hésite pas à utiliser les codes de la comédie, versant parfois dans un certain burlesque ou une légèreté qui permettent de prendre de la distance par rapport aux intrigues plus pesantes. Pour autant, elle peut aussi en un instant redevenir autrement plus sérieuse, nous faisant assister à un meurtre ou à de vraies confrontations entre les protagonistes. BOSS reste donc comme une fiction entre deux tons, défiant obstinément toute catégorisation.

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Si la tonalité attrayante de la série marque sur le fond, il est intéressant de noter que la forme s'efforce de se mettre au diapason. La réalisation est extrêmement dynamique, multipliant les effets de style à l'écran. D'images saccadés qui accentuent surtout les passages les plus comiques à des split screen qui permettent de suivre la même scène de différentes perspectives, le réalisateur expérimente beaucoup. Même si certains effets ne sont pas complètement maîtrisés, avec notamment une tendance à recourir à certains gros plans pas toujours opportuns, tout ce travail insuffle un réel dynamisme. Une fois passée la surprise initiale, le téléspectateur s'habitue rapidement. 

De plus, cette impression de fraîcheur orientée vers la comédie est renforcée par une bande-son sympathique, composée de petits interludes musicaux entraînants. La chanson utilisée dans l'ending (My Best of my life de superfly - dont le pv est disponible à la fin de ce billet) apparaît finalement comme un pendant bienvenu plus calme et posé, par rapport au reste de l'épisode.

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Enfin, BOSS n'atteindrait sans doute pas le degré d'attachement qu'elle parvient à susciter sans la présence d'un casting rarement pris en défaut, dont les premiers comme les seconds rôles méritent vraiment d'être salués. Si j'avoue que je partais avec un a priori très positif pour plusieurs d'entre eux, ayant déjà pu apprécier leur performance dans d'autres dramas, mes attentes n'ont pas été déçues. Tout d'abord, Amami Yuki (Last present, Fumo Chitai, GOLD) s'impose de manière convaincante dans ce rôle de dirigeante de l'unité, femme de poigne dont la compétence frôle à l'occasion l'arrogance. Mais si BOSS parvient à trouver un équilibre et une homogénéité au sein de ses personnages, c'est aussi parce que tous les autres acteurs qui l'entourent se révèlent à la hauteur. Takenouchi Yutaka (Fumo Chitai, Nagareboshi) trouve instantanément (dès la scène d'ouverture) une dynamique parfaite avec Eriko, vraiment excellent en directeur flirtant constamment.

Parmi les membres de l'équipe, j'ai beaucoup aimé Toda Erika (beaucoup plus que dans LIAR GAME), parfaite en scientifique qui se cherche et qu'Eriko va prendre sous son aile. J'ai aussi tout particulièrement apprécié retrouver Tamayama Tetsuji (je confesse soupçonne que sa seule présence pourrait me faire suivre n'importe quel drama) (Sunao ni Narenakute), en policier solitaire ayant perdu sa confiance en l'institution depuis un incident il y a quelques années. A leus côtés, on croise également Mizobata Junpei (Shinzanmono), Kichise Michiko (Mousou Shimai), Kendo Kobayashi, Nukumizu Youichi, Shiomi ansei, Hasegawa Hiromi, HILUMA, Mitsuishi Ken, Aijima Kazuyuki ou encore Maruyama Tomomi.

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Bilan : Série policière à la tonalité volatile, alternance pimentée de comédie et de drama procédural classique, BOSS est une fiction attachante et plaisante à suivre. Particulièrement rythmé, le drama cultive un dynamisme qui se ressent tant sur le fond que sur la forme, et qui sait capter et retenir l'attention d'un téléspectateur aisément charmé par cette ambiance particulière. Si certaines enquêtes policières n'échappent pas toujours aux sirènes d'un sensationnalisme un peu naïf, la série gagne en consistante et en nuance au fil des épisodes, l'aspect feuilletonnant parachevant de manière convaincante cette maturation. BOSS s'impose donc comme un agréable divertissement que j'ai pris beaucoup de plaisir à visionner.


