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19/05/2010

(K-Drama) Dong Yi : l'irrésistible ascension sociale d'une esclave


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En ce mercredi asiatique, revenons à mes premiers amours téléphagiques de ce continent, les productions en provenance de Corée du Sud. Alors que de nouvelles séries sont ou s'apprêtent à être lancées (Giant, My Country Calls (ou Call of the country), Coffee House ou encore Bad Guy pour ce seul mois de mai - j'aurais l'occasion d'y revenir, suivant la disponibilité de sous-titres et mes affinités), arrêtons-nous aujourd'hui sur une série qui a débuté en mars dernier : Dong Yi. Ce drama appartient au genre des sageuk, c'est-à-dire des kdramas historiques. Qui dit sageuk, dit aussi souvent marathon téléphagique, car vaste fresque épique. Cinquante épisodes sont a priori prévus pour cette série, conduisant la fin de la diffusion de la série à septembre prochain. Il n'est donc pas trop tard pour s'y mettre ! Les "pauses" estivales sont faites pour ça (certes, le terme "pause" est tout relatif par rapport à la situation d'il y a quelques années, mais ce sont des séries qui se suivent toutes seules une fois que l'on est rentré dans l'histoire).

Pour ma part, j'ai pour le moment vu les dix premiers épisodes (un peu trop avancée pour parler de simple critique de "pilote" donc), sur les dix-huit à ce jour diffusés par MBC.

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A priori, Dong Yi est le type-même de drama à l'égard duquel l'addiction du  téléspectateur se construit de façon exponentielle au fil des épisodes visionnés ; une histoire qui s'inscrit résolument dans la durée et dont la pleine dimension s'acquiert dans les détours et la complexité de la réalisation d'une destinée, celle de l'héroïne. Il faut savoir que même si leur nombre d'épisodes effraye plus d'un courageux amateur occidental de kdrama, les sageuk ont plutôt la côte auprès des ménages coréens. L'an dernier, par exemple, Queen Seon Duk avait plusieurs fois dépassé les 40% de part d'audience. En début d'année, dans un style très différent mais toujours historique, Chuno (Slave Hunters) a également cartonné, dépassant allègrement la barre des 30%. Dong Yi, après avoir débuté modestement, tourne actuellement autour de 25% de part d'audience.

Vous savez aussi que, de manière générale, peu importe la nationalité, je garde toujours une affection particulière pour toute fiction touchant à l'Histoire. Il est donc logique que j'apprécie ce genre. Je crois d'ailleurs que c'est le moment où je dois confesser que j'ai acheté, cet hiver, plusieurs livres d'histoire sur la Corée, justement pour mieux cerner la culture et apprécier un peu mieux ce type de dramas. Cependant, précisons quand même que la recette ne prend pas à chaque fois ; à l'automne dernier, je n'avais pas dépassé les 4-5 premiers épisodes de Queen Seon Duk, n'ayant jamais réussi à accrocher aux enjeux du récit et aux personnages. En revanche, avec Dong Yi, l'introduction s'est faite plus aisément, naturellement. Rapidement, je me suis laissée entraîner par cette histoire qui met en scène, à nouveau, une figure centrale féminine forte que nous allons voir mûrir sous nos yeux.

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Se déroulant au XVIIe siècle, ce drama se situe à l'époque de la dynastie du Joseon, plus précisément sous le règne du roi Suk-Jong. Il est basé sur une histoire vraie, celle de Dong Yi, qui, de basse extraction, gravira les échelons sociaux pour devenir concubine royale. Le fils qui naîtra de cette liaison, Yeong-Jo, deviendra le 21e roi de Joseon. C'est donc le récit d'une irrésistible ascension sociale que se propose de nous conter la série, à travers le destin de cette jeune femme finalement lié à celui du royaume. Dong Yi se présente ainsi presque sous les traits d'un faux conte de fée, une ascension sociale fulgurante quand on pense à la rigidité de la hiérarchie sociale dans la société coréenne de cette époque-là.

