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23/12/2011

(UK) Rev., saison 2 : une dramédie douce-amère humaine et attachante

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Un an et demi après ma review du pilote, je profite de cette période de fêtes pour revenir sur une série qui est sans doute ma dramédie préférée actuellement en cours de diffusion ; même si elle est présentée comme une comédie, je n'ose la placer complètement dans ce genre. Reste que Rev. a été une des séries les plus attachantes de cet automne. Elle mérite donc bien de faire l'objet d'un bilan.

La diffusion de la saison 2 s'est achevée ce mardi. Elle avait été associée cet automne, par BBC2, à la dernière nouveauté, ni drôle, ni convaincante, de Ricky Gervais, Life's too short. C'est un épisode spécial Noël qui est venu la conclure ce 20 décembre, venant superbement parachever une saison de 7 épisodes. Mon attachement à Rev. me confirme une chose : je ne cherche pas des comédies pour rire. Un peu à la manière de The Café, Rev. se démarque par sa capacité à être touchante tout en capturant parfaitement certaines tranches de vie. 

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Rev. nous plonge dans une petite paroisse de l'Est de Londres, St Saviour, au sein de laquelle officie le révérend Adam Smallbone, lequel découvre la vie citadine après avoir longtemps officié dans le monde rural. Son quotidien se partage entre ses efforts constants pour dynamiser tant bien que mal une communauté paroissiale clairsemée et sa gestion de l'école privée locale rassemblant des élèves du quartier de toutes confessions. S'il n'est guère soutenu par un supérieur direct qui apparaît souvent plus semblable à un gestionnaire déshumanisé qu'à un homme d'église, Adam peut cependant trouver du réconfort auprès de son épouse, une avocate avec un caractère bien affirmé. De plus, gravite autour du révérend une galerie de personnages hauts en couleur, un assistant ambitieux, une paroissienne sur-impliquée ou encore un sans-abris marginal.

La grande force de Rev. réside incontestablement dans son humanité. Bénéficiant d'une écriture qui fait souvent preuve d'une rare justesse, la série n'a pas son pareil pour toucher le coeur du téléspectateur, réussissant le tour de force d'émouvoir sans jamais déprimer. En effet, si sa tonalité douce-amère, souvent un peu mélancolique, se teinte de doutes désillusionnés, elle offre pourtant trente minutes de véritable réconfort, pleines d'une chaleur communicative qui ne laisse jamais insensible. Tout en se classant dans le genre des comédies cléricales affectionnées par les Anglais, Rev. reste avant tout l'histoire d'un homme ordinaire, confronté aux soucis quotidiens d'une activité professionnelle loin d'être de tout repos dans la jungle londonienne. Le fait que le personnage principal soit un prêtre apporte une dimension supplémentaire à certains questionnements existentiels qu'il se pose, mais cela ne modifie en rien l'essence et le parti pris réaliste de la série. Une proximité se crée naturellement avec Adam, et c'est un des atouts qui assure la fidélité du téléspectateur.

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S'inscrivant dans la continuité directe de ce que la première avait su peu à peu construire, la saison 2 de Rev. aura été une belle réussite. Parvenant à maintenir un équilibre aussi rare que précieux dans sa tonalité d'ensemble, oscillant entre passages légers et moments plus dramatiques, la série est devenue une des dramédies les plus abouties du petit écran. Toujours très humaine, elle ne manque pas de scènes marquantes. A ce titre, l'épisode 4, se concluant sur une scène magistrale et bouleversante, d'une sobriété parfaite, restera sans doute le plus impressionnant de la saison. Il est parfaitement représentatif de ce qui fait l'essence de cette fiction : car Rev. est une oeuvre à part, de celles qui sont capables, dans un même épisode, non seulement de faire rire, mais aussi d'émouvoir aux larmes le téléspectateur. C'est dans cette continuité que s'est d'ailleurs inscrit le Christmas special, avec une construction qui reflète vraiment l'âme de la série, entre pragmatisme désenchanté et petites réussites du quotidien.

Par ailleurs, Rev. exploite pleinement son cadre londonien, l'anonymat d'une grande ville mais aussi son rythme effrené demeurent d'ailleurs des thèmes récurrents. La réalisation sait mettre en valeur le choix citadin fait au départ ; et l'esthétique globale de la série a cette neutralité sobre qui souligne bien le réalisme de l'ensemble. Enfin, il faut vraiment saluer un casting qui respecte parfaitement l'ambiance de l'histoire, conduit par un Tom Hollander (Wives and Daughters, Cambridge Spies, The Company, Desperate Romantics) très convaincant, qui sait habilement jouer sur toute la palette des émotions.

