01/04/2011
(UK) Mad Dogs, saison 1 : descente aux enfers sous le soleil de Majorque
Poursuivons le bilan des dernières semaines du petit écran britannique en revenant aujourd'hui sur une fiction qui était très attendue - en raison du casting annoncé - : Mad Dogs. Comportant 4 épisodes d'environ 45 minutes chacun, cette série a été diffusée du 10 février au 3 mars 2001 sur Sky One. Elle s'inscrit dans la politique suivie par cette chaîne visant à s'imposer dans le paysage des fictions télévisées outre-Manche. EDIT : Initialement conçue comme une mini-série, la commande d'une saison 2 lui permettra de poursuivre plus avant l'expérience narrative initiée.
Assez indéfinissable dans son genre, empruntant au buddy show comme à la fiction de gangster, Mad Dogs peut sans doute être rapprochée par son esprit d'un film comme Sexy Beast. Cependant si elle cultive une ambiguïté dans ses tonalités qui se révèle proprement rafraîchissante, elle laisse aussi le téléspectateur sur une impression assez ambivalente à la fin.
C'est sous le chaud soleil de Majorque, dans un cadre paradisiaque et coloré, que Mad Dogs s'ouvre, nous présentant les retrouvailles de vieux amis qui se connaissent depuis toujours, à l'initiative d'un des leurs, Alvo. Ce dernier a si bien réussi qu'il se propose de fêter déjà sa retraite et les a donc invités pour passer quelques jours dans sa luxueuse villa espagnole. La quarantaine passée, chacun en est au stade de sa vie où l'on dresse un premier bilan de sa vie, ayant connu réussites et revers de fortune. Leurs situations familiales et professionnelles sont très diverses, mais pas vraiment au beau fixe. Ce qui fait que Baxter, Rick, Woody et Quin sont a priori très heureux de cette opportunité de changer d'air, pour permettre en plus de renouer des liens d'amitié qui ont pu se distendre avec le temps.
Malheureusement ils vont vite déchanter. Car Alvo, avec les arrières-pensées qu'il pouvait nourrir en leur demandant de venir et les origines floues de sa mystérieuse fortune, va les entraîner dans un engrenage dangereux rapidement hors de contrôle. La promesse de vacances paradisiaques s'efface alors, le séjour se transformant en véritable cauchemar. Plongés dans des histoires dont ils ignorent tout, entre mensonges, meurtres et trafic de drogue, voilà nos quatre amis confrontés à un tueur Tony Blair-isé, l'ombre menaçante de la mafia serbe, voire même une police corrompue : s'en sortiront-ils indemnes ? Mais l'enjeu est peut-être ailleurs : leur amitié survivra-t-elle à ces épreuves ?
Mettant en scène l'éprouvante descente aux enfers de ses quatre personnages principaux, Mad Dogs apparaît tout d'abord comme un thriller psychologique relevé assez fascinant par la dynamique implacable qu'il crée. Sans forcément innover dans les thématiques qu'elle investit, la série retient en effet l'attention du téléspectateur par sa capacité à mêler les genres, empruntant tant aux codes narratifs des fictions de gangsters qu'à celui des huis clos où la tension va croissante et où la cohabitation semble destinée à finir par dégénérer à tout moment. En nous plongeant dans une spirale infernale à l'issue de moins en moins certaine, Mad Dogs se construit par et grâce aux ruptures inattendues qui jalonnent son récit. Si le suspense ainsi généré offre un fil rouge opportun, il convient cependant de relativiser sa réelle importance : entièrement dédiée à ses personnages, la série leur sacrifie une partie de la consistance de sa trame.
