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14/09/2011

(J-Drama) Shinya Shokudou : poussez la porte du restaurant de minuit à Tokyo

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En Asie, la télévision japonaise reste sans doute le petit écran qui propose les fictions les plus diversifiées qui soient. Je suis toujours étonnée par sa faculté de parvenir encore à me surprendre après toutes ces années. En ce mercredi asiatique, j'avais initialement prévu de m'en tenir à un planning de septembre minutieusement établi, entre nouveautés sud-coréennes et bilans japonais... Et puis, vendredi dernier, une série est venue bouleverser mon rigoureux ordonnancement. Je me suis installée devant Shinya Shokudou, et soudain, tous mes autres projets ont disparu en arrière-plan, tandis que je savourais chaque épisode. Un grand merci donc à Ladyteruki et à son prosélytisme si bien inspiré (ainsi qu'à Calcifer qui m'en avait parlé l'été dernier) pour cette belle découverte.

Adaptation du manga du même nom d'Abe Yaro, Shinya Shokudou est une série programmée sur TBS dans sa case horaire après minuit, le vendredi soir. Sa première saison, comportant 10 épisodes d'environ 25 minutes chacun, a été diffusée du 14 octobre au 16 décembre 2009. Fait notable, une seconde saison a été commandée et est prévue cet automne au Japon. Ce drama atypique en bien des points, délicieusement gourmand, touchant et intimiste, a été pour moi le grand coup de coeur très particulier de cette semaine sériephile.

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Quelque part dans Tokyo, au coin d'une ruelle, existe un petit restaurant confidentiel. De jour, vous y trouverez porte close et devanture fermée. Il n'est ouvert que de minuit à sept heures du matin. Si le menu ne propose officiellement qu'un seul plat, le propriétaire accepte de cuisiner pour ses clients tout ce que ces derniers souhaitent, dans la mesure où il dispose des ingrédients nécessaires. Du maître des lieux, que chacun appelle Master, nous ne saurons rien ou presque. Mais il est le narrateur qui va nous introduire dans le quotidien nocturne de ce restaurant de minuit.

Dans cet endroit que l'on ne peut connaître que par le plus grand des hasards ou par le bouche à oreille, se rencontre une population bigarrée de tokyoïtes, noctambules aux vies décalées ou souhaitant retarder au maximum l'heure où il faut rentrer chez soi. Se croisent ainsi un yakuza, des employées de bureau toujours célibataires à leur plus grand désarroi, un photographe, une strip-teaseuse, un gérant de bar gay, et d'autres clients plus ou moins représentatifs de cette société japonaise. A travers les plats, associés à une mémoire particulière, que chacun commande, ce sont des tranches de vie de clients, habitués ou occasionnels, que va nous présenter Master.

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Shinya Shokudou est un drama à part qui va toucher une fibre particulière dans le coeur du téléspectateur. Dès l'introduction du premier épisode, quelque chose se passe. Par contraste avec un Tokyo de nuit, jungle urbaine illuminée par ses multiples façades éclairées, lorsqu'on pousse pour la première fois la porte de ce petit restaurant, on est immédiatement frappé par le contraste offert par l'ambiance qui y règne : un petit lieu comme suspendu dans le temps, renvoyant une impression diffuse de confort et d'intimité. Se déroulant à une heure où la plupart des gens dorment, le téléspectateur est invité dans ce petit coin de socialisation, où se retrouvent des clients aux vies et aux milieux tellement différents qu'en temps normal, de jour, ils ne devraient jamais être amenés à se croiser, ou encore moins à s'adresser la parole. 

Plus qu'un écho de vie de quartier, le restaurant de minuit offre une échappatoire à la solitude nocturne, apportant une chaleur humaine et gustative à ses clients. Car la spécificité de Shinya Shokudou est d'éclairer nos rapports particuliers avec la nourriture, et plus précisément cette façon qu'a notre mémoire de lier irrémédiablement le goût de certains mets à des périodes de notre vie qui ont compté. En filigrane, c'est donc un drama gourmand entièrement consacré à ces saveurs éveillant en nous souvenirs et émotions enfouis. Chaque épisode s'intéresse à un client particulier, qui va être associé à une spécialité culinaire. La série fait ici preuve d'une empathie rare, d'une justesse troublante, pour relater avec sobriété ces moments de communion où chacun se délecte d'une saveur qui signifie tant de choses pour lui. Capable de faire passer beaucoup d'émotions, sans avoir besoin d'en dire beaucoup, ce drama est une série de peu de mots, mais dont l'approche très personnelle, souvent touchante, se drape d'une douce mélancolie qui ne peut laisser indifférent le téléspectateur.

