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10/03/2013

(Pilote US) Vikings : à la conquête de l'Ouest, par Odin !

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Après le succès rencontré l'an dernier par la mini-série Hatfields & McCoys, History Channel poursuit ses incursions dans le genre des séries historiques. Le week-end dernier (le 3 mars 2013), elle lançait ainsi deux nouveautés qui ont été un joli succès côté audiences. C'est tout particulièrement vrai pour la première, The Bible - une mini-série dont vous devinez le sujet -, ayant servi de lead-in à cette soirée de fictions qui s'est poursuivie avec la diffusion du pilote de Vikings.

A l'origine de cette dernière, dont une saison de 9 épisodes est prévue, se trouve Michael Hirst, une figure familière des fictions historiques à qui l'on doit notamment The Tudors de Showtime. Vous connaissez mon inclinaison pour tout se qui ressemble de près ou de loin à une série en costumes : avec son cadre moyenâgeux, Vikings bénéficiait d'un sujet de départ qui avait retenu mon attention, sorte de complément à une de mes lectures actuelles, les Histoires Saxonnes de Bernard Cornwell (des livres qui parlent de l'Angleterre du IXe siècle, entre Saxons et Vikings). Si le pilote m'a un peu laissé sur ma faim, le deuxième est venu confirmer que la série pouvait disposer d'un intéressant souffle narratif. A la conquête de l'Ouest, par Odin !

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Vikings débute à la toute fin du VIIIe siècle. Elle met en scène un ambitieux viking, Ragnar Lothbrok (une figure mi-historique, mi-légendaire du peuple viking) qui rêve de partir à l'assaut des territoires qui se trouvent à l'ouest de la Scandinavie, vers des terres où se trouveraient de nombreuses richesses, mais où s'étend aussi le culte d'un nouveau Dieu. Il partage ses espoirs avec son épouse, Lagertha, une femme de caractère qui sait également manier les armes. C'est cependant sur son impulsif frère, Rollo, que Ragnar s'appuie pour monter ses projets, même s'il apparaît vite d'un soutien très aléatoire, nourrissant des sentiments et ressentiments complexes à son égard.

Les aspirations de Ragnar se heurtent au conservatisme intransigeant du chef local, Haraldson, qui, crispé sur son pouvoir et pas particulièrement visionnaire, envoie invariablement ses hommes piller l'Est depuis des années. En dépit de cette opposition, les choses s'apprêtent enfin à changer : avec l'aide d'un ami, Floki, concepteur de navires capables de parcourir de grandes distances sur les mers, et d'un objet qui lui permet de s'orienter grâce au soleil en naviguant, Ragnar entend désormais réaliser l'expédition dont il rêve et partir vers ces nouveaux territoires, et vers de nouvelles découvertes.

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Vikings est un mélange, assumé et plutôt bien dosé narrativement, entre le divertissement moyenâgeux musclé et abrasif, et la volonté de nous présenter cette société nordique, très superficiellement connue de la plupart des téléspectateurs. La série a ainsi l'art de surfer sur nos préconceptions et sur les images que l'on peut avoir de ce peuple, guère associé dans la mémoire collective au pacifisme, tout en distillant quelques détails culturels qui viennent donner un certain cachet à la reconstitution proposée. Le pilote nous offre ainsi un aperçu de leurs croyances religieuses, puis, dès le deuxième épisode, s'amorce l'opposition entre le paganisme Viking et le christianisme, avec l'évangélisation qui se poursuit en Europe. On a également l'occasion d'assister au rendu de la justice, et de voir le rôle des hommes libres dans le verdict ainsi que l'influence du Earl, protégeant avant tout ses intérêts. Ces différents éléments permettent d'offrir à la série un cadre cohérent - c'est tout l'objet du premier épisode - sur lequel elle va pouvoir ensuite s'appuyer pour développer son histoire.

Sur ce plan justement, Vikings se révèle plutôt simple et basique. Elle va explorer des thèmes familiers, les adaptant à l'époque mise en scène. Au programme de ces conquêtes vers l'Ouest : heurts d'égos et d'ambitions, luttes de pouvoirs, relations de couples et art de faire la guerre, le tout sur fond d'opposition entre un chef établi s'accrochant à ses prérogatives et un jeune ambitieux qui entend redistribuer les cartes à son profit, usant non seulement de son sens de l'initiative mais aussi d'avancées technologiques. Après un premier épisode introductif, le récit décolle vite, sans tergiversation inutile. Les dynamiques qui s'installent entre les personnages sont plutôt pimentées, souvent construites dans la confrontation. De façon appréciable, au sein de cette société guerrière, les femmes savent s'imposer, à l'image de Lagertha qui dévoile une adresse intéressante au tisonnier dès le pilote. Les personnages ont pour la plupart leurs ambivalences (quand ils n'apparaissent pas uniformément sous un jour sombre), comme en témoigne le versant inquiétant que laisse vite transparaître le frère du protagoniste principal. Ragnar lui-même, tout entier consacré à ses projets, a l'aplomb (et la foi, étant donné ses "visions divines") de ceux qui ne doutent jamais du bienfondé de leurs ambitions, au risque de s'y brûler.

