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14/04/2010

(K-Drama / Pilote) Cinderella's Sister : artifices et complexités au sein d'une famille recomposée


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Diffusée depuis le 31 mars 2010 sur KBS2, Cinderella's Sister est, parmi les nouveautés sud-coréennes de ce printemps 2010, le premier k-drama dont le pilote remplit efficacement son office, c'est-à-dire que sans me faire crier au chef d'oeuvre, il m'a donné envie de découvrir la suite. Même si je n'ai pas encore jeté un oeil à toutes les nouvelles séries qui ont fleuri sur les chaînes sud-coréennes en ce printemps, je ne serais pas loin de penser que Cinderella's Sister peut être considérée comme l'une des plus prometteuses de la saison.

Certes, il convient de nuancer ce premier jugement : cette introduction peut être trompeuse, car, elle a une fonction de pure exposition, l'épisode nous en apprenant finalement relativement peu sur l'évolution future de la série et sur l'orientation que prendront les storylines. Cependant, il installe une situation de départ à l'atmosphère loin d'être manichéenne et plutôt accrocheuse, où un froid pragmatisme teinté de cynisme et dénué de tout artifice se dispute à la ré-écriture moderne de l'utopie d'un conte de fée, pour un résultat à dimension très humaine.

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Comme le titre du drama l'indique, Cinderella's Sister s'inscrit en référence à une histoire bien connue, celle de Cendrillon. La série entend se réapproprier, de façon assez lointaine et moderne, le mythe de ce conte de fées, en choisissant d'évoquer l'histoire d'une famille recomposée, et plus précisément de suivre la vie de deux jeunes filles, devenues soeurs en raison du rapprochement de leurs parents.

Le premier épisode propose de suivre l'installation de cette situation. Il ne donne pas vraiment de pistes sur le futur développement des intrigues, mais permet d'introduire les différents personnages, dotés de personnalités plutôt tranchées, et nous familiarise avec les enjeux qui entourent ces deux familles qui vont s'unir. Le rôle du hasard et la magie de la coïncidence, particulièrement appréciés des scénaristes des dramas asiatiques, jouent pleinement leur rôle pour nous offrir une suite d'évènements qui va conduire à une rencontre imprévue autant qu'improbable, que rien n'aurait pu laisser présager, mais qui va bouleverser le quotidien de chacun des protagonistes. Une nouvelle fois, nous est proposée une exploitation de la thématique du contraste entre des milieux sociaux presque opposés. Mais cet emprunt au conte de fées moderne, affectionné par nombre de dramas et qui n'a rien d'original, n'est pourtant pas central dans ce pilote : il va parvenir à se distinguer par un aspect plus humain et personnel, avec en filigrane le poids du passé de chacun, dictant leurs comportements présents.

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En effet, ce qui m'a le plus interpelé dans ce premier épisode de Cinderella's Sister, c'est le fait qu'elle présente un récit de vie très humain et fort peu aseptisé, plutôt tranchant dans le paysage téléphagique actuellement proposé en ce printemps 2010. La scène d'ouverture est de ce point de vue très révélatrice : elle s'ouvre chez le compagnon actuel de la mère, Song Kang Sook. Tandis que le couple se dispute en arrière-plan, Song Eun Jo prépare à manger à son "frère" du moment, comme si de rien n'était. Les cris montent, l'intensité se change en danger et, au moment où les coups commencent à voler, comme une goutte d'eau qui fait déborder un vase plus que plein, Eun Jo intervient et décide que "trop c'est trop" et qu'il est temps de changer d'air, entraînant sa mère avec elle.

