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23/12/2011

(UK) Rev., saison 2 : une dramédie douce-amère humaine et attachante

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Un an et demi après ma review du pilote, je profite de cette période de fêtes pour revenir sur une série qui est sans doute ma dramédie préférée actuellement en cours de diffusion ; même si elle est présentée comme une comédie, je n'ose la placer complètement dans ce genre. Reste que Rev. a été une des séries les plus attachantes de cet automne. Elle mérite donc bien de faire l'objet d'un bilan.

La diffusion de la saison 2 s'est achevée ce mardi. Elle avait été associée cet automne, par BBC2, à la dernière nouveauté, ni drôle, ni convaincante, de Ricky Gervais, Life's too short. C'est un épisode spécial Noël qui est venu la conclure ce 20 décembre, venant superbement parachever une saison de 7 épisodes. Mon attachement à Rev. me confirme une chose : je ne cherche pas des comédies pour rire. Un peu à la manière de The Café, Rev. se démarque par sa capacité à être touchante tout en capturant parfaitement certaines tranches de vie. 

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Rev. nous plonge dans une petite paroisse de l'Est de Londres, St Saviour, au sein de laquelle officie le révérend Adam Smallbone, lequel découvre la vie citadine après avoir longtemps officié dans le monde rural. Son quotidien se partage entre ses efforts constants pour dynamiser tant bien que mal une communauté paroissiale clairsemée et sa gestion de l'école privée locale rassemblant des élèves du quartier de toutes confessions. S'il n'est guère soutenu par un supérieur direct qui apparaît souvent plus semblable à un gestionnaire déshumanisé qu'à un homme d'église, Adam peut cependant trouver du réconfort auprès de son épouse, une avocate avec un caractère bien affirmé. De plus, gravite autour du révérend une galerie de personnages hauts en couleur, un assistant ambitieux, une paroissienne sur-impliquée ou encore un sans-abris marginal.

La grande force de Rev. réside incontestablement dans son humanité. Bénéficiant d'une écriture qui fait souvent preuve d'une rare justesse, la série n'a pas son pareil pour toucher le coeur du téléspectateur, réussissant le tour de force d'émouvoir sans jamais déprimer. En effet, si sa tonalité douce-amère, souvent un peu mélancolique, se teinte de doutes désillusionnés, elle offre pourtant trente minutes de véritable réconfort, pleines d'une chaleur communicative qui ne laisse jamais insensible. Tout en se classant dans le genre des comédies cléricales affectionnées par les Anglais, Rev. reste avant tout l'histoire d'un homme ordinaire, confronté aux soucis quotidiens d'une activité professionnelle loin d'être de tout repos dans la jungle londonienne. Le fait que le personnage principal soit un prêtre apporte une dimension supplémentaire à certains questionnements existentiels qu'il se pose, mais cela ne modifie en rien l'essence et le parti pris réaliste de la série. Une proximité se crée naturellement avec Adam, et c'est un des atouts qui assure la fidélité du téléspectateur.

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S'inscrivant dans la continuité directe de ce que la première avait su peu à peu construire, la saison 2 de Rev. aura été une belle réussite. Parvenant à maintenir un équilibre aussi rare que précieux dans sa tonalité d'ensemble, oscillant entre passages légers et moments plus dramatiques, la série est devenue une des dramédies les plus abouties du petit écran. Toujours très humaine, elle ne manque pas de scènes marquantes. A ce titre, l'épisode 4, se concluant sur une scène magistrale et bouleversante, d'une sobriété parfaite, restera sans doute le plus impressionnant de la saison. Il est parfaitement représentatif de ce qui fait l'essence de cette fiction : car Rev. est une oeuvre à part, de celles qui sont capables, dans un même épisode, non seulement de faire rire, mais aussi d'émouvoir aux larmes le téléspectateur. C'est dans cette continuité que s'est d'ailleurs inscrit le Christmas special, avec une construction qui reflète vraiment l'âme de la série, entre pragmatisme désenchanté et petites réussites du quotidien.

Par ailleurs, Rev. exploite pleinement son cadre londonien, l'anonymat d'une grande ville mais aussi son rythme effrené demeurent d'ailleurs des thèmes récurrents. La réalisation sait mettre en valeur le choix citadin fait au départ ; et l'esthétique globale de la série a cette neutralité sobre qui souligne bien le réalisme de l'ensemble. Enfin, il faut vraiment saluer un casting qui respecte parfaitement l'ambiance de l'histoire, conduit par un Tom Hollander (Wives and Daughters, Cambridge Spies, The Company, Desperate Romantics) très convaincant, qui sait habilement jouer sur toute la palette des émotions.

