29/08/2011
(UK) Doctor Who, season 6, episode 8 : Let's Kill Hitler
Le mois d'août touche à sa fin, tout comme l'ambiance estivale de vacances... à laquelle va succéder peu à peu un parfum caractéristique de presque-rentrée téléphagique. En Angleterre, un retour en particulier était attendu ce samedi pour nous aider à clôturer l'été. Il faut dire que, mine de rien, il manque vraiment quelque chose à mes week-ends lorsque Doctor Who déserte sa case du samedi soir sur BBC1. Conséquence du hiatus forcé que le téléspectateur aura subi devant cette saison 6 coupée en deux, que l'on avait abandonnée au printemps, c'est avec un plaisir décuplé que j'ai savouré cette reprise.
Ce huitième épisode portait un titre pour le moins provoquant, "Let's kill Hitler", soulevant bien des interrogations sur la manière dont cette incursion dans l'Allemagne des années 30 pouvait être traitée. Mais c'est finalement un épisode fortement mythologique, emboîtant diverses pièces du puzzle mystérieux de l'univers de la série, qui nous est ici proposé. Écrit par Steven Moffat, le téléspectateur y retrouve non seulement une construction narrative riche en paradoxes temporels, mais aussi et surtout des réponses et beaucoup d'émotions autour du vrai sujet de l'épisode : la genèse de River Song.
Plusieurs mois se sont écoulés depuis les déchirants évènements de l'épisode précédent qui avaient vu le Docteur impuissant à empêcher l'enlèvement de Melody Pond par ses ennemis les plus résolus. Ils souhaitaient transformer l'enfant, humaine mais ayant aussi des capacités de Time Lord, en arme contre le Docteur. L'ultime twist final, la révélation de l'identité future de Melody, n'avait apporté qu'un réconfort très limité aux parents qu'étaient devenus Amy et Rory. Melody Pond est River Song. Mais entre le bébé qu'ils ont tenu dans leurs bras et la femme adulte et provocatrice qu'ils connaissent, combien de temps, combien d'épreuves, a-t-elle traversé ?
Lassés d'attendre des nouvelles qui ne viennent pas, Amy et Rory appellent le Docteur en traçant son nom dans un champ de blé - ce qui nous offre une des plus hilarantes introduction de pré-générique qui soit. Si les recherches de ce dernier ont pour le moment été infructueuses, leurs retrouvailles sont interrompues par l'arrivée mouvementée d'une amie d'enfance du couple, Mels. Si l'obsession d'Amy pour le Docteur a également grandi chez elle, la jeune femme a des méthodes bien à elle : poursuivie par la police, elle sort un revolver et enjoint le trio à l'embarquer à bord du Tardis. "You've got a time machine, I've got a gun. What the hell - let's kill Hitler."
Le quatuor attérit en catastrophe à Berlin, en 1938... dans le bureau même de Hitler, où nos héros viennent perturber d'autres voyageurs temporels, miniaturisés dans une machine humanoïde investis, d'une mission de justiciers pour envoyer en enfer - au sens propre du terme - les pires criminels de guerre de l'histoire de l'humanité.
Let's kill Hitler est un de ces épisodes proprement réjouissants où on retrouve l'ambiance dont la série a le secret. Il nous emporte dans un tourbillon de répliques marquantes et/ou cinglantes, nous renvoyant à tout un kaléidoscope d'émotions les plus diverses, passant de l'humour au drame en quelques secondes avec une fluidité et une habilité d'écriture souvent grisantes. S'il suscite cet enthousiasme caractéritisque des bons épisodes de Doctor Who, c'est aussi parce qu'il offre de quoi récompenser la fidélité du téléspectateur : des réponses sur un thème central de la série sous Steven Moffat : la mythologie autour du personnage de River Song. Car après nous avoir fait vivre la naissance à la vie de Melody, cette fois, c'est la réelle naissance de River Song qui nous est racontée. Comment est-elle passée de la jeune femme endoctrinée et entraînée pour assassiner le Docteur à l'aventurière qui nous est devenue familière ? Au coeur des lignes de temps qui s'entrecroisent pour nos héros, c'est sa première rencontre, de sa perspective, avec le Docteur que l'on va vivre.
Si les premières minutes entretiennent volontairement le suspense sur l'orientation de l'épisode, Hitler va rapidement être évacué, enfermé dans le placard, tandis que le véritable enjeu apparaît lorsque Mels, touchée par une balle perdue, se regénère en une figure que nous connaissons bien : River Song. Indirectement, Rory et Amy auront bien d'une certaine manière élevé leur fille... Investissant un registre à la tonalité étonnamment versatile, le premier échange entre la jeune femme et le Docteur, particulièrement brillant, est vraiment jouissif : les réparties fusent et, à la manière d'une partie d'échecs, chacun anticipe les actions de l'autre, River cherchant à accomplir la mission pour laquelle elle a été programmée, le Docteur se contentant de se défendre. C'est l'occasion de découvrir une autre facette de River : une attitude inconséquente, où sont exacerbées l'arrogance et les certitudes de la jeunesse, sans conscience, ni limites. Parce qu'elle le connaît parfaitement, elle va effectivement atteindre son but, empoisonnant le Time Lord, permettant ainsi à l'épisode de basculer dans une seconde partie où, au divertissement intense des débuts, succèdent des passages où l'émotionnel et le psychologique prédominent.
