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05/05/2014

(Pilote AUS) Devil's Playground : au sein de l'Église catholique australienne de la fin des années 80

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Outre des histoires d'épidémie, le deuxième grand thème du Festival Séries Mania 2014 était le religieux. Un de mes grands regrets a d'ailleurs été de ne pas pouvoir découvrir l'israélienne Mekimi, sur laquelle j'ai entendu de très bons échos. Parallèlement, côté français, j'ai pu assister à la projection des premiers épisodes de la saison 2 de Ainsi Soient-Ils, qui sera diffusée cet automne sur Arte : si la première saison m'avait laissé bien des réserves, cette seconde démarre vraiment sur de très intéressantes promesses (j'aurais sans doute l'occasion d'y consacrer un billet prochainement). En restant au sein de l’Église catholique, une autre série a retenu mon attention : l'australienne Devil's Playground.

Encore inédite en Australie (elle était au festival en "avant-première mondiale"), où elle sera diffusée d'ici la fin de l'année sur Showcase, Devil's Playground comptera en tout 6 épisodes. Elle est la suite d'un film du même nom (The Devil's Playground) de Fred Schepisi datant de 1976. Elle reprend le même protagoniste principal, Tom Allen, qui était alors enfant dans un séminaire, et qui est désormais devenu psychiatre et père de famille. Fait notable, le personnage demeure toujours interprété par le même acteur, Simon Burke, à 38 années d'intervalle. Les deux histoires sont cependant indépendantes. Si Devil's Playground partage son point de départ criminel -la mort d'un enfant- avec bien d'autres séries récentes, à l'image de Broadchurch ou Mayday, elle n'en est pourtant pas une énième déclinaison policière. Il s'agit en effet avant tout d'une œuvre qui, au sein d'une communauté, s'interroge sur le pouvoir et la religion.

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Devil's Playground s'ouvre en 1988. Depuis le film d'origine, Tom Allen a bien grandi : il est devenu psychiatre, père de deux enfants. Il est veuf quand débute la série. Toujours croyant et pratiquant, il fréquente, avec ses enfants, la communauté catholique de Sydney - de l'école confessionnelle à la messe dominicale. Dans sa vie professionnelle, il est aussi amené à traiter un patient prêtre, qu'il convainc de confesser à ses supérieurs les malversations qu'il a commises. Ce "fait d'armes" attire l'attention d'un des évêques, dans le contexte particulier qui entoure une Église australienne alors en pleine effervescence et mutation. Tom Allen se voit proposer de poursuivre le travail qu'il a initié auprès de ce prêtre, en recevant d'autres membres du clergé qui auraient besoin de son assistance.

Au même moment, le quotidien de la communauté est soudainement troublé par la disparition d'un enfant, dont la famille est bien connue de Tom Allen. Le corps du garçon est finalement retrouvé dans une étendue d'eau. Tandis que la police traite l'affaire comme une simple noyade accidentelle, le meilleur ami du défunt est persuadé que cette mort a été provoquée. Le psychiatre se retrouve ainsi au premier rang pour essayer de comprendre ce qu'il s'est passé, et démêler ce qui se joue, à cette époque, au sein de l’Église catholique du pays. Un scandale se profile.

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Si Devil's Playground démarre sur un ressort dramatique classique, promesse d'un fil rouge criminel assuré de retenir l'attention du téléspectateur, la série opte pour une autre approche que la classique enquête relatée du point de vue des policiers. En effet, ne se réduisant pas à une simple investigation, les premiers épisodes entreprennent de nous plonger dans cette communauté catholique de la fin des années 80. Plus qu'aux fidèles, la fiction s'intéresse à l'institution ecclésiastique elle-même et aux tensions internes -mais aussi intimes- qui déchirent en son sein le clergé. Par l'intermédiaire de l'école confessionnelle ou du cabinet de Tom Allen, plusieurs prêtres sont ainsi introduits. Cependant, ce sont les sommets de la hiérarchie qui concentrent les enjeux principaux : en effet, la succession du plus haut dignitaire australien s'annonce. Par-delà les luttes d'hommes de pouvoir, ce sont aussi des conceptions qui s'opposent, entre intransigeants à la ligne rigoriste et ceux qui souhaiteraient évoluer dans le sens de la société. Convictions et ambitions s'entremêlent et se heurtent. Mais c'est un autre écueil qui s'annonce pour certains des protagonistes, lié à des affaires de mœurs.

