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11/03/2012

(UK) Blackadder (La Vipère Noire) : une comédie historique savoureuse et incontournable

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Je suis la première à reconnaître être peu versée dans les comédies. Je n'ai fondamentalement rien contre ce genre, mais elles sont peu nombreuses à me fidéliser. Actuellement, à l'exception notable de ce petit bijou qu'est The Thick of it dont j'attends avec impatience la quatrième saison, aucune ne me marque. Pourtant j'ai moi aussi mes classiques dans ce genre : quelques comédies cardinales dont les DVD sont soigneusement rangés dans ma bibliothèque. Vous connaissez mon trio sacré de l'humour en séries : Yes Minister (Yes Prime Minister) (à laquelle je voue un culte), Jeeves & Wooster et Blackadder. Un peu plus récemment, l'intégrale de A bit of Fry and Laurie est venue s'ajouter au rayonnage ; j'aurais sans doute l'occasion de vous en reparler.

Si parmi les tous premiers billets de ce blog, figurait une brève présentation de la saison 2 de Blackadder, j'ai achevé il y a quelques temps un revisionnage intégral (et dans l'ordre de diffusion) de la série, si bien que j'ai envie aujourd'hui d'y revenir plus globalement. Car au rang des comédies cultes que tout sériephile doit avoir vues une fois dans sa vie, elle occupe une des toutes premières places. Diffusée de 1983 à 1989 sur BBC1 (avec un dernier épisode spécial venu conclure le millénaire en 1999), Blackadder compte 4 saisons, pour un total de 26 épisodes. Elle a été diffusée en France, sous le titre La Vipère Noire, sur Arte, à partir de 1995. Et elle reste une série qui se savoure avec un plaisir inaltéré.

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Les 4 saisons de Blackadder se déroulent chacune à une époque différente ; elles ont pour point commun de nous faire suivre les (més)aventures d'un membre de la famille des Blackadder, Edmund, à diverses périodes de l'Histoire de l'Angleterre, et dont l'ambition et l'opportunisme demeureront inchangés. Il restera toujours accompagné par un serviteur, le fidèle - plus ou moins - Baldrick, et par les descendants de ce dernier. Au fil des saisons, tandis que Blackadder ne cessera de s'abaisser dans la hiérarchie sociale, c'est sur le plan de l'évolution que Baldrick régressera inversement.

Blackadder s'apparente donc à une ré-écriture de l'Histoire anglaise s'étendant sur quatre siècles, à travers les destins des représentants de deux familles liées. La première saison se déroule à la fin du Moyen-Âge, au XVe siècle, sous le règne (fictif) de Richard IV. La seconde prend place sous Elizabeth I, dans la seconde moitié du XVIe siècle. Puis, la troisième met en scène la fin du XVIIIe et le début du XIXe siècle, sous George III. Enfin, la dernière se déroule dans les tranchées de la Première Guerre Mondiale, en 1917.

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Blackadder est une comédie brillante, à la richesse rare, dont la force va être de savoir exploiter tous les types d'humour, tout en faisant de ses dialogues son atout principal. Dotée d'une tonalité volontairement sombre, de plus en plus désenchantée à mesure que la série progresse, on retrouve entremêlés jusqu'à l'excès un cynisme et un absurde dont le cocktail se révèle très savoureux. Car c'est par ces échanges acides, délicieusement ciselés, qui prennent place entre ses personnages, et par ces réparties cinglantes, où tous les registres de la langue anglaise sont mobilisés, que Blackadder va marquer. Chaque mot est pensé et pesé, avec des passages à la densité prenante ; la série se savourant logiquement avant tout en version originale. Si l'écriture fonctionne si bien à l'écran, elle le doit aussi aux dynamiques qui se mettent en place entre ses protagonistes. Tout en étant la figure centrale, Blackadder permet une prise de distance souvent jubilatoire face aux problèmes à surmonter. Et il va aussi savoir s'intégrer dans une galerie de personnages aux rôles identifiés (le serviteur, l'aristocrate chanceux...).

Si toutes ces caractéristiques ont permis à Blackadder de passer à la postérité, il serait faux de décrire la série comme un bloc homogène. En effet, elle a considérablement évolué au fil de ses saisons, permettant au téléspectateur d'être le témoin privilégié de la maturation, aussi fascinante que très réussie, de l'idée de départ. La première saison est ainsi celle des expérimentations, et reste sans doute la moins aboutie. Disposant d'un budget qui lui permet des scènes en extérieur, elle revisite avec excès la période médiévale, en multipliant les anachronismes. Mais elle laisse un arrière-goût d'inachevé, donnant l'impression de toujours chercher son équilibre. Même si elle propose quelques scènes très réussies, c'est celle que j'aime le moins. Puis, à partir de la saison 2, la distribution des rôles entre les personnages s'affine, de même que leurs rapports. Le duo entre Blackadder et Baldrick, tout particulièrement, réserve quelques échanges très savoureux, et les caprices de la reine Elizabeth I provoqueront plus d'un sourire.

