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10/10/2012

(J-Drama) Ningen no Shoumei : le poids du passé

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La saison estivale a été assez morose au Japon. Peu de dramas avaient aiguisé ma curiosité a priori, et les quelques-uns que j'ai tentés n'ont pas pu retenir mon attention plus d'une poignée d'épisodes. Heureusement l'hiver s'annonce autrement plus fournie et alléchante, et soyez certain que j'y reviendrai de manière plus détaillée (des présentations à consulter par , ou ). En attendant, ces dernières semaines, j'ai donc eu l'occasion de ressortir ma liste de séries japonaises "à voir" (liste qui, il faut bien l'avouer, atteint une telle longueur qu'elle me fait douter en venir un jour à bout). J'avais initialement mis de côté le drama du jour dans le cadre mon cycle "explorons la filmographie de Takenouchi Yutaka", puis une review publiée cet été par Asa avait achevé de me convaincre de lui laisser sa chance.

Ningen no Shoumei (aka Proof of the Man) a été diffusé au cours de l'été 2004 sur Fuji TV. Il compte en tout 10 épisodes de 45 minutes environ (sauf le pilote qui avoisine 1 heure). Adapté d'un roman de Seiichi Morimura, il faut savoir que cette histoire a déjà été portée sur grand écran, au cinéma, en 1977 dans un film du même nom (Un article ici sur le film permet d'apprécier la liberté prise par le drama par rapport aux thèmes originaux). Cette version télévisée a été scénarisée par Maekawa Yoichi. Si j'ai découvert Ningen no Shoumei grâce à son casting, son histoire m'intriguait tout autant. Plus qu'une simple enquête policière, elle explore toute une galerie de portraits ambivalents et humains de personnages forts sur lesquels le passé a laissé une empreinte indélébile. Le genre de fiction à entrées multiples susceptible de me plaire.

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Suite à une arrestation réalisée de manière musclée mais efficace au cours d'une descente de police dans un club de Tokyo, Munesue Ichiro obtient une promotion dans un nouveau service relevant du commissariat central. Policier obstiné et instinctif, ses compétences sont reconnues par ses collègues, mais son impulsivité et ses excès de violence lui valent régulièrement des ennuis. Il va avoir l'occasion de faire ses preuves au cours de la première grande affaire à laquelle il est confronté : le meurtre d'un jeune Afro-Américain, dont le cadavre poignardé est retrouvé sur un pont de la ville.

Remontant le fil des indices et des fausses pistes, l'enquête conduit Ichiro de la campagne japonaise jusqu'au sud profond des Etats-Unis, en passant par sa ville d'enfance qu'il avait sans regret laissée derrière lui. Sa route croise également la route de nombreuses personnalités toutes connectées d'une façon ou d'une autre, de la romancière célèbre envisageant une carrière politique à une ancienne activiste d'extrême-gauche, en passant par un mari infirme et l'amant de son épouse unis tous deux dans la recherche de la femme qu'ils aiment et qui a disparu.

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Le premier attrait de Ningen no Shoumei tient à la densité de son récit. Exploitant parfaitement un caractère feuilletonant qui lui permet de se démarquer du format du simple procedural show, trop restrictif, le drama s'attache au contraire à construire et à tisser, tout au long de ses dix épisodes, une seule intrigue extrêmement foisonnante. Il éclate volontairement son histoire en de multiples storylines parallèles dont les liens n'apparaissent qu'au fur et à mesure de la progression de l'affaire. L'enquête policière principale, restant le fil rouge immédiat le plus accessible pour le téléspectateur, est classiquement mais efficacement construite, avec son lot de fausses pistes, de rebondissements et de découvertes. Elle est non seulement prétexte à voyager pour les enquêteurs, mais elle conduit aussi à remonter le temps aux origines des faits qui ont scellé les destinées de chacun.

Dans cette optique, Ningen no Shoumei est une série qui joue beaucoup sur la symbolique. Elle fait la part belle aux coïncidences permettant de parvenir à un toutélié voulu qui aurait pu sonner artificiel dans toute autre circonstance, mais que le scénario sait bâtir patiemment et surtout légitimer. En effet, le drama fait le choix opportun de ne pas se contenter d'être une simple quête du meurtrier - lequel se devine de toute façon rapidement. Esquissant une galerie de portraits ambigüs qui sont autant de personnages marqués pour beaucoup par des blessures indélébiles, c'est un récit qui parle avant tout de l'humanité, dans tout ce qu'elle contient d'espoir mais aussi dans sa dimension la plus sombre et désespérée. Au gré des tranches de vie qui défilent, l'objet de l'histoire s'impose peu à peu : obliger chacun à faire face à lui-même pour trouver, s'il le peut, une forme de paix.

