09/10/2011
(Pilote / Mini-série AUS) The Slap : une gifle qui change tout
Le rush de la rentrée américaine retombé, c'est l'occasion de repartir explorer les nouveautés anglophones au-delà des seuls Etats-Unis. Cela tombe bien puisque jeudi soir débutait en Australie une mini-série assez ambitieuse qui se propose d'adapter un des romans marquants de la littérature récente de ce pays (publié en 2008) : The Slap (La gifle), de Christos Tsiolkas. Diffusée sur ABC1, cette mini-série comportera en tout 8 épisodes d'une cinquantaine de minutes chacun.
Plusieurs raisons m'ont motivé à lancer ce premier épisode : il y avait non seulement le prosélytisme toujours bien ordonné de LadyTeruki, mais aussi l'impressionnant casting rassemblé : la perspective d'y retrouver Alex Dimitriades (c'est mon adolescence devant Hartley Coeur à Vif qui s'exprime) ou encore Sophie Okonedo justifiait amplement la découverte au moins du pilote. Je n'ai pas regretté mon visionnage : ces débuts sont intéressants, posant solidement le ton et les bases pour la suite de l'histoire.
The Slap est une mini-série construite de manière chorale autour d'un geste central qui va tout déclencher : une gifle. Tout débute à l'occasion de la fête d'anniversaire de Hector. Il organise avec son épouse, Aicha, un barbecue où sont conviés sa famille, de ses parents à ses cousins, ainsi que des amis du couple. Si Hector est issu d'une famille d'immigrés grecs, la langue étant encore couramment parlé entre eux, la fête réunit cependant des personnes de tous les milieux sociaux et de toutes les cultures. Cette réunion conviviale, entre amis plus ou moins proches de Hector, ne va certes pas aller sans quelques antagonismes et autres tensions, puisque chacun a amené ses enfants, ce qui suffit à sur-ajouter à l'agitation ambiante.
Tout se déroule à peu près bien jusqu'à une scène de confrontation où un adulte, Harry, le cousin de Hector, gifle un des enfants qui a été insupportable tout au long de la journée. Le barbecue se termine abruptement par une altercation violente entre Harry et les parents de l'enfant giflé, des amis de Hector, qui n'entendent pas en rester là et veulent déposer plainte. Cette gifle va être l'événement catalyseur à partir duquel chaque personne présente va devoir se déterminer, provoquant des réactions en chaîne au sein de ce groupe qui soudain éclate sous nos yeux.
Au vu de ce pilote, The Slap dispose de deux atouts qui retiennent l'attention. Tout d'abord, la série apparaît comme un portrait coloré et riche, véritable instantané de la middle-class résolument multiculturelle de l'Australie actuelle (Melbourne). Rien n'est en effet plus approprié qu'une fête pour réunir autour d'un barbecue des personnes d'origines et d'horizons différents, dont les liens sont très divers, tous rassemblés par ce fragile plus petit dénominateur commun incarné par Hector. On perçoit bien dans l'épisode la volonté manifeste de présenter, sans l'édulcorer, l'ordinaire des quotidiens des familles introduites.
Dans les portraits ainsi esquissés, la série n'évite pas certains clichés : Hector et sa mère envahissante, ses problèmes de couple avec Aicha ou encore sa potentielle aventure extra-conjugale, ne font pas particulièrement dans l'originalité. Cependant, il se dégage de l'ensemble une forme de proximité et beaucoup de naturel. Les dynamiques, globalement sobres, sonnent authentiques. Dans ce registre mêlant le social et l'humain, c'est certainement par sa dimension chorale que la série promet le plus et devrait gagner en épaisseur : chaque épisode se concentrera en effet sur un des personnages présents lors de la scène de la gifle, multipliant ainsi les points de vue et les perspectives.
Si ce pilote démarre sur un rythme un peu lent, il gagne progressivement en intensité : une fois l'atmosphère posée grâce à une introduction appliquée en suivant le personnage de Hector, la gifle intervient dans le dernier quart de l'épisode pour assurer l'électro-choc final. Les problématiques soulevées par ce geste controversé, répréhensible socialement et juridiquement, permettent à The Slap de poser les bases solides d'un human drama des plus intéressants. Les répercussions de la gifle, au sein des amis et de la famille, sont immédiates. De plus, le conflit risque de s'envenimer encore plus si la police est impliquée.