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Construit comme un huis clos où l'action se déroule principalement entre les quatre murs de ce restaurant figé dans le temps, Shinya Shokudou est une série chorale qui nous raconte des tranches de vie de tokyoïtes, dont le seul point commun est le besoin de trouver du réconfort durant ces quelques heures où la ville fait mine de s'assoupir. Chaque épisode est un instantané se focalisant sur un personnage (la série exploite pleinement son format court de seulement 25 minutes), relaté du point de vue de Master. Parfois, est proposée l'histoire d'un nouveau venu, ou d'un ancien client qui ne vient plus, d'autres fois, le projecteur s'arrête sur un habitué qui fréquente anonymement le restaurant depuis plusieurs épisodes. C'est sans doute redondant d'écrire cela, mais il flotte sur ce drama un vrai parfum de Japon : à l'opposé de certaines séries, presque indifférentes à leur environnement, ici, on a l'impression que c'est l'âme du pays qui se dévoile, le coeur d'une société qui bat en arrière-plan. 

Ce ressenti, d'une rare intensité, s'explique en partie en raison de l'ambiance globale de Shinya Shokudou, mais aussi grâce aux thèmes abordés, qui sont très divers, dépendant des personnages mis en scène : un yakuza, une chanteuse de enka, des employés et autres salary men, une Idol, un marginal... Il faut préciser que la série est diffusée après minuit sur TBS, elle bénéficie par conséquent d'une plus grande liberté, introduisant des sujets plus osés dans ces tableaux classiques : une strip-teaseuse, un acteur porno... Les portraits de ces clients, réchauffés par les plats de Master, sont toujours remplis d'une humanité qui fait chaud au coeur. Ils sont souvent chargés d'une nostalgie particulière, parfois teintés d'une amertume douce amère comme peut l'être la réalité de la vie. Plus d'une fois, alors que l'émotion submerge un personnage lorsqu'il goûte ce plat auquel tant de choses sont attachées, le coeur du téléspectateur se serre. Assez paradoxalement, mais c'est son charme, Shinya Shakoudu est un drama qui sait faire sourire et pleurer en même temps. C'est une petite fable aussi versatile dans sa tonalité que peut l'être la vie, légère et drôle par moment, poignante à d'autres passages. Reflet de Japon, elle devrait séduire tout téléspectateur s'intéressant à ce pays.

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L'atmosphère particulière de la série se retrouve également dans sa mise en scène. Shinya Shokudou est en effet sur un plan purement formel une vraie réussite. Alors même qu'il s'agit d'un huis clos où peu de scènes se déroulent en extérieur, tout est superbement filmé. La réalisation cinématographique est vraiment agréable à l'oeil esthétiquement, mettant en valeur et en relief ce décor minimalistes, les intéractions au sein du restaurant, mais aussi la nourriture, cet élément central qui relie tous les protagonistes. De plus, le drama bénéficie d'une bande-son également magnifique composée de plusieurs chansons de Suzuki Tsunekichi. Ces ballades au rythme posé et à la tonalité quelque peu mélancolique correspondent parfaitement au ressenti que l'on éprouve devant cette série. L'introduction de chaque épisode est d'ailleurs parfaitement représentative de cette ambiance : dans Tokyo illuminée de nuit, la chanson-titre nous amène au restaurant pour nous le présenter (cf. la vidéo à la fin du billet). Par contraste, la conclusion plus rythmée est interprétée par MAGIC PARTY.

Enfin, Shinya Shokudou dispose d'un casting au diapason. Celui qui nous guide, le seul à être présent dans tous les épisodes, est Kobayashi Koaru (Naniwa Kinyudo) : il incarne avec beaucoup de sobriété ce maître des lieux, attentif à ses clients et cusinier appliqué. Autour de lui, les clients vont et viennent, même s'il existe toute une galerie d'habitués que l'on va régulièrement croiser. Parmi ces occasionnels ou fidèles qui resteront jusqu'au bout, on retrouve notamment Sudo Risa, Kobayashi Asako, Yoshimoto Nahoko, Kaneko Kiyobumi, Yamanaka Takashi, Ando Tamae, Ayata Tohiki, Tabata Tomoko, Fuwa Mansaku ou encore Uno Shohei. J'y ai reconnu deux têtes qui m'étaient familières : Matsushige Yutaka et Odagiri Joe (qui a environ 4 lignes de dialogue en tout et pour tout, mais dont le décalage du personnage et la coiffure expérimentale ont suffi à mon bonheur).