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Le thème central de Ningen no Shoumei tourne ainsi autour du poids du passé. Ce dernier agit comme une ombre pesante, prédéterminant les actions des protagonistes et forgeant leurs ambivalences. La figure centrale qu'est Menesue Ichiro représente bien tout cela : sa défiance instinctive envers quiconque, ses explosions de violence dans certaines situations, ou encore cette froideur efficace qui le caractérise, trouvent leur source dans un traumatisme plus lointain qui hante sa mémoire. Le passé encore est ce qui régit les actions de Koori Kyoko, cette femme célèbre qui cultive une apparence policée de réussite mais qui porte en elle des stigmates d'une toute autre nature. Au fil du récit, Ningen no Shoumei dessine les contours de figures cabossées par la vie, qui poursuivent comme elles peuvent leur existence tout en gardant un oeil sur un passé dont ils ne peuvent se défaire. Cela permet de créer de vrais personnages de fiction, difficiles à cerner et intriguants.

Même les histoires plus connexes, peut-être non vitales à l'intrigue, contribuent à cette ambiance en mettant en scène des figures un peu perdues qui cherchent une direction : qu'il s'agisse de ce fils s'enfonçant irrémédiablement dans une spirale autodestructrice qu'il a lui-même initiée, ou de ce rapprochement hésitant et presque contre-nature auquel on assiste entre un mari et l'amant de sa femme pour rechercher celle qu'ils aiment et qui a disparu. Quant à l'approche peu flatteuse réservée aux Etats-Unis, qu'il s'agisse de l'évocation du racisme dans le Sud ou des dérives autour des bases militaires américaines sur le sol japonais, elle semble s'inscrire aussi dans cette ambiance un peu amère pour aboutir à une même conclusion : la nécessité de regarder vers l'avenir.

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Sur la forme, Ningen no Shoumei dispose d'une réalisation correcte, déjà quelque peu datée (le drama remonte à 2004). Assez paradoxalement, c'est lors de ses escapades aux Etats-Unis que la série trahit particulièrement son âge : l'oeil du téléspectateur opère alors la comparaison naturelle et immédiate, au vu de cet environnement familier, avec des séries américaines. Face à cette reconstitution du sud profond de l'Amérique, la photographie et les cadrages paraissent nous ramener encore une décennie supplémentaire en arrière. Mais la fluidité du récit ne souffre pas de ces quelques limites que l'on occulte facilement tout heureux que nous sommes d'avoir l'occasion de voyager par-delà les continents. Et puis le drama peut s'appuyer sur une intéressante bande-son composée par Iwashiro Taro : il dispose notamment d'un thème principal assez marquant qui contribue à rythmer l'enchaînement des situations.

Enfin, Ningen no Shoumei bénéficie d'un solide casting (je n'ai pas oublié que c'était d'abord lui qui m'avait permis de découvrir ce drama). S'il joue un rôle assez traditionnel, celui du flic sombre, torturé et efficace, Takenouchi Yutaka (Ryuuten no Ouhi - Saigo no Koutei, BOSS, Fumou Chitai) se montre convaincant, se réappropriant pleinement les ambivalences de son personnage. L'acteur remporte également l'examen de maîtrise de langue étrangère, son anglais étant assez compréhensible, ce que l'on ne peut pas vraiment dire pour les quelques mots phonétiquement hésitants prononcés dans la langue de Shakespeare par Natsukawa Yui (Kekkon Dekinai Otoko), qui interprète une journaliste déterminée, soutien amical constant pour Ichiro, et par Matsuzaka Keiko (Atsu-hime), qui joue la troublante Koori Kyoko. On retrouve aussi à l'affiche d'autres têtes familières du petit écran japonais, comme Ogata Ken, Osugi Ren ou encore Tanabe Seiichi. Mon seul réel regret est que Sato Jiro ait été cantonné à un rôle caricatural qui tient plus du comique maladroit de répétition qu'autre chose.

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Bilan : Suivant en fil rouge une enquête policière complexe et à tiroirs multiples, Ningen no Shoumei est un drama dense, choral par sa mise en scène d'une large galerie de personnages ambivalents. Il interroge sur le poids du passé - qu'il soit personnel, ou étroitement mêlé à celui du Japon - et sur la manière dont il est possible, ou non, de refermer des blessures qui semblent ne pouvoir se cicatriser. Son récit gagne en force au fil d'une narration qui bénéficie d'une construction méthodique et efficace, sans précipitation. Une série donc très intéressante à plus d'un titre.