NOTE : 7,25/10


La chanson de l'ending de chaque épisode (My best of my life, par superfly - PV) :


05/05/2010

(J-Drama / Pilote) Sunao ni Narenakute : du virtuel à la rencontre IRL, portrait d'une socialisation moderne



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Un "mercredi asiatique" original aujourd'hui : ce n'est pas en Corée du Sud mais au Japon que je vous emmène pour explorer cette saison 2010 et ses nouveautés. Car ma téléphagie a connu un nouveau tournant, parmi les cycles qui l'animent. Cela devait faire plus d'un an que je n'avais plus regardé de j-dramas. Et bien, je vous annonce qu'après de longs mois d'hibernation, il semblerait que mon intérêt pour le Japon se soit soudain réveillé au cours de la semaine passée. En somme, il est fort probable que ce pays ne soit plus une destination si exceptionnelle que ça, dans le cadre du mercredi asiatique (même si la Corée du Sud demeure privilégiée).

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Il faut dire que je passais trop de temps à lire des reviews de séries japonaises, en quête de la petite étincelle, pour échapper éternellement au prosélytisme d'un internaute qui me convaincrait de sauter le pas et de rompre cette distance prise avec le petit écran du pays du Soleil Levant. Le tournant s'est donc produit la semaine passée : sur le blog Ladytelephagy (une mine d'or, notamment en découvertes de pilotes de tous les horizons, que je soupçonne constituée grâce à l'utilisation d'une machine à voyager dans le temps pour réussir à regarder tout cela en le reviewant), la critique proposée sur un des nouveaux dramas de ce printemps a aiguisé ma curiosité : elle concernait Sunao ni Narenakute. Série présentée a priori un peu comme la rencontre improbable de classiques comme Last Friends et Densha Otoko, je suis ressortie très satisfaite de cette découverte.

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Sunao ni Narenakute est un drama diffusé depuis le 14 avril 2010 sur Fuji TV. Projet assez ambitieux à la base, disposant d'un casting accrocheur, la série a la particularité d'avoir choisi comme concept de départ, un outil très actuel : twitter. Cette inspiration n'est pas le propre du Japon, puisque des scénaristes aux quatre coins de la planète (aux Etats-Unis, par exemple) commencent à s'intéresser au potentiel narratif se cachant derrière ces micro-messages du quotidien  et leurs frustrants 140 caractères. Cependant, plus qu'un drama sur cet outil de communication particulier, Sunao ni Narenakute s'empare d'une thématique relativement générale : celle de la place du virtuel dans la construction du lien social au sein de nos sociétés modernes, initiant par ce biais une réflexion sur ses rapports avec la vie réelle. La représentation de twitter dans ce drama le rapproche d'ailleurs un peu d'une forme d'ersatz de chat privé, tant les différents followers paraissent former une communauté fermée (même si la suite du drama nous montre que ce n'est, malheureusement peut-être pour certains, pas le cas).

Sunao ni Narenakute
nous introduit donc dans les vies compliquées de plusieurs jeunes adultes, habitués à échanger leurs dernières réactions sur leur vie via internet. Un quotidien personnel qu'ils présentent évidemment sous un jour biaisé, cédant facilement à la tentation de l'embellir ou de ne sélectionner que certaines informations à partager avec leurs followers. Cependant, le maintien facile de cette fiction, générée par la distance, va voler en éclat le jour où l'un d'entre eux propose une rencontre IRL ("in real life"). La série va alors explorer cette composante spécifique des relations humaines entretenues sur internet, la présentant avec une sobriété et une justesse qui sonnent profondément authentiques. Ne perdant pas de temps en introduction inutile, le pilote présente immédiatement les enjeux. S'y déroule ainsi la première réunion, dans la vraie vie, entre Nakaji (Keisuke), Haru (Tsukiko), Doctor (Seonsu), Linda (Kaoru) et Peach (Hikaru), une amie de Haru se laissant entraîner par l'enthousiasme de cette dernière.