En effet, au fil de la progression de l'intrigue, les péripéties mafieuses des personnages ressemblent de plus en plus à un prétexte, plus ou moins bien négocié, à l'artificialité parfois évidente. Car la priorité de Mad Dogs est ailleurs : elle se situe dans la mise en scène des réactions de ses protagonistes face une tension croissante. Quels effets les évènements vont-ils avoir sur leurs intéractions ? Au fond, on en viendrait même à penser que la cause réelle de cet engrenage importe peu : qu'elle ait des accents gangster ou autre, ce que veut la série, c'est poursuivre une oeuvre méthodique de déstabilisation, en poussant chacun dans ses extrêmités. Et elle y parvient de façon plutôt convaincante.
Ce jeu du révélateur d'une nature humaine ambigue est un parti pris scénaristique qui va constituer tant l'attrait que la limite structurelle de Mad Dogs. Négociant avec brio une dimension humaine qu'elle place en son coeur, la série marque par ces marquantes scènes d'amitié ambivalente, au cours desquelles les rancoeurs se mêlent à un affectif jamais démenti. Quoi de plus pimenté et finalement intrigant que cet étonnant paradoxe constitué par ces explosions où chacun échange ses quatre vérités, parfois de manière particulièrement vicieuse, mais sans que la fondation même de leur amitié puisse être atteinte. Chaque fois qu'une nouvelle confrontation a lieu, le téléspectateur s'interroge : jusqu'où leurs liens peuvent-ils tenir ? Au final, c'est dans ce portrait assez atypique, un brin désillusionné, mais pourtant juste et sincère, des paradoxes de l'amitié, que réside une bonne partie du charme indéfinissable de Mad Dogs.
Cependant, cette dimension humaine ne parvient pas toujours à contrebalancer les faiblesses de la série sur le fond. La résolution bâclée sur laquelle se conclut cette saison, après avoir essayé de construire les bases plus ou moins scolaires du thriller, laisse un arrière-goût mitigé. Plus les choses dégénèrent, plus le côté parachuté des rebondissements semble évident. Si bien que ce fil rouge donne de plus en plus l'impression de sonner creux, le quatrième épisode étant sans doute le plus flagrant sur ce point. Toute l'attention des scénaristes est concentrée sur la tension psychologique qui monte, le reste n'est qu'anecdote, plus ou moins réfléchie et travaillée, pour permettre ce type de développements. Il est donc difficile de ne pas ressortir assez frustré par cette impression de vide dans l'histoire en elle-même.
Sur la forme, la série joue beaucoup sur son cadre assurément dépaysant et sur le contraste entre les quelques paysages paradisiaques qu'elle nous propose à l'occasion et le cauchemar autrement plus concret dans lequel elle plonge les personnages. Les teintes colorées des images sont en tout cas un écho parfait à ce chaud soleil de Marjorque dont on finit forcément par rêver. Un voyage donc agréable.
Enfin, terminons sur l'atout le plus important de Mad Dogs, ce qui lui permet justement de survivre et de s'imposer grâce à ses personnages : son casting. Il réunit des noms dont la seule lecture suffit a priori à mettre des étoiles plein les yeux du téléspectateur familier du petit écran britannique. Cette série a été faite pour leur donner l'opportunité de travailler ensemble, cela se voit, mais les performances d'ensemble achèvent de balayer les dernières réticences du téléspectateur. Pensez donc : qui pourrait rester insensible et passer son chemin sans sentir sa curiosité éveillée devant un tel casting alléchant, où l'on retrouve John Simm (State of Play, Life on Mars, The Devil's Whore), Marc Warren (State of Play, Hustle, Mutual Friends), Philip Glenister (State of Play, Life on Mars, Ashes to Ashes) et Max Beesley (The Last Enemy, Survivors, Hotel Babylon) ? En ce qui me concerne, j'avais perdu la bataille de la curiosité dès l'annonce du projet. De plus, notons qu'ils sont efficacement secondés au début par Ben Chaplin, puis par Maria Botto.