Il est difficile pour le téléspectateur de ne pas instinctivement s'attacher et s'intéresser à cette héroïne qui fait preuve d'un sens de l'initiative et d'un caractère qui s'impose immédiatement à l'écran : derrière son naturel méfiant et presque sauvage, on devine une adolescente qui a dû trop rapidement grandir et qui, ballotée au gré des errances masculines de sa mère, a dû avoir son lot d'expériences qui vous font perdre toute innocence et vous changent en adulte avant même que vous n'ayez goûté à votre enfance. L'utilisation, avec une parcimonie opportune, d'une voix off afin de nous faire partager les réflexions désabusées de la jeune fille à quelques passage clés, comme lorsqu'elle envisage d'abandonner sa mère dans le train, est particulièrement bien pensée ; absolument pas envahissante, cela permet de souligner et de mieux comprendre ce personnage complexe qui nous est présenté.

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Dans la droite lignée de cet aspect qui souligne une part assez sombre de la nature humaine, force est de constater que ce qui domine ce pilote, ce n'est pas tant l'impression d'une appartenance à la mouvance du conte de fées, mais plutôt un certain pragmatisme, teinté de cynisme, qui paraît gouverner l'ensemble des actions des personnages.

Certes, dans la famille riche - le père, entrepreneur à succès et sa fille -, il y a une plus forte propension aux bons sentiments, auxquels demeure rattachée une forme d'insouciance. Mais les drames de la vie ont également laissé leur trace, avec le décès de la figure féminine et maternelle. A la tristesse suscitée par la perte d'une épouse, d'une mère, a succédé ce besoin de la remplacer, de retrouver une présence réconfortante à leur côté ; et ce, même si cette substitution doit avoir une part d'artifice. La nécessité de retrouver quelqu'un conduit à une forme de déni de réalité. Il est aisé de céder à la facilité, en rencontrant finalement une femme qui renvoie l'image tant recherchée et qui pourrait s'immiscer dans le rôle qu'ils souhaiteraient la voir remplir : offrir un remplacement et apaiser leur chagrin. Peu importe qu'il y aient des arrières-pensées de part et d'autre ; que tout cela puisse paraître précipité. Le pragmatisme l'emporte.

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Si ces mécanismes de survie agissent de façon plus inconsciente dans la famille riche, jouant de manière assez implicite sans que le téléspectateur puisse vraiment distinguer entre la part de calcul et les sentiments spontanés, dans l'autre famille, la volonté de s'en sortir est plus clairement affichée. Il faut dire que l'enjeu n'est pas ici cantonné uniquement à de l'émotionnel. Dans ce drame ponctué d'épreuves que constitue la vie, la fin justifie les moyens. La manipulation, plus ou moins instinctive, est alors élevée au rang d'outil nécessaire dont on ne peut faire l'économie. L'attitude de la mère dans la belle maison, à partir du moment où elle apprend que le chef de famille est veuf, est à ce titre particulièrement révélatrice ; tout comme les réactions épidermiques de sa fille, tellement endurcie qu'elle est bien incapable d'envisager un environnement qui ne soit pas hostile.

Pourtant, il semble y avoir un point commun entre tous ces personnages : un désir de continuer à avancer en dépit des traces laissées par une vie déjà pleine de désillusions. Avec des personnages naviguant entre fausse quête en vue d'une hypothétique rédemption et essai hésitant pour parvenir à faire la paix avec soi-même et avec un passé qui dicte chacune de leurs attitudes présentes, le pilote de Cinderella's Sister laisse entrevoir des pistes de réflexion qui confèrent une dimension profondément humaine à la série.

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Côté casting, l'héroïne est jouée avec beaucoup de fraîcheur et un dynamisme bien dosé par Moon Geun Young, croisée l'an dernier dans The Painter of the Wind. C'est surtout elle qui se détache au cours de ce pilote, marqué par de violentes confrontations avec sa mère interprétée par Lee Mi Sook (Great Inheritance). Kim Gab Soo continue d'étaler son don d'ubiquité pour incarner la figure paternelle ; rien que depuis le début de l'année 2010, vous avez pu le croiser dans le petit écran sud-coréen dans pas moins de trois dramas historiques : Chuno, Jejoongwon et Merchant Kim Man Deok. See Woo (Tempted Again) incarne sa fille, affichant pour le moment une innocence émotionnelle presque déstabilisante tant elle est excessive. Du côté des rôles masculins principaux, seul Chun Jung Myun (What's Up Fox?) est introduit dans ce pilote, personnage encore en retrait, un brin effacé. Taecyeon (plus connu des amateurs de Kpop, en tant que membre du groupe 2PM) devrait débarquer par la suite pour son premier drama.

