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16/11/2013

(Mini-série UK) The Escape Artist : un essai de thriller judiciaire

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Aujourd'hui, direction l'Angleterre pour le bilan d'une fiction qui a été diffusée ces dernières semaines. Proposée du 29 octobre au 12 novembre 2013, sur BBC1, The Escape Artist est une mini-série qui aiguisait la curiosité. Se présentant comme un thriller judiciaire, on retrouvait à sa création David Wolstencroft, à qui l'on doit Spooks. Le scénariste allait-il être capable de transposer les tensions et les rebondissements qu'il avait maîtrisés dans l'univers de l'espionnage au contexte particulier du barreau londonien ? Par ailleurs, la série pouvait aussi s'appuyer sur un solide casting, porté par David Tennant. Malheureusement, The Escape Artist est une fiction qui montre vite ses limites et laisse au final le téléspectateur sur un sentiment de déception. 

[La review qui suit révèle quelques évènements importants du déroulement de l'intrigue.]

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Will Burton est un barrister de talent, connu pour n'avoir jamais perdu une seule affaire. Il n'a pas son pareil pour exploiter à merveille le moindre détail de procédure au profit des justiciables qu'il défend. Rien ne semble pouvoir interrompre le cours de sa carrière qui s'annonce brillante, promis à une belle ascension vers les sommets. Jusqu'au jour où il accepte de représenter Liam Foyle, accusé du meurtre atroce d'une jeune femme. Si la culpabilité de ce dernier fait peu de doute, Burton obtient cependant, avec son habileté légendaire, son acquittement. Seulement cette victoire va marquer le début d'une éprouvante descente aux enfers pour le juriste...

En dépit de sa victoire, Foyle commence par déposer plainte contre lui pour une attitude supposément inappropriée durant le procès. Puis, il se met à harceler sa famille. Un soir, dans la maison de campagne qu'ils possèdent, Burton retrouve le cadavre de son épouse qui vient d'être sauvagement assassiné, tandis que son fils, choqué, s'est caché dans un recoin. Will n'a que le temps de voir Foyle à travers une fenêtre. Malheureusement, le meurtrier a une nouvelle fois été prudent : c'est surtout sur le témoignage de son ancien avocat que repose l'accusation. Or Maggie Gardner, une collègue qui aspire à sortir de l'ombre de Burton, décide de tout mettre en œuvre pour défendre Foyle et discréditer les preuves qui pèsent contre lui...

Jusqu'où Liam Foyle et Will Burton sauront-ils exploiter l'appareil judiciaire britannique ?

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Le concept de The Escape Artist ne manquait pas de potentiel, permettant d'aborder quelques grands sujet liés à la notion de Justice, de droits de la défense, mais aussi à la place des avocats au sein du système judiciaire. Derrière le drame qui se noue, c'est en effet une histoire d'ambitions et d'égos au sein d'un milieu professionnel feutré qui se retrouve soudain confronté à un individu rompant la distance maintenue avec les justiciables. Brusquement, le cadre de l'action ne se situe plus dans les débats rhétoriques et autres arguties juridiques d'une cour de justice : les faits touchent personnellement. Pour Burton, c'est même tout son univers qui s'effondre. Malheureusement, loin d'exploiter cette base, la série se contente d'un balayage extrêmement superficiel de tous ces thèmes, préférant se construire sur un rythme artificiel à partir duquel elle essaie (souvent vainement) de susciter une tension. En voulant miser sur le seul registre du thriller, elle en oublie l'essentiel : offrir une fondation crédible et solide à l'histoire dans laquelle elle tente d'entraîner le téléspectateur.

De manière générale, si The Escape Artist rate le coche, c'est que, dès le départ, en adoptant une approche transparente et sans subtilité, l'écriture accumule les poncifs. Les personnages n'acquièrent jamais l'épaisseur espérée, cantonnés dans un rôle de simples outils scénaristiques avec pour seule fonction de créer des twists et des complications par leur attitude ou réaction. L'histoire sonne souvent très forcée, une impression qui est aggravée par une tendance chronique à s'enliser ou à complexifier inutilement les situations. Lancée dans une course vaine à la tension, la mini-série s'égare dans des idées mal exploitées, en même temps qu'elle égare le téléspectateur. La gestion de la confrontation finale entre Burton et Foyle, qui rend plus perplexe qu'elle ne marque par son intensité, est parfaitement révélatrice des limites d'un scénario qui avait manifestement des ambitions, mais ne s'est pas donné les moyens de les tenir à l'écran. Cela donne ainsi une fiction judiciaire avec certes quelques fulgurances, mais un thriller bien frustrant...