La réussite de ces débuts tient au fait que tout en capturant sans complaisance ces jeux politiques ecclésiastiques, Devil's Playground n'oublie pas de donner un personnage pouvant servir de point d'accroche au téléspectateur : Tom Allen occupe en effet très bien cette fonction. Le personnage est dépeint avec ses failles, dans sa vie privée et familiale ; de quoi lui donner l'épaisseur qui convient. Mais il y a aussi chez lui une droiture. Et il est surtout un croyant sincère, loyal à l’Église ; un laïc, observateur extérieur d'une institution qui lui reste très familière. Invité, à la demande d'un évêque, à devenir le "psychiatre de l’Église", il se retrouve donc dans une situation privilégiée, y compris pour pousser un peu plus loin les questions que soulève la mort du fils de cette famille qu'il côtoie. Autour de ce drame, la série est capable de se construire en dehors de l’Église, introduisant divers protagonistes -la famille du défunt, son meilleur ami-, qui lui permettent de traiter avec justesse des thèmes forts que sont la perte d'un être cher, ou encore le rapport à la foi face à un tel événement. Ainsi, si la série entend jeter un éclairage sur l'institution ecclésiastique, c'est cependant bien un portrait plus vaste de la communauté catholique, où croyants et clergés se croisent, qui est envisagé, donnant plus d'ampleur au récit.

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Visuellement, Devil's Playground fait preuve d'une belle maîtrise formelle qu'il convient de saluer. La photographie y est soignée, et la réalisation emprunte une sobriété toute calculée. La simplicité travaillée, très bien dosée, permet une reconstitution de l'Australie de la fin des années 80 par petites touches et grâce à quelques détails du quotidien, des voitures aux technologies. Une telle mise en scène assure l'immersion du téléspectateur au sein de ce cadre et de la communauté catholique dans laquelle elle nous glisse. Signe du parti pris esthétique de la série, le générique d'ouverture est tout aussi réussi, annonçant avec style le thème de la fiction.

Enfin, Devil's Playground peut s'appuyer sur un casting solide, au diapason de la sombre tonalité ambiante : les interprétations sont convaincantes, avec la retenue, mais aussi l'intensité qui convient parfois. Les protagonistes personnalisent différents enjeux, et consolident par leur jeu un récit déjà très efficace. Comme indiqué en introduction, c'est Simon Burke (The Alice) qui reprend, trois décennies après, le rôle de Tom Allen. A ses côtés, on croise quelques têtes très familières, toutes impeccables, comme Toni Collette (United States of Tara), John Noble (Fringe, Sleepy Hollow), Don Hany (East West 101, Serangoon Road), voire Leon Ford (Puberty Blues). Figurent également dans la distribution Andrew McFarlane (The Alice), Jack Thompson, Max Cullen (Love My Way) ou encore Anna Lise Phillips (Young Lions).

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Bilan : Délivrant deux premiers épisodes denses, dotés d'une narration solide et maîtrisée, Devil's Playground signe des débuts réussis. La série introduit efficacement le téléspectateur dans la communauté catholique de Sydney, aussi bien du côté des laïcs que des ecclésiastiques, utilisant le personnage de Tom Allen comme clé d'entrée - son statut de psychiatre lui donnant une dimension supplémentaire. Les tensions et les luttes, exacerbées, qui se perçoivent au sein de l'institution dépeinte, retiennent l'attention du téléspectateur, tout autant que le fil rouge criminel qui ébranle la communauté.