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Bilan : Dramédie foncièrement attachante, souvent touchante, Rev. est une chronique de vie quotidienne, sur laquelle flotte un parfum doux-amer caractéristique. Offrant trente minutes d'un réconfort bienvenu, elle fait preuve de beaucoup inspiration pour trouver le juste équilibre dans ses tons, capable de faire rire comme d'émouvoir aux larmes le téléspectateur. Offrant ainsi un mélange plein d'humanité, c'est une série sincère et authentique qui se suit vraiment avec plaisir et mérite que l'on s'y investisse.


NOTE : 7,5/10


Le générique :

Un extrait du premier épisode de la saison 2 :

01/07/2010

(Pilote UK) Rev. : it's hell being a vicar...

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Du Vicar of Dibley à Father Ted, on peut probablement affirmer qu'il existe une certaine tradition britannique à développer des "comédies cléricales". La télévision anglaise s'est déjà passablement amusée à mettre en scène, de la plus improbable ou caricaturale des manières, ses hommes d'Eglise. Si bien que le sujet de la dernière nouveauté diffusée sur BBC2 pour cet été n'apparaissait pas particulièrement original, même s'il proposait une modernisation de ces classiques. Si le parallèle instinctivement fait par le téléspectateur s'établissait plutôt avec The Vicar of Dibley au vu du seul synopsis, par la tonalité adoptée dans son pilote, Rev. marque immédiatement une certaine distance avec ses prédécesseurs, s'inscrivant dans un registre plus mesuré, et en un sens, plus réaliste.

En ce qui me concerne, la seule présence de Tom Hollander (également créateur de la série, aux côtés de James Wood) suffisait à attiser ma curiosité, de sorte que la découverte du pilote, diffusé ce lundi soir outre-Manche, s'imposait d'elle-même. Cette première saison de Rev. comportera 6 épisodes, d'une durée d'une demi-heure chacun.

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Rev. raconte l'acclimatation urbaine (mouvementée) du Révérend Adam Smallbone : en provenance d'une petite paroisse rurale, le voilà nouvellement promu à St Saviour, dans l'Est de Londres, au sein d'une communauté éclatée où le manque de dynamisme des paroissiens viendrait rapidement à bout des efforts les plus patients. Au-delà du quasi-désert hebdomadaire que constitue le service religieux, Adam doit gérer les sollicitations les plus diverses, notamment des demandes de faveur défiant son sens moral pouvant provenir de fidèles fréquentant l'église, mais aussi d'opportunistes découvrant soudain un intérêt surprenant pour la foi. Il faut alors au révérend beaucoup de bonne volonté, une sacrée dose d'humilité et des compromis constants pour gérer ce quotidien pas toujours de tout repos.

Outre des paroissiens envahissants et hauts en couleurs, ne mesurant pas toujours ce qu'ils exigent, Adam peut heureusement compter sur quelques soutiens à géométrie variable. L'aide la plus précieuse est sans doute celle apportée par son épouse, Alex. Si cette dernière, avocate menant sa propre carrière professionnelle, ne rentre pas dans les stéréotypes traditionnellement associés à l'image de la femme d'un révérend, elle fait cependant des efforts pour s'adapter ; ce qui rend finalement leur association des plus rafraîchissantes. Les collègues d'Adam sont en revanche plus réservés. Nigel l'assiste dans la gestion de la paroisse, tout en rêvant de promotion et de se trouver, un jour, à sa place. Enfin, son supérieur hiérarchique direct, avec ses objectifs chiffrés et ses analyses sans concession, maintient une pression constante sur le Révérend, reproduisant ironiquement des schémas de management pas si éloignés du style mafieux.

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Je dois dire que le résultat proposé par le pilote de Rev. est assez différent de ce à quoi je m'attendais. La série opte en effet pour une approche relativement réaliste de la fonction de révérend dans notre société moderne sécularisée. Loin d'être une simple sitcom, qui s'amuserait de ses excès et exploiterait les potentielles situations improbables que cette situation peut générer, Rev. se révèle beaucoup plus mesurée. Adoptant une tonalité cynique et désabusée à souhait, la série s'inscrit dans une tradition d'humour noir feutré, où les passages prêtant à sourire sont mis en scène de façon plus subtile. Si certains dialogues s'avèrent effectivement décalés à souhait, on reste toujours dans une froide retenue. Le téléspectateur y perçoit d'ailleurs sans difficulté les efforts des scénaristes pour essayer de dresser un portrait juste, pas si éloigné de la réalité, d'une paroisse populaire anglicane.

