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30/12/2009

(Ma DVDthèque idéale) Dix mini-séries des années 2000


Un bilan décennal parce que :
"Y
ou got to ask yourself which is more exciting,
watching your car roll over from 99,999 to 100,000,
or watching it go from 100 to 101 ?
"
(Sam Seaborn, A la Maison Blanche, 1.10)


Plus le temps passe et plus j'apprécie le format d'une mini-série. Plus longue qu'un film, donc permettant à l'histoire de bien s'installer et de se complexifier, avec l'assurance qu'il y aura une vraie fin et que la structure d'ensemble du scénario a été pensée dès le départ, le tout d'une durée raisonnable, ne laissant pas le temps à la lassitude et aux répétitions de s'installer : serait-ce mon format téléphagique d'avenir ?


Donc, voici les dix mini-séries, diffusées entre 2000 et 2009, qui figureraient dans ma DVDthèque idéale si je devais faire une sélection (la liste a été réalisée par ordre alphabétique ; elle englobe toutes les nationalités) :

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Angels in America [HBO (US), 2003]

Dans l'Amérique des années 80, dans le cadre de la communauté homosexuelle, une mini-série bouleversante qui nous raconte les premières années de l'apparition du SIDA. Cette fiction de haut prestige est de plus dotée d'un casting exceptionnel, cinéphile (Al Pacino, Meryl Streep, Emma Thompson) et sériephile (Mary-Louise Parker, Justin Kirk). Une très grande mini-série qui a marqué le petit écran lors de sa diffusion et qui mérita amplement toutes les récompenses qu'elle remporta.

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Band of Brothers [HBO (US), 2001]

Co-produite par Steven Spielberg et Tom Hanks, Band of Brothers nous raconte le sort de la Easy Compagny, au cours de la Seconde Guerre Mondiale. De la formation des hommes dans le camp d'entraînement jusqu'à la reddition japonaise marquant la fin du conflit, en passant par le débarquement sur les côtes françaises, l'enlisement du terrible hiver 1944-45 ou encore la découverte de l'horreur des camps nazis. C'est une fiction de très standing, porté par un solide casting homogène conduit notamment par Damian Lewis.

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Charles II: The Power and the Passion [BBC (UK), 2003]

Je me devais d'évoquer au moins un costume drama britannique. Attirée, par goût personnel, vers les mini-séries portant sur des récits historiques, et n'ayant pas peur des têtes couronnées, j'ai longtemps hésité entre celle-ci et Elizabeth I. Si j'ai finalement arrêté mon choix sur elle, c'est peut-être parce qu'il s'agit d'une des premières du genre que j'ai découverte. Elle nous relate la vie compliquée du roi Charles II, fils de Charles Ier qui fut exécuté en 1649, sur fond de guerre civile et de révolution anglaise au XVIIe siècle. Cette fiction est particulièrement bien servie par l'interprétation magistrale de Rufus Sewel.

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City of Vice [Channel 4 (UK), 2007]

Une mini-série prenante, qui nous plonge dans la dangereuse Londres du XVIIIe siècle, aux côtés de Henry Fielding, un écrivain célèbre de l'époque, qui va rassembler quelques hommes pour constituer la première police publique de la capitale britannique, les Bow Street Runners. Cette mini-série, policière et historique, sombre et réaliste, offre une reconstitution rigoureuse de l'époque et se révèle vraiment capitivante, avec un magistral Ian McDiarmid (le chancelier Palpatine de Star Wars). A mes yeux le plus convaincant costume drama britannique de la deuxième partie de la décennie.

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Generation Kill [HBO (US), 2008]

Cette mini-série de sept épisodes se présente sous la forme brute d'une chronique de la dernière guerre d'Irak. Un journaliste va suivre, au sein d'une unité de marines américains, l'invasion et la chute du régime de Saddam Hussein. Réalisée par les auteurs de The Wire (Sur Ecoute), Generation Kill en adopte le style narratif neutre, son ton quasi-documentaire et une caméra qui se présente comme un observateur extérieur, en quête d'authenticité. On retrouve au sein de son casting des têtes appréciées des téléphages, comme Lee Tergesen (Oz) et Alexander Skarsgård (True Blood).