Après deux épisodes, Devil's Playground en est certes encore au stade des promesses ; mais elle semble avoir toutes les cartes en main pour mener à bien les ambitions affichées. Une chose est sûre, je surveillerai la diffusion australienne.


NOTE : 7,5/10

04/06/2012

(Pilote CAN) Continuum : le futur est entre ses mains... mais quel futur ?

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Un peu de science-fiction pour ouvrir la saison estivale, ça vous tente ? En ce qui me concerne, vous le savez bien, je suis toujours partante. Ces thèmes de voyage dans le temps et de sauvetage du futur, aussi classiques soient-ils, s'ils sont bien mis en scène, restent des valeurs sûres pour m'intéresser. Côté websérie, Le Visiteur du Futur reste une des rares que je regarde avec enthousiasme. Et dans le registre des séries nord-américaines, je garde même encore une certaine tristesse en songeant à l'annulation de The Sarah Chronicles... Autant dire que je suis le public qui peut, potentiellement, apprécier Continuum.

Initialement, c'est pourtant avec plus d'appréhension et assez peu d'espoir que j'ai lancé le pilote, la faute à une bande-annonce guère convaincante et à un résumé qui, soyons franc, sonnait trop le déjà vu et revu. Mais c'est peut-être un mal pour un bien parce que, finalement, c'est un démarrage très honnête que s'est offerte cette nouvelle série canadienne qui a débuté sur la chaîne Showcase dimanche 27 mai 2012. Dix épisodes ont à ce jour été commandés. A voir si le potentiel entraperçu peut grandir  !

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En 2077, les gouvernements ont failli. Les corporations s'y sont substituées, restaurant l'ordre et mettant fin aux anciennes formes ayant échoué. Le pays n'est plus une démocratie. Cependant, la situation ne fait pas l'unanimité. Un groupe terroriste veut faire prendre conscience de la situation. La scène d'ouverture nous fait ainsi vivre un attentat, avec un gigantesque gratte-ciel s'écroulant en arrière-plan. Plusieurs conspirateurs sont arrêtés par une équipe d'agents menés par Kiera Cameron. Ils sont par la suite condamnés à mort.

C'est le jour où leur exécution est programmée que tout va changer pour Kiera. Elle est chargée de surveiller le bon déroulement des opérations. Mais au dernier moment, leur chef brandit un objet qui fait disparaître tous ceux qui se trouvaient autour, la jeune femme comprise. Ils se retrouvent au même endroit, mais à une autre époque : en 2012. Tandis que les terroristes s'échappent dans ce nouveau monde, Kiera se retrouve prisonnière de ce passé, loin de sa famille. Assez naturellement, elle va prendre place aux côtés des autorités dès que les combattants venus du futur commencent à faire parler d'eux.

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Voyage temporel impromptu, héroïne devant sauver le futur de l'action d'un groupuscule dangereux, technologie révolutionnaire seulement en voie de développement avec un concepteur encore adolescent, paradoxes temporels à venir et sans doute quelques secrets à découvrir sur le façonnement de son monde tel que Kiera le connaît... Nul doute que tous les ingrédients sonnent de manière familière au téléspectateur. Naviguant quelque part dans la filiation directe d'une franchise comme Terminator, Continuum assume ses influences. La reconstitution du futur et de ses techniques offre un visuel de science-fiction assez intéressant et bien exploité, avec des possibilités qui font de Kiera une véritable super-flic dans notre présent de 2012. Certes, l'écriture ne fait pas dans la subtilité et on n'échappe pas à certains poncifs : la jeune femme n'est pas seulement policière, c'est une mère de famille qui veut retrouver son fils. Les motivations personnelles sont là pour humaniser le personnage, mais elles tirent sur une fibre émotionnelle peut-être un peu trop facilement. De manière générale, le traitement des personnages n'est pas le point fort de ce pilote.