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Bilan : Dramédie foncièrement attachante, souvent touchante, Rev. est une chronique de vie quotidienne, sur laquelle flotte un parfum doux-amer caractéristique. Offrant trente minutes d'un réconfort bienvenu, elle fait preuve de beaucoup inspiration pour trouver le juste équilibre dans ses tons, capable de faire rire comme d'émouvoir aux larmes le téléspectateur. Offrant ainsi un mélange plein d'humanité, c'est une série sincère et authentique qui se suit vraiment avec plaisir et mérite que l'on s'y investisse.


NOTE : 7,5/10


Le générique :

Un extrait du premier épisode de la saison 2 :

04/12/2011

(Pilote UK) The Café : une dramédie attachante somewhere beyond the sea...

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Vous le savez sans doute, la comédie n'est pas mon genre de prédilection. Plus qu'une question d'humour, le problème vient surtout de son impossibilité à me fidéliser au-delà d'une poignée d'épisodes. C'est sans doute pour cela que cette rentrée je n'ai fait aucun effort pour jeter un oeil aux dernières comédies des grands networks US : une saison qui dépasse les 10 épisodes, cela relève de l'engagement impossible pour moi. Cependant, de l'autre côté de l'Atlantique, en Angleterre, le format plus bref devient un atout. Et je me laisse même convaincre d'accompagner certaines en saison 2 - puisque je suis actuellement complètement sous le charme de Rev !

En attendant de revenir sur cette comédie de BBC2, aujourd'hui, évoquons une nouveauté lancée par Sky One le 23 novembre dernier : The Café. C'est peu dire que le précédent essai du genre tenté par cette chaîne il y a quelques semaines, Spy, ne m'avait pas emballé, mais la bande-annonce de The Café m'avait intriguée (et la review de Lady également). Une impression confirmée par le pilote (j'ai même lancé le deuxième épisode dans la foulée). Embrassant un registre plus proche de la dramédie, il émane de cette série un charme confusément attachant et désuet qui vous donne envie de vous installer confortablement devant elle et de l'accompagner vers la maturité.

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Co-écrite par deux de ses acteurs principaux, Ralf Little et Michelle Terry, The Café, dont six épisodes (d'une trentaine de minutes chacun) ont pour le moment été commandés, se déroule à Weston-Super-Mare, une petite ville balnéaire dans le sud-ouest de l'Angleterre. Son action se concentre principalement dans un petit café du bord de mer, lieu de socialisation par excellence, voyant ainsi défiler une clientèle bigarrée représentative de la vie du bourg.

Ce sont trois femmes, représentantes de trois générations différentes d'une même famille, qui s'occupent du Café : Mary, la grand-mère, tricotant ou mangeant, en observe les allers et venues de chacun de sa place stratégique à côté de la fenêtre, Carol, la mère qui est la gérante du café, et Sarah qui aspire à un avenir professionnel meilleur en se rêvant écrivain. Autour d'elles gravite une galerie de personnages qui vont rythmer le quotidien de la vie dans cette bourgade esseulée tournée vers la mer. 

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The Café est une série d'ambiance qui séduit instinctivement dès ses premières scènes. Loin d'être une comédie cherchant à provoquer le rire, elle s'illustre plutôt dans le registre de la dramédie souvent légère, dont la tonalité se nuance au contact des épreuves de la vie qu'elle peut relater. Tout en distillant avec parcimonie des répliques où perce un humour discret, c'est une série qui sait prendre le temps d'installer son cadre et de soigner les détails de la mise en scène. Elle fait cela avec beaucoup de naturel, si bien que sa sobriété apporte une fraîcheur inattendue à un récit qui n'a pourtant rien d'original. Si elle souffre parfois d'un problème de rythme qu'il faudra corriger, la réussite de The Café réside dans cette faculté rare qu'a la série de faire en sorte que le téléspectateur se sente instantanément confortable au sein de cette bourgade qu'il découvre.