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Sur la forme, Vikings tire parti de son lieu de tournage, l'Irlande, pour proposer quelques jolis paysages "simili-nordiques". Les effets spéciaux ont certaines limites (la bataille introductive avec les Walkyries emportant l'âme des guerriers), mais l'ensemble reste honorable. Moyen-Âge oblige, l'éclairage n'est pas le fort des scènes intérieures, a fortiori lorsqu'elles sont nocturnes, cependant, il n'en demeure pas moins que le téléspectateur se glisse sans difficulté dans l'univers reproduit sous ses yeux. Par ailleurs, la série s'offre aussi un générique assez soigné qui a le mérite de bien poser l'ambiance et l'univers.

Enfin Vikings rassemble un casting au sein duquel certains doivent encore s'affirmer. Mais Travis Fimmel (The Beast) interprète de manière convaincante le héros, apportant à son personnage la dose d'assurance qui convient. Katheryn Winnick (Bones) incarne son épouse. Clive Standen (Camelot) joue son frère, figure rassurante lorsque la bataille vient, mais souvent inquiétante. L'ami concepteur du navire sur lequel repose les espoirs de Ragnar est interprété par Gustaf Skarsgard (Bibliotekstjuven), tandis que le chef auquel il s'oppose l'est par Gabriel Byrne (In Treatment, Secret State). Jessalyn Gilsig (Boston Public, Glee) incarne l'épouse de ce dernier. Enfin, George Blagden joue un moine saxon capturé lors d'un raid au cours du deuxième épisode. En guise de repères linguistiques, chacun parle anglais avec un étrange accent qui, personnellement, m'a un peu perturbé.

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Bilan : Un ancien peuple guerrier avec ses moeurs et ses croyances, de la violence, de jolis paysages, un peu de mal de mer, quelques pillages, le tout sur fond de confrontations d'ambitions et de quêtes de grandeurs et de richesses : Vikings rassemble un cocktail d'ingrédients qui a tout pour donner du divertissement historique moyenâgeux musclé. La série n'a certes pas les ambitions d'une incursion dans la fantasy moyenâgeuse à la Game of Thrones, mais elle a certainement les moyens de proposer une saison honnête et efficace dans son genre. Pour les amateurs.


NOTE : 6,5/10


La bande-annonce de la série :

Le générique de la série :

15/12/2012

(Mini-série UK) Secret State : conspiration dans les coulisses du pouvoir

"You get to the top, and you realise, it's really only the middle."
(Tom Dawkins, Premier Ministre)


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Je vous parlais il y a quelques semaines de la très intéressante mini-série A Very British Coup, thriller politique pessimiste particulièrement happant des années 80, inspiré du roman éponyme d'un député britannique de l'époque, Chris Mullin. Channel 4 s'est proposée durant le mois de novembre de moderniser ce récit, en se réappropriant librement ces interrogations sur le pouvoir réel derrière le pouvoir politique. Cette nouvelle mini-série, Secret State, compte 4 épisodes.

Fiction ambitieuse, aux thèmes multiples, elle n'aura pas su mener sa démonstration jusqu'au bout, cédant trop souvent à une surenchère et à une escalade dans la complexification des intrigues au fil de laquelle le propos même de l'oeuvre s'est un peu dilué. Cependant elle n'en reste pas moins un honnête thriller, globalement prenant.

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Secret State débute à la suite d'une tragédie. Un accident industriel dévaste un petit bourg et fait plusieurs dizaines de victimes. Ce sont les installations d'une entreprise de pétrochimie, PetroFex, qui ont provoqué cette catastrophe. Après le choc et le temps du deuil, le Premier Ministre britannique s'envole pour les Etats-Unis pour négocier avec le géant pétrolier une compensation pour les citoyens britanniques touchés. Mais, sur le chemin du retour, son avion disparaît des écrans radars. L'épave est ensuite retrouvée, sans survivants.

Alors que le pays est en pleine période électorale, le vice-Premier Ministre, Tom Dawkins, est contraint de prendre les choses en main pour assurer à la fois l'assise de son parti et la conduite du pays. Cependant l'affaire PetroFex ne fait que commencer, et ses ramifications vont bien au-delà de ce qui pouvait être imaginable. En plus de devoir rechercher les causes de l'accident industriel, les services de sécurité doivent enquêter sur la mort du Premier Ministre. Les réponses offertes ne satisfont pas Tom Dawkins. Dans sa quête pour la vérité, il va se trouver confronter à des forces d'un système dont il n'est que le leader apparent.

