Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

04/09/2011

(Mini-série UK) The Field of Blood : une sordide affaire dans le Glasgow des années 80

 thefieldofblood.jpg

Cette semaine, j'ai regagné la maison familiale pour quelques jours avec un thème central : l'Ecosse. Ma soeur décollait pour Edimbourg hier. Par conséquent, en plus de m'être amusée à défier les lois de la physique en l'aidant à remplir stratégiquement sa valise, j'ai apporté ma contribution dans un domaine que je maîtrise, à savoir une présentation de l'Ecosse... à travers les séries. Parmi les plus récentes, j'ai donc ressorti Case Histories de mes cartons (ça se passe à Edimbourg, ça tombe bien), et puis nous sommes aussi allées à Glasgow pour Lip Service.

Pour couronner le tout, BBC1 a parfaitement joué le jeu puisqu'elle a proposé lundi dernier la première partie (la suite est programmée demain) d'une mini-série déjà diffusée sur BBC Scotland en mai dernier : The Field of Blood. Cette mini-série, comportant deux épisodes d'environ 55 minutes chacun, est une adaptation d'un roman de l'écrivaine écossaise, Denise Mina. The Field of Blood (Le champ du sang en VF) est ainsi la première aventure mettant en scène le personnage de Paddy (Patricia) Meehan, une aspirante journaliste.

thefieldofblood2.jpg

The Field of Flood débute à Glasgow en 1982. Paddy Meehan est une jeune femme, passionnée et ambitieuse, qui rêve de devenir journaliste. Pour le moment, elle n'est cependant qu'une simple "copy boy" (employé à tout faire) dans un quotidien local, le Daily News. Sa mère, tout particulièrement, voit d'un mauvais oeil les aspirations professionnelles de Paddy, tandis que son fiancé, amour d'enfance, rêve plutôt d'une épouse traditionnelle. Si Paddy s'efforce de concilier ces deux pans de sa vie, sa famille va devoir affronter une période très difficile.

La disparition d'un garçon de deux ans, Brian Wilcox, met la population en émoi. Mais quelques jours plus tard, son cadavre est retrouvé dans le canal. La police s'oriente rapidement vers un suspect d'une dizaine d'années, identifié par un témoin. Alors que Paddy participe, à force de persuasion, à sa première recherche de scoop pour le journal, elle déchante vite en découvrant la photographie de l'enfant arrêté : il s'agit de son jeune cousin. Persuadée qu'il n'a pu commettre un tel acte, voyant que la police ne semble guère prête à douter du scénario qu'elle a établi, elle décide alors d'enquêter de son côté, troublée par les étranges parallèles avec une précédente affaire aussi tragique.

fieldofbloodl.jpg

Polar sombre, démarrant sur le crime particulièrement sordide du meurtre d'un enfant et marqué par quelques scènes assez violentes, The Field of Blood n'est cependant pas une fiction d'enquête policière classique. En effet, ce ne sont pas des policiers qu'elle met en scène : elle va nous faire suivre l'investigation menée par une apprentie journaliste. Elle profite d'ailleurs opportunément de l'occasion pour nous glisser dans les coulisses abrasives et machistes du quotidien local, le Daily News. La limite de ce choix est sans doute de cantonner l'enquête officielle de la police à une simple toile de fond presque en arrière-plan, en passant parfois très vite sur certains détails et avancées, nous informant par des ouïe-dire et autres échanges entre les journalistes. C'est un peu lointain, mais l'ensemble n'en demeure pas moins efficace et prenant. Car pour maintenir une tension et un rythme sans temps mort tout au long de ces deux heures, la mini-série va mettre à profit l'empathie suscitée par la jeune héroïne, dont les dilemmes et l'obstination inébranlable sauront impliquer le téléspectateur ; puisque la mise en accusation de son cousin fait prendre une tournure beaucoup plus personnelle à l'affaire.

L'intrigue va suivre un développement linéaire qui a les qualités, mais aussi les limites, de ce style d'écriture académique. L'enquête est à la fois très bien huilée - on se laisse entraîner dans la tension et la noirceur ambiantes - mais aussi très prévisible, de telle façon que les recoupements et les soupçons se font naturellement, le téléspectateur prenant à l'occasion de l'avance sur les protagonistes de l'histoire. Cependant The Field of Blood est une de ces fictions qui retiennent l'attention, non seulement par le savoir-faire calibré des scénaristes, mais aussi - et peut-être surtout - par ce grisant parfum de polar un peu daté, qui est relaté du point de vue d'une héroïne qui tranche singulièrement dans le milieu journalistique cynique et désabusé où elle évolue. Ce sont d'ailleurs les rapports de Paddy avec ses différents collègues du Daily News qui vont insuffler une dimension supplémentaire à la mini-série : qu'il s'agisse de scènes de confrontation ou de passages où certains se comportent plutôt en mentor, ils humanisent considérablement et de manière très appréciable le récit (et certains sont vraiment bien écrits). C'est ainsi que The Field of Blood s'assure la fidélité du téléspectateur peut-être d'avantage par son ambiance que par l'intrigue en elle-même.

fieldofbloode.jpg

Sur la forme, The Field of Blood dispose d'une réalisation appliquée qui va renforcer l'atmosphère de polar noir. On retrouve dans la photographie, plutôt sombre, comme une teinte d'époque, la caméra cherchant à nous faire remonter le temps en capturant ce parfum du Glasgow du début des années 80. La mini-série y parvient d'autant mieux qu'elle est soutenue par une bande-son très dynamique, rythmée par des morceaux de musique de cette période ; le casque du walkman de Paddy offrant un prétexte parfait pour insérer ces parenthèses musicales.

Enfin, The Field of Blood bénéficie d'un casting pour lequel on se prend rapidement d'affection. L'héroïne est incarnée avec beaucoup de naturel et de spontanéité par une actrice que je ne connaissais pas, Jayd Johnson (River City). Elle est bien épaulée par des seconds rôles très solides, parmi lesquels les plus notables sont Peter Capaldi (The Thick of It), journaliste désillusionné en fin de vie, qui délivrera notamment une scène d'une intensité bouleversante (cf. l'extrait vidéo ci-dessous), et David Morrissey (State of Play, Blackpool, Meadowlands), en patron caractériel plus compréhensif qu'il n'y paraît. On retrouve également à l'affiche Ford Kiernan ou encore Alana Hood.

fieldofbloodm.jpg

Bilan : Polar sombre et efficace, dans lequel le parfum des 80s' reste une garantie de dépaysement appréciable, The Field of Blood doit beaucoup au fait d'avoir choisi, pour bâtir son intrigue, de se placer du point de vue d'une jeune aspirante journaliste. En effet, le dynamisme de Paddy offre un contraste saisissant avec l'atmosphère plus pesante et tellement désabusée du milieu dans lequel elle évolue. Jouant ainsi sur le côté rafraîchissant et donc attachant de la jeune femme afin d'impliquer émotionnellement le téléspectateur, la mini-série saura développer une histoire globalement captivante en dépit des facilités auxquelles le scénario finira par céder ; la durée brève (2 heures) expliquant sans doute certains des raccourcis empruntés. A voir (c'est court) !


NOTE : 7,25/10


Un extrait marquant (Peter Capaldi, "And Death Shall Have no Dominion") :