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16/03/2013

(Pilote DAN) Livvagterne (The Protectors) : une fiction riche et à suspense, au sein d'un service de protection des personnalités


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L'engouement pour les fictions scandinaves qui a gagné ces dernières années l'Angleterre n'a pas seulement eu pour conséquence d'encourager BBC4 à faire de nouvelles acquisitions dans ce registre, il a également permis à NordicNoir d'éditer directement en DVD des séries inédites outre-Manche (et en France). C'est ainsi qu'en début d'année est sortie la première saison de Rejseholdet (Unit One en version internationale), une des premières séries de DR ayant suivi la révolution de son approche des fictions à la fin des années 90 et récompensée d'un Emmy Award international en 2002. S'il faudra un jour que j'évoque cette série policière procédurale, c'est une plus récente qui retient mon attention aujourd'hui : Livvagterne (The Protectors).

La première saison de cette série sort justement ce lundi 18 mars en Angleterre (le coffret est par exemple disponible par là). Diffusée de 2009 à 2010, sur DR1, cette fiction danoise comporte 2 saisons de 10 épisodes chacune. Elle a également remporté un Emmy Award international, en 2009. Elle a été créée par Mai Brostrom et Peter Thorsboe, c'est-à-dire la même équipe de scénaristes à l'origine de Rejseholdet, mais aussi d'une autre des grandes valeurs danoises de la décennie écoulée, Ornen : En krimi-odyssé (The Eagle) (une autre série sur laquelle il faudra que je revienne). Après un double épisode pilote prometteur, la suite de Livvagterne m'a définitivement happé devant mon petit écran. En attendant la réception du DVD, la review qui suit évoque donc ces débuts.

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Livvagterne met en scène une branche spéciale de la police danoise, connue sous le nom de P.E.T. (Politiets Efterretningstjeneste : c'est-à-dire, le service de renseignements de la police - ce nom ne sera pas étranger aux téléspectateurs de Forbrydelsen, notamment pour sa troisième saison). Il s'agit d'une unité en charge de la protection des personnalités considérées comme à risque dans le pays, c'est-à-dire principalement des responsables politiques, mais aussi la famille royale du Danemark. Durant ces missions de protection, le quotidien de ces agents ne se résume pas uniquement à jouer les gardes du corps. Il passe aussi par du travail d'investigation policière classique, ainsi que par la surveillance, voire l'espionnage, puisqu'ils sont notamment conduits à s'intéresser aux menaces terroristes, de toutes natures, qui peuvent mettre en danger les personnes dont ils ont la charge.

Au sein du PET, Livvagterne s'arrête tout particulièrement sur trois nouvelles recrues qui réussissent les tests - pour le moins difficiles - pour intégrer le service au cours du pilote : Jasmina El Murad, Jonas Goldschmidt et Rasmus Poulsen. Ces trois policiers, aux caractères très différents, forgent rapidement entre eux une solide amitié - deux d'entre eux se connaissaient déjà auparavant. Nous faisant indirectement naviguer dans les coulisses du pouvoir au contact des puissants, la série va donc nous relater les missions de protection auxquelles le trio va participer, les épisodes étant rythmés par leur gestion des menaces de diverses origines. Le récit n'oubliera cependant pas non plus de nous introduire dans leur vie personnelle, révélant leurs aspirations et leurs ambitions.

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Livvagterne bénéficie d'un concept au potentiel très riche, dont elle va vite entreprendre d'exploiter les diverses facettes. Mettant en scène un service de protection, elle ne se réduit donc pas à une simple fiction policière, déclinant une version de whodunit. Les missions des agents du PET peuvent prendre des tournures très différentes. Tout d'abord, il y a le travail le plus quotidien, vite routinier, qui consiste en l'accompagnement des personnalités à risques, avec toute la discrétion exigée sur la vie privée de ces dernières, même si certaines ne manquent pas, parfois, de compliquer considérablement la tâche des policiers. Puis, dès qu'une menace potentielle est entrevue, on bascule dans des investigations policières plus classiques pour identifier précisément la source du danger. La série se rapproche alors des fictions d'espionnage, avec mises sous surveillance et autres collectes de renseignements. Tendant par moment vers une sorte de Spooks à la danoise, cela ne surprendra donc pas de voir que Livvagterne laisse ici une large place aux luttes antiterroristes.