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Une partie des limites de The Escape Artist est également perceptible au niveau formel : on y retrouve en effet le même manque de subtilité de la narration, avec quelques plans trop appuyés qui téléguident l'histoire et l'interprétation des scènes par le téléspectateur tout aussi sûrement que les poncifs scénaristiques employés. La photographie, plutôt sombre, est en revanche parfaitement adaptée à l'ambition de thriller de la mini-série. Enfin, parmi les lieux de tournage notables, la bonne surprise a été lorsque j'ai vu surgir Édimbourg dans mon petit écran. La fiction s'y transporte en effet pour sa dernière ligne droite : de quoi offrir quelques-unes des vues les plus emblématiques de la ville et éveiller une pointe de nostalgie écossaise chez moi, petite récompense méritée pour être parvenue au bout de l'histoire.

Au fond, ce qui soutient la mini-série, c'est avant tout un casting très solide qui tient, lui, toutes les promesses qu'il laissait entrevoir sur le papier. David Tennant (Blackpool, Doctor Who, Single Father, Broadchurch, The Spies of Warsaw) est impeccable dans un registre de barrister brillant, mais brisé. Ce rôle de ténor du barreau lui permet aussi de pleinement s'exprimer lors de quelques envolées oratoires qui posent bien le personnage. Face à lui, Toby Kebbell est glaçant à souhait dans le rôle de Foyle. En concurrente de Burton, Sophie Okonedo (Father & Son, The Slap, Mayday) a un rôle plutôt ingrat, mais elle sait en faire ressortir toute l'ambiguïté. A leurs côtés, c'est également l'occasion de croiser Ashley Jensen (Extras, Ugly Betty), Tony Gardner (The Thick of It, Last Tango in Halifax), Anton Lesser (Perfect Strangers, Little Dorrit, The Hour, Endeavour), Patrick Ryecart, Stephen Wight (Whites, The Paradise) ou encore Roy Marsden (The Sandbaggers).

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Bilan : Si The Escape Artist bénéficiait d'un concept avec du potentiel, la mini-série n'est pas le thriller marquant qu'elle ambitionnait d'être, en dépit de quelques scènes qui sortent du lot grâce à un casting solide. Dotée d'une écriture guère portée dans la nuance, c'est par une approche superficielle, souvent artificielle, qu'elle traite son intrigue. Frustrante par ses raccourcis, mais aussi par sa tendance à ajouter des complications inutiles, la fiction apparaît inaboutie, avec nombre d'idées insuffisamment ou mal exploitées. La déception prédomine donc au terme de ses trois épisodes. Une fiction à réserver à ceux qui apprécient David Tennant.


NOTE : 5,75/10


La bande-annonce de la série :

21/12/2012

(Pilote UK) Last Tango in Halifax : une sympathique et attachante dramédie relationnelle

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Il est des séries qui sont faites pour un visionnage hivernal. Celles qui, empreintes d'une chaude humanité, donnent envie de s'emmitoufler devant son petit écran, en sirotant un thé, tandis que la nuit froide est depuis longtemps tombée dehors. Last Tango in Halifax est de cette catégorie de fictions. Créée par Sally Wainwright, elle est diffusée depuis le 20 novembre 2012, le mardi soir, sur BBC1. Sa première saison compte six épisodes et s'est achevée mercredi soir en Angleterre.

Rassemblant un casting cinq étoiles au sein duquel on retrouve notamment Derek Jacobi et Anne Reid, la fiction a conquis le public anglais : avec une audience moyenne tournant autour de 7 millions de téléspectateurs, elle est la série diffusée en semaine qui a rassemblé le plus large public en Angleterre cette année. Cela explique le renouvellement par BBC1 pour une seconde saison. En attendant, laissez-moi vous expliquer pourquoi son pilote, rattrapé la semaine dernière, a su me séduire.

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Alan et Celia se tournaient autour durant leur adolescence. Un déménagement et une lettre qui n'est pas parvenue à son destinataire les ont fait se perdre de vue sur un qui pro quo, chacun emportant avec lui son lot de regrets. Depuis, ils ont vécu leur vie, se sont mariés, ont eu des enfants... Soixante ans plus tard, se laissant convaincre par leurs jeunes générations de s'inscrire sur Facebook, ils se retrouvent par hasard par l'intermédiaire du réseau social. Tous deux sont désormais veufs. Lorsqu'Alan suggère qu'ils se rencontrent pour un thé, Celia hésite peu. L'après-midi qu'ils passent ensemble, riche en émotions, réveille des sentiments enfouis et oubliés. Serait-ce la possibilité d'une seconde chance pour leur ancienne flamme d'adolescence ?

