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15/04/2012

(Pilote ITA) Il giovane Montalbano : les premiers pas d'une figure policière classique de la culture italienne


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Ces derniers mois, j'ai beaucoup écrit sur la télévision européenne (hors Angleterre), mais surtout celle venue du froid (Suède, Danemark, Norvège, Estonie, voire Russie...). Aujourd'hui, pour changer, c'est vers le sud que je vous propose d'embarquer... direction l'Italie, et plus précisément la Sicile, afin d'évoquer une série dont la diffusion de la première saison s'est achevée il y a peu : Il giovane Montalbano. Si ce nom ne vous est pas inconnu, c'est normal : le commissaire Salvo Montalbano est en effet le personnage récurrent des romans policiers de Andrea Camilleri. Ses enquêtes ont déjà fait l'objet d'une adaptation télévisée par la Rai, sous le titre de Il commissario Montalbano (Le commissaire Montalbano en VF). Existant depuis 1999, cette série en est à sa huitième saison et a été diffusée en France sur diverses chaînes hertziennes et de la TNT.

Avec Il giovane Montalbano, la Rai s'inscrit dans la mode porteuse du prequel, comme a pu le faire, début 2012, ITV en Angleterre, en lançant Endeavour qui invitait le téléspectateur à découvrir les débuts d'une autre figure policière familière du petit écran, l'inspecteur Morse. Il giovane Montalbano a démarré le 23 février 2012 sur la Rai1. Scénarisée par Andrea Camilleri et Francesco Bruni, elle s'inspire de trois romans : Un mese con Montalbano, Gli arancini di Montalbano et La prima indagine di Montalbano. La première saison compte 6 épisodes (d'1 heure 50 environ chacun). Elle a rencontré le succès auprès du public italien, rassemblant autour de 6,5 millions de téléspectateurs, si bien qu'une seconde saison est en préparation.

J'ai quelque peu hésité avant de rédiger ce billet, car le visionnage du (long) pilote de cette série constitue ma première incursion dans l'univers du commissaire Montalbano - dont je n'ai jamais lu les livres, ni gardé le souvenir d'un épisode de la série d'origine (que j'ai peut-être pu voir à l'occasion, mais une série italienne en VF, c'est juste impensable pour mes oreilles). Cependant j'ai trop rarement l'occasion de vous parler de télévision italienne (de vraies fictions italiennes, pas des incursions de la BBC comme Zen l'an dernier) - j'y manque d'ailleurs de références convaincantes en dehors de l'excellente Romanzo Criminale. Et Il giovane Montalbano, tout en étant très calibrée, dispose d'atouts pour séduire les amateurs de fictions policières.

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Il giovane Montalbano se déroule au début des années 90, en Sicile. Salvo Montalbano est à l'époque un jeune commissaire adjoint trentenaire, qui se languit de la mer et d'un climat tempéré, alors qu'il est actuellement en poste dans une petite bourgade de montagne. Grâce à sa fiancée - et à un parent de cette dernière -, fort du soutien de son supérieur hiérarchique, il obtient une promotion au grade de commissaire et, surtout, une mutation pour Vigata, une petite ville balnéaire (fictive) au sein de laquelle Montalbano a grandi et qu'il a laissée derrière lui après la mort de sa mère.

Revenir sur les traces de son enfance, ce n'est pas seulement retrouver le soleil, ainsi qu'un père qu'il n'a plus revu depuis longtemps et avec lequel il entretient des rapports difficiles, c'est aussi s'accomoder de nouvelles responsabilités. La série va ainsi nous raconter les premières enquêtes de Salvo Montalbano en tant que nouveau commissaire de Vigata. Non seulement le jeune homme devra savoir se concilier des subordonnés souvent plus âgés et expérimentés qui ne lui font pas tous bon accueil, mais il va devoir également apprendre à faire preuve de diplomatie et se montrer à l'occasion fin stratège, notamment pour gérer certaines influentes personnalités de la région.

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Il giovane Montalbano est une fiction policière procédurale relativement classique, mais qui va savoir rapidement se créer un charme bien à elle. Si les enquêtes de ce premier épisode - un meurtre à élucider, puis un incident qui se révèle bien plus complexe qu'une initiale simple altercation - s'avèrent plutôt solides, son principal atout réside incontestablement dans l'ambiance que la série entreprend de se construire. Tout d'abord, il y a l'exploitation de son cadre, la Sicile : avec un certain sens du détail, l'épisode nous immerge dans ses décors, montagnards comme balnéaires, mais aussi dans ses échanges culinaires, ou encore dans ses moeurs et ses non-dits à la mention de certaines familles qu'il n'est pas possible d'affronter même pour un représentant de la loi. C'est en somme une carte postale sicilienne - certes, avec une bonne part d'images d'Epinal - et italienne qui se dessine sous nos yeux. Sur le moment, le dépaysement s'opère. De plus, la série bénéficie d'une tonalité versatile et dynamique qui ne laisse pas insensible. L'épisode oscille ainsi entre des pointes de légèreté à la simplicité proche de la comédie (et qui déclencheront facilement plus d'un sourire), et des scènes autrement plus poignantes, le tout toujours porté par une énergie narrative communicative.