NOTE : 7,5/10

10/11/2010

(J-Drama / Pilote) Guilty Akuma to Keiyakushita Onna : jusqu'où le désir de vengeance peut-il conduire ?


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Devant l'embarras de choix téléphagiques en ce dernier trimestre 2010, j'ai l'impression d'avoir des problèmes de riche pour remplir mon mercredi asiatique. Ce qui, pour un téléphage, ne peut jamais être objectivement qualifié de "problème". Tant de nouveautés aux synopsis aguicheurs, aux genres complètement différents, aux castings retenant mille et une attentions... Sur quels critères objectifs (ou non) donner la priorité à telle ou telle série ? Avant un retour probable en Corée du Sud, où les nouvelles séries m'appellent, ce week-end, après de nombreuses tergiversations, j'ai finalement jeté mon dévolu sur un drama, diffusé depuis le 12 octobre 2010 au Japon, Guilty Akuma to Keiyakushita Onna.

Parce que les histoires de vengeance exercent toujours une certaine fascination chez moi. Parce que même si je n'imagine pas Fuji tv porter à l'écran une série aussi sombre que ce dont je pourrais rêver à partir de la seule lecture du résumé, j'avais bon espoir que la mise en scène d'un flou moral troublant, dépassant tout caractère manichéen, soit plus réussie que l'un des principaux ratés de mes expériences estivales, JOKER Yurusarezaru Sosakan. Finalement, Guilty Akuma to Keiyakushita Onna ne s'est pas révélé exempte de défauts, et il serait excessif d'en faire un coup de coeur automnal. Pour autant, la série a su si bien accrocher mon intérêt que j'ai visionné les trois premiers épisodes d'affilée, tout en conservant le secret espoir que le drama saura grandir et mûrir au fil de la saison. Ainsi, même si elle est loin d'être parfaite, la série n'en demeure pas moins digne d'attention.

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Guilty Akuma to Keiyakushita Onna, c'est une histoire de revanche implacable, mais pas seulement. Au cours des deux premiers épisodes, s'esquisse également une rencontre, de deux êtres à une intersection de leur vie, à un croisement incertain où les dérives et choix qui s'offrent à eux vont rapprocher ces deux adultes qui n'auraient jamais rien dû avoir en commun.

En apparence, Nogami Meiko incarne la jeune femme sans histoire, menant une existence paisible en occupant un emploi dans un salon dédié aux animaux domestiques. Appliquée et enthousiaste dans son travail, personne ne pourrait se douter que lorsque les regards se détournent, le sourire qui illumine habituellement son visage se fige et disparaît. Car Meiko cache des blessures plus profondes. A l'âge de 19 ans, elle a été accusée et condamnée pour les meurtres par empoisonnement de son beau-frère et son beau-fils, cette tragédie aboutissant au suicide de sa soeur. Elle a toujours clamé son innocence, mais en vain. Désormais libérée, elle utilise son emploi du temps flexible et ses sorties pour organiser un autre plan autrement plus sombre : orchestrer une vengeance implacable contre les personnes, dont les actions ont, des années plus tôt, brisé sa vie. Si le téléspectateur ignore quel secret unit toutes les cibles de Meiko, il assiste à l'inarrêtable progression des plans de la jeune femme. Si pour le moment, elle est toujours parvenue, à la suite de chantage impliquant des êtres qu'elles aiment, à pousser ses victimes au suicide, jusqu'où peut-elle aller dans cette spirale de vengeance ? Pourra-t-elle vraiment, si la situation l'y oblige, prendre une vie de sang-froid ?

Sa perspective va peut-être changer en raison d'une rencontre fortuite pour son travail, se liant avec l'ami d'un client ayant laissé son chien : Mashima Takuro. Les états d'âme de Meiko semble se refléter comme dans un miroir chez cet homme dont elle ne connaît quasiment rien. C'est du point de vue de ce dernier que l'histoire nous est contée. Car Takuro, ayant ses propres préoccupations et problèmes, va lui cacher sa qualité de policier. Depuis une erreur de jugement qui a coûté la vie à la recrue qu'il avait sous ses ordres, Takuro n'est que l'ombre de lui-même. En plus d'un lourd poids sur la conscience qui lui fait trouver refuge dans l'alcool, il doit supporter les brimades continuelles de ses collègues pour poursuivre sur les ruines d'une carrière policière qui aurait pu être brillante. S'ajoute à tous ces soucis déstabilisants la disparition récente de son ancien mentor, accusé de corruption. Si tout le monde a vite fait de classer ce cas en suicide, Takuro découvre que c'est sur une affaire glissante que le vieil homme s'est lancé : l'affaire d'empoisonnement qui vit condamner Meiko. Rapidement, Takuro établit un lien entre d'étranges suicides qui ont lieu depuis plusieurs semaines et la jeune femme... Alors que le meurtrier de son ancien partenaire échappe à la condamnation pour insanité, Takuro poursuit ses visites auprès de Meiko, sans rien reporter de ses soupçons à des supérieurs qui préfèrent tant l'ignorer. Jusqu'où le conduira cette fréquentation ?

