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13/05/2012

(ISL) Tími Nornarinnar (Season of the Witch) : incursion au coeur de l'Islande

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En fin de semaine, comme le thermomètre dépassait allègrement les 30 degrés, j'ai cherché un dépaysement téléphagique adéquat et, dans ma quête de latitudes nordiques, je me suis une nouvelle fois retrouvée en Islande. Ce n'est que ma quatrième série Islandaise (la troisième dont je vous parle), mais il n'y a pas à dire, j'éprouve beaucoup d'affection pour ces contrées. Des séries diffusées là-bas en 2011, j'attends surtout avec impatience de pouvoir découvrir Heimsendir (par les créateurs de Naeturvaktin - dont je suis en train de finir la suite, Dagvaktin) et évidemment la saison 2 de Pressa, mais les circonstances ont voulu que je commence par la troisième série nominée aux Edda Awards en début d'année (sur un total de trois - bon, l'Islande est un petit pays !) : Tími Nornarinnar.

Cette dernière est l'adaptation d'un roman policier d'Árni Þórarinsson (Thorarinsson) (un écrivain que l'on a déjà croisé, souvenez-vous, car il a participé à l'écriture de Pressa), datant de 2005 et paru en France sous le titre Le Temps de la Sorcière. Tournée à l'automne 2010, la série - composée de 4 épisodes de 45 minutes environ - a été diffusée à la télévision publique islandaise en avril 2011. Sans s'imposer véritablement dans le registre du polar, Tími Nornarinnar s'est révélée très intéressante par un aspect inattendu : elle offre un véritable portrait de la société Islandaise actuelle en crise, le tout accompagné par un décor superbement mis en valeur.

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Tími Nornarinnar a pour principal protagoniste Einar, un journaliste expérimenté d'un grand quotidien islandais. Ce dernier a été muté dans le nord de l'île, loin de Reykjavik, avec pour objectif officiel d'y installer une rédaction locale. Exilé dans cette campagne enneigée, installé dans une maison louée avec pour seul compagnon un perroquet laissé par le propriétaire - et une photographe de passage qui le rejoint en début de série -, il s'ennuie, tentant d'en profiter pour vaincre ses démons et ne plus toucher à l'alcool. Mais le calme de ce bourg n'est qu'apparent. Plusieurs drames vont en effet toucher la région.

Au cours d'une sortie en rafting avec son entreprise, une femme tombe dans la rivière; elle est tuée dans la chute. La mère de cette dernière, vieille femme en maison de repos, contacte Einar, persuadée qu'il ne s'agit pas d'un accident, mais que sa fille a été assassinée. Dans le même temps, une représentation théâtrale attendue est interrompue suite à la disparition du jeune acteur principal ; le cadavre de ce dernier est retrouvé peu après, calciné dans une décharge. En plus de ces morts, Einar couvre la situation d'un village situé à quelques heures de route où une tension de plus en plus sourde monte, alors que des incidents racistes ont lieu sur fond d'élection locale prochaine.

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En m'installant devant Tími Nornarinnar, je m'attendais à une mini-série policière assez proche de Pressa qui, déjà, mettait en scène les investigations de journaliste. Je me suis retrouvée face à un autre parti pris : ici, l'enquête - ou plutôt les enquêtes - ne semblent pas déterminantes. Elles sont certes les fils conducteurs du récit, mais Tími Nornarinnar donne l'impression que ce qui est vraiment le coeur de son histoire est avant tout ce qui entoure les intrigues et vient se greffer à elles. Ce qui intéresse la série, c'est ce que les évènements permettent de révéler sur la société, sur le pays, et sur les protagonistes eux-mêmes. En cela, il s'agit d'un polar nordique qui respecte un certain nombre de canons du genre : c'est une oeuvre d'ambiance, au rythme de narration lent. Elle ne cherche pas à créer de véritable suspense, mais elle intrigue. La fausse bonhomie d'Einar, personnage central désillusionné et fatigué mais persistant, rend le personnage attachant, s'imposant comme le point de repère solide du téléspectateur. En dépit de certaines limites, notamment un manque d'homogénéité et de liant au sein des storylines, lesquelles sont desservies par des figures secondaires insuffisamment travaillée, l'histoire fonctionne.