Rev. ne provoquera donc pas de rires aux éclats chez ses téléspectateurs. Le pilote s'installe en douceur, introduisant les paroissiens et nous présentant le quotidien d'Adam. La qualité d'écriture est un peu inégale, certaines scènes traînant un brin en longueur. Cependant, l'épisode contient plusieurs échanges inspirés, cocasses à souhait et dont les décalages sont parfaitement mis en lumière par un personnage principal rendu attachant par ses doutes et sa volonté de bien faire. Adam n'a pourtant rien d'un utopiste ; il est bien conscient des exigences de pragmatisme imposées par la société de son temps. Le dilemme va alors être de déterminer où se situe la ligne jaune à ne moralement pas franchir. L'exemple du jour, la réparation du vitrail brisé, est une illustration qui indique bien vers quelle voie des péripéties du quotidien la série pourra se développer.

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La thématique principale de Rev. s'avère finalement être des plus classiques : Adam est certes un homme de Dieu, mais il reste aussi un être humain, avec ses préoccupations, ses mauvaises habitudes (la boisson notamment) et ses failles. Il n'a rien d'un modèle infaillible, et c'est sur cette dichotomie, entre l'image idéalisée à laquelle renvoie la fonction et ce quotidien beaucoup plus terre à terre, que la série investit, avec une certaine réussite (exemple de dialogue : "je propose de réciter nos prières tout doucement... pour ceux qui auraient la gueule de bois ce matin"). Il se dégage du tableau présenté par Rev. une ambiance finalement assez attachante, dans laquelle la dimension humaine occupe une place déterminante. Sans provocation inutile, ni réelle révolution dans l'approche de son sujet, la série trouve progressivement un rythme, conservant un caractère mesuré qui n'empêche pas les petites piques et situations plus cocasses qui prêteront à sourire.

Sur un plan technique, Rev. est un reflet de cette paroisse urbaine quelque peu en déshérence, ses images adoptant des couleurs plutôt sombres, mises en avant par une réalisation très sobre. La série peut également compter sur un casting des plus solides, emmené par un Tom Hollander (Wives and Daughters, Cambridge Spies, The Company, Desperate Romantics), tout en nuances, en grande forme. A ses côtés, le téléspectateur familier du petit écran britannique retrouvera notamment Olivia Colman (Green Wing, Beautiful People), Miles Jupp, Simon McBurney ou encore Steve Evets (Five Days).

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Bilan : Rev. se situe un peu à la croisée des genres, comédie sombre flirtant avec le réalisme et une réelle volonté de décrire le quotidien moderne d'un révérend. C'est l'homme derrière la fonction qui intéresse la série, s'appliquant à souligner les dilemmes auxquels il doit faire face.

S'il laisse entrevoir un certain potentiel, ce premier épisode reste cependant trop timoré pour réellement s'imposer. Le téléspectateur regrettera en effet le peu de prise de risque d'une histoire qui suit finalement un chemin très balisé. On perçoit parfois les hésitations des scénaristes pour atteindre le juste équilibre dans la tonalité de leur série ; mais il est logique que le pilote permette également certains réglages.

Au final, cela n'est pas déplaisant à suivre. On s'attache facilement. Il manque seulement un soupçon de piquant pour réellement accrocher le téléspectateur. Mais je veux bien laisser à la série un peu plus de temps pour s'installer.


NOTE : 6,5/10


Des previews :


01/11/2009

(Mini-série UK) Cambridge Spies : l'histoire d'une trahison

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Cherchant dans ma DVDthèque l'inspiration pour le sujet de ce dimanche, je me suis arrêtée sur un classique, bien dans l'air du temps à quelques jours du retour de nos agents du MI-5 sur BBC One. Quelques années avant de travailler pour les services secrets de Sa Majesté, dans Spooks (MI-5), Rupert Penry-Jones avait déjà fait ses classes d'espion international dans une autre production de la BBC, dans laquelle il ne défendait, cette fois, pas les intérêts de la Couronne d'Angleterre.