Empreinte du parfum typique de petite ville balnéaire anglaise, la série dispose ainsi d'un a priori favorable qu'elle va devoir ensuite confirmer sur le fond. Cela passe par le développement de ses personnages. Usant de stéréotypes, mais sans pour autant trop en faire, elle va s'attacher à capturer l'esprit de cette communauté qui vit avec ses codes et ses habitudes. Tandis que Sarah, jeune femme rêvant d'avenir et d'ailleurs, s'impose comme le dénominateur commun des histoires et la clé d'entrée du téléspectateur, The Café bénéficie plus généralement d'une riche galerie de personnages haut en couleurs, dont plusieurs s'imposent et se démarquent aisément au fil de la narration. La série accorde un réel soin à cette dimension humaine, ce qui la rend fort sympathique. Il lui reste à bien asseoir ces différents portraits ; mais seuls le temps et les épisodes lui permettront d'acquérir la consistance et l'épaisseur qui lui font encore défaut sur ce plan.

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Sur la forme, la réalisation de The Café a été confiée Craig Cash, ce qui ne fait qu'accentuer les parallèles faits avec The Royle Family. La caméra contribue grandement à l'atmosphère de la série, exploitant à merveille le décor extérieur dont bénéficie l'histoire. Tout y est clair et bleuté ; et on ne peut rester insensible à ce charme balnéaire. C'est d'autant plus difficile que The Café s'ouvre sur une superbe reprise folk de la chanson Somewhere beyond the sea, interprétée par Kathryn Williams, qui plonge instanément le téléspectateur dans une ambiance vraiment à part, entre confort et appel du large. Cela fait rentrer le récit dans une autre dimension, presque rêveuse, nous plaçant dans les meilleures dispositions possibles pour apprécier l'épisode qui va ensuite suivre.

Enfin, The Café bénéficie d'un casting homogène, où les jeux des acteurs, avec naturel et sans excès, achèvent de convaincre le téléspectateur de s'installer devant son petit écran. Outre Michelle Terry et Ralf Little (The Royle Family), qui cumulent la double casquette d'acteurs et de scénaristes, on retrouve également à leurs côtés Ellie Haddington, June Watson, Daniel Ings (Psychoville), Phoebe Waller-Bridge, Kevin Trainor, David Troughton, Seeta Indrani, Brian Murphy, Marcia Warren, Carolin Stoltz ou encore Jack Roth.

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Bilan : Dramédie au charme désuet assumé, The Café est une série instinctivement attachante. Dans la lignée de cette mélodie introductive qui résonne longtemps dans nos oreilles, elle séduit avant tout par son ambiance. Sa tonalité trouve le juste équilibre entre une part de légèreté et un versant plus nuancé où la vie se poursuit avec ses hauts et ses bas. Cherchant à mettre en scène des instantanés qu'elle veut "typiques" de cette petite bourgade balnéaire, il lui reste à développer ses personnages pour prendre la mesure du potentiel que cette galerie foncièrement attachante laisse entrevoir. En ce qui me concerne, j'ai bien envie de me laisser embarquer.


NOTE : 6,5/10


La bande-annonce de la série :

24/03/2011

(Pilote UK) Twenty Twelve : dans les coulisses de l'organisation des Jeux Olympiques

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Les résolutions sont faites pour ne pas être respectéees : les comédies ont à nouveau disparu de mes programmes. C'est un peu frustrant de constater qu'en dépit de mes efforts, le problème reste entier : à la différence d'un drame ou une dramédie qui saura me faire réagir, positivement ou négativement, face à sa qualité, la comédie me laisse généralement indifférente. Sitôt vue, sitôt oubliée. Et mes essais de 2011 ne se sont pas révélés décisifs pour le moment, même si, peut-être...

Prenons Friday Night Diner : c'était potentiellement sympathique, mais dès la fin du pilote, son concept seul m'ennuyait déjà. Puis, la semaine dernière, c'était au tour de Twenty Twelve de passer l'épreuve du premier visionnage. Après ma curieuse perplexité initiale, hier soir, je me suis finalement installée devant le deuxième épisode... Le ressenti diffus du premier s'est confirmé et même accentué : cette série m'intrigue. Et une comédie qui retient suffisamment mon attention pour me faire envisager... (soyons ambitieux...) le troisième épisode, cela mérite que l'on s'y arrête.