En revanche, son grand mérite est de savoir bien installer un univers qui a du potentiel, à commencer par la relative ambivalence qui en émane. L'idée de grandes entreprises régissant le monde, ayant remplacé le politique, trouve forcément un écho particulier. Et puis, surtout, ce futur que Kiera défend est un futur dictatorial. Dans le même temps, les prétendus combattants de la liberté sont, eux, présentés clairement comme des opposants, méchants par excellence : la scène d'ouverture de l'attentat et les fusillades du dernier quart d'heure sont sur ce point de vue univoques. Continuum propose donc d'un côté des partisans de la démocratie terroristes, de l'autre une héroïne pro-dictature, et en filigranne quelques interrogations sur la manière dont les corporations sont arrivées où elles sont (/seront). Voilà une base de départ qui n'est que promesse, mais qui aiguise la curiosité. Tout dépendra de l'orientation future de la série : Kiera va-t-elle rester dans une logique de chasse à l'homme et d'obéissance ; va-t-elle découvrir des éléments qui vont l'amener à nuancer ses vues ? Le manichéisme ambiant n'est-il qu'apparent ? Reste que le pilote remplit sa fonction : il intrigue et propose une intéressante introduction.

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Sur la forme, il faut noter une reconstitution futuriste plutôt soignée qui est plutôt convaincante, après une scène d'ouverture "choc" à laquelle on assiste à l'attentat. Sinon, Continuum propose dans l'ensemble une réalisation classique, avec une priorité donné aux plans serrés. Les scènes d'action ne dépareillent pas non plus. Bref, un ensemble très honnête, qui ne se démarque pas particulièrement mais remplit efficacement son office.

Côté casting, les habitués de science-fiction nord-américaine ne seront pas dépaysés et croiseront dans Continuum bien des têtes familières. C'est Rachel Nichols (Alias, Esprits criminels) qui incarne l'héroïne du futur ; je l'ai assez aimée dans ces quelques moments où le masque tombe en prenant conscience de la situation inextricabe dans laquelle elle se trouve. A ses côtés, c'est Victor Webster (Mutant X) qui va l'assister au sein de la police locale. Erik Knudsen (Jericho) incarne quant à lui un adolescent à la grande destinée, puisqu'il sera le concepteur de la technologie dominante du futur et directeur d'une des plus puissantes corporations. Noter que dans le futur il est interprété par William B. Davis (qui restera éternellement l'homme à la cigarette de X-Files, ce qui a tendance à vous rendre instantanément tout personnage suspicieux). Enfin, on retrouve aussi à l'affiche Roger Cross (24, The Guard), Tony Amendola (Stargate SG1), Stephen Lobo (Artic Air, Painkiller Jane, Falcon Beach), Lexa Doig (Andromeda, Stargate SG1), Brian Markinson (The Killing, Caprica) ou encore Richard Harmon (The Killing).

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Bilan : Se réappropriant la thématique du voyage temporel de manière plutôt efficace, Continuum propose un pilote honnête et intriguant qui vaut surtout pour le potentiel que son univers ainsi posé laisse entrevoir. Derrière la présentation manichéenne des protagonistes de chaque camp, en arrière-plan, le régime dictatorial du futur peut promettre des développements très intéressants si, par la suite, la série sait jouer sur l'ambivalence manifeste des causes et des moyens pour et par lesquels chacun se bat.

Au fond, il est bien trop tôt pour dire si Continuum saura exploiter véritablement les nuances de son cadre, mais pour le moment, la téléspectatrice amateur de science-fiction que je suis a envie de lui donner sa chance.


NOTE : 6,75/10


La bande-annonce de la série :

16/09/2010

(Pilote CAN) Lost Girl : succube & fae pour du fantastique cheap au rabais


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Dans la lignée de la morosité de ces premières escarmouches de rentrée, les pays changent (remarquez que je fais des efforts en terme de nationalités traitées), mais la tonalité demeure invariable, et le Canada n'est pas en reste. Dimanche dernier, la chaîne Showcase y lançait une nouvelle série, Lost Girl, surfant sur cette vague fantastique qui fleurit actuellement un peu partout dans nos petits écrans. Une fiction qui promettait d'explorer toute la diversité des créatures de l'étrange, avec pour héroïne rien moins qu'une succube. Les rayonnages dérangés de ma bibliothèque trop bien garnie en bit-lit comprenant les deux premiers tomes des aventures de Georgina Kincaid, je mesurais ainsi à peu près le potentiel narratif du concept de départ.