Je lui ai déjà consacré un article sur ce blog : Generation Kill : chronique désabusée d'une guerre moderne.

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John Adams [HBO (US), 2008]

Cette somptueuse mini-série historique nous plonge dans la tumultueuse vie politique d'Etats-Unis encore en gestion. De la guerre d'indépendance jusqu'à sa mort en 1826, nous suivons John Adams, avocat qui participa activement à la formation de cet pays et qui en devint le deuxième président, succédant à Georges Washington. Pédagogique et intéressante, John Adams offre une reconstitution historique rigoureuse de la carrière de cet homme politique, à travers ses succès et sa vie personnelle, ainsi que son amitié et sa rivalité avec Thomas Jefferson. Le tout est superbement mis en scène. Cette fiction dispose en plus un casting cinq étoiles, composé de Paul Giamatti, Laura Linney, Stephen Dillane, Danny Huston, David Morse, Sarah Polley, Tom Wilkinson ou encore Rufus Sewell (Charles II: The Power and the Passion).

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State of Play [BBC (UK), 2003]

Mini-série devenue une référence du thriller médiatico-politique, elle s'interroge sur cette zone d'ombre trouble où évoluent les initiés du pouvoir et sur les pratiques qui y ont cours. A travers une enquête journalistique sur plusieurs morts qui n'ont a priori rien en commun, le téléspectateur plonge dans les coulisses et les rouages amers des secrets de fabrication d'une démocratie dont nous ne sommes normalement pas témoin. Une fiction britannique captivante qui a renouvelé le genre, servie par un casting brillantissime : John Simm, David Morrissey, Bill Nighy, James McAvoy, Polly Walker...

Je lui ai déjà consacré un article sur ce blog : State of Play : des jeux de pouvoir immuables.

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The Corner [HBO (US), 2000]

Dans une Baltimore lourdement touchée par le chômage et la drogue, cette mini-série suit la descente aux enfers d'une famille qui tente d'y survivre. Ce fut la première fiction des créateurs de The Wire (Sur Ecoute) ; elle a posé les bases de leur style quasi-documentaire ; la force et la dureté du récit est déjà là. D'un ton désespéré et pessimiste, elle nous expose, à travers un portrait sombre et méticuleux, l'envers du rêve américain. Indispensable.

Je lui ai déjà consacré un article sur ce blog : The Corner : plongée dans l'envers du rêve américain.

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The Project (Les Années Tony Blair) [BBC (UK), 2002]

Cette mini-série en deux parties constitue un modèle de fiction politique, chroniquant la vie de quatre amis d'université : ardents militants du temps de l'opposition, qui vont peu à peu accéder ensuite aux responsabilités avec le succès électoral du parti Travailliste en 1997. C'est une fiction, mais c'est aussi un quasi-documentaire qui relate la lente métamorphose d'un parti, une fois qu'il a accédé aux responsabilités. Elle constituait également une critique virulente de le gouvernement de Tony Blair. Mais, sa portée dépasse ce simple cadre conjoncturel : elle amène le téléspectateur à réfléchir sur le fonctionnement de nos démocraties modernes et sur la gestion du pouvoir. Avec Matthew Macfadyen (Spooks).

Je lui ai déjà consacré un article sur ce blog : The Project : l'histoire d'une désillusion.

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The State Within (Affaires d'Etats) [BBC (UK), 2006]

Se situant dans les coulisses de la froide géopolitique internationale et nous immergeant dans les méandres d'une diplomatie post-11 septembre, cette mini-série traite de la thématique moderne du terrorisme. Elle propose une véritable oeuvre de politique fiction en exploitant jusqu'à ses limites son concept, mettant en scène des conspirations qui mêlent nationalisme, enjeux industriels et financiers et espionnage. Très prenante, elle est de plus dotée d'un excellent casting, conduit par Jason Isaacs (Brotherhood).