Viennent ensuite les deux dernières saisons de Blackadder qui sont celles qui forgent véritablement la "légende" de la série. La troisième est celle de la maturité dans le domaine de la comédie : trouvant une justesse d'écriture entre tous les types d'humour et de dynamiques expérimentées au cours des saisons précédentes. On y retrouve du burlesque, du provocateur, et surtout des dialogues génialement ciselés, notamment ceux entre Blackadder et le prince régent au sujet desquels l'adjectif "culte" n'est pas galvaudé. Enfin, la quatrième saison est la plus approfondie. Elle permet à la série de prendre toute la mesure de son concept d'origine. Cette dernière s'y fait plus grinçante, et surtout moins légère, abordant des thématiques plus pesantes face à ces soldats dans les tranchées de la Grande Guerre. Blackadder exploite alors sa tonalité particulière, oscillant toujours entre cynisme et humour, pour traiter avec une justesse inattendue - mais sans se renier - de sujets qui sont normalement étrangers à la comédie. La quatrième saison est ainsi la plus aboutie ; et son résultat reste à mon sens le plus ambitieux apport de la série, démontrant par là toute sa richesse.

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Sur la forme, la baisse budgétaire à la fin de la première saison se perçoit dans l'évolution des décors. Mais dans l'ensemble, cela aura peu d'influence sur la série elle-même : c'est en effet sur ses dialogues que Blackadder repose, et c'est ce qui lui permettra de s'imposer, la forme demeurant plus anecdotique (surtout lorsque l'on a à disposition un tel casting pour leur donner vie). A noter que les génériques de début et de fin changent à chaque saison ; je vous en propose une petite compilation en fin de billet, car ils sont généralement très inventifs et l'orchestration musicale, comme les mises en scène, ont contribué à forger l'aura de la série. Personnellement, je continue d'avoir un faible pour le dynamisme de celui de la première saison (cf. première vidéo ci-dessous).

Interprète du rôle titre et co-créateur de la série avec Richard Curtis, Rowan Atkinson est sans doute plus connu en France pour son rôle de Mr Bean. Pourtant Blackadder reste à mes yeux son oeuvre la plus réussie ; la plus indispensable aussi. On y retrouve évidemment son jeu d'acteur caractéristique, et toutes ses expressions familières, qui apportent une dimension supplémentaire à un personnage de Blackadder dont l'atout va rapidement devenir ce sens de la réplique qui fait mouche. A ses côtés, Tony Robinson traversera les siècles à ses côtés, offrant un pendant parfait. On croisera également Tim McInnerny, Miranda Richardson, mais aussi Hugh Laurie (dont l'interprétation du Prince régent dans la saison 3 est juste brillante) et Stephen Fry, des noms qui marqueront le comique anglais des années 80 et 90.

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Bilan : Comédie culte qui n'a pas usurpé son rang mais mériterait une meilleure reconnaissance au-delà des frontières de l'Angleterre, Blackadder excelle dans le maniement d'un humour noir, cynique et provocateur. Sa force première réside dans des dialogues très bien écrits, qui vont offrir des échanges sacrément savoureux, dont beaucoup méritent d'être inscrits dans le panthéon des comédies. Rassemblant la fine fleur de l'humour anglais, cette série va nous faire assister à sa progressive maturation, pour aboutir à une saison 4 d'une richesse à saluer qui reste un bijou que tout sériephile devrait avoir dans sa DVDthèque.

Blackadder est donc un indispensable. Si vous êtes curieux, mais manquez de temps, laissez-vous au moins tenter par les saisons 3 et 4, elles le méritent vraiment ! Une arme anti-morosité toujours aussi efficace !


NOTE : 9/10


Tous les génériques (de début et de fin) :


23/07/2010

(UK) Jeeves and Wooster : insouciance bourgeoise et pragmatisme flegmatique pour une comédie "swinguante"

 

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Une des traditions de ce blog demeure la volonté d'explorer avec vous les trésors reconnus ou méconnus de la télévision britannique, en n'hésitant pas à remonter le temps au-delà des productions actuelles. C'est ainsi qu'aujourd'hui, je vais vous parler d'une série datant du début des années 90, Jeeves and Wooster. Cet incontournable et délicieusement swinguant britishism télévisuel, adapté des romans de P. G. Wodehouse, mit en scène le duo phare d'acteurs comiques de l'époque, les inséparables Hugh Laurie et Stephen Fry (de Blackadder à A bit of Fry and Laurie).