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Bilan : Drama attachant et intimiste, à la fois drôle et poignant, Shinya Shokudou est une petite tranche de Japon qui se déguste comme peu de séries. Explorant nos rapports à la nourriture, et la façon dont des saveurs particulières peuvent façonner et marquer notre mémoire, cette série offre une compilation de portraits humains et touchants, se révèlant par les souvenirs que font jaillir les plats que chaque personnage commande. Drama culinaire (il se termine à chaque fois par la recette du plat de l'épisode), c'est un moment de chaleur et de réconfort qu'il offre à ses personnages et qu'il étend à des téléspectateurs sous le charme.

Le mot de la fin sera donc : Bon appétit devant Shinya Shokudou !


NOTE : 8,75/10


L'introduction (qui met musicalement et par ses images immédiatement dans l'ambiance) :

09/02/2011

(J-Drama) Densha Otoko : un attachant conte de fées moderne

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Un mercredi asiatique un peu spécial aujourd'hui. Comme vous avez dû vous en rendre compte, au vu du rythme de publication très light sur le blog ces derniers jours, le travail a malheureusement rattrapé mon temps libre. Rien d'irrémédiable, mais n'ayant pas eu le temps de consacrer une seule soirée à visionner des séries au cours de la dernière semaine et demie (et n'ayant vu en tout et pour tout qu'un épisode de Being Human au cours des 10 derniers jours), vous comprendrez que l'exercice de rédaction de review se révèle quelque peu compliqué ! Si mes perspectives de temps libre risquent de ne pas s'arranger avant la fin du mois, je vais cependant tâcher de maintenir un rythme de publication, fut-il modeste, en attendant mieux.

Et, comme j'avais déjà pu le faire à quelques reprises l'an passé, lorsque je n'ai pas eu le temps de découvrir de nouveautés, ce mercredi asiatique devient l'occasion de revenir sur mes premiers pas téléphagiques dans les petits écrans de cet autre continent. Premiers pas téléphagiques qui s'effectuèrent au Japon. Parmi ces dramas qui ont posé quelque peu les bases de ce voyage asiatique, figure ainsi celui que je vais évoquer aujourd'hui : Densha Otoko.

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Diffusé sur Fuji TV en 2005, Densha Otoko ("L'homme du train") est l'adaptation d'un best-steller, lui-même inspiré d'une histoire vraie. La série va nous faire suivre les chamboulements que va connaître la vie de Yamada Tsuyoshi, un jeune homme célibataire, extrêmement maladroit socialement, plus souvent brimé qu'épanoui. Véritable otaku qui préfère se réfugier dans sa passion pour l'univers de l'animation, les relations humaines n'ont pour lui rien d'évident. Or, un jour, en rentrant par le train, il défend une belle jeune femme, Aoyama Saori, qu'un ivrogne importunait. Troublé et conquis par le bref échange que cela occasionna entre eux - et qui se conclut par un échange de coordonnées -, Tsuyoshi décide de prendre les choses en main : comment conquérir celle qui est sans conteste la femme de ses rêves ? C'est vers la communauté virtuelle qu'il fréquente qu'il va se tourner pour glaner quelques précieux conseils.

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Jouissant d'une solide réputation - sans doute avant tout liée à cette magie qu'il semble faire naître sous nos yeux -, Densha Otoko reste un drama culte qui, à sa manière, ne pourra pas laisser indifférent le téléspectateur. L'histoire apparaît somme toute classique - une rencontre entre deux êtres que tout sépare a priori -, difficile pourtant de ne pas conserver une profonde tendresse pour cette sorte d'adaptation moderne de conte de fées. L'association des deux personnages principaux saura toujours conserver ce côté atypique qui permet de ne pas avoir l'impression d'une énième redite, mais plutôt d'une ré-appropriation personnelle des codes du genre. Le drama est doté d'une écriture à part, soignant une forme de paradoxe où se ressent un côté presque déconnecté (suis-je dans un rêve?), tout en sachant pourtant traiter de thèmes qui auront rarement paru aussi solides et concrets. Densha Otoko dégage une impression quelque peu irréelle, mais particulièrement rafraîchissante.