En un instant, ce simple geste réflexe a rompu le fragile lien qui existait dans la petite communauté réunie pour célébrer l'anniversaire de Hector. Soudain, transparaissent des différences de vues et d'éducation - sur la manière d'élever les enfants. Se révèlent aussi les loyautés naturelles de chacun. Les dernières minutes du pilote sont très fortes. Elles s'assurent de la fidélité du téléspectateur qui perçoit tout le potentiel narratif du sujet : grâce à ce catalyseur, The Slap va pouvoir nous entraîner au-delà de la façade des familles sans histoire pour s'intéresser au coeur de chaque individu, à ce qui le définit plus intimement, mais aussi à ce qui peut le relier aux autres.
Sur la forme, The Slap bénéficie d'une réalisation appliquée, relativement nerveuse tout en restant sobre. Cela cadre bien avec l'ambiance de ces chroniques humaines. La photographie est soignée, s'offrant quelques parenthèses plus ensoleillées, comme les scènes dans la piscine qui ont un côté relaxé que je qualifierais de "typiquement australien". La bande-son est plutôt plaisante, accompagnant le récit tout en restant en retrait. A noter également que la série dispose d'un court générique, très simple, mais dont la symbolique capture parfaitement l'esprit de cette histoire.
Enfin, The Slap rassemble un casting alléchant qui devrait s'assurer de porter de manière convaincante l'histoire à l'écran. On y retrouve notamment Jonathan LaPaglia (Sept jours pour agir, Washington Police) et Sophie Okonedo (Criminal Justice, Father & Son), incarnant le couple chez qui se déroule la fameuse scène de la gifle. Melissa George (Alias, In Treatment) joue la mère de l'enfant frappé ; tandis que Alex Dimitriades (Hartley Coeur à Vif, Underbelly) est celui qui lève la main sur ce gosse un peu trop turbulent. A leurs côtés, on croise aussi Essie Davis (Cloudstreet), Lex Marinos, Diana Glenn (Killing Time), Anthony Hayes, Sophie Lowe, Blake Davis (Dead Gorgeous, Tangle) ou encore Oliver Ackland (Cloudstreet).
Bilan : Derrière son portrait d'une middle-class australienne multiculturelle, d'où émane un ressenti de proximité et de justesse, le pilote de The Slap pose les bases d'un human drama qui peut vraiment devenir très intéressant, notamment en raison de la narration chorale envisagée au fil des huit épisodes. L'épisode n'évite pas quelques facilités, mais il introduit efficacement une atmosphère volontairement ordinaire. Dès l'évènement déclencheur que constitue la gifle, le potentiel à explorer par les problématiques envisageables apparaît évident. A suivre.
NOTE : 7,25/10
La bande-annonce de la série :
18:42 Publié dans (Séries Océanie) | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : australie, the slap, abc1, jonathan lapaglia, sophie okonedo, melissa george, alex dimitriades, essie davis, lex marinos, diana glenn, anthony hayes, sophie lowe, blake davis, oliver ackland | Facebook |
Commentaires
Tu me donnes envie de jeter un oeil à ce pilot (le thème étant proche de ce qu'il pourrait se passer dans mon travail et j'aimerais voir ce que ca donne au niveau du traitement de l'éducation en générale)...
Tu as piqué ma curiosité !!
Écrit par : Nephthys | 11/10/2011
Ah en voilà une bonne idée de série hors sentier battu.
cela me fait furieusement penser à Peter"s friends avec enfant.
Rarement manichéen dans les rapports de couple famille amis une peu plus caricatural dans les relations filiales; un pilote ou l'on ressent ici une atmosphère bien pesante avec une très bonne palette d'acteur.
Un Bon drama australien qui me pousse à suivre avec impatience la suite de cette mini-série.
A découvrir
Ride On
Écrit par : Dibs | 13/10/2011
Je viens juste de remarquer que The Slap a été acheté par BBC Four et que sa diffusion ne devrait donc pas tarder. Ceci devrait me permettre de satisfaire ma curiosité.