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Guilty Akuma to Keiyakushita Onna laisse une première impression ambiguë, qui apparaît finalement comme un reflet fidèle au flou ambiant que réserve la tonalité de la série. Appliquée, la série flirte avec une ambivalence morale jamais complètement assumée, mais où pointe une volonté scénaristique évidente de dépasser tout cadre manichéen, afin de remettre en cause la dichotomie traditionnelle du bien et du mal. C'est dans le personnage de Meiko que s'incarnent toutes les nuances de gris composant l'univers de ce drama : son projet de vengeance fait distinctement transparaître les deux faces dissociées d'une même personne, sans que le téléspectateur puisse deviner quelle est la réelle personnalité qui se cache sous ces masques. Est-ce cette face enjouée et ouverte aux autres ? Ou bien est-ce celle qui se referme et laisse entrevoir une détermination ayant banni toute émotion humaine ? Si la non-culpabilité de Meiko, pour l'empoisonnement à l'origine de tout, ne semble faire aucun doute de la perspective du téléspectateur (avec le peu d'éléments dont il dispose), en revanche, l'image qu'elle renvoie à l'occasion, d'une froideur déconnectée de toute contingence morale apparaît presque en accord avec le portrait terrifiant que sa mère en dresse.

Pourtant, si Guilty Akuma to Keiyakushita Onna entretient une volontaire ambivalence quasi-schizophrénique construite autour de son personnage central, la série ne franchit jamais un certain seuil, comme prisonnière d'un restant d'inhibitions. Ainsi, lorsque Meiko menacera de lâcher le bébé du haut du toit d'un immeuble, on découvrira a posteriori qu'il ne s'agissait que d'une poupée... Invariablement, elle utilise toujours le bluff pour fonder son chantage fatal, et n'a pour le moment jamais eu à mettre à exécution ses menaces. Certes, elle apparaît implacable à l'encontre de ses cibles, n'hésitant pas à détruire leur famille par leur mort ; mais si elle se ré-invente des codes moraux, elle ne s'en affranchit jamais complètement. S'attachant à ne pas dépasser ce point de non-retour virtuel, pour le moment, la série semble ménager à Meiko une porte de sortie. Pour autant, cette prudence permet aussi à Guilty Akuma to Keiyakushita Onna de laisser subsister un certain non-dit, autrement plus inquiétant, puisque résonne en arrière-plan une question lancinante : jusqu'où Meiko peut-elle se laisser emporter dans cette spirale de vengeance ?

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A ce stade de l'histoire, deux possibilités s'offrent à ce drama pour son évolution future. Ou bien peut-il nous décrire un progressif glissement hors de contrôle de personnages emportés par un désir de justice personnelle, réglant alors de manière privée et implacable leurs comptes en achevant de détruire leur rattachement à un certain idéal. Ou bien peut-il rester prudemment sur le sentier balisé de ces premiers épisodes, exploitant pleinement l'ambiguïté de la mise en scène, mais sans jamais concrétiser ce risque, se contentant de laisser en suspens la possibilité d'une telle dérive. Tout le paradoxe de Guilty Akuma to Keiyakushita Onna est finalement de parvenir à faire d'une de ses limites, a priori les plus contraignantes par rapport à son concept, une forme de point fort, en ce sens que la série ne se ferme aucune porte et sait jouer sur la suggestion pour envisager toute éventualité.

Le personnage de Takuro suit un schéma similaire ; le cumul de sa faillite personnelle et de la faillite du système judiciaire qui relâche le meurtrier de son partenaire achève de détruire ses dernières certitudes qui sont emportées par la disparition de son mentor. Sa rencontre, puis la relation qui s'esquisse entre lui et Meiko, interpellent immédiatement le téléspectateur. Non seulement par cet effet de miroir que l'on perçoit entre les deux dans leurs échanges, pareillement tiraillés, mais aussi en raison du fait que le policier sait ce que représente la jeune femme, sans que cela l'empêche de ressentir une étrange fascination pour elle. Or, consciemment ou non, le rapprochement qu'il encourage avec Meiko, et le silence dans lequel il s'enferme vis-à-vis de ses supérieures, apparaît un premier pas vers un glissement plus sombre, qui anéantirait ses derniers repères.