Il existe, bien entendu, encore tellement de mini-séries de la décennie qui figurent sur mon immense pile de "fictions à voir" (surtout du côté anglais, où je suis loin d'avoir exploré tout l'univers des costume dramas), que ce bilan n'a rien d'exhaustif. Mais parmi celles que j'ai eues l'occasion de regarder, avec toute ma subjectivité, je pense que ces dix seraient celles que je sélectionnerais pour ma DVDthèque idéale des dix dernières années.

N'hésitez pas à compléter cette liste pour faire partager vos propres références et découvertes en mini-séries !

19/12/2009

(Mini-série US) The Corner : plongée dans l'envers du rêve américain


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Une immersion dans l'enfer de la drogue au sein d'un quartier paumé de Baltimore ? Instinctivement, vous répondez The Wire (Sur Ecoute). Mais nous nous situons ici en amont. Avant de signer ce chef d'oeuvre qui sera diffusé confidentiellement durant 5 saisons sur HBO (et se verra affubler de la désignation creuse de "la meilleure série du moment que personne ne regarde"), David Simon et Ed Burns avaient déjà posé l'ambiance et les bases futures de leur somptueuse chronique urbaine sur l'envers du rêve américain, à travers une première mini-série fondatrice, The Corner. D'une durée globale de six heures (pour autant d'épisodes), elle avait finalement ouvert la voie à la décennie puisqu'elle fut diffusée sur HBO au cours du printemps 2000.

Le coffret DVD étant arrivé dans ma boîte aux lettres il y a quelques semaines, il ne m'aura pas fallu longtemps pour (enfin) découvrir une fiction que je souhaitais voir depuis plusieurs années. A noter que, s'il y a parmi vous, chers lecteurs, des allergiques à la langue de Shakespeare (réaction d'autant plus compréhensible quand ladite langue est mêlée à l'argot des rues de Baltimore), le coffret DVD disponible en Angleterre (la mini-série n'est pas sortie en France) comporte non seulement une piste de sous-titres anglais, mais également une piste de sous-titres français. Par conséquent, aucune excuse linguistique pour se priver de cette mini-série fondatrice qui mérite le détour !

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D'un point de vue narratif, The Corner s'inscrit dans la même optique que The Wire (Sur Ecoute). On retrouve ce style inimitable que ses créateurs continuent de perfectionner (cf. Generation Kill). Il y a tout d'abord l'utilisation du journaliste, figure de l'observateur extérieur, qui est le prétexte et l'élément déclenchant permettant d'introduire le téléspectateur dans le récit qu'il se propose de suivre : une tranche de vie de quartier, à un croisement de plusieurs rues (d'où le titre de la mini-série). Cette approche renforce le ton de documentaire de la fiction. La caméra s'efface devant les faits : elle accompagne des scènes de vie brutes. Le fil narratif se réduit ainsi au minimum, comme si on craignait de bousculer le quotidien dans lequel on est convié. Les personnages dominent un récit d'où les scénaristes paraissent -de manière seulement apparente- s'effacer. C'est la caractéristique de ces séries citées plus haut, ce qui fait leur originalité, ainsi que leur force. Dans The Corner, ce style est déjà bien en place et renforce la portée d'une chronique qui ne saurait laisser insensible.

Si The Corner délivre une fiction dure et réaliste, elle marque surtout le téléspectateur par son pessimisme. Car c'est une descente progressive dans la drogue qui nous est contée, à travers le destin, finalement tragique, d'une famille qui va s'enfoncer dans cet enfer. Au-delà de ce récit, la mini-série ne semble offrir aucune touche d'espoir, seulement une réalité sombre et tentaculaire, où les étincelles sont si vite étouffées et à laquelle il paraît impossible d'échapper. En effet, c'est tout un quartier qui sombre autour, et avec, la famille McCullough. A l'aide de flash-backs savamment distillés, la mini-série expose les changements de Lafayette Street : de l'atmosphère résidentielle et bien tenue des années 70 jusqu'à la crise et l'arrivée de la drogue. Ce processus-là connaît également une gradation, des quelques joints dealés négligemment au raz-de-marée de la cocaïne et de toutes ces drogues dures qui vont transformer ces personnes en figures dépendantes et maladives, épaves humaines dont le seul but quotidien semble être de trouver les quelques dollars qui permettront de s'acheter une dose.