Pour traiter de ces affaires, la série suit un format procédural. Cependant, pour ces débuts de saison 1, l'intrigue se construit toujours sur deux épisodes. Ce mini-arc de 2 heures lui laisse ainsi une durée suffisante pour permettre à l'histoire d'être bien développée. Le rythme narratif est efficace et suit une évolution souvent plutôt rapide, sans temps morts. De manière générale, la fiction renvoie une impression de maîtrise très appréciable, capable de prendre parfois son temps quand la scène s'y prête, tout en restant en mesure d'accélérer et d'insuffler une vraie tension quand pointent les tournants plus dramatiques. Ce savoir-faire est particulièrement perceptible dans le soin raffiné avec lequel la série traite ses cliffhangers qui concluent la fin de la première partie de chaque affaire : le suspense sur lequel elle laisse le téléspectateur rend impossible toute attente avant de visionner l'épisode suivant !

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Outre cette approche policière solide, Livvagterne présente aussi certaines des caractéristiques des fictions de DR. Ces missions de protection concernent souvent des individus publics, en vue, notamment donc des politiciens (la première affaire touche le ministre de la Défense ; la deuxième, la ministre de la Culture) : le téléspectateur déjà familier du milieu politique danois depuis Borgen et Forbrydelsen ne sera donc pas dépaysé. Indirectement la série nous fait évoluer dans des coulisses du pouvoir où ses personnages sont les témoins privilégiés des prises de décision, mais n'en sont pas les acteurs, devant rester en retrait sans intervenir. Cependant, cela permet à la fiction de résolument s'inscrire au sein de la société danoise moderne et de mettre en scène les débats qui la parcourent. Les premiers thèmes traités sont ici particulièrement révélateurs : la première affaire questionne en filigrane l'engagement militaire danois en Irak, tandis que la deuxième parle d'immigration, d'intégration et d'extrêmisme, avec la montée de groupuscules d'extrême-droite.

Cet angle est aussi perceptible dans le choix des personnages principaux qui reflètent le multiculturalisme de la société danoise. La figure de Jasmina El Murad est à ce titre très intéressante : immigrée d'origine égyptienne, symbole d'une intégration réussie au sein de la société, elle doit aussi trouver sa place au PET en tant que femme dans une unité très masculine. Si Livvagterne se concentre en priorité sur ses affaires policières, la série va s'intéresser à ses personnages au-delà de leur seule vie professionnelle. D'autant plus que chacune de ces deux premières affaires touche de manière particulière un ou plusieurs de ses agents, qu'il s'agisse d'évènements marquants auxquels ils assistent ou bien parce qu'ils se retrouvent mêlés aux enjeux en cause et deviennent à leur tour des cibles potentielles. Sur ce dernier point lié au danger des missions confiées, la série a été claire dès le départ puisque dès le premier quart d'heure, nous assistons à la mort d'un de ses agents dans l'exercice de ses fonctions.

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Sur la forme, la réalisation de Livvagterne suit une approche qui sied tout particulièrement aux fictions à suspense. Elle adopte en effet un style nerveux et tendu, très direct dans la mise en scène, avec une caméra qui bouge beaucoup (sans pour autant jamais tomber dans l'excès). Conséquence de ce choix, l'image se place le plus souvent au plus près des protagonistes, proposant peu de plans larges. L'ensemble apparaît convaincant, et de solide facture, correspondant parfaitement à la tonalité ambiante et au sujet relaté. Quant au générique, s'il ne marque pas musicalement, il est visuellement tout aussi maîtrisé. 

Enfin, Livvagterne peut s'appuyer sur un casting qui apparaît solide, au sein duquel tout le monde trouve progressivement ses marques durant ces premiers épisodes. Dans le trio principal, Jasmina est interprétée par Cecilie Stenpsil. Peut-être parce qu'elle est celle qui est la plus mise en avant au cours de ces débuts, elle s'impose de la manière la plus convaincante. André Babikian joue lui Jonas, tandis que Soren Vejby incarne Rasmus. A leurs côtés, on retrouve notamment Thomas W. Gabrielsson (Äkta Människor, Forbrydelsen III), Ellen Hillingso, Ditte Grabol, Rasmus Bjerg (Julestjerner), Tommy Kenter, Michael Sand ou encore Kate Kjolbye.

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Bilan : Mêlant la protection de personnalités, le policier d'investigation et une pointe d'espionnage et de lutte antiterrorisme, Livvagterne bénéficie d'un concept de départ riche qu'elle va entreprendre d'exploiter sous toutes ses coutures. Leur proximité de fait avec le pouvoir et avec ses enjeux politiques confère aux storylines mises en scène une dimension particulière, en prise avec la société danoise actuelle et les problématiques qui la parcourent. La série n'en néglige cependant pas un trio principal de personnages intéressants, la fiction ne se limitant pas à leur seule vie professionnelle. L'écriture est solide, sachant manier l'art du cliffhanger. Sans réinventer son genre, Livvagterne se montre convaincante. A conseiller à tout amateur de séries scandinaves (et au-delà). De mon côté, je compte continuer mon visionnage. A suivre !


NOTE : 7,5/10


La bande-annonce de la série :

Le générique de la série :