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01/05/2014

(J-Drama) Woman : une série émouvante qui ne laisse pas insensible

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Le Festival Séries Mania s'est achevé hier soir. Je n'y suis restée que quatre jours, mais ils furent riches en visionnages et en rencontres sériephiles ! Parmi les différentes catégories de prix attribués, outre notamment un prix du public qui a couronné la mini-série anglaise Southcliffe (cf. ma critique écrite l'été dernier), figurait cette année un prix des blogueurs, auquel je participais, pour récompenser une "série du monde". La série japonaise Woman a remporté ce titre. C'est avec beaucoup de plaisir et un peu d'émotion que je l'ai vue s'imposer au sein de notre jury. Il sera temps dans les prochains jours de revenir sur les découvertes permises par Séries Mania, mais, pour aujourd'hui, quelques mots sur Woman, sur laquelle je n'avais pas encore eu l'occasion d'écrire un article complet, même si je vous en avais déjà parlé à plusieurs reprises. 

[La review qui suit a été prépubliée, dans une première version, sur le site du Festival.]

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Il est des séries dont on ressort marqué, des fictions qui touchent des cordes sensibles et interpellent leurs spectateurs. Woman est incontestablement de celles-là. Son scénariste, Yuji Sakamoto, est loin d’en être à son coup d’essai dans ce registre qui requiert finesse et subtilité. Il a par le passé su brillamment explorer de complexes dynamiques familiales. Woman s’inscrit ainsi dans la droite ligne d’une œuvre comme Mother datant de 2010. Elle raconte l’histoire de Koharu Aoyagi (interprétée par Hikari Mitsushima, magistrale), une jeune femme devant subvenir seule aux besoins et à l’éducation de ses enfants en bas âge.

Woman impressionne d’abord par sa faculté à raconter, avec un sens du détail et une authenticité jamais prise en défaut, les scènes de vie ordinaires composant les journées de cette mère isolée. L’écriture instaure immédiatement une proximité et une empathie sincère avec Koharu. Le quotidien dépeint est dur : de l’épreuve journalière que représentent les transports bondés, jusqu’aux divers emplois à temps partiel cumulés dont les horaires la forcent parfois à laisser ses enfants seuls, la vie de Koharu est une course permanente. En proposant ces instantanés du quotidien, anecdotes souvent touchantes, parfois bouleversantes, Woman suscite de fortes décharges émotionnelles ; elle ne verse cependant jamais dans du mélodrame gratuit, faisant preuve de justesse et de retenue.

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Explorant une dimension intime, profondément humaine, la série voit son propos s’élargir au fil des premiers épisodes. Comme la situation financière de Koharu se détériore, la jeune femme se rend au bureau de l’aide sociale. La réception qui lui est réservée réveille d’autres blessures. Non seulement ces services la contraignent à se remémorer le drame à l’origine de sa précarité, mais ils conditionnent aussi leur aide éventuelle à l’absence de soutien de ses parents. Seule encore vivante, sa mère n’a pas reparlé avec Koharu depuis deux décennies. La situation va provoquer des retrouvailles douloureuses. S’entrouvre une autre histoire familiale, tout aussi chargée d’émotions, auprès de cette figure maternelle qui a refondé un foyer, devenue une étrangère pour sa propre fille.

En outre, le parcours de Koharu durant ces premiers épisodes apparaît comme un révélateur de la société japonaise. Par-delà ces portraits de dynamiques relationnelles difficiles, le choix de son sujet permet à Woman d’acquérir une dimension sociale qui ne peut laisser indifférent. Elle est l’occasion d’éclairer la place des mères célibataires au Japon et de montrer quel regard est porté sur elles. Il s’agit aussi d’insister sur la précarité dans laquelle elles vivent, alors même que revient régulièrement au Japon, dans les débats publics, la question de la réduction des aides auxquelles elles peuvent prétendre. C’est un thème de société fort qui est ainsi abordé, mettant en exergue l’ostracisme subi par ces femmes.

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Bilan : Délivrant un récit empreint de sincérité, Woman propose un équilibre convaincant sur un double registre à la fois émotionnel et intellectuel. Son récit trouve un écho particulier auprès d’un large public, porté par un casting impeccable au sein duquel l'actrice principale, ainsi que celle qui joue sa petite fille, savent faire fondre les coeurs. En somme, c'est une série aux accents universels qui marque, tout simplement. Avis aux sériephiles, bien au-delà des seuls amateurs de fictions asiatiques (la série compte seulement 11 épisodes) : n'hésitez pas à être curieux !