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Diffusée sur BBC4 depuis le 14 mars 2011, son lancement coïncidant avec le décompte de 500 jours nous séparant de la cérémonie d'ouverture des prochains Jeux Olympiques de Londres, Twenty Twelve a commencé sur fond de polémique avec les créateurs d'une série au concept de départ très proche : The Games, imaginée pour la télévision australienne à la veille des JO de Sidney en 2000. Si vous voulez vous faire une opinion sur la controverse, des extraits d'épisodes de sa consoeur australienne sont disponibles sur YouTube, par exemple : The 100 Metres Track.

Derrière ses allures de faux documentaire aux accents satiriques, Twenty Twelve nous plonge dans les coulisses de la préparation des Jeux Olympiques prévus à Londres en 2012, au sein du comité chargé de cette - forcément complexe et propice aux crises de nerf - organisation. Dirigé par Ian Fletcher, il rassemble des personnes plus ou moins compétentes aux fonctions très spécifiques, qui occupent tous les postes à enjeu du projet : de la communication à la gestion des infrastructures, en passant par la pérennité et le sort ultérieur des infrastructures construites pour l'occasion.

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Twenty Twelve est un mockumentary dans la plus pure tradition du genre. Avec sa mise en scène minimale, guidée par une voix off qui fait le lien entre des scènes parfois anecdotiques, la série va naturellement rechercher à créer une proximité avec la réalité. A partir de ce parfum d'authenticité, elle va ensuite distendre ce portrait, pour exploiter toute l'absurdité potentielle des situations dépeintes, portée par des personnages stéréotypés. Et à ce jeu de la mise en image d'un rafraîchissant ridicule flegmatique, à la sobriété déroutante, la série saura provoquer plus d'un sourire. C'est en effet lorsque ce style s'accompagne d'un comique de situation efficace que son potentiel se dévoile vraiment (l'horloge dans le premier épisode ; la gestion du retard et notamment la "crevaison" dans le deuxième épisode).

Si le pilote peinait à trouver son rythme, ne s'équilibrant que dans le dernier tiers, cela s'explique en partie par la nécessaire introduction de tous les personnages. L'épisode 2 est plus consistant, mais il confirme aussi cependant la première impression : Twenty Twelve ne parvient pas à fonctionner en roue libre, par elle-même. En effet, le temps que le problème du jour surgisse, ses dialogues manquent de punch, ou du moins de lignes corrosives qui feraient mouche et troubleraient une narration trop linéaire (on est loin de la dynamique autrement plus tranchante d'un The Thick of It par exemple). En revanche, et cela s'apprécie encore plus dans le second épisode, une fois que l'histoire est vraiment lancée, la sobriété excessive du style adopté s'avère pleinement justifiée.

Au final, même si la série gagnerait à trouver une meilleure homogénéité, elle n'en demeure pas moins non seulement plaisante, mais aussi assez jubilatoire lorsque la crise à gérer est à son apogée. Rien que pour voir la réaction des Brésiliens face à la fausse nouvelle de la crevaison (j'en souris encore), je crois que la série mérite un petit détour.

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Sur la forme, Twenty Twelve respecte tous les codes du mockumentary classique. Caméra à l'épaule, la réalisation est nerveuse, le cadre changeant, donnant l'impression d'être aux côtés des différents protagonistes. Cela permet de renforcer à moindre frais cette fausse impression de réalisme. Par ailleurs, il faut aussi signaler - c'est suffisamment rare pour être souligné - l'existence d'un petit générique introductif, qui est même accompagné d'une chanson pas forcément en adéquation stricte avec le thème de la série, mais l'ensemble constitue une introduction décalée pas déplaisante.

Enfin, Twenty Twelve dispose d'un casting attrayant et solide, qui se glisse sans difficulté dans l'ambiance particulière que la série cultive. Il est emmené par un Hugh Bonneville (Lost in Austen, Downton Abbey) impeccable, aux côtés duquel on retrouve Amelia Bullmore (State of Play, Ashes to Ashes), Olivia Colman (Rev., Peep Show), Vincent Franklin (The Thick of It), Jessica Hynes (Spaced, The Royle Family) et Karl Theobald (Primeval). Enfin, c'est David Tennant (Doctor Who) qui se charge de la voix du narrateur, accentuant ainsi l'aspect documentaire de la série et servant à guider le téléspectateur.