Romance aux faux airs d'une Belle & la Bête modernisée, le drama sait parfaitement jouer sur tous les tableaux, tant amoureux que comiques, permettant une alternance de tons des plus intéressantes. Mêlant habilement un humour qui n'hésite pas à verser dans le burlesque et une dimension sentimentale très émotionnelle, la série capitalise en réalité sur une humanité qui surprend et revigore un téléspectateur rapidement conquis, d'autant que le drama bénéficie d'une galerie de personnages hauts en couleur. L'aspect le plus original de Densha Otoko réside sans doute dans la mise en scène de l'univers des otakus qu'elle propose, surtout à travers la petite communauté virtuelle qui entoure le héros. La série croque avec délice - et une pointe de gentille caricature - les traits d'une bande d'internautes aux liens presque plus unis que ceux qu'ils peuvent nouer IRL. Ce côté extrêmement bigarrée a le mérite de sonner très authentique ; et de permettre une exploitation de ce média de manière moins artificielle qu'une série comme Sunao Ni Narenakute l'an dernier (avec twitter).

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Pour autant, ce qui fait la vraie force de ce drama et qui explique à mon sens tant sa réputation, que le fait qu'il ait pu réunir des téléspectateurs aux goûts très différents, qu'ils viennent pour la comédie, la romance ou pour un mélange de l'ensemble, c'est ce parfum d'espoir qui sous-tend l'ensemble. Car au-delà de la douce incrédulité que ressent le téléspectateur devant la témérité diffuse que représente le fait de seulement envisager l'histoire qui nous est relatée, Densha Otoko est une de ces séries que l'on aime à chérir parce qu'elles se proposent d'ouvrir des portes que l'on croyait définitivement refermées et qui vont donner le courage de poursuivre des rêves que l'on pensait inaccessibles. Un instant, tout paraît pouvoir devenir possible. Comme un conte de fées. On se laisse emporter en se murmurant intérieurement, "et pourquoi pas ?".

Sur la forme, il convient de s'arrêter sur l'OST, car ce sont les musiques qui m'ont marqué dans cette série, et plus précisément les génériques, qui restent encore à ce jour parmi mes préférés de j-dramas (cf. en fin de billet pour les visualiser). En effet, tant pour ouvrir le drama que pour le conclure, Densha Otoko choisit opportunément de pleinement exploiter cet univers otaku qui lui est propre, avec un classique geek par excellence faisant office de première présentation (la chanson Mr Roboto), mais aussi en recréant l'opening d'un dessin animé dont le héros est fan. A la frontière de la réalité, jouant sur l'ambiguïté de sa thématique, c'est très bien trouvé.

Enfin, la série bénéficie d'un casting solide qui s'intègre parfaitement. Les deux rôles principaux sont dévolus à Ito Atsushi et Ito Misaki, tous deux très convaincants. Ils sont entourés d'une galerie de seconds rôles tout aussi déterminants pour forger l'ambiance globale du drama, parmi lesquels on retrouve : Shiraishi Miho, Sato Eriko, Sudo Risa, Hayami Mokomichi, Sato Jiro, Maekawa Yasuyuki, Horikita Maki, Koide Saori, Gekidan Hitori, Toyohara Kosuke, Akiyoshi Kumijo, Kishibe Shiroo et encore Sugawara Eiji.

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Bilan : Conte de fées moderne profondément attachant, Densha Otoko se visionne avec une tendresse jamais démentie. Il ne suscitera pas forcément de coup de foudre instantané, ni de passion démeusurée. Mais derrière sa thématique romantique très classique, tout en bénéficiant de la gestion calibrée de tonalités qui offrent un habile mélange de romance impossible et de comédie aux allures loufoques, se trouve quelque chose d'à la fois très personnel et universel qui ne saurait laisser indifférent. Car ce secret tiraillement qu'il éveille au fond de nous, c'est ce sentiment si précieux que l'on appelle "espoir". C'est cette fibre cachée, celle d'une utopie qui se matérialise, que ce drama parvient à toucher avec une authenticité et une sensibilité rares. 


NOTE : 6,75/10

Le générique de fin :


Le générique d'ouverture :

(Mr Roboto)