NOTE : 8,25/10


Une bande-annonce de la série :

16/01/2013

(J-Drama) Hitori Shizuka : un intriguant et fascinant drama

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Je poursuis mes rattrapages de séries de la saison automnale au Japon, alors même que les premiers épisodes des j-dramas de l'hiver 201 3 nous parviennent déjà et qu'il sera bientôt temps de s'y pencher. Après Double Face mercredi dernier, je ne change pas de chaîne et reste sur WOWOW (avouons que si elle n'existait pas, ma consommation de séries japonaises serait bien moindre !) pour cette fois-ci revenir sur un autre des dramas prenants de la saison dernière, Hitori Shizuka.

Adaptation d'un roman du même titre de Honda Tetsuya, il s'agit d'un renzoku comptant 6 épisodes d'une cinquantaine de minutes chacun. Il a été diffusé les dimanche soirs du 21 octobre au 25 novembre 2012. Bénéficiant d'une écriture solide, c'est une fiction extrêmement intriguante et mystérieuse qui aura subtilement et habilement exploité une histoire qu'il n'était pourtant pas si facile que cela de transposer à l'écran.

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Il est difficile de proposer un résumé de ce drama sans gâcher la saveur qu'acquiert progressivement cet enchaînement d'histoires qui, peu à peu, apparaissent de plus en plus liées les unes aux autres. Hitori Shizuka relate en effet successivement, au fil de ses différents épisodes, plusieurs meurtres, en apparence sans connexion entre eux. Mais derrière lesquels se cache une seule présence, celle d'une jeune portée disparue, Ito Shizuka, belle-fille d'un haut gradé de la police. Ce sont les actions, la vie et les motivations mystérieuses de cette fille que ce drama va entreprendre de nous raconter.

Le premier épisode s'ouvre en 1996. Un gangster est alors abattu dans un appartement d'un quartier résidentiel. Règlement de comptes, vengeance, les mobiles possibles ne manquent pas étant donné la victime... Un des officiers patrouilleurs, Kizaki, arrivé parmi les premiers sur les lieux, est adjoint à l'équipe menant l'enquête. Il s'interroge sur la non-prise en compte d'un rapport d'autopsie et les non-dits de son supérieur qui en sait peut-être plus qu'il ne veut bien le dire. Un suspect est cependant arrêté. Or il affirme que la victime n'était pas seule dans l'appartement et qu'une jeune fille, en tenue de lycéenne, s'y trouvait également.

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Hitori Shizuka est tout d'abord un drama qui marque par la construction maîtrisée de son histoire, laquelle acquiert peu à peu toute son ampleur. Il se dégage de l'ensemble une solidité et une cohérence jamais prises en défaut. La première partie de la série est avant tout très intriguante, aiguisant la curiosité du téléspectateur devant le mystère, pour l'instant seulement effleuré, que représente Ito Shizuka et toutes les questions que suscitent les actes qu'elle commet ou provoque. Se réappropriant avec une efficacité redoutable les codes classiques des fictions policières, les premiers épisodes ont l'apparence d'enquêtes déconnectées entre elles, derrière lesquelles plane l'ombre inquiétante et déroutante de la jeune femme. La série se révèle extrêmement convaincante dans sa manière de capturer, avec beaucoup de rigueur, le fonctionnement des unités d'investigation au sein de la police japonaise. Capable d'introduire à chaque fois de nouveaux protagonistes policiers avec une aisance qu'il faut saluer, l'approche narrative est ambitieuse : c'est d'abord d'un point de vue extérieur, et de manière incidente, que la série amène le téléspectateur à s'interroger sur Ito Shizuka.