Bilan : Au-delà du mélange des tonalités et des genres qu'elle propose, Mad Dogs apparaît avant tout comme une fiction sur l'amitié et les ambiguïtés inhérentes à ces liens humains. Si elle réussit plus dans cette dimension psychologique qui interpellera plus d'une fois le téléspectateur, que dans ses ambitions un peu creuses de thriller, la série bénéficie dans l'ensemble d'une dynamique attrayante grâce à des personnages (efficacement portés par son casting) auxquels elle doit tout. Au final, assez atypique dans notre petit écran, elle mérite probablement un coup d'oeil, en étant bien conscient de ses limites inhérentes.
NOTE : 6,25/10
La bande-annonce de la série :
17:13 Publié dans (Mini-séries UK), (Séries britanniques) | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : sky one, mad dogs, john simm, philip glenister, marc warren, max beesley, ben chaplin, maria botto | Facebook |
09/01/2010
(UK) Survivors : l'après du scénario catastrophe d'une pandémie meurtrière (Bilan, saison 1)
A partir de ce mardi 12 janvier 2009, NRJ12 entame la diffusion d'une série britannique à la thématique bien ancrée dans l'air du temps : et si la quasi-totalité des habitants de la Terre succombait à un virulent virus grippal ? Il ne s'agit pas du scénario catastrophe du ministère de la santé concernant la grippe A, mais du concept de départ de cette fiction britannique, dont la saison 1 a été diffusée en décembre 2008 sur BBC1 (donc, antérieurement au contexte grippal de 2009). Hasard du calendrier, la saison 2, comportant six épisodes, débutera en Angleterre ce même mardi 12 janvier.
Après un pilote implacable nous relatant la rapide progression inéluctable de la pandémie et ses conséquences bouleversantes, éradiquant 99% de l'humanité, Survivors se concentre ensuite sur un groupe de survivants, qui se retrouvent livrés à eux-même dans des villes désertées, où les structures et institutions sociales, mais aussi tout le confort moderne, ont été balayés par l'épidémie. Survivors est en fait un remake d'un classique de la télévision britannique : une série diffusée de 1975 à 1977 outre-Manche. Les téléphages y retrouveront de nombreuses têtes connues, habitués (avec plus ou moins de réussite) du petit écran anglais, tant dans le casting principal (Julie Graham, Max Beesley, Paterson Joseph, Zoe Tapper, Phillip Rhys), que dans les guest-stars (Freema Ageyman, Nikki Amuka-Bird).
Se situant dans un créneau post-apocalyptique que l'on pourrait rapprocher éventuellement, dans le paysage téléphagique de ces dernières années, d'une série comme Jericho, la saison 1 de Survivors laisse dans l'ensemble une impression très mitigée. Le potentiel d'un tel scénario est évident ; mais si s'esquissent quelques éléments intéressants à creuser, dans l'ensemble, la série souffre du manque d'ambition de ses scénaristes, qui choisissent de se reposer uniquement sur le concept fort et très spécifique de cette fiction, sans prendre la peine de se réapproprier ce cadre, d'atteindre la pleine envergure que l'on serait légitimement en droit attendre d'une telle idée. La vie d'après la pandémie se voit ainsi réserver un traitement scénaristique qui n'offre aucune surprise. En résulte des intrigues trop classiques, des enchaînements de clichés, parfois divertissants, parfois indigestes, et une frustration qui ne quitte pas le téléspectateur tout au long du visionnage. L'écriture est très aseptisée, quasi-linéaire, ne prenant jamais de risques.
L'aspect marquant, sans doute le plus réussi, de Survivors se résume en fait à son pilote, une efficace fiction catastrophe, à la fois divertissante et glaçante, exploitant tous les poncifs du genre, de façon assez prenante. On assiste à la plongée progressive de l'Angleterre dans le chaos, le pays cessant peu à peu de fonctionner, paralysé par la brusque pandémie. Les institutions officielles, dépassées, n'ont rien anticipé et vont être frappées de plein fouet, de la même manière que le reste de la population. Car la prise de conscience de la gravité de la situation, par le gouvernement comme par les citoyens, ne va intervenir que sur le tard, alors que la bataille contre l'épidémie est déjà perdue, l'issue fatale étant désormais inéluctable. Le pays entier sombre et se dissout en quelques jours... A travers le suivi du destin de quelques personnes, le téléspectateur se familiarise avec les futurs survivants et leurs tragédies personnelles.