Car ensuite, ce n'est pas tant pour lui-même que pour l'âme de River - en quelque sorte - que le Docteur mourrant utilise ses dernières forces. La présence des justiciers miniaturisés qui voient désormais en River leur nouvel objectif, surpassant Hitler dans l'ordre de leur priorité, prend ici tout son sens. De la manière la plus symbolique qui soit, ce sont les liens familiaux que le Docteur réactive pour ouvrir le chemin de la rédemption, grâce à Amy et Rory. Ils ne peuvent laisser leur enfant, peu importe ses crimes supposés, être soumis au châtiment que les justiciers temporels veulent lui réserver. Provoquant une réaction en chaîne pour libérer River, c'est eux-mêmes qu'ils mettent en danger, prisonniers au sein de la machine. C'est alors vers celle qui est non seulement leur fille, mais aussi issue et liée au Tardis, que le Docteur, désormais trop faible, se tourne : elle doit sauver ses parents. Ce double sauvetage réciproque éveille quelque chose en River. La construction de l'épisode est à saluer car elle se fait tout en parallèle : en écho inversé à leur première rencontre dans la librairie, le Docteur murmurera quelque chose de déterminant à l'oreille de River. En prenant la décision de le sauver grâce à sa nature de Time Lord, la jeune femme commet un sacrifice qui nous apporte une réponse intéressante : elle utilise toutes ses régénérations pour le ressusciter, c'est pourquoi nous ne la connaîtrons jamais que sous cette apparence. D'où la fameuse dernière scène de la librairie.
Ainsi, Alex Kingston restera à jamais la seule River. Ce qui n'est pas pour nous déplaire : l'actrice est brillante dans cet épisode où elle investit un registre un peu différent de ce à quoi elle nous avait habitué. Son alchimie avec Matt Smith est parfaite, les deux acteurs nous offrant des confrontations jouissives, aussi bien dans une dynamique de comédie que plus dramatique. L'épisode aura d'ailleurs aussi grandement mis à contribution Matt Smith, avec des scènes poignantes d'agonie qui, même si le téléspectateur sait pertinemment qu'il va y survivre, n'en demeurent pas moins touchantes. Dans l'ensemble, il faut d'ailleurs saluer la première réussite de Let's kill Hitler : être parvenu à nous faire vibrer pour un épisode au dénouement forcément très prévisible, et qui se déroule globalement comme il était légitimement attendu. Le revirement de River peut paraître presque précipité, mais il faut composer avec d'autres impératifs de la série : l'intrigue doit aussi progresser. Il fallait donc emboîter toutes les pièces pour parvenir au résultat logique, recentrant tous les mystères autour du Silence pour la suite de la saison. Remplissant parfaitement cet objectif, ces quarante minutes fonctionnent et s'apprécient ainsi sans arrière-pensée.
Bilan : Souvent jubilatoire, toujours très dynamique, bien pourvu en répliques sonnantes, ce huitième épisode de la saison est, en dépit d'un titre provocateur mais quelque peu trompeur, avant tout une avancée mythologique qui satisfait en bien des points la fidélité d'un téléspectateur conquis. La magie de Doctor Who reste de savoir nous faire rêver, sans exiger non plus une rigueur excessive dans l'entremêlement caractéristique de toutes les lignes temporelles avec lesquelles la série jongle. En nous offrant des réponses sur la genèse de ce personnage si fascinant qu'est River Song, l'épisode permet donc de faire avancer l'intrigue, tout en laissant ouvertes bien des questions sur la fin de la saison. Un retour qui se savoure !
NOTE : 8,75/10
Le prequel de l'épisode :
[A noter que, par manque de temps, je ne suis pas certaine de pouvoir reviewer toute la fin de saison épisode par épisode. Je verrais comment je m'organiserai au fur et à mesure.]
11:25 Publié dans Doctor Who | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : doctor who, bbc, matt smith, karen gillan, arthur darvill, alex kingston | Facebook |
Commentaires
Je serais vraiment très frustrée si tu ne trouves pas le temps de chroniquer épisode par épisode la fin de saison, tant j'ai un plaisir énorme à te lire après avoir vu l'épisode : tu en parles tellement bien !
Écrit par : Cuné | 03/09/2011
@ Cuné : Merci du commentaire d'encouragement. ;)
Je vais voir si j'arrive à reviewer cet épisode 9 ce week-end, même si c'est un épisode un peu de transition avec une entrée en matière enlevée (un peu comme les pirates en début de saison). J'ai besoin d'un retourneur de temps ! ^_^
Écrit par : Livia | 08/09/2011
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