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Pour illustrer cette réalité, la mini-série nous propose de suivre l'évolution d'une famille sur les pentes de cette déchéance amère. Initialement issu de famille modeste, mais travailleuse, Gary McCullough avait des projets plein la tête et se donnait les moyens de ses ambitions. Il mena d'ailleurs pendant quelques temps une vie plutôt confortable, avec une belle réussite professionnelle. Mais la machine se grippa, comme le bonheur familial. En six épisodes, la fiction va dresser des parallèles entre passé et présent, amenant en quelque sorte à répéter ce schéma, avec un nouveau cycle au sein de cette famille. Car si les deux parents, Gary et Fran, ont plongé dans la dépendance, leur fils, DeAndre, a jusqu'à présent éviter la consommation de drogue. Cependant, du fait du quartier dans lequel il vit, rythmé entre arrivée de nouvelles doses et descentes de police, il la vend à un de ces fameux "corner", intersections entre deux rues, familières aux téléspectateurs de The Wire. Aucun des personnages n'est figé dans un rôle précis. Chacun tente de mener sa vie et de se reprendre. Pourtant, la morale de l'histoire s'abat de façon cruelle : telle une fatalité, il paraît impossible d'échapper à cet environnement, à cette misère qui broie ceux qui la côtoient, aussi volontaires qu'ils soient.

Inspirée d'une histoire vraie, The Corner est une fiction choc. Le téléspectateur ne peut rester indifférent émotionnellement au sort de ces personnages, si riches en contradictions, mais aussi en humanité, auxquels il s'attache sans s'en rendre compte. Magistral récit, à la fois fascinant, incitant à la réflexion et bouleversant, c'est un témoignage sans concession sur une Amérique oubliée, dont l'existence est le plus souvent passée sous silence. Les amateurs de The Wire (Sur Ecoute) retrouveront, loin de toute ambiance de série policière, cette dimension sociale et sociologique unique, inégalée dans le petit écran. Le tout est servi par un casting parfait, chacun des acteurs ne jouant pas seulement un rôle, mais incarnant bel et bien ces individus égarés qui tentent de survivre. On recroisera d'ailleurs un certain nombre d'acteurs ensuite dans The Wire (Sur Ecoute).

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Bilan : The Corner est une chronique sociale où règne un pessimisme d'où ne perce durablement aucune éclaircie. C'est l'envers du rêve américain, à travers le portrait sombre et méticuleux des ravages de la drogue et du chômage, dans les quartiers déshérités de certaines grandes villes américaines, Baltimore étant un des exemples les plus frappants.
Filmée à la manière d'un documentaire, avec cette impression caractéristique d'être à peine scénarisée, cette mini-série nous raconte simplement la descente aux enfers, et la survie, d'une famille vivant sur Lafayette Street. Avec un style si particulier, la caméra paraît capter les scènes, non les provoquer. Cette mise en retrait d'une narration romancée accroît la portée, tout autant que le froid réalisme, de ce récit sur la misère, qui ne tombe jamais dans un voyeurisme creux ou moralisateur. C'est un simple témoignage brut qui appelle à une prise de conscience.

Le style pourra sans doute sembler abrupte à des téléspectateurs qui n'en ont jamais fait l'expérience, mais cela ne doit pas vous faire hésiter : non seulement on s'y ajuste très rapidement, mais, en plus, c'est une expérience télévisuelle incontournable et indispensable.

En cette époque de bilan de fin de "décennie", The Corner, diffusée en 2000, a ouvert la voie à un style narratif qui, il faut l'admettre, justifiait pleinement à l'époque le fameux slogan publicitaire : "It's not TV, it's HBO." Si on ne ressort pas indemne d'un tel visionnage, c'est une production dont on ne peut faire l'économie de la découverte.


NOTE : 9,5/10


La bande-annonce :