Décidés à en profiter, ils annoncent alors, à leurs filles respectives, leur intention de se marier. Les deux femmes en restent sans voix : leur vie n'est-elle pas déjà assez compliquée comme cela ? Appartenant à deux milieux sociaux très différents, elles ont en effet leur lot de soucis. Caroline, la fille de Celia, dirige une école privée. Elle a deux garçons, mais sa vie personnelle est bien complexe : son mari, qui l'avait quittée, a délaissé sa maîtresse et veut revenir, alors que Celia avait entamé une relation avec une enseignante de son école. Quant à Gillian, la fille d'Alan, mère de famille veuve qui peine à joindre les deux bouts, jonglant entre sa ferme et un emploi de caissière dans un supermarché local, elle doit gérer un fils en pleine adolescence qui subit un peu trop l'influence du frère de son père. C'est peu dire qu'une telle famille recomposée promet sa part d'éclats et de confrontations.

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Last Tango in Halifax est une dramédie relationnelle pleine de tendresse. Elle met en scène une improbable histoire de retrouvailles, racontée avec une écriture sincère et touchante qui n'entend pas laisser le téléspectateur indifférent. Le pilote s'amuse à décrire la valse d'hésitations à laquelle jouent ces deux êtres qui se recroisent 60 ans après. La particularité de cette histoire d'amour renaissante tient justement au vécu de ses protagonistes. Ils portent un regard bien différent de celui de leur jeunesse sur la nature des liens qui les unissent. Les expériences passées et les regrets qui les accompagnent leur permettent de mesurer l'importance des moments de bonheur, mais aussi d'apprécier la force des sentiments qu'ils éprouvent. Avec une authenticté attendrissante, on assiste au réveil d'un ancien amour que le temps avait dilué, mais qui s'est paradoxalement fortifié au fil des histoires -et des désillusions- que chacun a pu vivre de son côté. Celia, tout particulièrement, éprouve une profonde amertume à l'encontre de son défunt mari, consciente de ne pas avoir toujours pris les bonnes décisions, pour les bonnes raisons.

Au-delà de ce couple central qui va provoquer une réunion familiale qui promet d'être pimentée, Last Tango in Halifax ambitionne, en prenant son temps (son rythme de narration est assez lent), d'explorer plus avant les dynamiques et la complexité des rapports unissant une galerie de personnages colorés introduits dès ce premier épisode. La complicité qui s'installe entre Alan et Celia offre quelques passages mémorables, empreints d'humour et d'une touche d'espièglerie qui fait mouche. Par contraste, la série pourra également jouer sur l'antagonisme instantané qui prend place entre les filles respectives du nouveau couple. Ces quadragénaires ont elles-mêmes leurs expériences de vie et leur lot de blessures personnelles. Elles ont des caractères extrêmement différents, mais ont toutes deux du potentiel pour évoluer. Leurs interactions promettent donc de pimenter aussi l'organisation du mariage soudain que leurs parents leur annoncent, les laissant pareillement pantoises. Voilà donc une série qui semble promettre sentiments et émotions. lasttangoinhalifaxh_zpsc66a93cf.jpg

Sur la forme, Last Tango in Halifax bénéficie d'une réalisation classique, qui convient bien à la nature du récit mis en scène. La série trouve une identité propre surtout par une bande-son qui suit très bien les changements de tonalités. Les thèmes instrumentaux légers et rythmés interviennent quand il le faut pour donner l'ambiance appropriée à certaines scènes marquantes, à l'image, dans le pilote, de l'improbable scène de course-poursuite qui voit Celia et Alan tenter de suivre la voiture volée de ce dernier (à vous faire pleurer de rire). 

Si Last Tango in Halifax fonctionne, elle le doit aussi beaucoup à un casting extrêmement solide. L'association entre Derek Jacobi (I Claudius, Cafdael) et Anne Reid (Bleak House, Marchlands, Upstairs, Downstairs) est très enthousiasmante : chacun délivre une prestation convaincante, et des hésitations à la complicité qui renaît bientôt entre eux, l'évolution de leurs rapports dans le pilote résonne avec une authenticité particulière. A leurs côtés, c'est toujours un plaisir de retrouver Nicola Walker (Spooks), qui incarne la fille d'Alan, tandis que Sarah Lancashire (Lark Rise to Candleford, The Paradise) interprète de façon très assurée la fille de Celia. Parmi les autres acteurs, c'est l'occasion de croiser notamment Tony Gardner (The Thick of it, Fresh Meat), Dean Andrews (Life on Mars) ou encore Ronni Ancona.

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Bilan : Last Tango in Halifax est une dramédie chaleureuse et confortable, à la fois tendre et profondément humaine. Une de ces oeuvres, pas vraiment originale et plutôt prévisible, mais dont l'écriture sait toucher et parler au téléspectateur. Elle offre aussi l'occasion de savourer de vraies performances d'acteurs qui apportent une dimension supplémentaire à l'histoire. C'est une de ces fictions sympathiques qui se regardent un froid soir d'hiver, chaudement installé sur son canapé. Ce n'est certainement pas une série qui conviendra à tous les publics, mais son pilote m'a agréablement surprise. A suivre.


NOTE : 7,5/10


Le générique de la série :