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Bilan : Mockumentary bénéficiant d'un cadre original (dans la limite de la question liée à The Games), forcément intéressant au vu des thématiques pouvant être exploitées, Twenty Twelve doit certes encore gagner en constance. Mais dans ses meilleurs moments, la série impose son style par le biais de sa mise en scène flegmatique d'un ridicule aux limites constamment repoussées. L'ensemble se révèle assez jubilatoire. En somme, si la tonalité et la sobriété peuvent dans un premier temps dérouter, on retrouve aussi dans cette série des passages où les fondamentaux du mockumentary sont à la hauteur des attentes. Un résultat qui mérite peut-être un coup d'oeil !


NOTE : 6/10


La bande-annonce de la série :


08/11/2010

(Pilote UK) The Trip : balade champêtre et gourmande dans le nord de l'Angleterre

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Sur My Télé is Rich, on aime rien plus que voyager (du moins téléphagiquement parlant - parce qu'on est aussi pragmatiquement très attaché à sa connexion internet). Pas seulement voguer de pays en pays, mais aussi partir explorer les recoins et les charmes plus discrets des contrées qui nous sont familières. Fatigué de l'oppressant cadre citadin, vous ressentez l'appel des grandes étendues verdoyantes, de ce faux calme de la campagne dont le fond sonore est seulement rythmé par les bêllements de moutons ? Cela tombe bien, BBC2 a pensé à vous. Ou du moins a-t-elle choisi un cadre résolument champêtre  pour y planter le décor de sa dernière comédie en date, dont la diffusion a débuté lundi dernier en Angleterre.

Il s'agit donc d'embarquer pour six épisodes de The Trip, une série s'inscrivant dans le registre des sim-com (les comédiens y jouent une version alternative d'eux-même, par exemple avec des traits de caractère accentué). Michael Winterbottom réunit donc devant sa caméra un duo d'acteurs qu'il connait bien pour proposer une fiction qui va finalement rejoindre la lignée et l'esprit du film A Cock and Bull Story

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Alors qu'il était dépêché par The Observer pour jouer les apprentis critiques culinaires dans une demi-douzaine de restaurants et petites auberges situés dans la région du Lake District, au nord-ouest de l'Angleterre, les plans bien ordonnés, pour mêler travail et plaisir, de Steve Coogan tombent à l'eau lorsque sa petite amie, Misha, décide soudain de le quitter pour retourner aux Etats-Unis. N'ayant jamais été un grand amateur de gastronomie et ne pouvant se résoudre à passer une semaine à voyager avec sa solitude, il se résoud à contacter Rob Brydon, le seul de ses amis potentiellement disponible pour tout quitter pendant quelques jours. La perspective de gîtes et couverts gratuits s'avérant difficile à décliner, Rob accepte de se joindre à Steve dans cette aventure culinaire et champêtre dans la campagne anglaise.

Après un bref voyage dépaysant à souhait, où le paysage de cette partie de l'Angleterre, superbement mis en valeur à l'écran, donne au téléspectateur de soudaines envies de dépaysement, sans pour autant voler la vedette à nos deux protagonistes, ce pilote va mettre en scène leur premier repas à l'auberge. Efficace, l'épisode s'attache à caractériser chacun des personnage, soulignant tant le narcissisme latent de l'un (Coogan), que l'autodérision prononcée à l'exès de l'autre (Brydon). Interpelé par l'indéfinissable impression d'une barrière d'intimité qui tombe, le téléspectateur n'éprouve aucune difficulté pour s'installer à leurs côtés, soudain inclus dans des discussions, naviguant entre pseudos private jokes volontairement lourdes et moments plus personnels, esquissant d'autres préoccupations d'avenir.

Au final, c'est en se complaisant dans ce créneau équivoque, entre vanité et authenticité, que The Trip va progressivement trouver ses marques.

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A la lecture de cette présentation, vous devinez déjà que nous nous situons plus dans une série de niche, réservée aux amateurs, que dans une fiction tout public. The Trip est en effet une de ces comédies à la fois classique et post-moderne, à la croisée des genres, qu'il est difficile de cerner, ou de savoir vraiment comment prendre. En dilettante, sans avoir l'air d'y toucher, elle progresse avec un étonnant naturel. Elle ne cherche pas tant à nous faire rire, qu'à nourrir une confusion des tonalités s'attachant à l'installation d'une proximité de confort avec des protagonistes aux caractères rapidement bien marqués et installés. Les dialogues, dont la part d'improvisation véritable reste floue, cultivent avec une étrange saveur un art de la futilité qui sonnerait probablement très creux dans n'importe quel autre cadre. Pourtant, c'est dans cette désarmante banalité, aux allures vaguement désuettes, que se trouve l'identité de The Trip et sans doute une bonne part de son potentiel.