C'est que j'ai une confession à vous faire : je cultive un penchant déraisonnable pour le fantastique cheap. Ce genre de série pas prétentieuse pour un sou, mais diablement divertissante - telle Blood Ties par exemple - a pu me faire passer d'excellents moments devant mon petit écran. Si bien que c'était avec un esprit ouvert, sans a priori, que j'étais prête à découvrir Lost Girl, même si la bande-annonce avait fait naître quelques craintes à son égard... Craintes malheureusement plus que confirmées par le pilote.

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La Lost Girl intronisée héroïne par la série s'appelle Bo. La jeune femme mène une vie loin d'être sédentaire, devant régulièrement rassembler au plus vite ses affaires pour s'enfuir. Car Bo n'est pas une femme ordinaire. Derrière une assurance de façade, à l'évidence endurcie par les épreuves de la vie, son quotidien consiste à gérer des facultés dont elle ne comprend ni la nature, ni la manière dont elle pourrait les maîtriser. Si ses capacités lui simplifient la vie à l'occasion, puisqu'elle parvient à manipuler ses interlocuteurs par un simple contact, elles échappent parfois de manière fort dangereuse à tout contrôle : lorsqu'elle embrasse quelqu'un, elle aspire la vie de cette personne par la même occasion. Incapable de s'arrêter, c'est ainsi qu'elle laisse régulièrement des cadavres derrière elle.  

Au début de ce premier épisode, Bo travaille comme barmaid. Elle sauve une cliente, Kenzi, qu'un homme avait drogué, espérant ainsi pouvoir abuser d'elle en toute impunité. L'intervention de Bo ne s'opère pas sans dommage, puisqu'emportée dans le feu de l'action, son baiser létal tuera le criminel. Passée la frayeur des premiers instants, avec une Kenzi dépassée par ce à quoi elle a assisté, les deux jeunes femmes font plus amplement connaissance, nouant rapidement une certaine complicité.

Mais le meurtre commis par Bo la rattrape : elle est arrêtée par une bien étrange brigade... dont les membres n'appartiennent pas seulement à la police. Elle découvre alors un autre versant de ce monde dont elle n'avait jamais soupçonné l'existence : une société de fae (terme générique regroupant toutes les créatures surnaturelles), structurée et hiérarchisée, se cachant dans l'ombre. Une organisation mise en émoi par l'arrivée d'une inconnue qui attire de manière inconséquente l'attention sur eux. Plus que le mort, c'est la non affiliation de Bo à l'un des deux camps institués, "le bien vs. le mal" pour faire synthétique, qui perturbe le plus ces derniers. Qui est donc Bo ? Pourquoi son existence avait-elle été maintenue secrète jusqu'à présent ? Cet autre univers qui s'ouvre à la jeune succube va sans doute être source de plus d'interrogations que de réponses...

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A partir de ces bases fantastiques qui ne demandaient donc qu'à s'affirmer, Lost Girl s'inscrit dans un créneau cheap à l'excès, parfaitement assumé, sur le fond comme sur la forme. Dans son contenu, la série fait preuve d'une relative et malhabile subtilité, dont je soupçonne fortement le caractère involontaire. En effet, si elle exploite des allures excessivement manichéennes, ces dernières semblent, paradoxalement, plus conduire la série dans une zone grise et floue, où il apparaît bien difficile de distinguer le mal ou le bien en dépit de supposés camps clairement délimités. Les deux souhaitent la mort de l'intruse, ce qui les confond d'emblée, surtout aux yeux du téléspectateur. Finalement seul le policier venant en aide à Bo est présenté sous une lumière un tant soit peu positive.