Diffusée sur ITV1, du 22 avril 1990 au 20 juin 1993, Jeeves and Wooster comporte 4 saisons, pour un total de 23 épisodes. Elle est malheureusement inédite en France (même si l'idée d'une adaptation VF apparaît quelque peu blasphématoire tant l'essence de la série réside dans la tonalité des dialogues de sa version originale, le fait qu'elle n'est jamais franchie la Manche est assez déprimant - trop british ?). L'intégrale est cependant disponible en coffret DVD zone 2, en Angleterre. Pour les curieux que la langue de Shakespeare n'effraie pas, mais qui ne sont pas encore parfaitement bilingues, notez bien que l'édition UK comporte des sous-titres anglais pour tous les épisodes.

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Jeeves and Wooster se déroule dans la société britannique bourgeoise de la première partie du XXe siècle, dans l'entre-deux guerres. Elle suit les pérégrinations mondaines de Bertie Wooster (Hugh Laurie). Ce jeune héritier de bonne famille, demi-aristocrate dévorant la vie en dilettante appliqué, dont le quotidien se résume à diviser son temps entre bon temps entre amis et fuites continuelles devant les responsabilités et les propositions de mariages arrangées par ses tantes. Bertie a la tête pleine de courants d'air, mais n'est jamais à court d'imagination pour mettre au point des plans, aussi complexes qu'inutiles, pour parvenir à ses fins auprès de ses comparses mondains.

Heureusement pour lui, si ses orchestrations sont généralement vouées à un échec aussi cinglant que potentiellement humiliant, il dispose à son service de l'assistance d'un valet maîtrisant parfaitement tous les rouages de cette société, en la personne de Jeeves (Stephen Fry). Toujours sur-informé, semblant conserver constamment plusieurs coups d'avance sur son très distrait maître, Jeeves sauvera la mise à son employeur plus d'une fois. Derrière ses politesses maniérées à l'excès, qui s'accompagnent d'un flegme personnel que rien ne saurait perturbé, le valet élève la manipulation au rang d'art et s'impose un cérémonial distant et détaché, en parfait contre-poids des dérapages non-contrôlés de Wooster.

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Jeeves and Wooster suit donc le quotidien, aussi mouvementé qu'anecdotique dans ses préoccupations, d'un jeune héritier profitant pleinement de l'instant présent et dont le principe de vie premier consiste à fuir devant toute responsabilité potentielle. Derrière ce savoureux parfum épicurien, c'est l'instantané d'une époque que l'on retrouve dans l'environnement mis en scène. Il nous plonge, non sans piquant et avec un détachement teinté d'un humour noir aussi flegmatique que diffus, dans les moeurs de la bonne société britannique de l'époque. La pointe de cynisme qui perce derrière les accents obséquieux de Jeeves, comme le portrait caricatural de cette classe sociale priviléiée, ne font qu'ajouter à cette impression d'ensemble.

Au-delà de son ambiance bourgeoise, Jeeves and Wooster paraît respirer et renvoyer une allure "so british" à chaque scène, personnifiant par ses ressorts et ses enjeux, une certaine époque, mais aussi une certaine image d'Epinal, entre rigidité sociale et insouciance des années folles, qui nous semblerait aujourd'hui presque folklorique, mais dont le charme de la transposition à l'écran est indéniable.

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Si le portrait global est attrayant, la force - et l'attrait majeur - de Jeeves and Wooster réside bien évidemment dans l'association de ses personnages phares, aussi improbable que logique tant la complémentarité des deux s'impose comme marquante. Le piquant de cette dynamique ainsi mise en scène se trouve notamment dans cette relation de subordination, existant entre un maître et son valet, dont la versatilité, en l'espèce, apparaît bien atypique. C'est qu'il y a incontestablement des accents d'un Mariage de Figaro moderne et britannique dans les ressorts de cette savoureuse comédie. Si bien que si leurs rapports ne s'inversent jamais, le stoïcisme réservé de Jeeves ne l'empêchera pas de gratifier la caméra de quelques sourires en coin subtiles, dont la signification est plus parlante que bien des longs discours.