Sans véritable ligne directrice, les sujets de conversation s'enchaînent, avec une volatilité et une versatilité terriblement ordinaires, ouvrant la voie à une forme d'introspection des personnages. Entre rappels teintés d'accomplissements passés et frustrations actuelles, en passant par l'exploration de l'amitié qui unit le duo, tout sonne très juste, permettant à la série de capitaliser sur une indéniable dimension humaine. Les défauts et ambivalences de chacun, par moment à la frontière d'un pathétique éhonté, font ressortir une étonnante authenticité, un peu vaine, mais parfois presque attendrissante, comme en témoigne la dernière scène de cet appel du fin fond de la nuit, perdu au milieu de la campagne. C'est là que le registre sim-com représente une valeur ajoutée indéniable, par la pointe d'auto-dérision piquante qu'il permet ; même si cet angle a aussi ses détracteurs légitimes, tant la fin de la réalité et le début de la fiction paraissent volontairement excessivement flous par moment.

Corollaire de ce format, il suffira donc de rappeler que les rênes de The Trip ont été confiés à des acteurs confirmés, aux multiples caquettes, et habitués des comédies et autres one-man-show de l'autre côté de la Manche. Si Steve Coogan est sans doute plus connu pour son personnage d'Alan Partridge, Rob Brydon a notamment participé à certaines institutions de l'humour outre-atlantique, comme I'm sorry I haven't a clue.

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Bilan : Avec son rythme lent, en rupture nette avec le côté survolé des comédies modernes, The Trip investit un registre un peu à part. Cultivant l'art des dialogues délicieusement futiles au cours desquels tout semble prétexte à une douce autodérision teintée d'une certaine mélancolie, c'est une ambiance détendue, sorte de désarmante parenthèse entre amis, qu'elle installe. De cette invitation à la balade gourmande, le téléspectateur retient un parfum inimitable d'authenticité dans les relations mises en scène, au potentiel introspectif indéniable et renforcé par la semi-improvisation des dialogues, qui met instantanément à l'aise devant notre petit écran. Bien sûr, il y aura toujours cette frontière un peu trop floue entre fiction et réalité qui pourra troubler certains. Mais si aucun fou rire n'est à prévoir, au-delà des quelques sourires suscités, il y a quelque chose de confusément plaisant et revigorant à passer une demi-heure devant The Trip.Quelque chose qui donne envie de découvrir jusqu'où le voyage nous conduira. Pourquoi pas ?


NOTE : 6,25/10


Une bande-annonce :

This Is How Michael Caine Speaks

03/10/2010

(Pilote UK) Whites : sympathique mise en scène d'une dynamique des cuisines


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Après le rendez-vous manqué avec Him & Her début septembre (même si je lis ça et là que la série s'affirme peu à peu, mais je n'ai pas encore trouvé la motivation de poursuivre l'expérience), c'est une nouvelle possibilité de se laisser séduire par une comédie britannique qu'offrait BBC2, ce mardi 28 septembre, en proposant Whites .

Je dois dire que tant le concept, que le casting annoncé, avaient attiré mon attention. Ecrite par Oliver Lansley et Matt King, et conçue sur le format classique d'une demi-heure par épisode, si Whites ne m'a pas fait rire aux éclats, elle aura provoqué quelques sourires et m'aura en tout cas permis de passer un agréable moment devant ma télévision. Le potentiel est bien là ; le pilote remplit en plus honnêtement son office : donner envie au téléspectateur de revenir. Si bien qu'à la fin du visionnage, la question était : et si Whites et moi, cela pouvait coller ?

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Ayant pour cadre le charme entre chic et pittoresque d'un restaurant de campagne, Whites se déroule, pour la majeure partie de son pilote, dans ce lieu, stratégique par excellence, qu'est la cuisine. Cette dernière est dirigée, de façon plus ou moins lointaine, par Roland White. D'un tempérament versatile, si ses qualités de cuisinier ne font aucun doute, sa capacité de travail et son ardeur à la tâche sont en revanche plus sujettes à caution. Il est certes capable de préparer les plus grands plats... si l'envie l'en prend. D'un naturel dispersé, avec un égo proportionnel à son talent, il peine à se focaliser uniquement sur la bonne marche de ses cuisines. C'est ainsi qu'il passe une bonne partie du pilote à fantasmer sur un livre qu'il rêve de publier et dans lequel il partagerait expériences et conseils.