Pour autant, le grand atout de Tími Nornarinnar n'est pas ce versant policier. Ce qui marque, c'est cette incursion au coeur de l'Islande qu'elle propose. C'est la première fois que je visionne une série de ce pays qui respire à ce point l'Islande. Elle en exploite tout d'abord le cadre géographique particulier : la série s'imprègne des lieux à travers lesquels le personnage principal nous conduit, tirant pleinement parti de ces paysages glacés s'étendant à perte de vue. La neige se substitue à la pluie, le blanc à la grisaille de ses consoeurs scandinaves : cet épais manteau blanc est omniprésent, recouvrant tout le décor et tombant régulièrement. De plus, Tími Nornarinnar s'intéresse aussi à ses habitants : elle capture la photographie d'une société en crise, morale comme économique. Dans ce coin perdu d'Islande, on retrouve toutes les tensions sociales et ethniques (avec la question de l'immigration) qui agitent les sociétés occidentales modernes. Ce ne sont que des esquisses, et on regrettera que la série s'en tienne à un aperçu très sommaire, mais le téléspectateur n'en est pas moins marqué par le portrait sombre et peu optimiste qui est ainsi dressé.

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Tími Nornarinnar a été tournée dans le Nord de l'Islande (ce qui, de notre point de vue, est avouons-le une précision toute relative et assez anecdotique), principalement à Akureyi. Une des grandes forces de la série est justement que son réalisateur, Friðrik Þór Friðriksson (Fridrik Thor Fridriksson), va s'attacher à faire des lieux où se déroule l'action un acteur à part entière du récit. Il joue sur ces paysages superbes, oscillant entre une mer glacée et des sources d'eau chaude... De toutes les (quelques) séries islandaises que j'ai eu l'occasion de voir, c'est vraiment celle qui aura le mieux mis en valeur son cadre. Elle y est bien aidée grâce à sa photographie particulièrement soignée, qui reste à dominante claire - un intéressant choix pour une fiction qui demeure un polar. La musique, posée et entêtante, achève de happer le téléspectateur, contribuant à cette ambiance un peu déconnectée de tout, qui accompagne le héros dans ses investigations.

Enfin, côté casting, je crois que c'est la première fois dans l'histoire de ce blog que je vais devoir déclarer forfait pour vous donner des renseignements sur le sujet : la série n'a ni page imdb, ni fiche wikipedia, ni aucun référencement digne de ce nom dans le web anglophone, et mes quelques incursions dans le web islandais n'ont pas été très concluantes (certes, j'aurais pu enquêter sur les noms défilant à l'écran durant le générique de fin, mais entre les signes alphabétiques particuliers et une liste par ordre d'apparition, je n'ai pas eu le courage d'y consacrer plusieurs heures.). Je vais donc me contenter de dire que le casting est dans l'ensemble satisfaisant, l'acteur principal rentre très bien dans son rôle. Le seul bémol viendra de certains rôles secondaires - sans doute aussi une conséquence d'une écriture manquant parfois un peu de consistance.

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Bilan : Véritable portrait d'Islande qui exploite pleinement le cadre géographique (magnifique), mais aussi les tensions qui traversent la société - à l'image des crises touchant les sociétés occidentales -, Tími Nornarinnar vaut surtout pour cet instantané ainsi proposé de l'île nordique. Les enquêtes forment autant de fils rouges intermittents qui donnent une direction à l'histoire, même si l'ensemble n'est pas toujours pleinement maîtrisé et homogène. Sans créer de véritable tension captivante, l'intérêt sincère du téléspectateur ne se dément cependant pas au cours de ces quatre épisodes.