Logiquement, la série s'ouvre sur certains évènements fondateurs qui vont conditionner la destinée de l'héroïne. Ce sont ainsi des faits tragiques de son enfance qui nous sont d'abord relatés. Il est à noter que cette entrée en matière se rélève particulièrement efficace : rythmée, contenant beaucoup d'action, tout en introduisant une première fois tous les protagonistes, elle s'attache à poser les fondations de l'histoire. Les quatre premiers épisodes sont ainsi consacrés à ce tournant de l'enfance de Dong Yi ; ce qui, sur une série de 50 épisodes, est relativement court et bien dosé. Les ingrédients du récit prennent rapidement : il n'y a pas d'inutile exposition, on rentre immédiatement dans le vif du sujet.

Je précise également que les questions géopolitiques se révèlent plutôt aisées à suivre dans la série, avec des clans assez facilement identifiables et clairement divisés. Le téléspectateur s'y retrouve sans souci ; et nul besoin de garder un schéma à côté de soi, pour se souvenir de tout, comme dans certains dramas historiques (tel Bicheonmu, par exemple).

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Ce drama démarre en utilisant des ficelles classiques. Petite et grande histoires se rejoignent et la vie personnelle de Dong Yi va se retrouver emportée dans le tourbillon des jeux de pouvoir des puissants du Royaume qui se livrent à une lutte d'influence sans merci. La série débute alors que le pays est  ébranlé par les meurtres de plusieurs hauts dirigeants, appartenant à la faction du Sud. Dong Yi découvre l'une des victimes, agonisant sur les berges d'une rivière. Avant de mourir, l'homme a le temps de mimer un étrange signal avec ses mains, dont elle ne comprend pas le sens, et de lui confier une plaque d'identification qu'il a peut-être arraché à son meurtrier. Cette rencontre ne va être que le premier déclencheur de ses malheurs ; car c'est toute la famille de Dong Yi qui est entraînée dans les filets d'un complot, dont ils vont devenir les victimes collatérales autant que les bouc-émissaires. Le père de la petite fille, ancien instructeur de l'actuel chef de la police, se voit en effet confier les corps des dignitaires tués afin de les autopsier, pour aider à la progression de l'enquête.

Or, tous les indices pointent vers une organisation secrète de plus en plus agitée dernièrement, la Fraternité de l'Epée. Composée d'individus appartenant au bas de la hiérarchie sociale, ses membres ont appris à manier les armes et aident les esclaves en fuite à échapper à ceux qui les pourchassent. Ils sont surveillés depuis quelques temps par le chef de la police. Même si l'assassinat de nobles n'a encore jamais fait partie de leurs activités, une attaque de la Fraternité de l'Epée a eu lieu à proximité de l'un des assassinats. Pour appuyer ces soupçons, en coulisses, les vrais responsables tirent habilement les ficelles, orientant l'enquête en semant des indices qui accusent l'organisation.

Si le père de Dong Yi comprend la machination, se reposant sur la confiance du chef de la police, il se trouve malheureusement au centre d'un conflit d'intérêts qui lui sera fatal. En effet, il enquête, certes, pour le compte des autorités ; mais il est également le leader de la Fraternité de l'Epée, cette organisation émancipatrice tant redoutée et à laquelle on finit par attribuer les pires actions. Chaque camp avançant ses pions dans l'ombre, de complots en quiproquos, tout finit dans le sang. Injustement accusés, ces combattants qui rêvaient d'une certaine égalité sociale, parmi lesquels le père et le frère de Dong Yi, seront ainsi exécutés pour des crimes qu'ils n'ont pas commis.