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Secret State bénéfici tout d'abord d'un sujet particulièrement intéressant, ayant beaucoup à dire sur la réalité de nos démocraties modernes et sur ses illusions. Là où A Very British Coup s'inscrivait dans un contexte particulier de prise de pouvoir d'un parti travailliste socialisant à une époque où l'URSS n'était pas encore tombée, Secret State modernise ses problématiques en évoquant pêle-mêle les enjeux énergétiques et pétroliers, le pouvoir de la finance et des banques, mais aussi le spectre du terrorisme et des guerres énergétiques du Moyen-Orient. Entre le thriller politique, la fiction conspirationniste, le tout saupoudré de journalisme d'investigation et d'espionnage, la mini-série jongle avec ces différentes thématiques. Le fil rouge de l'ensemble est le nouveau Premier Ministre britannique, Tom Dawkins, qui manoeuvre comme il peut au milieu de ces intérêts contradictoires. Il est un homme de principes, mais surtout une figure isolée dans un monde où le politique s'efface devant la puissance d'autres pouvoirs de l'ombre, et où une oligarchie qui n'a jamais de comptes à rendre au peuple s'active et sert ses propres intérêts.

Avec son récit dense et une histoire complexe, Secret State retient l'attention du téléspectateur, et s'avère dans l'ensemble globalement efficace. Pourtant, elle laisse malgré tout un arrière-goût d'inachevé. L'ambition du scénario est manifeste, voulant englober toutes les problématiques actuelles des enjeux géostratégiques à la finance internationale. Mais la mini-série tend à verser dans la surenchère. Complexifiant à outrance certains développements de l'histoire, multipliant les interventions de protagonistes qui ne trouvent pas toujours leur place, Secret State donne parfois l'impression de tout survoler sans être capable d'aller vraiment au fond des choses. Ainsi, si son propos, passionnant, trouve indéniablement un écho particulier à l'heure actuelle, la démonstration aurait vraiment gagné en force à faire plus simple et percutant. Vous m'objecterez qu'il vaut sans doute mieux une fiction qui pèche par excès de richesses qu'une oeuvre creuse et vide, cependant il est frustrant de voir laisser inexploité ce vaste potentiel juste effleuré dans la précipitation avec laquelle tout est traité.

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Sur la forme, Secret State est une mini-série parfaitement maîtrisée. Sa réalisation est soignée, et le format choisi, le même que Top Boy l'an passé sur Channel 4 également, étire l'image dans sa longueur dans un style cinématographique inhabituel pour le petit écran, mais qui apporte un cachet supplémentaire à l'ensemble. La série sait aussi jouer sur l'ambiance qui se dégage de certaines images symboliques, n'ayant pas son pareil pour présenter un temps grisâtre, où les nuages menaçants s'amoncellent dans le ciel, signe des drames passés et des difficultés à venir.

Enfin, Secret State rassemble un casting extrêmement solide, dont on regrettera surtout qu'en seulement 4 épisodes, beaucoup ne soit que trop peu exploité au goût du téléspectateur (parmi lesquels Charles Dance (Bleak House, Game of thrones), Stephen Dillane (John Adams), Gina McKee (The Lost Prince) ou encore Rupert Graves (Garrow's Law, Sherlock)). Le rôle de Tom Dawkins revient à un Gabriel Byrne (In Treatment) qui, tout en subtilité et en nuance, construit un personnage complexe, plus fort et persévérant que l'on aurait pu lui donner crédit à première vue, homme providentiel -ou non- se retrouvant soudain placé devant des responsabilités énormes. Sa progression aboutit à un extrêmement discours final qui mérite le détour. A noter, sur le plan de l'anecdotique, que Chris Mullin lui-même - l'auteur de A Very British Coup - fait une brève apparition dans la mini-série.

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Bilan : Thriller politique et conspirationniste ambitieux, Secret State suit le parcours d'un politicien propulsé à la tête du pays suite à une tragédie. Tenant son mandat du peuple, il se heurte pourtant rapidement aux limites du politique et à la réalité du pouvoir de l'ombre, entre enjeux financiers et énergétiques. Dressant un portrait pessimiste et sans complaisance de la réalité de nos démocraties modernes s'apparentant à de véritables oligarchies, la mini-série ne parvient cependant pas à exploiter complètement son potentiel. Voulant traiter trop de thématiques à la fois, elle n'en traite au final véritablement aucune en profondeur, se contentant de tout survoler. Cela reste certes une fiction très correcte dans son genre, mais qui laisse malgré le téléspectateur quelque peu frustré.


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la mini-série :