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Le premier attrait de ce drama réside dans la mise en valeur de sa dimension humaine. Signe de la maturité de son écriture, la série aborde des thèmes adultes, n'hésitant pas à traiter de sujets difficiles. Si l'amour demeure invariablement une dynamique centrale, il se place loin d'une présentation fleur bleue idéalisée. Et, surtout, viennent s'y greffer des maux modernes, entravant bien plus sûrement que le jeu des sentiments, le quotidien de chacun des personnages. Certes les premiers épisodes n'évitent pas toujours le recours aux accents du mélodrame. Pour autant, la série ne verse jamais dans un pathos excessif dans lequel l'ambiance se ferait trop pesante. Agrémentée de scènes plus légères, où le collectif soudé permet d'alléger l'ensemble en se tournant résolument vers l'avenir, Sunao ni Narenakute se révèle souvent touchante, voire émouvante. Elle propose une exploitation pleine et entière de toute la large palette d'émotions humaines. Le mélange de ces différents ingrédients fonctionne : il se dégage de l'ensemble une véritable vitalité communicative.

Les scénaristes parviennent instinctivement à un équilibre fragile, mais convaincant, pour le moment, entre les diverses tonalités, réussissant à alterner le drame et les moments d'éclaircie marqués par ce besoin irrépressible d'aller de l'avant. Dans cette perspective, une des forces de Sunao ni Narenakute, qui assoit sa portée, reste d'avoir choisi une approche frontale et explicite pour nous relater les problèmes rencontrés par ses héros. Car, au sein de cette galerie de personnages très différents, rapprochés par une solitude que les rapports virtuels ne peuvent pleinement compenser, leur point commun semble être la façon dont la vie a pu, ou continue de, les abîmer. Nous sommes en effet face à des individus plus ou moins brisés, plongés dans des situations difficiles, voire intenables, pour lesquels cette rencontre IRL va peut-être pouvoir être une bouée de sauvetage. Apprendre ou re-apprendre l'amitié, l'amour... Sunao ni Narenakute, c'est aussi une réponse à l'isolement de l'homme moderne dont le salut passe par la force du collectif.

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Il faut dire que nos héros ont bien besoin de tirer parti de la maxime suivant laquelle "l'union fait la force". Car ils doivent face fae à de vrais problèmes, à bien des égards insolubles. Ainsi, Haru est une jeune professeur qui découvre son métier. Son absence de confiance en elle, qui se manifeste par un manque d'assurance chronique, rejaillit dans sa vie professionnelle, mais aussi personnelle. Nakaji, lui, se rêve artiste-photographe ; mais il navigue pour le moment entre un rôle d'assistant et réalisateur de photos de charme. Plus précaire encore, Doctor a immigré de Corée du Sud il y a quelques années. S'étant créé une identité de médecin dans le monde virtuel, il se heurte en réalité à l'environnement professionnel hostile des commerciaux, subissant quotidiennement humiliations et brimades de la part de ses supérieurs (une forme de racisme ?). Dans cette catégorie "très compliquée", il est également possible d'y classer la vie de Peach, laquelle semble avoir perdu tout sens. Mal dans sa peau, la jeune femme a l'impression d'être cernée de toute part. Entretenant une liaison sans futur possible avec un homme marié, elle pense être enceinte. Cherchant un exutoire dans l'automutilation, c'est un appel au secours qu'elle lance à ses nouveaux amis. Enfin, prouvant que les apparences peuvent être trompeuses, Linda paraît avoir la vie professionnelle la plus épanouie. Mais le jeune homme est confronté aux avances de plus en plus pressantes de sa supérieure hiérarchique. Une situation de harcèlement qui n'arrange pas ses problèmes physiques rencontrés lors de l'acte sexuel lui-même.

En somme, nous voilà donc aux prises avec des personnages bien écornés, parfois de façon irrémédiable. Le flirt avec une issue tragique est continuel. Le flashforward d'ouverture du premier épisode, spoiler dispensable mais qui pose un enjeu majeur, ne fait que souligner une évidence, que Peach mettra la première en acte. En dépit de ce cadre guère festif, Sunao ni Narenakute évite l'écueil de l'apitoiement : c'est un message où perce l'espoire que véhiculent les premiers épisodes de la série, posant finalement les bases optimistes d'une possible amitié. Le drama est d'autant plus dense qu'aucun de ses personnages ne se réduit à ses seules difficultés. Chacun présente plusieurs facettes, que le pilote ne permet que d'entre-apercevoir. Il esquisse des personnalités complexes, très loin d'être unidimensionnelles. Conservant ainsi l'attention du téléspectateur, ce sont autant de promesses pour les épisodes à venir, et de développements potentiels que l'on attendra avec curiosité.