Outre l'attraction qu'exercent ces figures troublées, si la série bénéficie pleinement de la force des thèmes abordés, un des reproches principaux qui peut être adressé à son écriture, est sans doute son relatif manque de subtilité, auquel s'ajoutent quelques problèmes de crédibilité - le personnage du journaliste excentrique à l'excès, aux motivations floues, et vaguement omnipotent, représentant l'incarnation de certaines caractéristiques des fictions japonaises auxquelles je ne me suis jamais habituée.  Pourtant, que ce soit dans les rapports qu'entretiennent les personnages, ou bien dans la façon dont l'histoire progresse, le drama sait maintenir une tension constante dans la narration qui ne prend jamais l 'intérêt du téléspectateur en défaut. Il offre une consistance d'ensemble apportant une solide homogénéité dans la narration, qui vient ainsi compenser certains de ses travers récurrents.

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Presque logiquement pourrait-on dire, la forme s'inscrit dans une certaine continuité par rapport au fond de la série. En effet, d'apparence classique et sans valeur ajoutée particulière dans ses premières scènes, c'est finalement par une frustrante intermittence que la série laisse entrevoir un réel potentiel esthétique et une certaine maîtrise des tonalités colorées qui mérite d'être soulignée. Elle adopte ainsi à l'occasion une photographie plus soignée et recherchée, s'attachant avec beaucoup de réussite, et une certaine poésie de la mise en scène - consacrée par le générique de fin -, à refléter l'ambiance trouble du passage concerné. L'exercice est appréciable à l'écran ; mais ne nous donne que plus de regret sur l'identité visuelle que Guilty Akuma to Keiyakushita Onna aurait pu se construire si elle en avait eu l'ambition.

Pour supporter cette difficile histoire, le casting se révèle à la hauteur. Je confesse cependant que ma mémoire m'a (encore une fois) fait défaut. Il aura fallu attendre que je me plonge dans la filmographie du casting en rédigeant cette review, pour me rendre compte que cette série marque en fait un retour aux sources, par des retrouvailles avec un des premiers acteurs de séries asiatiques croisé au cours de mes débuts téléphagiques sur ce continent : Tamaki Hiroshi. Puisque Nodame Cantabile fut, avec Nobuta wo Produce, mon premier drama asiatique (il est plus récemment apparu dans Love Shuffle). Cette parenthèse de nostalgie téléphagique refermée, il convient de saluer Kanno Miho (Ai no Uta, Magerarenai Onna ou encore Niji wo Kakeru Ouhi), qui n'a sans doute pas un rôle facile en raison des hésitations des scénaristes, mais qui s'en sort de façon convaincante. Par ailleurs, retrouver Kichise Michiko (Mousou Shimai, BOSS) suffit à m'offrir quelques petits instants de bonheur à l'écran. Enfin, on croise également dans  la série des têtes familières du petit écran japonais, comme Mikami Kensei (GOLD, Tsuki no Koibito), Yoshida Kotaro, Karasawa Toshiaki (Fumo Chitai), Rikiya, Moro Morooka, Takizawa Saori (Jotei), Yokoyama Megumi ou encore Iwamoto Masuyo.

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Bilan : A l'image de ses personnages, Guilty Akuma to Keiyakushita Onna est un drama sombre qui flirte avec ses propres inhibitions narratives, à la croisée des chemins, et auquel il manque peut-être une construction scénaristique plus subtile et rigoureuse pour pleinement exploiter son potentiel. C'est ce que ses deux personnages principaux feront de leur rencontre et jusqu'où les conduiront leurs réflexions et états d'âme qui déterminera la valeur et la portée de cette série. Pour autant, au terme de ces premiers épisodes, on ne peut que constater la capacité étonnante de cette fiction à savoir se jouer de ses limites pour cultiver une ambiguïté au sein de son univers qui interpelle, transcendant toute classification. En dépit de certaines réserves, et sans adhérer à tout, il se révèle très difficile de décrocher de cette intrigante histoire, une fois que l'on est immergé dans ces mystères. Téléphages amateurs d'histoire de vengeance, laissez-vous tenter sans hésiter.   


NOTE : 6,5/10


Le générique très sombre et esthétique :