Au-delà des enquêtes et de l'atmosphère de la série, ce sont les personnages, souvent démonstratifs, qui vont permettre d'humaniser l'ensemble de manière appréciable. Outre une galerie de figures secondaires hautes en couleurs, ce premier épisode réussit à installer efficacement le personnage de Salvo Montalbano, caractérisant rapidement les traits essentiels de sa personnalité. Tout en cultivant un penchant solitaire, ce dernier sait aussi faire preuve de beaucoup sollicitude : il ne se désintéresse jamais de ce qui l'entoure, s'impliquant auprès des victimes ou des témoins qu'il croise, et suivant invariablement son instinct pour juger ses interlocuteurs et évaluer les situations. Il est difficile de ne pas s'attacher à ce jeune trentenaire que l'on découvre, dans les premières scènes du pilote, souffrant du mal du pays et n'en pouvant plus de ces montagnes au sein desquelles il a été envoyé, rêvant de sa chère mer et d'un climat plus tempéré (voire d'une topographie plus clémente). Le téléspectateur s'investit ainsi très facilement à ses côtés, dans des investigations qu'il conduit de manière toujours très vivante. Presque plus que les intrigues, c'est donc sur cette dimension humaine, plus diffuse, que compte la série pour fidéliser un public qui, au terme de ces deux premières heures, a su trouver ses marques.

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Sur la forme, Il giovane Montalbano est une série relativement bien maîtrisée, dont la mise en scène reste cependant trop calibrée pour marquer. La photographie y est plutôt soignée. La caméra sait exploiter à l'occasion le cadre sicilien - les montagnes tout d'abord, puis la mer - en soulignant bien le contraste dans l'ambiance de ces deux lieux entre lesquels se divise l'action du pilote. Par ailleurs, pour accompagner l'enquête, la série bénéficie d'une bande-son opportune, au sein de laquelle dominent des mélodies rythmées ; ces dernières renforcent la tonalité plutôt légère d'un ensemble qui entremêle voontairement les tons. S'ajoutent par-dessus quelques chansons italiennes qui achèvent de poser l'atmosphère sicilienne.

Côté casting, il faut reconnaître que Il giovane Montalbano doit beaucoup à l'énergie de son interprète principal sur la présence duquel repose une bonne partie de la dynamique de la fiction. Michele Riondino (La freccia nera) s'investit pleinement dans son personnage, cernant très bien ce dernier, pour mêler obstination inébranlable et une faculté certaine à transiger afin de s'adapter aux situations auxquelles le commissaire doit faire face. Parvenant vite à le rendre attachant, il fait en sorte que le téléspectateur veuille l'accompagner dans ses enquêtes. On retrouve également, dans la série, Alessio Vassalo, Andrea Tidona, Fabrizio Pizzuto, Benjamino Marcone, Sarah Felberbaum, Adriano Chiaramida, Giuseppe Santostefano, Carmelo Galati, Massimo De Rossi ou encore Maurilio Leto

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Bilan : Fiction policière reposant sur des bases solides et classiques, Il giovane Montalbano est une série consciente de ses forces, et du fait qu'elle porte à l'écran la jeunesse d'un personnage bien ancré dans la culture littéraire et télévisuelle italienne. Tout en restant dans un registre convenu et confortable, sans prise de risque notable, elle ne manque pourtant pas de dynamisme, notamment grâce à un plaisant mélange des tonalités entre légèreté et drame qui rend le visionnage agréable. Sachant se créer une ambiance qui lui est propre, une grande partie de son charme tient à l'immersion sicilienne (et, pour moi, au plaisir d'entendre la langue italienne), ainsi qu'à un personnage principal sympathique.

Ceux qui apprécient le commissaire Montalbano - des livres comme de la série - devraient y trouver leur compte - tous les articles que j'ai pu lire reconnaissent la fidélité à l'original de Il giovane Montalbano -, de même que les amateurs de fictions policières souhaitant un peu de dépaysement ensoleillé.


NOTE : 6,5/10


Une bande-annonce de la série :