Pour couronner le tout, Hugh Laurie et Stephen Fry s'en donnent à coeur joie dans cette sorte de "mano à mano" d'où perce une complicité indéniable. Leur enthousiasme se communique aisément à un téléspectateur sous le charme, tandis que chacun personnifie, dans le moindre de ces maniérismes, le personnage qu'il interprète. Hugh Laurie est parfait en aristocrate inconséquent, oscillant entre franches niaiseries et grimaces hautaines. Et, si Stephen Fry apporte la retenue nécessaire pour mettre en scène ce valet obséquieux, il parvient également, par quelques mimiques plus discrètes, à faire ressortir toute la subtilité du jeu de Jeeves, derrière ce théâtralisme poli. Délicieux !

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Bilan : Jeeves and Wooster est une comédie britannique savoureuse, objet télévisuel aussi à part que incontournable. Derrière sa façade insouciante, sa tonalité épicurienne et ses accents ironiques à l'égard de cette aristocratie d'avant-guerre, elle repose avant tout sur la dynamique atypique, plus subtile qu'une simple "subordination", existant entre un duo fabuleux de personnages haut en couleurs, qui sont l'âme de la série. Les pérégréniations mondaines de Wooster ne sont que prétextes à mettre en scène un humour théâtral, plus en finesse et en petites touches qu'il n'y paraîtrait au départ, où l'on ressent bien l'inspiration littéraire d'origine. Le téléspectateur se laisse séduire par ce charme swinguant, presque nostalgique, intemporel, qui s'y diffuse...

Jeeves and Wooster est une série à part, dont il faut savoir prendre le temps de savourer chaque épisode. Mais n'hésitez pas à être curieux, la découverte se mérite !


NOTE : 7,75/10


Le générique, délicieusement swing :


Un extrait de la série, les 20 premières minutes du premier épisode (en VOSTA) :

29/10/2009

(UK) Blackadder, series 2 : Il était une fois... Hugh Laurie

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Pour occuper les monotones soirées d'automne, il y a toujours les classiques. Blackadder, véritable institution culte de la comédie britannique, est un des remèdes les plus efficaces contre ces petits moments de déprime passagère.

J'aurais sans doute l'occasion de vous parler plus en détail de cette seconde saison ultérieurement. Bien plus que la première saison, encore inachevée et hésitante sur le ton à tenir, elle consacre l'arrivée de Blackadder au panthéon des comédies britanniques. Enchaînant les épisodes réussis aux thèmes très divers, la série y trouve son équilibre ; les personnages, leur personnalité. Et les dialogues, agrémentés de répliques acides où aucun mot n'est laissé au hasard, ne peuvent laisser indifférents, délicieusement jubilatoires. Le cynisme décapant, désenchanté ou presque espiègle par moment, de Lord Blackadder, son opportunisme constant teinté de lâcheté, atteignent leur sommet dans des réparties qui font toujours mouche ; tout en trouvant un pendant parfait dans la naïveté de ce simplet de Baldrick, son serviteur, ou bien dans les frasques de son "ami", Lord Percy. Cette saison 2 se déroule à la fin du XVIe siècle, sous le règne d'Elizabeth Ier.

Outre cette consécration qualitative, la saison 2 voit l'arrivée d'un nouvel acteur en guest-star, dans les deux derniers épisodes (Beer et Chains) : Hugh Laurie. Il rejoindra ensuite le casting principal pour les deux saisons suivantes. Hier soir, quelque peu désoeuvrée, je me suis fait plaisir en regardant le dernier épisode de la saison. Hugh Laurie y incarne "l'infâme" prince Ludwig, personnage aussi machiavélique qu'absolument hilarant. Si, pour moi, Hugh Laurie restera, dans Blackadder, sans doute éternellement associé à la figure maniérée du Prince régent dans la saison 3, ces premières apparitions ne manquaient pas de piment. Il excelle dans l'art de moduler sa voix, de jouer sur des mimiques dans un théâtralisme au confinement du ridicule, déclamant avec un sérieux improbable les répliques les plus invraisemblables.

Nous sommes en février 1986, sur BBC One, soit presque deux décennies avant que Hugh Laurie ne commence à faire les beaux jours de la Fox avec House MD :

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Blackadder est vraiment un classique de l'humour, indémodable à travers les années et qui se revisionne toujours avec autant de plaisir. Si jamais vous n'avez pas eu l'occasion de découvrir cette série, n'hésitez pas (elle est connue en France sous le titre de La Vipère noire). Ne serait-ce que pour découvrir certains acteurs sous un jour totalement nouveau ; et parce que c'est réducteur et tellement dommage d'avoir seulement le docteur House à l'esprit quand on pense à Hugh Laurie.

Une comédie à consommer sans modération.


Pour les nostalgiques, le générique de cette saison 2 :