Puis, la série s'ouvre alors sur une nouvelle ère, le "jour d'après". Les villes, cadres de civilisation par excellence, sont devenues froide et vides. Les cadavres, que l'on devine ou l'on croise, pourrissent derrière les murs des bâtiments, laissant les survivants à la merci de nouvelles épidémies. Il n'y a plus aucun mouvement, plus aucune vie. Ce désert civilisé, ruines béantes d'une société qui n'est plus, génère une sensation pesante, particulièrement forte. Les scénaristes n'ont aucun souci pour jouer sur les symboles dans la mise en scène de ce point de départ glaçant, dans l'ensemble très efficace.
Cependant, c'est ensuite que cela se corse et que Survivors peine à tenir les promesses qu'elle a fait naître. Il va falloir décrire le nouveau mode de vie des rares survivants, des derniers êtres humains qui errent, sans but, au milieu de ce théâtre de tragédie. Chacun se retrouvant isolé, séparé des siens qui sont morts ou disparus, un groupe d'individus très hétéroclyte se forme, suivant le premier principe de survie : l'union fait la force. Il offre une galerie de personnages très différents, mais qui ne vont jamais dépasser les stéréotypes qui leur sont assignés. Trop unidimensionnels, dotés de personnalité sans nuance, on peine à s'attacher à leur sort. Au fil des épisodes, alors même que l'histoire progresse, aucun ne parvient à prendre une réelle dimension, manquant désespérément d'épaisseur.
Si ce n'est donc pas du côté de ses protagonistes que Survivors va trouver le salut, son exploitation du grand concept de départ va se révéler également laborieuse. Il faut reconstruire une organisation sociale permettant aux derniers représentants de l'espèce humaine d'assurer leur survie. Plusieurs systèmes sont proposés, très différents : de la tendance tyrannique et liberticide d'une des dernières officielles de l'ancien gouvernement britannique jusqu'à des propositions de libre association plus souple. Mais la série, refusant d'introduire toute subtilité, ne prend jamais le temps de s'interroger réellement sur ces diverses options et leur finalité, restant trop souvent dans l'exposition caricaturale.
Enfin, le dernier fil rouge le plus affirmé laisse pour le moment le téléspectateur sur sa faim : il s'agit du développement d'une véritable théorie du complot, amenant à s''interroger sur l'origine du virus, une origine humaine qui implique que la pandémie est une conséquence du travail de scientifiques. Le téléspectateur a ainsi droit à quelques scènes entourées de mystère dans un laboratoire caché.
Bilan : La saison 1 de Survivors s'avère être de facture très (trop) moyenne. Insuffisamment ambitieuse, en dépit de son fort concept de départ ; trop timorée pour oser prendre le moindre risque dans son écriture qui manque de subtilité, elle ne laisse qu'entre-apercevoir un potentiel bien présent mais qui n'est pas exploité. La série ne répond pas aux attentes que son pilote efficace avait fait naître chez le téléspectateur. Elle s'inscrit un peu dans la lignée de ces séries au synopsis de départ intriguant, mais qui ne parviennent pas à relever le défi de le faire vivre sur le long terme. Sa durée brève (six épisodes) peut cependant lui permettre de bénéficier de la patience du téléspectateur qui n'attendrait d'elle qu'un divertissement post-apocalyptique. Mais dans l'ensemble, cela reste une série très dispensable.
NOTE : 4/10
La bande-annonce de la saison 1 (VO) :
13:13 Publié dans (Séries britanniques) | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : survivors, bbc, julie graham, max beesley, paterson joseph, zoe tapper, phillip rhys, freema ageyman | Facebook |