Écrit par : Mayfield | 14/10/2011
@ Nephthys : Je ne sais pas si c'est véritablement l'éducation des enfants, ou plutôt les relations sociales et familiales que cette gifle va permettre d'explorer. Sans doute un mélange de l'ensemble. Mais il y a une volonté de dresser un portrait des différents protagonistes et d'éclairer ce qui les anime qui est vraiment intéressante ! Et l'approche renvoie un sentiment d'authenticité qui retient l'attention !
@ Dibs : Heureuse que ta curiosité ait également été piquée par ce pilote. C'est un portrait choral social et humain, avec ses ambivalences, dont la force est aussi de sonner très juste en se construisant autour de cet évènement catalyseur. Un sujet intéressant à explorer où on perçoit une réelle ambition dès le départ !
@ Mayfield : Une très bonne nouvelle pour l'exposition de la série au-delà de l'Australie ! BBC4 est la chaîne sur laquelle on peut compter pour ces découvertes internationales. Après, au vu du casting, je pense que The Slap peut retenir l'attention légitime de plus d'un diffuseur (j'espère jusqu'en France !).
Écrit par : Livia | 22/10/2011
Je vais attendre d'avoir toute la série pour me lancer, mais effectivement le pitch donne sacrément envie de se pencher dessus !
Écrit par : Nephthys | 26/10/2011
Oyo bonne année a toutes & à tous.
C est quand même la plus grosse surprise de la rentrée (avec homeland mais + attendu)
C'est un évènement qui peut paraître anodin qui va changer toutes les relations entres amis et famille au bord de l'implosion.
une plongé sur la diaspora grecque en Austalie avec ses anachronismes et ses traditions. un petit bémol les épisodes masculins sont plus subtiles et plus profonds que ceux de la gente féminine légèrement moins bien écrit malgré des performances d'actrisses de trés hautes qualitées avec Melissa Georges toujours au top (in treatement) ainsi que Sophie Okonedo que je découvres.
Un drama social intelligent et rafraîchissant qui me permet de me réconcilier avec les séries australiennes
à découvrir et à voir absolument
Ride ON
Écrit par : Dibs | 25/01/2012
@ Dibs : The Slap a été une excellente surprise en effet ! Heureuse que cela t'ait plu également. Ca nous rappelle qu'il y a des perles dans tous les pays ;) L'année 2011 aura quand même été très bonne en Australie, avec un certain nombre de fictions ambitieuses. J'espère que 2012 suivra cette même tendance.
Merci du commentaire, et meilleurs voeux à toi également ;)
Écrit par : Livia | 28/01/2012
Ah mince, je viens de finir la série avec beaucoup de retard, et je vois que tu n'as analysé "que" le pilote. J'aime beaucoup te lire, et j'aurais aimé lire ton avis sur l'ensemble de la série, car le pilote est à mes yeux l'épisode le plus faible.
J'ai trouvé cette série vraiment remarquable dans son ensemble : il y a énormément de subtilité dans le jeu des acteurs, et l'épisode consacré au grand-père est un vrai petit bijou (comment oublier la scène de danse avec son vieil ami ?).
Je n'aurais jamais cru que des séries d'une telle qualité pouvaient exister en Australie, et je suis heureux d'avoir tenté l'expérience malgré mes réticences initiales sur le pitch.
Écrit par : Julien | 15/04/2013
@ Julien : Hélas, voici toutes les limites de mon système de critiques : en jonglant entre nouveautés et bilans d'ensemble, trop de séries méritantes passent au travers de la seconde étape lorsque j'ai réalisée la première de présentation. Manque de temps, défaut d'organisation... Je plaide coupable. :(
Mais tu as parfaitement raison sur le fait de souligner que sur l'ensemble, la série aura acquis une dimension à saluer qui dépasse ce que le pilote avait laissé entrevoir. C'est une des plus intéressantes séries australiennes de ces dernières années, et c'est une bonne chose qu'elle soit fréquemment citée en référence désormais là-bas, notamment du fait des thèmes et de la manière de les aborder.
En tout cas, merci d'être passé sur ce billet pour avoir éclairer une fiction dont l'existence mérite d'être rappelée. ;)
Écrit par : Livia | 21/04/2013
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