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Bilan : Ré-écriture d'un conte dont elle égare la féérie pour en garder un portrait cynique, finalement très moderne, Cinderella's Sister propose un pilote prometteur, à l'écriture plutôt tranchante. S'il est trop tôt pour savoir de quoi le futur de la série sera fait, ce premier épisode réussit à capter l'attention du téléspectateur qui, tout en s'interrogeant sur la pérennité de cette famille promptement recomposée, se demande si les blessures de la vie que chacun arbore déjà jusqu'au plus profond de son être pourront guérir. La portée profondément humain de ce premier épisode dévoile un potentiel dramatique, mais aussi initiatique, intéressant. A suivre !


NOTE : 7/10


Une bande-annonce de la série :

Commentaires

Ouaouh grâce à toi, j'ai enfin compris de quoi parlait ce drama! Il me tentait déjà, mais lààààà...
C'est vrai que côté "K-pilote", c'est rare que je sois emballée dès le départ, comme toi!

Écrit par : Galy | 20/04/2010

@ Galy : C'est un peu une réadaptation du mythe de Cendrillon, sauf que les rôles sont un peu inversés et tout est re-écrit à la sauce moderne. Mais je suppose qu'il va falloir attendre un peu pour voir très concrètement si le côté "Cinderella" n'est pas juste une approche marketing.
Mais parmi les nouveautés de ce printemps (même si je n'ai pas encore tout regardé), je la place en 1er pour le moment.
Derrière, je mettrais Oh! My Lady et Personal Taste (ex-aequo), mais pour ces deux-là, il faut que je vois comment ils évoluent.

Pour les K-Pilotes, c'est vrai que c'est compliqué de se faire une réelle première opinion au vue du seul pilote d'une série coréenne. Plus que pour les japonaises, je trouve. Les coréens aiment (excessivement) prendre leur temps. On assiste fréquemment à des évolutions et des changements de ton entre les premières esquisses du début et le coeur réel de la série...
Mais en même temps, le but des scénaristes doit rester celui d'accrocher le téléspectateur. Dès le début. Pas forcément déclencher un enthousiasme sans limite, mais juste au moins susciter la curiosité.
Et puis, il y a quand même des éléments qui vont être constants : la qualité des acteurs, la réalisation, mais aussi la subtilité et la finesse de l'écriture.. Les variations sont moindre sur ces aspects-là.


Après, je fais des billets sur des k-pilotes parce que c'est mon propre processus de sélection que je traduis en mots par ces review. Je reviendrais peut-être sur certains dramas non continués ultérieurement, suivant les échos sur la suite ; mais, avec la pile de k-drama qui nous attend, généralement je regarde 1 ou 2 épisodes, et puis je classe dans la pile "à suivre" ou "plus tard".

(Et puis, je parle des pilotes, parce que sinon, vu mon emploi du temps actuel, le mercredi asiatique deviendrait un rendez-vous mensuel s'il fallait parler uniquement des dramas entièrement visionnés. O:-) )

^_^

Écrit par : Livia | 20/04/2010

Pour un novice comme moi en matière de séries coréennes, le travail de débroussaillage de la production au travers de chroniques de pilotes est vraiment très précieux.
Après lecture de ta chronique, Cinderella's sister me tente vraiment bien, d'autant plus que je suis curieux de voir Moon Geun-Young après The painter of the wind (qui fût ma première excursion sur les terres du K-drama).

Écrit par : Fred | 21/04/2010

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