Avoir les cuisines régentées par un tel patron ne serait sans doute pas viable sur le long terme si le sous-chef Bib ne se dévouait pas à la bonne marche quotidienne des fourneaux, devant trop souvent cumuler ses propres responsabilités avec celles de Roland. Une situation dont la difficulté est d'ailleurs accrue par l'équipe de bras cassés qui officie en cuisine. La femme de Bib, tout particulièrement, trouve que tout cela n'a que trop duré... mais son mari est bien incapable de s'en dépêtrer. Le détachement de Roland exaspère également Caroline, la manager du restaurant. Cependant, si elle traque sans relâche les moments de profonde paresse du chef cuisinier, elle finit généralement invariablement par baisser les bras, attendant la catastrophe annoncée en spectatrice extérieure désabusée.

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Whites nous invite à suivre les péripéties vaguement improbables qui rythment le quotidien un brin chaotique de ce petit restaurant. Le charme opère en partie grâce à la manière dont ce décor culinaire est exploité. L'univers décalé s'installe par petites touches, de l'incompétence du personnel employé jusqu'aux demandes quelques peu atypiques de clients commandant des eggless omelettes, de la croisade anti-végétarienne du chef jusqu'à ses efforts pour mettre la main sur la plus improbable des viandes... ce pilote regorge ainsi de ces petits détails, anecdotes savamment distillées qui, sans être hilarantes, sauront provoquer chez le téléspectateur plus d'un sourire. L'atmosphère navigue avec aplomb entre le cocasse et le faussement burlesque, arbitrée par des réparties cinglantes qui manquent rarement leur cible.

Cet instantané des cuisines se révèle donc divertissant. La série s'avère d'autant plus plaisante que les personnages, avec leurs tempéraments opposés, contribuent pour beaucoup à donner une dimension humaine relativement attachante à la série. Ne lésinant pas sur les chutes et ruptures narratives, tout sonne très vivant dans Whites, capitalisant pleinement sur les clashs à répétition, tirades volontairement théâtrales de circonstances et autres mises en concurrence interne venant brouiller certaines hiérarchies. La dynamique entre les personnages fonctionne bien, prêtant naturellement à sourire sans arrière-pensée. S'il manque encore peut-être un peu de consistance à l'ensemble et si l'épisode gagnerait sans doute à des storylines plus conséquentes, pour un épisode d'introduction comme ce pilote, les ingrédients déjà en place laissent entrevoir un réel potentiel.

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Sur la forme, Whites propose une réalisation agréable à suivre. De même, la musique est utilisée de façon opportune. En somme, la série bénéficie d'une finition sérieuse.

Enfin, un autre aspect positif de la série, sur lequel elle sait très bien capitalisée, est son casting, chacun s'intégrant parfaitement dans le rôle qui lui est dévolu. Alan Davies (Jonathan Creek) est impeccable en cuisinier pratiquant son art en dilettante. Katherine Parkinson (The It Crowd) joue les managers exaspérées d'une façon naturelle toujours aussi enthousiasmante. Darren Boyd (Personal Affairs, Little Dorrit, Kiss me Kate), et son regard faux-fuyant, est excellent dans son rôle de sous-chef peinant à s'affirmer. On retrouve également à l'affiche Stephen Wight, Isy Suttie (Peep Show) et Maggie Steed (Clatterford, Born and Bred).

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Bilan : Le pilote de Whites permet donc au téléspectateur de se glisser sans souci dans cette dynamique des cuisines assez plaisante à suivre. L'épisode provoquera quelques sourires, à défaut de réellement faire rire ; cependant il remplit efficacement sa fonction d'exposition. On s'attache aux personnages introduits et, plus généralement, à l'univers ainsi créé. Reste à la série à concrétiser en apportant aux épisodes suivants un peu plus de consistance. Cependant, avec ce pilote, Whites laisse entrevoir un certain potentiel et semble sur la bonne voie.


NOTE : 6,5/10


La bande-annonce de la série :