Puis, un recentrage s'opère progressivement sur la jeune femme : de façon particulièrement glaçante, est alors véritablement mise en lumière la dangerosité machiavélique dont elle est capable de faire preuve. Ce personnage inclassable fascine d'autant plus que l'écriture, habilement, fait le choix de ne jamais trop en dire. Le drama fait toujours preuve de beaucoup de retenu, disséminant les indices et les informations, mais évitant tout long discours explicatif ou autres scènes de pure exposition. Le scénariste suggère, mais fait confiance au téléspectateur pour déduire et apprécier les situations comme il se doit. Tout en se montrant parfois très forte et dense, la narration adopte un style presque minimaliste, où prévaut une grande sobriété. Il s'agit d'un des grands atouts du drama, même si cela sera aussi source d'un léger flottement lors de sa conclusion : cette dernière se voit en effet précédée d'un saut temporel de plus d'une décennie qui nous ramène dans le présent, sans qu'aucune indication ne soit donnée à l'écran. Il faut quelques minutes au téléspectateur pour retrouver ses marques et comprendre qui et à quelle époque sont les protagonistes mis en scène. Il est possible que le roman soit ici en cause, le texte d'origine ayant peut-être voulu entretenir un temps la confusion. Reste que la chute de la série n'en demeure pas moins d'une logique et d'une légitimité parfaites par rapport à la tonalité de l'histoire, refermant parfaitement la boucle de vie qui aura été relatée.

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La sobriété bien huilée de Hitori Shizuka se retrouve sur la forme. Sa réalisation est globalement soignée et maîtrisée, accompagnée d'une bande-son uniquement composée de thèmes musicaux instrumentaux qui est opportunément choisie et qui accompagne très bien le récit. Si, comme je l'ai dit, la gestion des sauts temporels aurait mérité d'être un peu plus soulignée (juste indiquer l'année à l'écran !), je retiendrais surtout de ce drama sa mise en scène des fusillades. Il faut dire que ces dernières semblent tout d'abord vouloir poser une vérité : personne ne sait manifestement tirer au pistolet quand il s'agit d'abattre froidement quelqu'un ! Surtout, elles traduisent une certaine surenchère avec un sur-jeu qui décontenance, au point que la première scène du drama déstabilise vraiment. Ce n'est que lorsqu'est venue la grande fusillade de l'épisode 4 que j'ai véritablement compris ce que le réalisateur essayait de faire. Car si la première prend trop au dépourvu pour fonctionner, la seconde d'une ampleur toute autre est assez jubilatoire par la distance qu'elle introduit.

Enfin Hitori Shizuka bénéficie d'un solide casting choral, puisque nombre d'acteurs occupent le devant de la scène le temps d'un épisode seulement. Le rôle d'Ito Shikuza est confié à Kaho (Diplomat Kuroda Kousaku), autour de laquelle tout le récit tourne, mais qui n'a cependant pas une présence aussi importante que l'affiche du drama aurait pu le laisser supposer. Interprétant un personnage froid, peu expressif, ou se contentant de préserver sobrement les apparences, l'actrice s'en sort très bien dans ce registre. Autour d'elle, vont graviter plusieurs têtes plus ou moins familières du petit écran japonais, tel Murakami Jun, Arai Hirofumi (Shokuzai, Going my Home), Nagatsuka Keishi, Takahashi Issei, Matsushige Yutaka (Shinya Shokudou, Unmei no Hito, Kodoku no Gurume) (que j'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir !), Tokiwa Takako (Tenchijin), Takito Kenichi, Nukumizu Yoichi (BOSS), Ikeda Narushi, Kurosawa Asuka, Nikado Satoshi, Midori Mako ou encore Kishibe Ittoku.

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Bilan : Tour à tour mystérieux, puis inquiétant, voire glaçant, Hitori Shizuka est un intriguant drama dont l'histoire se déploit peu à peu pour se révéler extrêmement solide. Sa construction, avec une progressive mise en pleine lumière de la jeune femme et ses secrets, est très bien gérée. Le style d'écriture retient l'attention en raison de l'assurance avec laquelle le drama choisit de faire confiance au téléspectateur pour déduire certains faits, comprendre les silences et les liens à opérer, évitant les passages d'exposition et les longs discours pesants qui peuplent trop souvent ce genre de fiction. En résumé, Hitori Shizuka est un drama habile, subtile, qui relate de façon ordinaire une histoire qui ne l'est pas, chargée de non-dits dans lesquels se trouve toute sa force. Seule la mise en scène de la conclusion suscitera quelques réserves, mais qui ne remettent pas en cause les qualités de l'ensemble. A voir.


NOTE : 8/10