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Dong Yi parviendra à échapper au destin funèbre de ses proches, avec l'aide des derniers fidèles de sa famille. Déjà très obstinée, elle choisira cependant de ne pas s'enfuir, se jurant de mettre à jour cette conspiration qui provoqua une telle tragédie et de découvrir la vérité. Pour cela, son seul indice est le fameux signal que le dignitaire mourant lui indiqua sur la berge de la rivère. Or, quelques jours plus tard, en ville, elle vit une dame du palais reproduire le même geste. Décidée à retrouver cette femme afin de comprendre ce que signifie ce signe, Dong Yi entre au service du palais, comme esclave rattachée au Département Royal de Musique (où travaillait d'ailleurs son frère).

Se concluant sur ses évènements fondateurs tragiques, le drama reprend ensuite le fil de l'histoire six ans après ces faits. Dong Yi entre dans l'âge adulte, devenue une jeune femme encore très immature, mais qui a su se rendre progressivement indispensable auprès des musiciens. Grâce aux connaissances enseignées par son père, qui lui avait notamment appris à lire, elle est beaucoup plus éduquée que ce que son rang d'esclave ne le laisserait penser. Elle dispose ainsi de ressources insoupçonnées, qu'elle va devoir mettre à profit pour se sortir de situations complexes dans un palais où plusieurs camps se livrent une âpre lutte sans merci.

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Si les premiers épisodes avaient laissé une large place à l'action, à partir du moment où l'histoire se recentre sur le palais, le drama renoue avec la tradition des intrigues de Cour les plus classiques.

Au détour des corridors et des différents bâtiments composant la vaste résidence royale, sorte de ville dans la ville, les complots reprennent en effet de plus belle lorsque le roi décide de reconvoquer à ses côtés Lady Jang, une de ses favorites, pour qu'elle devienne une de ses concubines. Nous retrouvons, plusieurs annéess après, les mêmes jeux de pouvoirs entre factions rivales que ceux qui avaient coûté la vie au père de Dong Yi. Au-delà des clans du Sud et de l'Ouest, c'est entre les deux femmes les plus proches du Roi qu'a lieu l'affrontement direct, la Reine mère faisant tout ce qui est en son pouvoir pour piéger Lady Jang et obtenir son renvoi de la Cour. Au milieu de cette lutte que Dong Yi va devoir essayer de ne pas être, une nouvelle fois, sacrifiée, victime collatérale anecdotique du combat des puissants. Faisant preuve d'un esprit vif, d'un sens de l'initiative rarement pris au dépourvu et d'une loyauté obstinée, Dong Yi se fait remarquer à plusieurs reprises, attirant l'attention de Lady Jang, mais aussi du roi...

Si les enjeux sont toujours très élevés dans les intrigues en cours, le téléspectateur amateur d'action risque cependant de trouver certains développements un peu longuet. Nous sommes ici dans un sageuk au sens traditionnel du terme, où tout suit un théâtralisme codifié, avec une réalisation posée, et où les dialogues prennent plus de place que les combats. L'affrontement n'en est pas moins létal ; mais entre gens de Cour, les moyens de parvenir à ce résultat sont plus détournés et compliqués.

Personnellement, mise à part deux ou trois petites baisses de rythme vite rattrapées, je ne trouve rien à redire à ce début : la série trouve le bon dosage entre les complots et le façonnement des relations qui unissent les différents protagonistes.

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Cette dimension plus humaine constitue d'ailleurs sans doute un des atouts majeurs de Dong Yi. Le formalisme relativement figé de ce drama ne l'empêche pas de jouer dans l'émotionnel et de réussir ainsi à faire vibrer le téléspectateur devant les dilemmes et les épreuves que doivent traverser les différents protagonistes. Pour le moment, ce sont surtout - et logiquement - Dong Yi et Lady Jang qui s'imposent, deux figures féminines aux destinées finalement plus proches que leurs différences de statuts actuels ne le laisseraient penser. Lady Jang était elle-aussi de basse extraction sociale, mais éduquée et pleine de ressources, elle est parvenue à gagner sa place auprès du roi. Dong Yi n'est encore qu'une adolescente, souvent naïve et trop spontanée ; mais le drama donne justement envie au téléspectateur de suivre sa progressive mâturation, sa transformation qui va lui permettre d'accomplir une destinée insoupçonnée.