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L'autre grande problématique évoquée par Sunao ni Narenakute correspond à ce portrait de socialisation moderne que le drama introduit. Sa description du passage du virtuel à la rencontre IRL sonne d'ailleurs très juste : sont exposés les différents stades de ce processus, au sein desquels le téléspectateur familier d'internet s'y retrouve aisément, des hésitations initiales jusqu'aux petits flottements et nécessaires ajustements à réaliser lorsque l'on se côtoie ensuite dans la vraie vie. La série est une occasion de permettre l'initiation d'une réflexion sur les rapports nés des réseaux sociaux. Plus globalement, elle traite de la socialisation des générations actuelles, mais aussi de la solitude engendrée par le rythme de vie d'une société qui s'agite autour de chaque individu, sans se préoccuper des sorts particuliers. A ce titre, il faut souligner certains dialogues particulièrement bien écrits, aux accents très authentiques, notamment les moments où les personnages exposent les raisons pour lesquelles chacun a éprouvé le besoin d'échanger sur twitter, puis de se rencontrer dans la réalité. Ces passages intéressants touchent une fibre sensible.

Au-delà des lourds problèmes individuels introduits, Sunao ni Narenakute met en exergue des maux plus profonds dont souffrent les sociétés modernes, soulignant cette déstabilisante perte de repères, conséquence d'une rupture du lien social au sein de milieux pourtant surpeuplés comme l'espace des grandes villes. Chacun s'y croise, mais personne ne se voit, en témoigne la scène du début où Haru et Nakaji traversent le même pont sans échanger un regard. Instinctivement, l'être humain recherche des palliatifs, pour corriger ce sentiment d'isolement. La série est aussi une invitation pour découvrir jusqu'où nos outils de communication et toute cette technologie peuvent nous conduire et nous aider sur cette voie, peut-être aussi à double tranchant.

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Sur un plan formel, la série se révèle des plus solides. La réalisation reste classique, mais offre quelques bons plans. A l'occasion, le découpage de l'écran et les balayages de changement de scènes s'insèrent sans souci dans la narration globale. La bande-son est plutôt sympathique et plaisante, collant bien à l'ambiance générale ; il faut cependant noter la forte présence de chansons anglophones.

Enfin, si tous ces arguments déjà énoncés ne vous ont pas encore convaincu de laisser sa chance à Sunao ni Narenakute, son casting devrait lui attirer les faveurs de quelques téléspectateurs supplémentaires, au vu des têtes connues qui s'y pressent. On retrouve en effet à l'affiche un couple phare composé de Eita et Ueno Juri (ce qui ne fait, certes, que renforcer la tentation du téléspectateur de faire des parallèles avec Last Friends). Pour assurer une touche d'international, le chanteur coréen Hero JaeJoong (membre de DBSQ) est venu pratiquer son japonais. Tamayama Tetsuji et Seki Megumi complètent ce casting assez homogène et plutôt solide.

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    Bilan : Série aux premiers abords assez sombres, Sunao ni Narenakute dresse le portrait désenchanté du quotidien d'une génération plongée dans une société où le lien social s'est dilué. S'intéressant à un nouvel outil de socialisation (twitter), elle esquisse une réflexion sur ces réseaux sociaux capables de faire naître des relations qui, à terme, peuvent devenir tout aussi tangibles et solides. Fable sur l'amitié, tout autant que questionnement sur les rapports et la place du virtuel et du réel, ce drama se rélève très riche en émotions les plus diverses, alternant scènes poignantes et instants d'éclaircie salvateurs. Ses premiers épisodes remplissent efficacement leur office, permettant de s'attacher aux différents protagonistes et donnant envie au téléspectateur de s'investir.


    NOTE : 7,5/10


    Une brève présentation de la série :