Mais ce flou moral est également entretenu par notre héroïne : elle admet ne pas contrôler ses pouvoirs, qu'elle n'hésite cependant pas à utiliser. Elle est incapable à l'occasion de résister à la faim ; et elle tue bel et bien un homme en début d'épisode... Cependant, le message subliminal de Lost Girl est clair : ce dernier était un criminel, avec des antécédents qui plus est, permettant de faire glisser Bo dans des habits de justicière. C'est à peine si cette mort fait ciller les protagonistes, chacun étant plus concentré sur la nature de succube de la jeune femme. Si bien que l'on a finalement l'impression que les scénaristes, avec une naïveté un peu grossière, jouent avec leur attrayant concept, sans oser pleinement le mettre en scène. Voulant présenter leur héroïne comme indépendante, ils tendent inconsciemment à la détacher des contingences morales. Mais, dans le même temps, c'est avec un traitement scénaristique réinvestissant le champ des codes des super-héros qu'ils l'introduisent, souhaitant à l'évidence cultiver une certaine sympathie à son égard. Une ambivalence de traitement qui laisse un arrière-goût d'inachevé, devant une construction tour à tour maladroite et excessivement timorée.

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Au-delà du cadre binaire assez rigide qu'elle pose, Lost Girl s'avère être d'une prévisibilité vite lassante, dont les dialogues sonnent trop creux pour réveiller l'intérêt du téléspectateur. La faiblesse des moyens alloués à la réalisation, comme aux pseudos effets spéciaux, lui permet de soigner ce faux premier degré apparent pour se créer une ambiance au rabais, qui renvoie à un univers de série B, d'où percent d'importantes pointes comics. Tout au long de l'épisode, elle frôle constamment la trop fine frontière du ridicule, qu'elle finit par franchir allègrement à plusieurs reprises. Cela ne serait pas handicapant en soi si la série savait faire preuve d'une distance plus maîtrisée avec son contenu et n'oubliait pas le registre du divertissement. Malheureusement loin du cheap fun et versatile de certaines fictions, c'est plutôt dans un registre indigeste et assez pesant que Lost Girl va s'affirmer.

Si la série peine à trouver ses marques sur la forme, les acteurs ne semblent pas non plus particulièrement concernés, les lignes de dialogues ne motivant sans doute pas trop pour gagner en crédibilité. On retrouve pourtant quelques têtes familières au casting. Bo est incarnée par Anna Silk (croisée en guest dans Being Erica). A ses côtés, figurent  Zoie Palmer (The Guard), Kristen Holden-Reid (The Tudors) ou encore Ksenia Solo (quelques apparitions dans Life Unexpected la saison dernière).

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Bilan : Du cheap divertissant au ridicule pesant, il n'y a souvent qu'un pas. Lost Girl bascule malheureusement trop aisément dans le second versant. Pour une série fantastique mettant en scène des fae, elle se ré-approprie paradoxalement beaucoup plus de codes scénaristiques propres aux fictions de super-héros que ceux du surnaturel plus traditionnel. Cela lui permet de soigner une atmosphère très série B, dans laquelle il manque l'ingrédient sans doute le plus important, le divertissement (les sourires générés involontairement par certaines lignes de dialogue ne pouvant être comptabilisés comme un second degré volontaire). A la fois excessivement manichéenne, tout en ayant l'irrésistible envie de brouiller un peu les cartes sans l'oser vraiment, Lost Girl n'assume pas pleinement le registre qu'elle a choisi d'investir en prenant une succube comme héroïne...

En somme, je ne suis pas certaine qu'il y ait grand chose à sauver dans cette série. Si je me laissais aller aux comparaisons, je la classerais sans doute dans la droite lignée d'un Demons, tant au niveau des moyens budgétaires que de l'univers mis en place. A oublier.


NOTE : 3,25/10


La bande-annonce :