Le personnage du roi a pour le moment laissé entrevoir un potentiel intéressant, qu'il faudra exploiter. S'il est entouré de courtisans comploteurs, sa figure demeure sacrée pour chaque faction. Tous les clans s'affrontent entre eux, mais le roi se situe au-dessus de la mêlée. Se plaçant souvent en arbitre des évènements, essayant d'influer sur les rapports de force au sein de son gouvernement, afin d'atteindre un équilibre précaire, mais nécessaire, dans l'intérêt du royaume, Suk-Jong gouverne en alternant autoritaire reprise en main de ses ministres et action indirecte via quelques fidèles. Il se pose donc en maître de l'échiquier du pouvoir, que le drama symbolise par le biais du Jeu de Go.

J'ai beaucoup apprécié le fait que les rapports entre les différents personnages se révèlent généralement bien caractérisés. Ce que j'ai préféré le plus jusqu'à présent, c'est l'habile contraste proposé par les intéractions très différentes du roi avec les deux autres personnages féminins de la série. Ses relations avec Lady Jang se situent dans un registre très digne, remplies de confiance et de sentiments. Tandis qu'avec Dong Yi, simple esclave qui, surtout, ignore qui il est, pensant côtoyer un simple officier de la garde royale, il y a une spontanéité et une certaine forme d'innocence, le roi se laissant emporter par l'enthousiasme pas toujours mesuré de la jeune femme. Ces différentes facettes contribuent à donner au drama une atmosphère très rafraîchissante, appréciée par le téléspectateur et qui lui permet de s'attacher à ces protagonistes.

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Sur la forme, Dong Yi est une belle série, dotée d'une réalisation classique, mais enrichie par des décors et une reconstitution d'époque très aboutis. Le fait de s'intéresser au Département Royal de Musique permet d'offrir plusieurs belles représentations ; ces spectacles prennent la couleur du folklore par moment. C'est chatoyant et c'est un vrai plaisir pour les yeux. Cela offre un magnifique dépaysement pour le téléspectateur.

La bande-son de Dong Yi est également très bien fournie, en musiques adaptées aux différentes ambiances rencontrées. Quelques balades tristes pour illustrer le deuil, des morceaux épiques pour donner un souffle supplémentaire à certaines scènes d'action... Tout y est, tout en restant suffisamment en retrait pour ne pas empiéter sur l'histoire, évitant d'être trop envahissant.

Enfin, du côté du casting, rien à redire. Dong Yi est interprétée, à l'âge adulte, par Han Hyo Joo, l'héroïne de Brilliant Legacy l'an dernier. Ji Jin Hee (He Who Can't Marry) incarne le roi Suk-Jong. Lee So Yeon (Temptation of an Angel) est Lady Jang Hee Bin. Bae Soo Bin (Temptation of an Angel, Brilliant Legacy, Jumong) joue un ancien membre de la Fraternité de l'Epée à qui Dong Yi doit la vie. Le rôle du chef de la police revient à Jeong Jin Yeong (Kingdom of the Wind). Et, enfin, Park Ha Seon incarne la reine, et épouse officielle de Suk-Jong.

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Bilan : Dong Yi est un beau drama historique, dont les intrigues de cour sont soutenues par une intéressante dimension humaine. La série parvient à jouer sur l'affectif du téléspectateur, en dépeignant avec une certaine finesse les relations entre ses différents personnages. Si les amateurs d'action risquent de rester un peu sur leur fin au vu de ces dix premiers épisodes, les amoureux de belles reconstitutions devraient y trouver leur compte. Il émane de ce drama un souffle rafraîchissant des plus dépaysants.


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la série :

Le générique :