En effet, en 2003, la BBC s'était attelée à raconter l'histoire des fameux Cambridge Five dans une mini-série, comportant 4 épisodes. Recrutés par les Services secrets Russes alors qu'ils étaient de jeunes étudiants à Cambridge, dans les années 30, ils  accédèrent ensuite à des postes à responsabilité et transmirent des informations à l'Union soviétique au cours de la Seconde Guerre Mondiale jusque dans les années 50. Ils figurent parmi les plus célèbres agents doubles de l'histoire de la guerre froide ; et il n'est pas rare de croiser leurs figures ou leurs noms au détour de la plupart des romans d'espionnage évoquant cette époque.

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Cambridge Spies suit leur progression et leurs désillusions sur les chemins de la trahison, de leurs études à Cambridge (l'histoire commence en 1934) jusqu'à la défection de Burgress (Tom Hollander) et Maclean (Rupert Penry-Jones) pour l'Union soviétique, en 1951, laissant Philby (Toby Stephens), le plus emblématique d'entre eux sans doute, seul encore en poste. Fortement soupçonné, ce dernier démissionnera du MI-6 quelques années plus tard. La mini-série prend le temps d'expliquer la genèse de leurs choix. Puis, ce sera l'engrenage progressif des premières missions presque anodines, confiées par les Soviétiques, jusqu'à la transmission d'informations classées, une fois les personnages en poste. Ces parties séduiront tout amateur d'histoires d'espionnage, car nous y retrouvons tous les classiques du genre jusque dans les moindres petits détails. Une manière de rappeler que réalité et fiction ne font souvent qu'un dans ces domaines et nous offrant ainsi des scènes à l'atmosphère incomparable qui pourraient être sorties tout droit des romans de John Le Carré.

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Mais Cambridge Spies ne se cantonne pas seulement à ces histoires d'espions. En effet, c'est un portrait sans complaisance de la haute bourgeoisie britannique du milieu du XXe siècle qui nous est proposé. Car, en 1934, c'est dans un contexte encore bien éloigné de celui de la future guerre froide que se scelle le destin de ces jeunes gens. Issus d'un milieu privilégié, leur attirance vers un idéal aux contours de réalisation encore si mal connus, le communisme, s'explique par leurs propres observations de ce monde auquel ils sont destinés. Ce n'est pas un régime, dont ils ignorent tant, qu'ils rejoignent, mais une utopie qui n'a jamais existé. Ils réagissent d'abord confrontés à cet étouffant immobilisme ambiant, face à la rigidité d'une haute société si codifiée, tandis qu'en toile de fond, le vieux continent européen connaît la montée des fascismes dans la relative indifférence de l'Establishment britannique.

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Dotée d'une thématique forte, Cambridge Spies est parfaitement consciente qu'elle détient un sujet suffisamment solide pour pouvoir quelque peu broder autour. Si elle réussit pleinement dans sa description de la société britannique comme dans la mise en scène de ces jeux d'espions, elle peine parfois à rendre justice à ses personnages et à leurs relations. Elle offre dans l'ensemble une qualité inégale, même si l'intérêt du téléspectateur n'est jamais pris en défaut. S'alternent des scènes magistrales et des ruptures de rythme marquées par une scénarisation maladroite dans lesquelles la mini-série se perd un peu. Un des reproches majeurs qui fut adressé à cette fiction est sa propension à re-écrire quelque peu l'histoire, mêlant vérités historiques et ajouts romancés pas toujours très bien inspirés. Ne s'embarassant pas de subtilités pour exposer son point de vue narratif, elle n'hésite pas à verser dans la caricature. Cependant, ces quatre épisodes s'apprécient sans arrière-pensée, se suivant avec plaisir.
 
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Au final, Cambridge Spies reste une belle mini-série qui aurait pu être perfectible, mais qui propose une description passionnante du milieu du XXe siècle européen. Servie par ce savoir-faire britannique, toujours si professionnel, pour les reconstitutions historiques, cette histoire laisse un arrière-goût doux-amer au téléspectateur. Seuls restent à l'écran des idéaux qui ont flêtri confrontés à la réalité, à l'ombre d'une nature humaine capricieuse et versatile capable du meilleur comme du pire. Cette impression diffuse est accrue par notre perspective d'observateur extérieur qui nous permet de bénéficier du recul historique, conscient des enjeux et percevant les faux-semblants bien avant des personnages principaux à la croisée des chemins.
 
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Bilan : Une mini-série qui devrait combler les amateurs de fictions d'espionnage comme de reconstitutions historiques. Elle offre une interrogation sur les enjeux du pouvoir tout autant qu'un portrait critique de la bourgeoisie britannique, écrasée et immobilisée par ses codes sociaux, au tournant de la Seconde Guerre Mondiale.
 

NOTE : 7/10