Une série à réserver aux amateurs de fictions scandinaves. Et pour tous les curieux qui souhaiteraient s'offrir un court voyage à travers l'Islande !


NOTE : 6,75/10


La bande-annonce (sous-titrée anglais) :


[Comme beaucoup de séries islandaises, le coffret DVD comprend une piste de sous-titres anglais.]

Commentaires

Intéressant ! Je vais tester je pense. Quelques souvenirs d'Islande de ma part : les piscines sont des endroits à part. Café gratuit en libre service, vestiaires sans cabine, tout le monde se déshabille sans se cacher, pas de casiers, on laisse portefeuille, clés et autres objets de valeur en libre-accès. L'eau coule en permanence dans les douches, puisque l'eau est un bien gratuit et inépuisable, c'est connu. Deux bassins à 40 et 42 degrés, qui jouent le rôle social du café chez nous, tout le monde va tremper et taille la bavette. Pour ma part, c'était trop chaud, et j'ai eu la sensation d'avoir une piscine privée pendant tout mon séjour (presque jamais d'islandais dans la piscine) 10 degrés dehors, de l'eau entre 25 et 30 degrés. Beaucoup de tatouages surtout chez les jeunes, puisque le corps se montre à la piscine. Souvent des piscines en plein air dans toutes les "villes moyennes" (tout ce qui n'est ni la capitale Reykjavik, ni la deuxième ville Akureyri) de 300 à 3 000 habitants.

Écrit par : k3c | 13/05/2012

Merci pour cette critique, j'essaierai de voir cette série. J'ai vu seulement "Hamarinn (The Cliff)" et suis en train de regarder "Pressa". J'ai passé un mois en Islande il y a quelques années : c'est en effet magnifique.

Écrit par : Ioanis Deroide | 13/05/2012

Bel article. Complet, argumenté et en phase avec la "réalité" Islandaise. L'évocation de l'île aux volcans n'offre pas toujours une égale pertinence !

Écrit par : Lislandais | 14/05/2012

@ k3c : Merci pour ce portrait complémentaire d'Islande ! :) C'est un pays qui m'intéresse de plus en plus pour le découvrir un jour (déjà que j'ai des inclinaisons nordiques prononcées).
Pour renouer avec l'Islande d'un point de vue ambiance et lieux, c'est vrai que cette série est très bien et pourra te rappeler des souvenirs. Après, au niveau de la qualité même, ce n'est pas la série islandaise la plus réussie ; mais elle se défend. Ce pays ne produit pas beaucoup de séries, mais plusieurs méritent un coup d'oeil. A l'international, la trilogie Naeturvaktin est probablement la plus connue (elle a été diffusée en Angleterre ; un remake est prévu cette année en Norvège).


@ Ioanis Deroide : C'est décidé, je vais classer l'Islande avec la Scandinavie parmi les destinations de vacances où je veux absolument aller dans les années à venir. :) Ce qui marque dans Timi Nornarinnar, c'est qu'elle intègre vraiment le décor et le paysage dans son récit. Pressa avait un filtre sombre au niveau des images qui lui permettrait d'embrasser une ambiance de polar/thriller, mais qui ne mettait pas aussi bien en valeur ces balades dans la campagne islandaise (d'autant qu'elle se passait principalement en ville / à la rédaction).
Sinon, Hamarinn vaut-elle le détour ? Il faudrait quand même que je tente un jour un polar islandais qui ne raconte pas l'enquête du point de vue d'un journaliste, mais bien d'un policier ! :)


@ LIslandais : Heureuse donc que mon article vous ait plu. Il y a beaucoup d'images d'Epinal qui viennent à l'esprit quand on mentionne l'Islande, mais il est vrai qu'on la connait assez peu (et moi la première). Ces séries sont l'occasion d'une première incursion et découverte !

Écrit par : Livia | 15/05/2012

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